J.-L. Mélenchon.

  • il y a 7 mois

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Transcription
00:00 Là, nous venons de finir la première séance de la saisine de la Cour de justice internationale.
00:06 Alors, aujourd'hui, c'est la partie plaignante, en quelque sorte, qui saisit la Cour, l'Afrique du Sud.
00:13 C'est elle qui est l'actrice de ce moment.
00:16 Et puis, demain, le gouvernement de M. Netanyahou répondra aux interpellations qui ont été faites aujourd'hui.
00:25 Alors, ça, c'est déjà une... Rien que ça, hein, on s'arrête un moment pour y réfléchir, rien que ça, c'est un grand moment.
00:32 Pourquoi ? Parce que nous sommes plongés dans une situation que tout le monde connaît, qui est abominable, et surtout qui est honteuse.
00:40 Pourquoi honteuse ? Parce que le groupe des grands pays qui, à toute occasion, fait la leçon au monde entier,
00:47 provoque des sanctions contre celui-ci, contre celle-là, est muet et laisse faire.
00:55 Ce qui, au minimum, est une addition de crimes de guerre, mais à partir d'un certain nombre de crimes de guerre,
01:02 on est dans autre chose, qualitativement. Et c'est ce que dit l'Afrique du Sud.
01:08 Comme elle est signataire de la Convention pour la prévention et l'interdiction des actes de génocide,
01:16 elle dit "il y a problème de génocide, il y a un différent".
01:20 Alors, je passe de côté, pour l'instant, les aspects purement juridiques pour m'en tenir à ça.
01:25 Donc, en quoi c'est un grand moment ? C'est parce que c'est le retour de l'humanité.
01:29 Et l'humanité, le peuple humain, ne se donne à voir que par le droit international.
01:35 Alors, il peut... et par l'action collective, bien sûr, mais ce qui est important, c'est que là, nous avons le droit international.
01:41 Si imparfait qu'il soit, du moins existe-t-il. Du moins peut-on être à un endroit où il y a un argument, un contre-argument,
01:47 un jugement, et le jugement, ensuite, deuxième étape, devra être respecté.
01:51 Mais tout le monde comprend que si cette Cour venait à conclure qu'en effet, il y a des actes qui présentent le risque de génocide,
02:05 alors, évidemment, la situation politique serait complètement modifiée et juridique
02:09 pour tous ceux qui participeraient, d'une manière ou d'une autre, à aider le gouvernement d'Israël,
02:15 quelle qu'en soit la forme, dans son opération à Gaza.
02:18 Alors, c'est là qu'il y a un point qu'il faut bien comprendre, moi, j'en ignorais la subtilité avant d'arriver ici,
02:25 c'est que la Cour est saisie au fond, est-ce un génocide ou pas, mais ce n'est pas sur ce point qu'elle a à prendre une décision à cet instant.
02:33 Ça, ça va être jugé sur le fond, et ça prendra du temps. Mais là, elle a à juger sur la demande de mesures conservatoires.
02:41 Moi, je ne savais pas que c'était ça qu'on venait faire, mais j'en comprends la finesse,
02:45 et c'est là qu'on peut avant tout dire millions de fois merci au gouvernement de l'Afrique du Sud d'avoir pris cette initiative.
02:52 Et évidemment, en tant que représentant, un des représentants d'un pays qui ne l'a pas fait,
02:58 je vous garantis que je ne me sens pas très fier de mon chez-moi à cet instant,
03:04 car la Convention sur le génocide a été aussi signée par la France.
03:09 Et le système, c'est que, entre ceux qui signent, chacun peut saisir et interpeller un autre membre signataire pour lui demander des comptes sur ses actes.
03:19 C'est ça en quoi consiste la Convention. Et dès lors que l'un a interpellé l'autre, et que le différend est constaté,
03:26 qu'il est constaté, il est établi, alors la Cour est saisie. C'est ce qui se passe ici.
03:32 Donc, ce qu'elle a à dire, c'est si elle prend les mesures conservatoires qui sont demandées par l'Afrique du Sud
03:38 au profit des Palestiniens et de la population de Gaza. C'est-à-dire des mesures pour arrêter.
03:43 Alors, il faut bien comprendre le truc, hein. C'est, quand on dit "il y a des éléments qui peuvent donner à penser que"
03:50 ça va terminer par un génocide, alors la Cour est compétente pour dire "alors stop, et je prends telle, telle, telle, telle décision".
03:57 Alors, ça ne serait pas la première fois, c'est pas un cas spécial. La Cour s'est déjà prononcée sur des cas similaires
04:04 où il y avait la même accusation de génocide, par exemple, pour les Rohingyas. Et elle avait pris des décisions.
04:12 Et il y a plusieurs cas qui ont été cités dans les magnifiques plaidoiries que l'Afrique du Sud a présentées ce matin.
04:19 Voilà. Donc, on est à cet instant. Et la décision serait prise rapidement, puisque ce sont des mesures conservatoires
04:27 contre des actions qui sont considérées comme irréparables. Et c'est le cas de ce qui se passe, c'est un massacre irréparable.
04:37 Alors, de nombreuses pièces ont été versées au dossier que les connaisseurs qu'il y a ici, les militants qu'il y a ici connaissent tous.
04:44 Le nombre de morts, l'acharnement. Et surtout, moi, ce qui m'a frappé, c'est à quel point le discours du génocide a été porté par les autorités israéliennes.
04:56 On s'aperçoit que la violence des propos qui ont été tenus, notamment par M. Netanyahou, mais aussi par son ministre de la Justice,
05:05 son ministre des Armées, le chef des Armées. Je veux dire, pas une personne, dans un moment d'émotion, hein,
05:11 a tenu des propos qui sont de nature génocidaire, notamment la référence à un extrait de la Bible,
05:18 que, d'une manière qui, moi, si j'étais religieux, me choquerait, s'approprie M. Netanyahou pour recommander de massacrer tout le monde.
05:28 Alors, ça, ça, il y a eu comme ça beaucoup de citations de fait, beaucoup d'exemples donnés qui ont montré que, sur la base de ces incitations,
05:38 au sommet de l'État, eh bien, jusque dans la troupe, individuellement, les gens se sentaient investis d'une mission génocidaire,
05:45 en disant "il faut les tuer tous", et puis les femmes, les enfants, il n'y a pas d'innocents, quoi. Voilà.
05:50 Alors ça, ça a été un moment très fort. Mais encore une fois, je dois vous dire que, comme observateur depuis tellement longtemps de faits de violence absolue,
06:00 quand on vient dans une arène judiciaire, c'est un moment quasiment de réconciliation avec l'humanité, parce que, tout d'un coup,
06:09 on est remis au contact d'un peuple humain, avec des droits, des droits garantis. Alors, peut-être que ça ne va pas être le résultat immédiat,
06:19 mais ça compte tellement. Enfin, nous n'avons pas d'autre choix que celui-là. Si nous ne voulons pas de la loi du plus fort, alors nous avons besoin du droit.
06:28 Voilà pourquoi la cause palestinienne a été défendue ce matin extrêmement brillamment, parce qu'on partait de faits avérés, documentés.
06:38 Alors, après, la Cour estimera à quel point ils sont avérés, mais c'était des faits. Ce n'était donc pas des discours de nature idéologique,
06:46 même si, évidemment, il y avait un engagement de la part de l'Afrique du Sud qui a fait remonter l'histoire de cet instant,
06:54 non pas au 7 octobre, mais depuis le début, à la fin de la guerre mondiale. Mais si vous voulez, à part cette référence-là,
07:03 tout le monde se réclamait du droit international, de l'ONU, des prises de position du secrétaire général. Bref, on était dans un cadre bien balisé.
07:11 Je pense que, pour nous, c'est un point d'appui considérable, parce que ça nous permet d'établir la permanence de certains principes politiques.
07:21 Ce n'est pas "un jour, on est de tel point de vue, et puis le lendemain, dans la même situation, on ne voit rien", parce que ça s'appelle le campisme, ça.
07:30 Comme on est dans un camp, comme on est aligné, alors on s'aligne sur le chef. Et bon, vous connaissez ma position, et celle des Insoumis, c'est le non-alignement.
07:39 Le non-alignement n'est pas une position de confort, parce que ce n'est ni l'équidistance, ni la neutralité. C'est l'engagement dans des principes qui sont constants,
07:49 quels que soient les protagonistes. Donc tous les crimes de guerre doivent être condamnés, et là, si nous avons affaire, comme cela a été démontré ce matin,
07:58 à des faits concordants, débouchant sur des pratiques génocidaires, ben il faut le dire, il n'y a rien qui justifie. Il y a eu une parole très forte, à un moment donné,
08:06 des avocats disant "Quelle que soit la raison, quel que soit ce que l'on peut reprocher à la partie adverse, quelle que soit la situation,
08:17 et qu'on soit en paix ou en guerre, rien ne justifie le génocide, jamais, en aucune circonstance." Et le rôle d'un pays civilisé, notamment quand il signe des conventions,
08:27 ben c'est de respecter sa propre parole, et les engagements qu'il a pris en signant. C'est pourquoi, si vous voulez, pour beaucoup de gens, je pense que ce qui se dit là,
08:38 si ça se diffuse bien, sera un encouragement à intervenir. Parce que l'une des plaidoiries que j'ai trouvées les plus brillantes, nous disait, faisait état de médecins
08:51 qui, avant de quitter l'hôpital, écrivent sur un tableau "Nous avons fait ce que nous avons pu, souvenez-vous de nous." Et l'avocat disait "Qui pourra se regarder dans la glace demain,
09:04 parce que quels que soient les événements du jour, les hauts, les bas, de toute façon, nous savons tous à quoi nous en tenir. Et nous savons que c'est un massacre,
09:13 pas disproportionné, le mot n'est pas adapté. Aucun massacre n'est proportionné, aucun génocide n'est proportionné. Et donc, je pense que la condamnation morale que contient
09:24 cette situation, elle a sa force. Et elle a sa force d'entraînement. Voilà. Donc, il faut s'en mêler. Alors, puisque ça va passer sur nos réseaux, ce que je suis en train de dire,
09:33 moi, je demande à tous ceux qui partagent mes convictions, mon engagement, puisque c'est moi qui parle à cet instant, mais celui des insoumis d'une manière générale,
09:43 occupez-vous de cette affaire. Participez au rassemblement, signez des pétitions quand il y en a, suivez les leaders historiques de ce mouvement en France, que je ne suis pas.
09:53 Il y a des gens comme Salah Amouri, comme d'autres, ont été des militants de toujours de cette cause. Écoutez-les. Tout ce qu'ils disent a de l'importance, parce que ça vous aide
10:03 à vous faire votre propre conviction et votre propre éducation. Et on n'est jamais assez éduqués en matière de droit international et de respect de la paix entre les nations.
10:13 En ce moment, nous savons que ce procès a déjà un premier résultat. C'est les déclarations qui ont été faites aussi bien par les porte-parole américains que par les porte-parole
10:22 israéliens, même si nous ne les croyons pas. Même si nous ne croyons pas à leur sincérité, ils sont obligés de le faire. Et là, de ne plus tenir les propos qu'ils ont tenus au début de cette histoire.
10:33 Donc je considère que c'est déjà un premier résultat. Mais pour le reste, de toute façon, cette réunion a eu lieu, cette séance a eu lieu, et rien que ça, c'est une victoire de l'humanité contre la loi du plus fort.
10:44 Je crois exprimer l'opinion générale de ceux qui se sont associés ce matin, et de nos très nombreux militants qui sont là, et les millions de personnes qui verront nos vidéos,
10:59 en disant de tout cœur un million de fois merci à l'Afrique du Sud, à son gouvernement qui a ramené dans une situation honteuse l'humanité sur le devant de la scène.
11:15 Ici, nous sommes dans une cour de justice d'un ordre international imparfait, c'est certain, d'un droit international incomplet, c'est certain, mais du droit, de la loi, et non pas de la loi du plus fort.
11:32 Ce matin a été plaidé très brillamment le fait que la cour peut décider des mesures conservatoires immédiates. Je me rends compte de la responsabilité morale qu'ont à ce moment les juges qui ont à prendre cette décision.
11:51 Mais d'eux dépend le fait que l'humanité toute entière, le peuple humain tout entier reprenne confiance dans le fait qu'il existe mieux que la loi du plus fort, c'est la loi du plus humain.
12:05 Bravo !