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Mobilier, bijoux, tableaux… les œuvres du couple Raymond et Suzanne Fischof-La Foux seront dispersées par la maison de vente aux enchères Osenat. Au cœur de la collection se trouve un tableau d’André Derain, Maisons à Collioure, ayant auparavant appartenu au marchand d’art Ambroise Vollard.

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Transcription
00:00 *Générique*
00:04 Nous recevons le commissaire-priseur Jean-Pierre Osna,
00:07 commissaire-priseur et président de la maison de vente aux enchères Osna,
00:10 à l'occasion de la dispersion de la collection de Raymond et Suzanne Fischhoff-Lafou,
00:16 qui aura lieu dans une semaine.
00:18 Alors voilà, mobilier, bijoux, tableaux, c'est la vente d'un regard,
00:23 de collectionneurs du goût d'une époque.
00:25 Est-ce que vous pouvez tout d'abord nous présenter ce couple du XXe siècle ?
00:30 – Oui, du XXe siècle, parce que Suzanne Fischhoff est née en 1920,
00:37 elle est née à Mellon, et puis à 18 ans, elle va devenir manucure à Paris.
00:43 Elle est très jolie, et un monsieur va la séduire,
00:48 et il l'emmène aux États-Unis.
00:49 Pendant la guerre, il part, et lui, il est consul de Suisse aux États-Unis.
00:55 Il s'installe à Miami, et à Miami, elle va connaître tous les peintres de l'époque,
01:00 notamment Kissling, qui était parti pendant la guerre pour se réfugier là-bas.
01:05 Elle divorce, elle revient à Paris à la fin de la guerre,
01:11 et là, elle va retrouver monsieur Fischhoff qu'elle avait connu chez ses parents.
01:15 Elle va sonner à sa porte, il va tomber fou, amoureux d'elle,
01:20 et donc ils vont vivre une histoire d'amour incroyable,
01:23 et ils vont vivre le Paris de l'après-guerre dans tous ses excès.
01:27 Ils vont à la couverte de bijoux, ils vont s'installer dans 350 m² F du Foch.
01:32 Elle avait, dans cette succession, 350 robes de soirée.
01:37 Donc, elle était l'amie de Graskelly, elle était amie de la princesse de Monaco,
01:43 et donc, couverte de bijoux, elle va passer aussi trois mois de l'année à Monaco.
01:48 Quand elle arrive sur le quai, on dépose les mâles,
01:51 et il y a le directeur de l'hôtel de Paris avec tous les groumes qui l'attendent
01:55 pour aller s'installer dans la suite de l'hôtel de Paris.
01:58 Face à la mère, enfin, une vie extraordinaire,
02:01 et donc, elle est morte l'année dernière à 102 ans,
02:04 et avant de mourir, elle a décidé de donner tout ce qu'elle avait aux petits frères des pauvres.
02:09 Etant qu'à lui, c'est un personnage aussi très curieux,
02:14 puisqu'il a été résistant pendant la guerre,
02:16 du reste, à la fin de la guerre, il a demandé au gouvernement de changer son nom,
02:20 il s'appelait Fischhoff-Lafou, c'était un grand ami de François Mitterrand.
02:23 Il n'a pas connu François Mitterrand, président de la République,
02:26 parce qu'il est mort en 1980, et Mitterrand était président en 1981.
02:31 Donc, en fait, tous les deux ont vécu une aventure extraordinaire,
02:36 et toute cette aventure se termine dans une vente aux enchères
02:39 avec les plus beaux bijoux du monde, vraiment des bijoux extraordinaires.
02:43 Elle a été cliente de Vendky Fjärpels,
02:45 ils achetaient des diamants chez les Diamantères à plusieurs millions d'euros,
02:48 des tableaux, des objets d'art, voilà, tout ça est vendu.
02:52 - Et voilà, c'est toute une aventure qui se retrouve dans des objets.
02:55 Est-ce qu'on pourrait dire, est-ce qu'il y a, par exemple, une toile de fond ?
02:58 Est-ce qu'il y a un goût de ce coup ?
03:00 Est-ce qu'il y a un fil conducteur qu'on pourrait retrouver ?
03:04 - Alors, sur le fil conducteur, manifestement, c'est des diamants.
03:08 Je pense que ce monsieur, qui, je pense, était juif,
03:10 pendant la guerre a dû être marqué, qu'il ne le serait pas, par la Shoah,
03:14 et qui a dû penser qu'avec des diamants, remplacer son argent,
03:18 on pourrait repartir demain s'il y avait quelque chose qui arrivait de nouveau.
03:22 Donc, les bijoux ont été quand même la partie la plus importante,
03:28 la partie émergée de l'iceberg, de tout ce qu'ils ont acheté.
03:31 Alors, après, l'appartement a été meublé convenablement, oui,
03:35 mais c'est surtout les tableaux de Kissling,
03:37 parce qu'ils étaient très aimés, Kissling,
03:39 et puis ce fameux tableau de De Ryn,
03:42 que nous avons fini par identifier,
03:44 et qui devrait se vendre plusieurs millions d'euros.
03:48 - Est-ce que ça apporte de la valeur, le fait qu'un tableau, qu'une œuvre,
03:52 qu'un bijou appartiennent à une collection, à des collectionneurs,
03:56 à quelque chose qui soit un ensemble ?
03:58 Quel est le regard des acheteurs sur ce genre de projet ?
04:01 - Oui, alors, il est certain que si on fait la vente Saint-Laurent,
04:05 ou la vente d'une personnalité très connue, ça rajoute un peu plus.
04:08 - Bien sûr.
04:09 - Alain Delon qui a vendu ces tableaux,
04:11 je suis convaincu qu'il y a des gens qui ont acheté aussi le tableau d'Alain Delon.
04:15 Bon, M. Fischoff et Mme Fischoff n'étaient pas connus,
04:17 on les a fait connaître là-bas à l'intermédiaire de cette vente,
04:20 maintenant son nom va devenir connu.
04:22 Mais néanmoins, le fait qu'il y ait un seul vendeur dans une vente,
04:25 et puis en plus, tout est à vente, sans prix de réserve,
04:27 le fait que ce soit la même personne, la même main qui ait tout acheté,
04:31 c'est manifestement un plus.
04:32 - Même en termes de provenance, c'est vrai que c'est un terme qu'on entend beaucoup en ce moment,
04:38 c'est vrai que le fait qu'on sait vraiment qu'il y a une recherche derrière,
04:41 que ça meublait un appartement, qu'il y a autant d'archives, etc.,
04:44 ça doit apporter beaucoup à une vente, j'imagine ?
04:47 - Oui, alors vous voyez dans le catalogue que vous avez là,
04:50 dans le catalogue où il y a énormément de photographies de cet appartement,
04:55 vous avez aussi beaucoup de photos de Mme Fischoff avec ses bijoux qu'elle portait.
04:59 Donc le fait de vendre un collier de vente Clifford Peltz,
05:02 mais d'avoir la photo elle-même au Locke de Caume en train de porter ce...
05:05 dans les années 50-60, il n'y a pas doute que c'est un plus, bien sûr.
05:11 - Parce que je me demandais si aujourd'hui, il n'y avait pas de plus en plus d'intérêt des acheteurs
05:15 vers des œuvres qui ont un côté très émotionnel,
05:20 vraiment, qui ont été choisies avec beaucoup d'attention,
05:23 ça, que tous ces objets-là ont une histoire.
05:25 Et je me demandais si c'était vraiment quelque chose qui...
05:27 enfin, quelque chose qui attirait de plus en plus de savoir que c'était vraiment...
05:31 qu'un rêve, en fait, derrière tous ces objets.
05:35 - Oui, cette histoire à elle-même, elle rajoute un petit plus à la vente,
05:39 parce qu'effectivement, tout ça leur appartenait à tous les deux.
05:43 Ils ont vécu cette vie de plaisir, d'amour avec tous ces objets,
05:50 donc c'est pour les gens qu'ils achètent.
05:52 Enfin, vous savez, les objets ont une âme en eux-mêmes.
05:55 Les objets-là ne nous appartiennent pas, nous ne sommes que locataires.
05:59 Ils appartenaient à quelqu'un d'autre avant,
06:01 ils en pertiendront à quelqu'un d'autre après,
06:04 donc l'objet parle de lui-même.
06:05 Donc le fait, par exemple, ce deurin, qu'il ait appartenu à M. Fischhoff,
06:11 est-ce que ça rajoute vraiment à la valeur de l'objet ? Non.
06:14 C'est surtout l'histoire du marché de l'art,
06:18 le fait que ce tableau ait fauve, qui date de 1905,
06:21 cette fameuse exposition fauve au Grand Palais,
06:25 où un critique d'art qui s'appelle Voxel rentre à l'exposition,
06:31 il voit tous ces tableaux très colorés, très vifs,
06:33 et dit "on rentre dans la cage aux fauves".
06:35 Et c'était un scandale de l'époque,
06:37 puisque le président de la République de l'époque, Emile Loubet,
06:41 n'avait pas voulu faire le vernissage, tellement c'était scandaleux.
06:44 Donc ces deux ans, 1905-1906,
06:47 c'est une période où les peintres lâchent la peinture complètement dans le tube,
06:53 deviennent une période complètement vive dans la peinture en elle-même,
06:59 et ça ne va pas durer.
07:00 Et du reste, un tableau de Derain, ou de Matisse, ou de Vlaminck de ces époques-là,
07:04 vaut à peu près peut-être 10, 100 fois le prix que vaut le même tableau peint 10 ans après,
07:10 mais qui n'est plus fauve.
07:12 Oui, donc ça, c'est vos recherches qui ont permis de découvrir tout ça,
07:16 ou les Fischhoff, Lafourme, savaient déjà l'histoire de ce tableau ?
07:20 Alors, je dois dire que nous avons beaucoup travaillé dessus,
07:23 et que notre expert a été extraordinaire, parce que nous avons trouvé derrière ce...
07:27 C'est un petit tableau, je vais vous le montrer, tiens, du reste.
07:31 Ce petit tableau, voilà, vous voyez ?
07:34 Oui, de Derain, mais ça c'est bon, on va pouvoir le mettre à l'écran.
07:37 Et ce tableau, qui n'est pas grand,
07:39 nous avons trouvé derrière, au dos des écritures, des numéros peints en bleu.
07:45 Et en fait, il s'est avéré que ces numéros, on les a identifiés
07:48 comme étant des références de la collection d'Ambroise Vollard,
07:52 qui était le grand marchand de tableaux, qui est mort en 1939.
07:55 Et Ambroise Vollard avait donc acheté des tableaux de Derain très tôt,
07:59 donc en 1905, il a toujours gardé ce tableau.
08:02 Et donc, on a pu retrouver, identifier la collection d'Ambroise Vollard.
08:07 Et grâce à ça, nous sommes allés voir le comité Derain,
08:10 et nous avons obtenu un certificat du comité Derain sur ce tableau.
08:15 Ce qui est rarissime, parce que des tableaux fauves, il n'y en a pas, il n'y en a plus.
08:19 - Eh bien, merci beaucoup Jean-Pierre Osna.
08:21 Je rappelle que vous êtes commissaire, priseur et président de la Maison de Vente aux Enchères.
08:24 Osna, merci pour votre présence et nous avoir raconté toutes ces histoires de tableaux.
08:28 Et quant à nous, on se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau numéro d'Art et Marché.
08:33 Sous-titrage Société Radio-Canada
08:35 ♪ ♪ ♪

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