• il y a 10 mois
Pour ce nouvel épisode de “Chocs du monde", le magazine des crises et de la prospective internationales de TVL, Edouard Chanot reçoit Alexis Tarrade, depuis Moscou.
Dans quelques jours, la guerre en Ukraine entrera dans sa troisième année. Un conflit qui a coupé l’Europe occidentale et la Russie, un conflit tragique dont bien sûr les répercussions sont considérables. En deux ans, le monde a basculé du fait de ce bras de fer entre l’Occident et Moscou. La relation entre la France et la Russie, historiquement riche mais mise à mal depuis plusieurs années, a été bouleversée. Mais est-ce à jamais ? Alexis Tarrade, secrétaire général de France Russie expatriation, nous répond.

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Transcription
00:00 [Générique]
00:22 Bonsoir à tous et bienvenue dans Choc du Monde, le magazine des crises et de la prospective internationale de TVL.
00:29 Ce soir, Choc du Monde a rendez-vous à Moscou, avec Alexis Tarade, qui est secrétaire général de l'association France-Russie-Expatriation.
00:38 Alexis Tarade, bonsoir.
00:40 Bonsoir, Albert Chanel.
00:42 Merci beaucoup d'avoir répondu présent à l'appel de Choc du Monde.
00:45 Avec vous, nous allons évoquer les relations difficiles, c'est le moins qu'on puisse dire, entre Paris et Moscou.
00:52 Car dans quelques jours, la guerre en Ukraine entrera dans sa troisième année.
00:56 Un conflit qui a coupé l'Europe occidentale et la Russie.
00:59 Un conflit tragique, dont bien sûr les répercussions sont considérables, non seulement pour les deux pays, mais pour l'ensemble de la planète.
01:07 En deux ans, en effet, le monde a basculé à cause de ce bras de fer entre l'Occident et Moscou.
01:13 Alors, je l'ai dit, la relation entre la France et la Russie, historiquement riche, est mise à mal depuis plusieurs années, si ce n'est bouleversée.
01:20 Mais est-ce à jamais ?
01:22 Pour répondre à cette question, nous avons avec nous Alexis Tarad.
01:26 Comme je le disais, vous êtes secrétaire général de l'association France-Russie-Expatriation.
01:30 Vous vivez à Moscou.
01:32 Vous avez été par ailleurs engagé au sein du Parti des Républicains, aussi à Moscou.
01:36 Et vous êtes chroniqueur dans l'émission Allô, ici Moscou, présentée par Xavier Moreau sur RT en français.
01:43 Alors, vous êtes resté à Moscou.
01:45 Permettez-moi une première question quasiment personnelle.
01:48 Vous êtes resté à Moscou après le début de ce conflit en Ukraine, le 24 février 2022.
01:53 Je souligne cela parce que c'est rare.
01:55 Tous les expatriés français ont, ou presque, déserté la Russie.
01:59 Mais vous non.
02:01 Comment s'est-il passé, Alexis Tarad ?
02:04 Comment avez-vous vécu cela, et les deux dernières années, les différentes phases de ce conflit ?
02:11 C'est une très bonne question. Je dirais avant tout que peut-être que je n'ai pas déserté,
02:16 ou que les autres n'ont pas déserté non plus, pour un grand nombre de Français de notre communauté.
02:22 On leur a demandé de partir, ou du moins, quand je dis « on leur a demandé »,
02:25 je dirais qu'on les a fortement incités de partir pour des raisons professionnelles.
02:29 Donc, le message n'est peut-être pas aussi blanc ou aussi noir que vous le dites.
02:36 C'est beaucoup plus complexe.
02:38 On a vu, effectivement, au début de ce conflit, en février-mars,
02:42 beaucoup de familles qui étaient déchirées de quitter la Russie,
02:45 et qui quittaient sous une pression de leur employeur, tout simplement.
02:49 Également dans une période où, en plus, il y avait une pression qui était extrêmement forte
02:54 de la part, je dirais, du ministère des Affaires étrangères,
02:58 par le biais de communication du ministre,
03:01 mais par le biais, ici localement, de communication de notre ambassadeur,
03:06 qui envoie une lignée d'adhérents français en demandant, effectivement, de partir,
03:09 de quitter la Russie.
03:11 Moi, je suis un peu moins dur que vous.
03:15 Ils n'ont pas fui la Russie.
03:17 Ils ont été, pour une très grande majorité, obligés, malheureusement,
03:20 de quitter la Russie sous la pression.
03:22 Donc, des pressions plutôt que des déserteurs, si j'ai bien compris, Alexi Taras.
03:26 Les relations, nous le disions, se sont progressivement tendues
03:31 entre Paris et Moscou.
03:32 D'abord en 2014, lors de l'annexion de la Crimée, selon la Russie,
03:37 rattachement, selon Moscou, puis évidemment, avec l'invasion de l'Ukraine,
03:41 selon Paris, opération militaire spéciale, selon la Russie.
03:44 Mais plus récemment encore, rien ne semble plus aller entre la France et la Russie.
03:49 Alors, je vous propose une mise au point pour que tout cela soit clair.
03:53 Emmanuel Macron devait se rendre les 13 et 14 février en Ukraine, à Kiev et Odessa,
03:59 mais ce déplacement a été reporté, a dévoilé Challenge, le 11 février.
04:04 À Paris, certains diplomates ukrainiens sont tombés des nues, ajoute l'article.
04:09 Selon le magazine, l'Elysée admet à demi-mot qu'Emmanuel Macron
04:12 aurait souhaité muscler l'aide française.
04:15 En clair, les projets dans les tuyaux s'avéraient encore insuffisants,
04:19 écrit Challenge.
04:20 Cette révélation intervient alors que les relations entre Paris et Moscou
04:24 se sont brusquement tendues à la suite de l'annonce par Emmanuel Macron
04:28 le 16 janvier d'une nouvelle livraison de 40 missiles Scalp à Kiev.
04:33 Le 18 janvier, la défense russe a annoncé une frappe à Kharkov,
04:37 revendiquant avoir éliminé des mercenaires étrangers
04:40 dont le noyau était constitué de français.
04:43 Le Quai d'Orsay a nié l'existence de mercenaires français en Ukraine,
04:47 mais le ministre français de la Défense a admis la présence de combattants,
04:51 déclarant sur LCI le 19 janvier "On n'a pas à leur interdire,
04:56 on est encore une démocratie".
04:58 Moscou a dénoncé l'implication croissante de Paris dans le conflit
05:02 avant que Stéphane Séjourné ne fustige la barbarie russe
05:06 ayant visé des civils en Ukraine le 2 février à la suite de la mort
05:10 de deux humanitaires français près du front.
05:13 Barbarie russe, donc, selon Stéphane Séjourné.
05:20 Alice Hidarad, vous êtes français, vous viviez en Russie,
05:23 comme nous l'avons dit, comment jugez-vous cette sortie de Stéphane Séjourné ?
05:28 Stéphane Séjourné vient d'arriver en poste, je pense qu'on l'a vu,
05:35 lors de son premier déplacement notamment à Kiev.
05:38 Moi c'est ce que j'en ressens, en tout cas la volonté de marquer son arrivée
05:44 à ce ministère avec des failles et des déclarations
05:47 qui peut-être sont peu mesurées sur un terme diplomatique.
05:51 La question de la barbarie russe, il faudrait pouvoir la qualifier juridiquement,
05:58 légalement. Aujourd'hui, ça n'est pas fait au niveau de l'ONU,
06:02 ça n'est pas fait non plus encore au point de vue d'accord pénalité nationale,
06:07 même s'il y a un processus qui est en route, qui n'est pas statué.
06:11 Donc je trouve que diplomatiquement, en tout cas, c'est un message
06:16 extrêmement surprenant, je vais être un peu redondant,
06:20 mais qui manque de diplomatie pour quelqu'un qui est censé représenter la France
06:24 et qui, de plus en plus, est censé essayer de trouver un terrain d'entente
06:28 ou de mode d'entente entre la France et la Russie,
06:32 et peut-être même être le pays, je parle de nous, français, la France,
06:36 le pays qui puisse un jour, qui sait être moteur d'un dialogue avec l'Ukraine.
06:41 En tout cas, c'est le pareil, compromis en ayant des positions aussi fermes et drastiques.
06:48 Des positions tranchées selon vous. La Russie, de son côté, a toujours été très admirative,
06:53 historiquement, encore une fois, de la France. Mais comment perçoit-on désormais la France
06:59 depuis ce conflit, depuis cette guerre en Ukraine ? Avez-vous ressenti davantage d'hostilité
07:04 au quotidien à Moussou que depuis les années précédentes, les décennies précédentes ?
07:09 Non, moi absolument pas. Je n'ai pas eu de découts ou de retours, notamment par exemple
07:15 des membres de notre association, des adhérents, qui avaient subi des agressions
07:21 ou des insultes ou des propos désobégeants du fait de leur nationalité ou autre.
07:27 Je n'en ai jamais entendu parler. Et en ce sens, la Russophobie que nous avons vécue,
07:34 que nous vivons en France, il n'y a pas d'effet miroir ici en Russie.
07:40 Il n'y a pas de robophobie, de francophobie ou d'occidentalophobie.
07:46 Ça n'existe pas. Alors, moi, je parle de Moscou, je parle de Saint-Pétersbourg,
07:50 je parle des grandes villes. Peut-être effectivement qu'on peut avoir des cas isolés,
07:53 dans des villes plus rurales, où peut-être l'entité ou l'idée patriotique est plus marquée.
08:00 En tout cas, dans les très grandes villes russes, effectivement, on n'a pas ce phénomène.
08:04 Vous avez vu des retours justement sur des événements de ce genre en France ?
08:11 Non, justement, aujourd'hui, il n'y a pas ce phénomène.
08:15 Ce qui prouve justement que la population russe arrive à faire la différence
08:21 entre le citoyen que l'on peut être, que je suis par exemple, étranger, sur son territoire,
08:27 et puis la situation diplomatique compliquée, complexe, dont vous venez de parler, entre nos deux pays.
08:33 Donc là, je trouve qu'il y a plutôt une loi d'intelligence derrière le russe.
08:36 Pas de problématique, on peut marcher, je dirais, tranquillement dans les rues de Moscou.
08:42 Marcher tranquillement, la situation est sécuritaire. D'ailleurs, nous allons revenir là-dessus.
08:47 Mais le journaliste américain Tucker Carlson l'a déclaré il y a 48 heures,
08:50 alors qu'il était dans un forum à Dubaï, me semble-t-il,
08:53 que la situation était en effet très sécurisante à Moscou.
08:58 Vous avez évoqué, nous avons évoqué les départs des Français de Russie.
09:03 Avez-vous une estimation sur le nombre de ressortissants français
09:07 qui restent encore à Moscou et en province aujourd'hui ?
09:13 Sur toute la Russie, alors, on a une estimation qui est notre estimation,
09:17 parce qu'il n'y a aucun chiffre volontairement qui est officiel sur cette question.
09:22 Je pense qu'on peut le dire avec beaucoup de franchise,
09:26 c'est un sujet un peu tabou au niveau du consulat ou de l'embauchade de France,
09:30 ici en Russie, et effectivement, il n'y a pas de clarté sur les vagues,
09:36 je dirais, d'exode ou de départ.
09:39 Je dirais depuis 2022, oui, mais il faudrait remonter même peut-être depuis 2015.
09:44 Moi, je suis en Russie depuis maintenant, je crois, 11 ou 12 ans.
09:49 J'ai vu progressivement cette vague de départ qui est liée à la situation que nous connaissons aujourd'hui.
09:55 Ça a commencé progressivement à partir de 2015, ça s'est accentué.
09:59 Bien entendu, le phénomène a explosé à partir de 2022, de début 2022,
10:04 c'est-à-dire février, mars, avril, mai 2022,
10:07 c'était une tornade à Moscou, dans la communauté, effectivement.
10:12 Mais il n'y a pas de chiffre, pour revenir à votre question,
10:15 extrêmement précis et officiel, en tout cas sur la question.
10:19 Ce que l'on sait de toutes les discussions que l'on peut avoir avec les listes
10:24 qui sont constituées par les élus, construites par les différentes associations,
10:29 par toute cette communauté française active,
10:33 c'est qu'on estime aujourd'hui à globalement environ 800,
10:36 la présence de Français, surtout en Russie.
10:39 Donc c'est très peu, comparé à ce que la communauté a été.
10:42 Je rappelle que ça a été la deuxième plus importante communauté sur le sol russe,
10:47 étrangère sur le sol russe, la première étant à l'époque la communauté allemande.
10:52 C'était vraiment une communauté extrême étrangère, extrêmement active en Fédération.
10:57 Et puis je dirais, au grand jour, cela correspondait à combien de milliers,
11:03 de dizaines de milliers de Français en Russie ?
11:06 Ça correspondait à des dizaines de milliers, puisque ça correspondait globalement
11:10 en officiel, c'est-à-dire enregistré auprès du Consulat de France,
11:15 comme étant physiquement ici, on comptait à peu près 15,
11:19 un peu plus de 15, 17 000 Français.
11:22 Et donc avec les noms inscrits, mais dont on savait qu'ils étaient là,
11:26 on estimait qu'on comptait à 20, voire au grand maximum 25 000.
11:30 Je pense que la fourchette est plus autour des 20 000.
11:33 Donc c'était quand même une communauté relativement importante.
11:35 Deuxième effet qu'il y avait, et qui n'en a plus aujourd'hui,
11:37 nous sommes passés de 20 000 à 800 ressources.
11:40 Et 800, je pense qu'on est généreux aujourd'hui.
11:42 On le voit, le phénomène notamment, on peut le mesurer au travers
11:45 des enfants inscrits auprès de l'école française.
11:49 Là, c'était une diminution considérable, ce qui change notamment
11:53 la question de renseignement français, en l'occurrence.
11:55 Et pour finir sur la question, on a aussi un deuxième effet
11:58 qui s'est créé post-février 2022.
12:02 C'est qu'avant, la communauté était dispatchée dans différentes villes de Russie,
12:06 et qu'aujourd'hui, on va la schématiser à 99%.
12:09 Elle est entre Moscou et Saint-Pétersbourg.
12:12 Et quand je dis à 99% entre ces deux villes, il faudrait
12:15 comptabiliser à 80% à Moscou et un tout petit peu à Saint-Pétersbourg.
12:20 Je vais revenir sur la situation quasiment sur le front,
12:24 enfin en tout cas, l'état d'esprit de la population russe
12:27 à l'égard du conflit.
12:29 La situation sur le front a évidemment beaucoup évolué,
12:32 en disant entre l'offensive russe, le ressac des troupes russes,
12:36 puis une sorte de stabilisation du front.
12:38 Dans les médias français, on répète à l'envie que le front est,
12:41 je cite, "gelé", me semble-t-il de manière assez naïve,
12:44 si vous me permettez ce jugement, puisque le conflit n'est pas seulement territorial.
12:48 Nous pouvons d'ailleurs voir sur cette carte du front que le conflit
12:52 est en effet relativement fixé, mais cela n'en dit pas plus
12:57 sur la situation géopolitique, sur le rapport de force,
13:00 sur la bonne santé des politiques russes, en tout cas en apparence.
13:06 Je disais que l'opinion russe a évolué en deux ans.
13:08 Le climat a été sans doute anxiogène au début du conflit,
13:11 et encore davantage à l'été et à l'automne 2022,
13:14 quand l'armée russe a subi des échecs sur le front.
13:17 Alice Hitarad, comment avez-vous vécu ce rollercoaster émotionnel en Russie,
13:22 si vous me permettez l'expression ?
13:24 En fait, je ne suis pas d'accord avec vous.
13:26 Je ne crois pas qu'il y ait une évolution dans la perception
13:30 de la situation par la population russe.
13:33 Je ne pense même pas qu'on ait dans un effet justement de rollercoaster.
13:38 En fait, on a connu deux moments, ou même un seul véritablement important,
13:45 où il y a eu de l'agacement.
13:47 Ce n'est pas une évolution du sentiment, c'est juste de l'agacement
13:50 de la population, parce que les choses n'avançaient pas,
13:53 et effectivement, lors de la première offensive qui a permis à l'armée ukraine
13:59 de reprendre une partie du terrain, où là il y avait un recul de l'armée russe,
14:03 ça a agacé les populations, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas une variation
14:07 sur le motif de soutien patriotique.
14:10 Il y avait un agacement parce que les choses n'avançaient pas aussi vite
14:14 que la population l'aimerait, que certains hommes politiques.
14:17 D'ailleurs, on parlait tout le temps de Vladimir Poutine,
14:20 en Occident, comme étant un dictateur fou, etc.
14:23 Je trouve que si on compare aujourd'hui le spectre politique en Russie,
14:27 c'est plutôt peut-être plus mesuré sur la question.
14:31 Je rappelle qu'un opposant qu'on aime beaucoup à citer en Europe,
14:34 comme un exemple Navalny, en 2015, disait qu'il fallait envoyer
14:39 les tanks jusqu'à Kiev, suite au Maïdan.
14:42 Vous voyez, les choses ne sont pas aussi blanches et aussi noires
14:45 qu'on essaie de présenter en Europe.
14:49 Il y a aussi dans la population ici en Russie et dans la classe politique
14:52 ici en Russie, pas une opposition sur la question de ne pas faire ce conflit,
14:56 mais plutôt la question de pourquoi ça n'avance pas aussi vite
14:59 qu'il le voudrait.
15:02 Désormais, est-ce que la population, l'opinion russe, selon vous,
15:06 a compris cette guerre d'attrition ? Parce qu'il s'agit de cela.
15:10 Les troupes russes avancent peut-être moins, mais semblent en tout cas
15:15 avoir remporté pour l'heure ce conflit d'attrition.
15:20 C'est compliqué, effectivement, dans la mentalité russe,
15:23 peut-être de comprendre ce principe d'avancer un peu comme un rouleau
15:30 de compresseur, lent et inexorable.
15:33 C'est assez compliqué parce que c'est exactement ce que je venais de vous dire.
15:37 Beaucoup aimeraient que ça arrive beaucoup plus vite, beaucoup plus fort,
15:41 que les frappes sur Kiev soient beaucoup plus massives,
15:45 que le Parlement ukrainien, que Zelensky soit mis en danger, etc.
15:51 Et ils ne comprennent pas pourquoi finalement ça ne va pas beaucoup plus vite.
15:56 Aujourd'hui, ce qui est certain, c'est que je ne suis pas d'accord non plus
16:00 avec le terme de conflit gelé.
16:05 On n'est pas dans un conflit gelé, on est dans un conflit où on est
16:09 dans une phase extrêmement importante, où deux blocs sont en train de s'affronter.
16:13 Mais de celui qui prendra le dessus aujourd'hui, il y aura une évolution,
16:20 un avance considérable qui va se créer derrière.
16:23 Le premier qui va s'effondrer maintenant va entraîner un effet dévastateur
16:28 sur son camp. On n'est pas dans un conflit gelé, on est dans un moment
16:32 de bras fer très très intense.
16:35 Comment vit-on à Moscou ? La Russie, je le rappelle, est coupée de l'Europe
16:39 et de l'Occident. Comment vit-on sous sanctions occidentales ?
16:44 Encore une fois, dans les médias occidentaux, on déchante un peu
16:47 sur l'effet de ces sanctions. Mais on entend quand même, en France,
16:51 en Europe, parler d'une inflation record en Russie qui atteindrait 15%,
16:56 si ce n'est plus, par exemple sur le prix de la volaille, du poulet, dit-on.
17:01 J'ai entendu qu'il n'y avait plus d'oeufs, j'ai entendu qu'il n'y avait plus de poulet.
17:05 On prenait des pièces, des machines à laver pour emballer dans les missiles.
17:09 On est dans un fantasme, ce n'est même pas un fantasme,
17:13 on est dans une propagande de guerre de toutes les parties,
17:17 et notamment de nous, de notre partie occidentale, où on a des médias
17:21 qui vont avoir envie d'essayer d'influer sur le psychisme,
17:26 ou en tout cas la résilience des populations, notamment russes.
17:30 Mais à tort, parce qu'en fait ici, les gens, et c'est peut-être un petit peu dur,
17:35 ce que je veux dire, et peut-être que certains de vos téléspectateurs
17:39 vont avoir un peu de choqué, mais ici, on ne perçoit pas la guerre.
17:43 On est loin du frein, la vie se passe de manière extrêmement traditionnelle
17:50 pour tout habitant d'une grande métropole mondiale,
17:54 ça se passe même plutôt bien, plutôt mieux même que dans d'autres capitales mondiales,
17:59 je reprends d'ailleurs la déclaration de Carsten Tucker,
18:03 lors d'un forum, je crois hier, mois 20ième, où il disait qu'il trouvait que Moscou
18:08 était une ville beaucoup plus propre, beaucoup plus agréable, beaucoup plus sûre,
18:11 que beaucoup de villes qu'il connaissait, etc.
18:13 Ben oui, c'est la réalité, ça l'est, c'est plus propre, c'est plus sûr,
18:16 vous n'avez pas à vous inquiéter si vos enfants sortent le soir,
18:20 et puis vous trouvez tout ce qui fait la vie dans une métropole comme Paris,
18:24 Londres, Tokyo, en termes de fourniture, de marchandises, etc.
18:29 Mais cela dit, l'effort de guerre russe est bien réel, semble-t-il ?
18:33 Oui, l'effort de guerre est soutenu par une économie qui est extrêmement forte,
18:38 moi je ne suis pas économiste, mais ceci étant,
18:41 pour toutes les personnes qui s'intéressent au sujet,
18:43 qui écoutent les experts parler de la question,
18:46 la Russie est assise sur des capacités économiques
18:48 qui lui permettent justement de déclencher cet effort de guerre,
18:51 sans qu'il y ait un saignement du mode de vie de ces populations.
18:58 Donc non, on n'est pas dans une crise comme vous l'avez,
19:01 comme vous décriviez, que nos médias en parlaient,
19:04 l'inflation de 15% est complètement farfelue,
19:07 je n'ai pas cette problématique au quotidien,
19:11 je ne dis pas qu'il n'y a pas d'inflation,
19:13 bien évidemment les prix ont augmenté,
19:15 enfin ils ont augmenté énormément à Paris,
19:17 ils ont augmenté énormément à Bordeaux,
19:19 ils ont augmenté énormément à Lyon et dans toutes nos villes de France,
19:22 mais je dirais qu'ici, on est encore dans un cadre d'indébit
19:26 qui est tout à fait accessible pour toute la population russe dans sa globalité.
19:32 Alors bien sûr, l'un des effets de la guerre en Ukraine
19:36 a été l'ouverture de la Russie vers d'autres alliés,
19:39 la liste est considérable, la Chine bien sûr,
19:42 on pense toujours à Xi Jinping,
19:43 mais aussi aux autres membres des BRICS,
19:45 qui se sont d'ailleurs élargis,
19:47 mais aussi au Moyen-Orient,
19:49 au prince saoudien Ben Salmane,
19:51 à l'Afrique évidemment.
19:53 Le monde ne pense pas, comme l'Occident semble-t-il,
19:56 c'est devenu une évidence,
19:58 mais inversement, Alexis Tarad,
20:00 ne craignez-vous pas que ce jeu se retourne quand même un peu contre la Russie,
20:04 qui risquerait de se retrouver avec de nouvelles dépendances,
20:09 voire même vassalisées,
20:10 on pense souvent à Pékin, à la Chine,
20:12 quand on évoque cette hypothèse,
20:14 bien sûr encore une fois en Occident principalement,
20:16 de vassalisation par la Chine.
20:19 Ça va dans ce sujet très complexe,
20:22 et j'aurais tendance à dire "qui vivra verra".
20:25 Vladimir Poutine a dit quelque chose de tout à fait cohérent
20:30 dans son débat avec Tucker Person à propos de la Chine,
20:34 il dit "nous vivons ensemble, côte à côte depuis des siècles,
20:38 et le fait d'avoir des frontières communes nous force inéluctablement,
20:41 qui arrive à développer nos relations économiques, diplomatiques, etc."
20:46 La Russie et la Chine seront toujours obligées de s'entendre,
20:49 seront toujours obligées d'avoir une coopération.
20:51 Maintenant, effectivement, est-ce qu'il y aura un jour,
20:53 l'un de ces deux pays, on pense à la Chine naturellement,
20:56 qui prennent l'ascendant,
20:58 et donc qui prennent une domination,
21:02 une dépendance,
21:03 et qui créent une dépendance pour la Russie vis-à-vis de la Chine ?
21:06 Aujourd'hui, ce n'est pas le cas,
21:08 on verra peut-être dans le futur,
21:10 ce qui est le plus important, c'est qu'aujourd'hui, la Russie,
21:13 moi je pense, je suis très objectif,
21:16 mais je pense qu'elle reviendra vers l'Occident et notamment l'Europe
21:19 pour des questions de réalité économique,
21:21 et puis peut-être en parlant, pour des questions de réalité culturelle.
21:24 Elle reviendra naturellement, ça va peut-être prendre du temps,
21:26 mais en attendant, elle s'est tournée vers les BRICS,
21:30 vers tous ces pays qui sont aujourd'hui très attentifs à la situation,
21:35 parce qu'ils trouvent dans cet affrontement entre la Russie et l'Occident,
21:39 ils se retrouvent dans la question,
21:41 donc ils le regardent avec un oeil très intéressé,
21:44 parce que ces pays, ils en ont marre pour une grande partie,
21:48 on parlait d'Afrique, on parlait des pays d'Amérique du Sud,
21:51 on parlait des pays du Middle East, de sortir anti-colonialisés,
21:54 vous en parliez tout à l'heure d'Arabie Saoudite,
21:56 on pourrait y rajouter les Emirats mubliques,
21:58 qui ont été pendant très longtemps des protectors américains,
22:01 et qui aujourd'hui, par leur entrée dans les BRICS,
22:05 envoient un vrai message diplomatique,
22:07 de "Rail ball", on est autonome,
22:12 nous ne sommes pas votre domination, on se tourne vers qui on veut.
22:15 Et ça, ça a un intérêt pour la Russie,
22:17 parce que ça lui permet de créer, certes,
22:21 des dépendances vis-à-vis de l'Inde, de la Chine,
22:23 aujourd'hui, physiquement, parce qu'il y a une économie à tenir en haleine,
22:28 pour pouvoir maintenir son effort de guerre,
22:31 mais ça lui permet aussi d'ouvrir d'autres portes vis-à-vis d'Afrique,
22:35 justement, des Emirats mubliques,
22:37 où je crois que la Russie est la première source de tourisme dans le pays,
22:42 vers la Turquie, ne l'oublions pas,
22:44 les liens avec la Turquie économique se sont extrêmement développés ces dernières années,
22:47 donc la Russie progressivement s'ouvre aussi beaucoup de nouvelles portes.
22:50 Ça, il faudra quand même le prendre en compte
22:52 dans son développement économique futur.
22:54 De nouvelles portes, cela fait évidemment penser
22:57 à un projet pharaonique colossal de Vladimir Poutine,
23:00 le corridor Nord-Sud, que l'on évoque souvent dans "Choc du monde",
23:04 je vous invite à retrouver encore une fois cette carte réalisée par notre équipe.
23:08 Voici encore de quoi il s'agit,
23:10 c'est un projet qui permet multimodal,
23:12 qui permet de relier la Baltique au Golfe Persique,
23:15 en deux semaines, trois semaines éventuellement.
23:18 Alors, ma question, Alexis Drat, sera moins économique que sociale,
23:22 mais comment les Russes vivent-ils cette ouverture au Sud,
23:27 que vous décrivez, et qui a aussi des déclinaisons très concrètes,
23:31 comme nous le voyons, avec ce corridor Nord-Sud ?
23:33 Qu'est-ce que cela signifie pour les Russes
23:35 qui, jusqu'à peut-être récemment, avaient les yeux tournés vers l'Occident ?
23:39 Est-ce qu'ils suivent ce changement ?
23:41 Comment le vivent-ils ?
23:43 Alors, ils le suivent, c'est une certitude.
23:45 Je vais vous donner une anecdote à l'occasion du nouvel âge chinois,
23:49 qui avait lieu il y a deux ou trois jours,
23:52 ou quelques jours, j'ai oublié.
23:53 Pour la première fois, il y avait effectivement,
23:56 sur une artère qui part de la place Rouge,
23:58 qui était une artère piétonnière,
23:59 avec toute une décoration, une mise en scène,
24:02 pour mettre en avant cet événement.
24:04 Donc, il y avait véritablement une envie de Moscou
24:10 de montrer qu'on se tournait vers la Chine.
24:12 Malheureusement, ça n'a pas attiré énormément de monde,
24:15 ce n'est pas été un événement qui a fasciné les foules
24:18 et les adrénalins dans la rue par ce front intense.
24:22 Ça résume à peu près la situation,
24:24 c'est-à-dire qu'il y a une nécessité aujourd'hui
24:26 de se tourner vers d'autres risons,
24:29 on vient d'en parler avant.
24:30 Et donc, les Russes le font naturellement
24:32 parce que c'est leur intérêt économique.
24:34 Par contre, en termes culturels,
24:38 en termes de proximité, dans les modes de vie,
24:42 il y a eu une fracture aujourd'hui diplomatique avec l'Occident,
24:46 mais pour n'importe quel Russe que vous arrêtez à Moscou,
24:49 à Saint-Étienne-en-Lourdes,
24:50 j'irais dans cette partie ouest de la Russie,
24:53 on va dire ouest de l'Ural,
24:56 les gens se sentent européens, je suis désolé de le dire,
24:58 mais c'est encore un effet ou une vérité.
25:01 Et cela s'accompagne à votre avis d'une blessure
25:04 ou d'une certaine rancœur à l'égard de l'Occident depuis deux ans ?
25:09 Mais, c'est exactement ça,
25:13 ce n'est pas une question de depuis deux ans en fait.
25:15 La Russie vit avec…
25:18 Moi, j'ai toujours comparé la Russie
25:20 et la relation de la Russie et de l'Europe un petit peu,
25:22 ou de la Russie et de la France tout particulièrement,
25:25 à l'histoire d'un couple amoureux
25:28 où l'un aime moins l'autre que lui.
25:31 Et donc, il y a une frustration,
25:33 il y a un côté déception,
25:37 on le fait en très clair,
25:38 parfois un peu de colère,
25:40 on est dans cette métaphore du couple
25:43 où la Russie aime beaucoup la France,
25:45 elle aime beaucoup l'Europe,
25:46 elle a des yeux de chez-mère,
25:47 parfois sur ce point,
25:48 un point où elle ne perçoit pas nos faiblesses,
25:50 où elle ne perçoit pas tous les dysfonctionnements chez nous,
25:54 et puis là, du fait de la colère,
25:56 du fait de la rancœur qui se crée autour de ce conflit,
25:58 du fait des poids, des diplomaties, des jeux politiques, etc.,
26:03 les autorités russes mettent,
26:06 je dirais, le doigt sur nos défauts
26:09 et les montrent à la population,
26:11 et donc il y a une petite dissension qui se prend,
26:13 mais on reste entre deux peuples occidentaux,
26:17 soyons honnêtes.
26:19 Alors, nous allons revenir sur ce que vous avez évoqué,
26:22 l'entretien entre Vladimir Poutine
26:24 et le journaliste vedette américain Tucker Carlson,
26:27 qui a eu lieu le 9 février,
26:29 après quelques jours d'attente
26:30 qui ont fait frémir tout le monde,
26:32 à la fois en Russie et en Occident.
26:34 L'entretien a donc fait grand bruit,
26:35 beaucoup fait jaser.
26:36 Nous ne allons pas revenir sur tout,
26:38 j'aurais deux questions principales
26:40 à vous poser sur cet entretien, Alexis Tarad.
26:42 La première, pensez-vous que l'Occident,
26:44 en général, la France en particulier,
26:46 peuvent comprendre les arguments russes
26:49 et les revendications de Poutine
26:50 sur le fait qu'une partie de l'Ukraine d'aujourd'hui
26:53 est en réalité, eh bien, russe ?
26:56 Alors, petite parenthèse,
26:59 je pense que les quelques jours avant l'interview
27:03 étaient en fait une stratégie de teasing extrêmement bien menée.
27:07 C'est ce que je pense aujourd'hui, avec le recul.
27:10 Pour revenir sur l'interview,
27:12 et sur la question que vous venez de poser,
27:14 qui est même au-delà de la question d'interview,
27:16 je pense que nous devons essayer de comprendre
27:22 ce que dit la Russie.
27:24 C'est là aujourd'hui qu'il y a un problème,
27:26 et c'est en ça que je trouve que l'interview,
27:28 pour moi, a eu des lacunes,
27:30 peut-être dans la communication,
27:32 mais il a eu en tout cas une force,
27:35 c'est la force du message qui a été véhiculé.
27:38 Donc, je dirais, c'est vraiment ce débat du fond et de la forme.
27:41 Sur le fond, Vladimir Poutine a pu s'exprimer
27:44 auprès des Européens, et j'espère que les Occidentaux,
27:47 les Européens et les Américains ont essayé de comprendre
27:50 cette position russe qui fait que nous sommes
27:52 dans cette situation aujourd'hui.
27:54 Donc, je crois que le message était bon sur le fond.
27:56 Sur la forme, je ne suis pas certain.
27:58 Pourquoi je dis ça ?
28:00 Parce qu'on s'adressait notamment, majoritairement aux Américains,
28:04 dans ce message-là.
28:06 On connaît nos amis Américains,
28:08 ce sont des gens avec énormément de qualité,
28:10 mais la géographie et l'histoire n'ont pas toujours
28:12 leurs points forts.
28:14 Et comment sait cette interview de 2h par 30 minutes,
28:18 40 minutes, d'histoire de la Russie médiévale ?
28:22 Je ne suis pas certain qu'on ait gardé
28:24 beaucoup d'Américains, je dirais, devant l'écran.
28:28 Donc, je pense que, voilà, encore une fois,
28:30 c'est peut-être toute la faiblesse de la Russie,
28:32 c'est de ne pas savoir communiquer avec un message
28:36 qui soit compréhensible par nous, Occidentaux.
28:39 Ce que nous attendons comme message,
28:42 comme communication,
28:44 ce que nous attendons comme dialogue, nous, Occidentaux,
28:47 et pas forcément ce que les peuples sénaves
28:50 aiment à pratiquer.
28:52 Alors, Poutine a déclaré,
28:55 et là, nous sommes dans ce qu'il y avait de plus concret,
28:58 sans doute, dans son entretien,
29:00 beaucoup moins historique.
29:01 Il a déclaré, je cite,
29:02 "Je vois que les Occidentaux voudraient négocier
29:04 une sortie de crise, mais ils ne savent pas,
29:06 selon lui, comment faire."
29:08 Alors, voyez-vous, Alexis Tarrade,
29:10 une sortie de crise se profiler,
29:12 se dessiner en Ukraine,
29:13 alors que Kiev est, semble-t-il,
29:15 dans une posture pour le moins délicate.
29:17 L'aide européenne a été malmenée,
29:20 l'aide américaine est toujours en sussement.
29:23 Alors, une sortie de crise peut-elle se profiler ?
29:26 Pourrait-elle ?
29:27 Comment pourrait-elle advenir, selon vous, Alexis Tarrade ?
29:30 Je ne suis pas forcément le meilleur pronostiqueur,
29:34 puisque j'avais pronostiqué une fois le conflit
29:37 au maximum fin du premier trimestre 2024,
29:40 sur le terrain.
29:41 Donc, vous allez me dire, il me reste encore,
29:43 normalement, un peu plus d'un mois,
29:45 mais ça me paraît difficile.
29:47 Pour être plus sérieux,
29:49 je pense qu'aujourd'hui, on est dans une situation
29:51 où une marche arrière
29:53 de l'un ou des deux parties est impossible,
29:56 très clairement.
29:57 L'Ukraine ne peut pas s'arrêter,
29:58 elle ne peut pas discuter,
29:59 parce que ça entraînerait inéluctablement
30:02 sa disparition, à court ou moyen terme,
30:05 et la Russie ne peut pas s'arrêter,
30:07 ou ne doit pas s'arrêter,
30:08 parce que de toute façon,
30:09 elle est aujourd'hui sur une dynamique positive,
30:11 et donc elle n'a pas de nécessité
30:13 ou de réalité de s'arrêter.
30:14 Ensuite, il y a le troisième tiers dans l'histoire.
30:17 C'est encore un coup de poing,
30:18 cette histoire ukrainienne.
30:19 C'est nous, les Occidentaux.
30:21 Et nous, alors, justement,
30:23 le « nous » n'est même pas un « nous » unique,
30:24 c'est un double « nous ».
30:25 Il y a le « nous » européen,
30:26 et il y a le « nous » américain.
30:27 Et là, encore une fois,
30:28 on n'a pas non plus les mêmes objectifs
30:30 ou les mêmes obligations.
30:31 Et en ce sens,
30:33 je pense que, effectivement,
30:35 si les Américains, eux, ont une envie,
30:37 peut-être, de calmer le soutien,
30:40 de calmer les choses,
30:41 en tout cas de passer à autre chose,
30:42 et de s'occuper de questions plus domestiques,
30:45 on le voit avec la question du Texas,
30:46 côté européen,
30:47 nous, on continue à être,
30:50 je dirais, en guerre frontale,
30:52 parce qu'on peut dire qu'on n'est pas en guerre avec la Russie.
30:54 Moi, je crois qu'on est en guerre avec la Russie.
30:56 Pas sur le terrain, pas militairement,
30:57 mais en tout cas, diplomatiquement, économiquement, etc.
31:00 Nous sommes en guerre avec la Russie.
31:01 Et je pense qu'aujourd'hui,
31:03 l'Europe n'est pas prête à accepter ce défi,
31:06 parce que négocier,
31:07 ce serait reconnaître que tous les efforts
31:09 qui ont été faits jusque-là,
31:10 l'ont été fait en vain.
31:12 Et à mon sens,
31:13 l'Europe, nous,
31:15 nous ne sommes pas, psychologiquement,
31:17 en tout cas nos leaders,
31:18 je ne parle pas de nos populations,
31:19 mais nos leaders,
31:20 ne sont malheureusement pas prêts
31:21 à accepter de reconnaître leurs adversaires.
31:23 Donc, je pense qu'on n'est pas dans ce temps.
31:25 Pour l'instant, pas dans ce temps.
31:27 D'autant plus, je prends un exemple très récent,
31:28 dimanche dernier,
31:29 Alexander Stubb,
31:31 qui vient de remporter l'élection présidentielle finlandaise,
31:34 a soutenu que la Russie avait déjà perdu la guerre.
31:37 Donc, il dit vraiment le contraire
31:39 d'un certain nombre de personnes,
31:41 puisque l'Ukraine entrerait, selon lui,
31:43 de facto dans l'Union européenne
31:45 et dans l'OTAN, tôt ou tard.
31:47 Alors, question quand même un peu à contre-cours,
31:50 mais le bilan est-il vraiment si positif
31:52 pour Poutine et pour la Russie, Alexei Tarad ?
31:55 Je pense qu'il n'y a pas de bilan positif
31:58 ou négatif, je dirais.
32:00 On est en cours d'une opération,
32:01 elle n'est pas finie.
32:02 Le bilan se tirera à la fin.
32:04 C'est le principe du bilan,
32:05 on le tire toujours à la fin.
32:06 Là, on est à mi-chemin,
32:08 on est à plus que la moitié du chemin,
32:10 j'espère en tout cas,
32:11 et je le crois sincèrement.
32:13 Il y a deux feuilles qui seront attirées dans ce bilan
32:17 pour savoir qui a gagné.
32:18 Il y a la partie militaire,
32:20 c'est-à-dire le terrain, physiquement,
32:22 où sont les frontières à l'issue du combat.
32:26 Il suffit de regarder les cartes
32:31 pour voir que l'avancée est du côté des armées russes.
32:35 Pour l'instant, je ne vois pas comment on peut dire
32:38 que la Russie a perdu,
32:40 puisqu'elle est en train de progresser
32:42 et que l'Ukraine est militairement
32:43 sous une difficulté considérable
32:45 qui se propose à l'éventu média,
32:46 donc on ne peut pas revenir dessus.
32:47 Deuxièmement, pour savoir qui a gagné,
32:50 il faudrait parler de la diplomatie et de l'économie.
32:52 C'est peut-être un double bloc
32:55 qu'on peut composer ensemble,
32:56 diplomatie et économie.
32:57 Sur ce point-là, j'aurais tendance à dire
33:00 que peut-être on peut déjà, dès aujourd'hui,
33:04 tirer un bilan.
33:05 Malheureusement pour ce nouveau président finlandais,
33:09 je pense très clairement que Vladimir Poutine a gagné.
33:12 La Russie a gagné
33:13 parce qu'elle s'est développée économiquement
33:15 dans des mesures qui n'étaient pas imaginables avant.
33:17 Et diplomatiquement, elle a su fédérer
33:22 quasiment les trois quarts du monde
33:24 peut-être pas en soutien direct,
33:26 mais en tout cas dans une neutralité guerreveillante.
33:29 Le terme de neutralité guerreveillante
33:31 est un petit peu original,
33:34 mais en tout cas, c'est l'Occident
33:36 contre le reste du monde aujourd'hui
33:37 si on veut schématiser.
33:38 C'est ce qu'on voit avec tout ce qui a été tenté
33:41 par l'ONU, par les Nations unies
33:43 ou par les Occidentaux,
33:44 d'imposer des sanctions contre la Russie
33:46 à tous les acteurs mondiaux.
33:48 Ça n'a jamais marché pour une raison très simple,
33:50 c'est qu'il n'y a pas une unité sur la question
33:53 de l'exigence de soutien à l'Ukraine.
33:55 Ça n'a jamais marché contre la Russie.
33:58 Et bien Alexis Tarade, ce sera le mot de la fin.
34:00 Je rappelle que vous êtes ici à Moscou.
34:03 Merci beaucoup d'avoir répondu
34:05 à l'appel de Chocs du Monde.
34:07 Merci à tous d'avoir suivi ce nouvel épisode.
34:09 Surtout, je vous rappelle,
34:11 n'oubliez pas de commenter et de partager cette vidéo.
34:14 Merci encore et bonne soirée à tous.
34:17 Merci à vous.
34:18 [Musique]

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