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Hommage national à Robert Badinter : Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel est l'invité de Yves Calvi dans RTL Matin.
Regardez L'invité d'Yves Calvi du 14 février 2024 avec Yves Calvi.

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Transcription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 7h, 9h, RTL Matin.
00:06 Il est 8h22, bonjour Jean-Louis Debré.
00:10 Bonjour.
00:10 Vous êtes ancien ministre de l'Intérieur, ancien président du Conseil constitutionnel.
00:14 Merci beaucoup de prendre la parole ce matin sur RTL.
00:16 Un hommage national est donc rendu à Robert Baninter aujourd'hui, place Vendôme à Paris.
00:20 L'ancien garde des Sceaux est décédé à l'âge de 95 ans.
00:23 Avant d'évoquer le souvenir que vous gardez de Robert Baninter,
00:26 je voulais avoir votre sentiment sur ce qui fait polémique depuis hier.
00:29 La famille de Robert Baninter refuse la présence du Rassemblement national et de la France insoumise à cet hommage.
00:35 Le parti de Jean-Luc Mélenchon veut tout de même y envoyer deux députés.
00:38 Quelle est votre réaction ?
00:39 Non, moi je ne veux pas rentrer dans une polémique.
00:42 Respectons les souhaits de la famille.
00:45 Voilà, point c'est tout.
00:46 Je ne rentre pas dans cette polémique.
00:48 Un hommage national dont sont exclus une partie des Français n'est pas un image nationale.
00:52 La République est une et indivisible, a tweeté Jean-Luc Mélenchon.
00:55 Vous partagez cette analyse ?
00:56 Je pense que le moment du deuil, le moment du décès,
01:01 est un moment où les Français se rassemblent,
01:04 non pas en fonction de leur étiquette politique,
01:07 mais en fonction de leur citoyenneté de Français.
01:10 Madame Le Pen a décidé de ne pas s'imposer, ni de polémiquer, elle a raison.
01:14 Mais respectons les souhaits de la famille.
01:16 Voilà, on arrête là, je ne veux pas rentrer dans une telle discussion.
01:20 Alors, évoquons la trace que va nous laisser Robert Baninter.
01:23 Que représente-t-il pour vous, Jean-Louis Delors ?
01:26 En tant que magistrat, il a été pour moi un ténor, une voix du barreau,
01:34 un homme qui s'élevait pour la défense des libertés.
01:39 Comme avocat, comme ministre de la Justice, comme président du Conseil Constitutionnel,
01:44 il y a trois combats qui ont fait mon admiration.
01:49 C'est le combat contre la peine de mort,
01:53 parce qu'il fallait, dans un contexte qui était extrêmement hostile, oser.
02:00 François Mitterrand l'avait mis dans ses 110 propositions,
02:04 mais de toutes les propositions, toutes n'ont pas été réalisées.
02:09 Et celle-là, il s'est battu, et c'est un beau combat républicain,
02:13 c'est le combat contre la peine de mort.
02:15 - Vous étiez à ses côtés dans ce combat ?
02:17 - Alors, j'étais magistrat à l'époque.
02:19 Mais, donc, appelé à un devoir de réserve.
02:23 - J'entends bien, mais moralement ?
02:24 - Mais j'avais laissé filtrer, avec un certain nombre de camarades magistrats,
02:29 que nous étions pour.
02:30 Et François, de l'époque, avait fait un entrefilet,
02:34 disant que quelques magistrats, ils avaient cité les noms,
02:37 nous étions pour la suppression de la peine de mort.
02:41 Deuxièmement, j'ai trouvé que son combat,
02:45 qui était un combat républicain, c'est ça qui est fantastique,
02:48 contre toutes les discriminations,
02:51 et notamment certaines discriminations qui touchent,
02:54 dans certains cas, les homosexuels,
02:56 était un combat pour l'égalité.
02:58 La République, c'est la liberté.
03:01 Mais la République, c'est aussi l'égalité.
03:03 Et puis, son dernier combat, Calvi,
03:05 c'est le combat contre l'antisémitisme.
03:08 Et là, je pense qu'aujourd'hui,
03:11 dans la situation dans laquelle se trouve le monde,
03:16 il est bon de rappeler qu'il y a des hommes, depuis toujours,
03:19 qui se lèvent contre l'antisémitisme.
03:21 - Et pourtant, il était un adversaire politique.
03:24 - Mais alors ?
03:26 Mais peu importe.
03:27 Je pense que la République, elle doit rassembler,
03:30 dans un certain moment, des hommes et des femmes
03:32 qui ont des opinions différentes.
03:35 Nous sommes des républicains.
03:37 Et je crois en la liberté, comme lui croyait en la liberté.
03:40 L'égalité, elle est essentielle.
03:42 Oui, républicains.
03:43 - Est-ce que l'homme de droite que vous êtes a été influencé,
03:47 d'une façon ou d'une autre, notamment par le gouvernement ?
03:49 On l'a bien compris, je dirais, par ce...
03:52 - Mais Yves Calvi...
03:53 - Vous l'avez combattu politiquement ?
03:54 - Dans l'histoire de la République,
03:56 dans l'histoire de la République...
03:57 Oh, je ne l'ai pas combattu politiquement.
03:59 Quand j'étais au Conseil constitutionnel,
04:00 je l'ai invité au Conseil constitutionnel.
04:03 Dans l'histoire de la République,
04:04 il y a des grandes voix.
04:06 Et ces voix, elles sont...
04:10 Elles n'ont pas de parti politique.
04:12 Moi, j'ai beaucoup lu les discours de Jaurès.
04:15 J'ai beaucoup lu les discours de Victor Hugo.
04:18 J'ai beaucoup lu les discours du général de Gaulle.
04:22 Ces hommes, ils se situent au-dessus de la mêlée.
04:26 Et ils sont des points fixes.
04:28 Ce que je veux dire, c'est que...
04:29 Et c'est là où je voudrais préciser,
04:33 c'est que lorsque j'étais au Conseil constitutionnel,
04:36 je suis à l'origine d'une réforme qu'on a appelée la QPC,
04:39 qui permet aux citoyens, aux justiciables,
04:43 de saisir le Conseil constitutionnel.
04:44 Eh bien, l'idée avait été émise par Bannater.
04:48 Il ne l'avait pas appliquée.
04:50 Il n'avait pas pu la mettre en œuvre.
04:53 Et en regardant ce qu'il avait souhaité
04:57 pour l'avenir du Conseil,
04:59 il ne l'a pas fait.
05:00 C'est moi qui l'ai fait.
05:01 Et vous voyez, on peut ne pas avoir...
05:02 - Il n'y a aucune continuité, en fait, de valeur ?
05:05 - Je pense que nous sommes,
05:07 et j'espère l'être, dans la continuité républicaine.
05:11 - Emmanuel Macron réfléchit à faire rentrer Robert Bannater au Panthéon.
05:14 Est-ce que ce serait une bonne décision ?
05:16 - Écoutez, pour l'instant, ce n'est pas à moi de décider.
05:20 Je pense qu'il faut toujours honorer ces grandes voix.
05:23 Et aujourd'hui, dans le brouillard de la politique
05:27 et dans la disparition de tous ces grands personnages
05:31 qui donnaient un cap, une direction,
05:33 il est bon de rappeler aux jeunes générations
05:36 qu'il y a des hommes, des femmes, comme Simone Veil,
05:39 qui se sont élevés au-dessus des divisions politiques
05:44 pour rappeler le cap de la République.
05:46 - Et Bannater en fait partie à vos yeux ?
05:47 - Et Bannater fait partie, avec ses forces et ses faiblesses,
05:51 de celles et ceux qui avaient comme ligne de mire la République,
05:55 c'est-à-dire la liberté.
05:57 Mais il était convaincu qu'il n'y a pas de liberté sans égalité,
06:00 qu'il n'y a pas de fraternité sans liberté et sans égalité.
06:03 - Vous lui rendez un hommage vibrant ce matin sur l'antenne d'RTL.
06:06 En même temps, en tant que composant politique,
06:08 est-ce que vous n'avez pas trouvé chez lui, je dirais,
06:10 un aspect donneur de leçons qui parfois a pu vous agacer ?
06:15 - Tous les hommes politiques sont donneurs de leçons
06:17 quand ils ont des convictions.
06:19 Mais ce qui m'importe, c'est les convictions.
06:22 Et j'ai toujours reconnu en lui un homme de convictions,
06:27 peu importe qu'il n'ait pas les mêmes orientations politiques
06:33 que moi.
06:33 Mais vous savez, moi, vous dites que je suis à droite,
06:37 je suis républicain, je suis gaulliste,
06:40 et je ne me situe, je ne me sens pas bien dans les partis politiques.
06:45 - Est-ce que finalement les combats de Robert Baninter
06:47 sont plus que jamais d'actualité ?
06:49 Vous évoquiez il y a quelques instants l'antisémitisme.
06:51 - Mais je pense que le combat de l'antisémitisme aujourd'hui,
06:54 le combat pour la tolérance, le combat pour la laïcité,
06:58 sont des combats essentiels.
07:00 Et donc, rappelons celles et ceux qui ont accroché leur vie
07:06 à ce combat pour la liberté,
07:08 et la liberté de croire ou de ne pas croire.
07:10 - Une grande voix de l'histoire de la République,
07:12 nous avez-vous dit, concernant Robert Baninter.
07:14 Merci beaucoup Jean-Louis Debré d'avoir pris la parole
07:16 ce matin en direct sur RTL.
07:17 Bonne journée.
07:18 [SILENCE]

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