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00:00 - Axel Alitru, bonjour. - Bonjour. - Merci d'être avec nous ce matin.
00:03 Vous vous êtes réveillé, déplacé avant un entraînement parce que vous allez courir à l'an du repas du Duké Pas-de-Calais.
00:10 Motocross, évidemment. Est-ce qu'on peut juste résumer votre histoire parce qu'elle est particulière ?
00:15 - Effectivement. Alors, je suis du Nord, déjà.
00:18 Je me décris souvent comme l'homme aux plusieurs vies. J'ai pratiqué beaucoup de sports de haut niveau.
00:22 BMX, où j'étais trois fois champion d'Europe et trois fois champion du monde. Motocross, où j'étais vice-champion du monde junior.
00:28 Et malheureusement, l'accident le 27 juin 2010 où j'ai perdu l'usage de mes jambes. Et donc là, je deviens, en 2010,
00:36 le diagnostic tombe, je suis paraplégique. Donc, paraplégique, ça veut dire perdre l'usage de ses jambes.
00:40 - D'accord. Pour gagner une seconde sur une bosse, m'a-t-on dit, c'est ça ?
00:44 - Ah bah, comme je dis souvent,
00:45 en une fraction de seconde, tout bascule.
00:48 À 20 ans, on n'a pas conscience qu'une demi-seconde pour le reste de ses jours, ce n'est rien.
00:52 Et là, j'ai décidé, fou furieux, de ne pas lâcher les gaz et
00:55 le verdict est sans appel.
00:58 - D'accord. Et aujourd'hui, vous dites, j'ai envie de gagner l'Enduropal,
01:01 qui va débuter donc vendredi jusqu'à dimanche, et vous allez participer à l'Enduropal. Racontez-nous.
01:06 - Alors, gagner, je ne sais pas, c'est peut-être un peu prétentieux.
01:08 - Si vous pouvez, c'est pour gagner.
01:10 - Déjà, j'ai récupéré
01:13 20% des muscles des jambes depuis toutes ces années,
01:15 ce qui est déjà un miracle. Et j'ai des attelles qui me permettent de pallier à mes muscles qui sont paralysés pour me mettre debout,
01:21 donc des attelles en carbone.
01:22 Et aujourd'hui,
01:24 j'ai la possibilité de me mettre un petit peu debout et marcher avec des béquilles.
01:27 Et grâce à ces muscles que j'ai récupérés, j'ai eu l'occasion de remonter sur une moto, moto adaptée à mon handicap,
01:34 avec des commandes non plus au niveau des pieds, mais au guidon, pour passer les vitesses, pour freiner.
01:40 Et aujourd'hui, j'ai eu l'envie de boucler la boucle et de participer
01:45 à une course qui m'est chère, parce que je suis du Nord et j'ai jamais pu faire l'Enduropal du Touquet.
01:49 Donc, j'ai envie de remonter sur une moto et être avec les valides. Donc, c'est une première historique,
01:53 et de faire le départ de l'Enduropal le 4 février prochain.
01:57 - Voilà, la grande course,
01:58 au guidon d'une moto électrique, m'a-t-on dit.
02:01 - Alors, j'ai développé plus facile pour moi, parce que, évidemment, avec mon handicap,
02:06 il n'y a pas moins de risque de caler,
02:09 pour le passage de vitesse, c'est beaucoup plus facile.
02:13 Donc, aujourd'hui, j'ai envie d'envoyer un message fort, et avec le hashtag #JePeux2024.
02:19 - Voilà, il y a un grand symbole, il y a un gros symbole derrière vous, c'est-à-dire que vous allez
02:22 concourir aux côtés des valides. Il y a une petite appréhension ?
02:26 - Évidemment, il y a toujours une appréhension sur des épreuves comme le Touquet, 1300 pilotes au départ, ce n'est pas rien.
02:32 Je pense que je suis la seule personne handicapée,
02:37 donc, voilà, c'est un défi pour les organisateurs, pour moi. J'ai dû passer ce qu'on appelle une licence officielle,
02:43 donc j'ai dû démontrer que j'étais apte à ramasser ma moto, ne pas être un danger pour moi-même et pour les autres.
02:49 Donc, ça, ça a été un énorme verrou à lever pour que je puisse être apte à rouler avec eux.
02:54 - Quand vous contactez l'organisation pour dire "voilà, moi je veux le faire, je suis en capacité de le faire",
02:58 alors, bien sûr, avec une machine un peu adaptée, on vous a dit "oui" tout de suite ? On vous a dit "c'est une excellente idée" ?
03:02 - Alors, c'est plus compliqué que ça.
03:06 Certains disent "oui", d'autres ne veulent pas dire "non", mais il y a tout un système d'assurance, un système de logistique,
03:13 des appréhensions. Quand on va arriver en fauteuil roulant, on s'imagine jamais que je peux monter sur une moto.
03:20 Donc, aujourd'hui, j'ai dû démontrer beaucoup de choses. On a co-travaillé ensemble pour qu'on puisse organiser ça au mieux.
03:27 Et je pense que cette première, j'espère en tout cas, ouvrira d'autres personnes handicapées par l'avenir.
03:34 Donc, c'est pour ça, on veut que ça se déroule bien, pour que ça puisse continuer et non pas qu'il y ait une mauvaise expérience dès la première fois.
03:40 - Axel, c'est quoi le programme à partir d'aujourd'hui, mercredi jusqu'à dimanche, heure de la grande course,
03:45 retransmise en direct sur France Bleu et sur France 3, où nous sommes d'ailleurs. C'est quoi le programme ?
03:48 Beaucoup d'entraînement, vous allez à l'enduro, comment ça va se passer ?
03:52 - Alors, gros programme, pas de tout repos. Aujourd'hui, dernier entraînement, validation de la machine.
03:57 Demain, on a à 10h la photo officielle avec l'équipe Yamaha.
04:02 Puis après, les vérifications techniques. Puis ensuite, on a toute la partie repérage du circuit, les médias,
04:09 organiser tout le stand. Et après, samedi, un peu plus repos. Et après, dimanche matin, on est parti.
04:16 - Vous êtes focus à partir de quand sur la course, samedi soir, dimanche matin ?
04:19 - Je pense que déjà, le samedi soir, la pression monte. Donc, on ne va pas se coucher tard.
04:23 On va bien manger, aller se coucher de bonne heure et puis être prêt pour le lendemain.
04:27 Essayer de visualiser. Je parle beaucoup dans mes conférences de visualisation.
04:31 Donc là, la veille, je vais essayer vraiment de visualiser la course parfaite.
04:34 - De votre côté, je vais faire un parallèle. Est-ce que vous sentez aujourd'hui beaucoup d'intérêt,
04:39 beaucoup d'engouement, beaucoup d'attention, la part du grand public pour, par exemple, les sports paralympiques,
04:45 les sports adaptés ? Est-ce que vous sentez ça aujourd'hui de plus en plus de votre côté ?
04:49 - En 2010, entre 2010 et aujourd'hui, j'ai vu une énorme évolution.
04:53 Parce qu'aujourd'hui, le monde avec les jeux paralympiques 2024, ça a énormément évolué.
05:00 Je pense qu'il y a un intérêt encore plus fort quand on fait une performance avec les valides.
05:06 Parce que c'est vrai que dans le handisport, il y a beaucoup de classifications.
05:09 Même moi qui suis dans le handisport, j'ai parfois du mal à comprendre.
05:12 Et ce qui est normal pour le grand public.
05:13 Et donc, je pense que parfois pour les médias ou pour le grand public,
05:16 c'est plus facile de voir une performance avec des personnes valides
05:20 où les gens peuvent se rendre compte de ce qu'on fait.
05:23 Mais en tout cas, je vois que les choses évoluent.
05:24 Et je suis sûr qu'après Paris 2024, on passera encore un step.
05:29 Donc voilà, et quoi de mieux pour ma part, en tout cas, de pouvoir partager un message fort
05:33 de résilience à travers l'enduropal avec ces 3 300 pilotes.
05:37 - Est-ce que vous, vous vous rendez compte de la difficulté du challenge ?
05:40 Ou pour vous, c'est naturel ? Vous dites "bon, allez, je le fais".
05:43 C'est un coup de folie ou c'est bien réfléchi ?
05:45 - Non, souvent on me dit que c'est un coup de folie.
05:46 Non, je ne me suis pas levé un matin en me disant "tiens, aujourd'hui, j'ai fait un enduropal".
05:49 - Pourquoi pas ?
05:50 - Ça fait quand même 2 ans que je travaille sur ce projet.
05:53 En 2022, j'avais été repéré un petit peu sur la grille de départ,
05:57 voir comment se passent les procédures de départ, savoir si j'étais apte.
06:01 Et j'ai vu que c'était potentiellement possible.
06:03 Et à partir de là, je me suis dit "bon, maintenant, on va construire un projet".
06:06 Je suis allé voir les marques, je suis allé voir les organisateurs.
06:09 Et aujourd'hui, au fur et à mesure, on a pris conscience que c'était possible.
06:14 Et voilà, ce n'est pas un coup de folie en disant "bon, je suis dépressif,
06:18 j'ai envie de faire un départ et tenter le tout pour le tout".
06:20 Loin de là, c'est très très réfléchi.
06:22 - Numéro de Dossard, vous l'avez déjà ou pas le numéro de Dossard ?
06:24 - 22.
06:25 - 22. On va vous suivre parce que toutes les équipes de France Bleu et de France 3 seront là pour suivre le départ,
06:31 pour suivre la grande course.
06:32 Ça sera télévisé sur France 3 Nord Pas-de-Calais où nous sommes en ce moment
06:35 et sur France Bleu Nord en direct.
06:36 Dossard numéro 22, Axel Aletru.
06:39 La petite particularité, si je peux parler comme ça, c'est qu'il est paraplégique,
06:43 mais il va vivre, il va faire l'enduro aux côtés des autres coureurs.
06:48 On croise les doigts ?
06:49 - On croise les doigts.
06:50 - Moi, je suis sur la ligne d'arrivée.
06:51 Je vous promets, je suis sur la ligne d'arrivée dimanche.
06:53 Et je vous attends avec le micro et avec les caméras.
06:55 - Ah, c'est la ligne d'arrivée, je ne sais pas.
06:56 Comme je dis souvent, je prends les objectifs au fur et à mesure.
06:59 Il ne faut pas forcément se donner un objectif clair parce que ça évolue tellement au fur et à mesure de la course.
07:03 Mais en tout cas, je pense que la première performance déjà,
07:06 on peut tous le dire, c'est d'être déjà au départ avec les valides.
07:08 C'est déjà extraordinaire.