• il y a 10 mois

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Transcription
00:00 Comment la drogue parvient dans l'enceinte ?
00:02 Le premier point qu'il faut absolument expliquer, c'est qu'il n'y a malheureusement aucun établissement pénitentiaire en France
00:09 qui n'est épargné par cette perméabilité,
00:13 et qui fait que nous découvrons quotidiennement de la drogue dans nos détentions.
00:18 La maison d'arrêt de Besançon est un établissement de centre-ville,
00:22 à proximité d'habitation,
00:25 et plus particulièrement d'un immeuble qui se trouve au sud de la structure.
00:31 C'est une copropriété qui a un accès depuis l'extérieur très aisé,
00:36 puisqu'il s'agit d'un portail d'une petite hauteur,
00:39 et donc les projeteurs escaladent ce portail pour se présenter au pied du mur de la maison d'arrêt et de projeter.
00:46 Donc vous nous dites d'une certaine façon que c'est impossible à sécuriser totalement ?
00:50 Alors je ne dis pas ça, j'expose déjà la présentation de l'établissement au sein de cette ville,
00:55 qui permet donc des accès très faciles pour les projeteurs,
00:58 sur des véhicules les plus simples possibles, que ce soit des scooters ou même des vélos.
01:03 Le sujet est quand même pris en compte, bien évidemment, puisque la drogue en détention c'est une hérésie, dirais-je,
01:10 mais c'est une réalité qui concerne tous nos sites.
01:13 Donc je ne voudrais pas qu'on considère que cet établissement est une sorte de laissé pour compte.
01:18 Vous dites que c'est perméable, mais ce n'est pas pire qu'ailleurs ?
01:21 Je le dis, oui effectivement, puisque j'ai une expérience aujourd'hui, je suis directeur depuis 2009,
01:26 c'est mon quatrième établissement, donc le sujet de la drogue nous préoccupe en permanence quand on écheuve l'établissement.
01:31 Comme ailleurs, dans la maison d'arrêt de Besançon, on a un peu plus de 400 détenus, c'est ça à Besançon ?
01:37 Alors ce matin on est à 434 personnes détenues, donc écrouées à la maison d'arrêt de Besançon,
01:42 dont 8 personnes détenues mineures, ce qui nous conduit à avoir des matelas au sol.
01:47 Oui, parce qu'on est largement au-dessus, on est quoi ?
01:50 On est à une capacité théorique d'hébergement à hauteur de 276 personnes détenues.
01:55 Très largement au-dessus de ce que normalement devrait accueillir la prison.
01:58 Donc on est à 166% de taux d'occupation avec des matelas au sol, ce qui est une situation extrêmement compliquée.
02:03 Mais là aussi, malheureusement, je suis désolé, c'est le parc national pénitentiaire qui est aussi aujourd'hui sur son volet maison d'arrêt.
02:09 Donc maison d'arrêt, maison d'arrêt de Besançon, on incarcère les personnes prévenues et les personnes condamnées en attente de départ sur des établissements long peine.
02:17 Le parc maison d'arrêt est donc effectivement assez saturé, voire parfois débordé en France,
02:23 puisqu'une maison d'arrêt a vocation à accueillir tout écrou ordonné par l'autorité judiciaire.
02:29 Les établissements pour peine, eux, accueillent s'il y a de la place. Donc c'est le principe du numéro exclusus.
02:34 - Camille Lagoy, une fois qu'on a dit que ce n'est pas qu'à Besançon, que dans toutes les maisons d'arrêt en France c'est comme ça,
02:40 on se résigne, on est fataliste ? Ou non, qu'est-ce qui pourrait être fait ?
02:43 Est-ce qu'il y a des détenus qu'il ne faut plus accepter demain ? Qu'est-ce que vous vous défendez finalement comme solution
02:48 pour éviter d'en arriver avec des détenus qui dorment sur des matelas, avec une perméabilité que ce soit pour la drogue ou pour d'autres choses,
02:54 et à l'incapacité finalement des surveillants de faire le travail puisqu'ils sont trop peu nombreux, ils nous le disent ce matin, par rapport à la population carcérale ?
03:01 - Alors bien évidemment, l'effectif des personnels est calibré en fonction du nombre de personnes que l'établissement peut accueillir.
03:10 Si l'inflation carcérale est active, bien évidemment que l'administration n'est pas en mesure d'affecter des personnels dans un délai très court.
03:18 - Ils étaient trois par exemple, lorsque le détenu s'est suicidé, trois pour plus de 400 détenus la nuit, c'est très très peu.
03:24 - Ils étaient trois parce qu'un autre équipage est parti à l'hôpital de Besançon pour conduire une personne détenue qui présentait des risques.
03:35 Mais l'organigramme du service de nuit, il est calibré ainsi, on a donc en service de nuit, de 19h à 7h du matin, six personnels de surveillance et un premier surveillant.
03:45 C'est ainsi, c'est un chiffre qui est calibré à un certain moment de l'ouverture de l'établissement, dans son fonctionnement,
03:53 mais bien évidemment ces données-là ont vocation aussi à évaluer par ce qu'on appelle un travail sur l'organigramme de référence, par rapport à un organigramme souhaité.
04:02 Donc ce travail a été fait depuis mon arrivée à la maison de rat de Besançon, depuis le 1er mars dernier, on attend les résultats.
04:08 J'ai bon espoir qu'il y ait des améliorations dans ce sens-là, d'autant plus qu'à partir de depuis le 1er janvier 2024,
04:16 on pourra recruter des personnels pénitentiaires sous un format contractuel.
04:20 Je sais que ce sujet fait polémique, mais c'est quand même pour des chefs de structure une marge de manœuvre supplémentaire.
04:26 - Oui c'est une solution de recruter des contractuels.
04:28 J'ai envie de dire de façon triviale, est-ce que vous ici à Besançon ne pouvez pas s'appuyer sur ces détenus morts pour réclamer des moyens supplémentaires ?
04:36 Comment vous pouvez défendre finalement le cas de la maison d'arrêt de Besançon auprès de l'administration pénitentiaire pour dire non,
04:41 mais là à Besançon ce n'est plus possible, on a eu trois morts en 15 jours, pour obtenir des moyens, puisque visiblement c'est un petit peu comme ça que ça fonctionne ?
04:49 - Alors, très honnêtement madame, si la solution afin de prévenir les décès en détention était le recrutement des personnels,
04:58 je pense qu'on aurait là peut-être une solution, dirais-je.
05:04 Moi ce que je souhaite par rapport à cette actualité effectivement triste et tragique,
05:08 d'abord c'est renouveler mes condoléances auprès des familles des trois personnes détenues décédées,
05:14 auprès de leur entourage, mais aussi si je peux me permettre, adresser un soutien à mes personnels qui ont été extrêmement présents lors de ces deux drames.
05:22 Mais je rappelle aussi, et je ne veux pas non plus entrer dans un sujet autour de comparaison entre ce qu'on a réussi à prévenir et malheureusement ce qu'on a dû constater,
05:31 il y a aussi des situations où des personnes détenues en grande détresse, sont, comment dirais-je, rattrapées,
05:38 parce qu'il y a autour d'eux une prise en charge collective, depuis les SPIP, le service médical et les personnels en tenue.
05:45 - Vous voulez dire une prise en charge peut-être psychiatrique qui n'est pas suffisante ?
05:48 - Elle l'est, mais je rappelle aussi que dans des circonstances où les personnes détenues sont dans une détresse extrême,
05:57 il est parfois, je vous dis honnêtement, impossible de mesurer l'étape psychologique.
06:02 Tout est fait, on a ce qu'on appelle des réunions pluridisciplinaires où les avis des uns et des autres sont rassemblés, étudiés,
06:08 après que chacun ait rencontré les personnes détenues, et ensuite on essaie de mettre en place de l'accompagnement,
06:14 des affectations en cellules qui sont ciblées selon les profils, et bien évidemment, tout ça est regardé, contrôlé.
06:23 Tout décès en détention conduit à une enquête judiciaire, c'est le cas actuellement pour les trois personnes.
06:29 Suite à cela, sur le volet administratif, on doit nous opérer ce qu'on appelle des rétex, donc des retours sur expérience,
06:35 où l'ensemble des acteurs concernés par ces sujets-là sont présents autour d'une table,
06:40 et on voit un petit peu ce qui a mal fonctionné, ce qui a bien fonctionné, ce qui a mal fonctionné,
06:46 si c'est le cas, on essaye de le corriger, et moi en tant que responsable, j'ai un devoir d'assumer cela,
06:53 et si les choses se sont mal déroulées, j'en assumerai la responsabilité.

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