Pierre-Henri Dumont, député "Les Républicains" du Pas-de-Calais.
l a été élu maire Les Républicains à 26 ans, député à 29: Pierre-Henri Dumont est un jeune-homme pressé qui ne s'embarrasse pas toujours des bonnes manières en politique. Son ambition: changer le logiciel de la droite.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !
l a été élu maire Les Républicains à 26 ans, député à 29: Pierre-Henri Dumont est un jeune-homme pressé qui ne s'embarrasse pas toujours des bonnes manières en politique. Son ambition: changer le logiciel de la droite.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
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Car on ne naît pas politique, on le devient !
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00:00 -Il a été élu maire à 26 ans, député à 29.
00:04 Mon invité est un jeune homme pressé
00:06 qui ne s'embarrasse pas forcément des manières en politique.
00:10 Son ambition, changer le logiciel de la droite.
00:12 Musique intrigante
00:15 ...
00:26 -Bonjour, Pierre-Henri Dumont. -Bonjour, Clément Méric.
00:30 -Vous nous regardez ou nous écoutez en podcast,
00:32 vous me maudirez, car on va commencer par une chanson
00:35 qui reste dans la tête toute la journée.
00:37 Vous voyez de quoi je parle. -Je vois.
00:40 -C'est le fameux lip-dub des jeunes de l'UMP,
00:42 qui a été lancé fin 2009.
00:44 Vous allez sans doute reconnaître l'un des interprètes.
00:47 ...
01:16 On a reconnu Rachida Dati, Patrick Deveggian, Ramayad,
01:20 mais on s'est permis de faire aussi un arrêt sur image
01:23 sur un jeune homme, l'un des interprètes.
01:25 On le voit ici en train de taper sur un djembé.
01:28 Vous le reconnaissez.
01:29 -Oui, c'était mes années militantes.
01:32 Ca reste un beau souvenir.
01:33 Bon, il y a eu un bad buzz sur le lip-dub,
01:36 mais au final... -Beaucoup de gens
01:38 s'en sont moqués. -Oui, mais au final,
01:40 on a pris énormément de plaisir à le tourner.
01:42 Il y a eu un décalage dans la diffusion.
01:45 A la fin des trois jours du campus des jeunes,
01:47 où on partait dans le train, c'est le train allé,
01:50 ça a été diffusé trois mois après,
01:52 au moment des fêtes de Noël.
01:54 La crise financière est arrivée, le contexte n'était pas le même.
01:57 Honnêtement, c'est aussi un symbole des années jeunes pop.
02:00 On était un grand mouvement jeune, 30 000 jeunes.
02:03 -A l'époque, vous aviez 22 ans,
02:05 vous aviez des responsabilités au sein du mouvement
02:08 des jeunes populaires de l'UMP.
02:10 Vous avez pris votre carte à l'UMP à 17 ans.
02:12 Comment vous avez motivé un adolescent
02:14 à s'engager dans un parti politique aussi jeune ?
02:17 -Une personnalité, c'était Nicolas Sarkozy.
02:20 Son dynamisme... Je me souviens de joutes
02:22 que je regardais à la télévision chez moi
02:24 quand j'étais plus jeune, contre H. Ramadan,
02:27 contre J.-M. Le Pen, où il écrasait le match.
02:29 C'était cette volonté, cette envie de changement,
02:32 de faire, qui m'a vraiment happé,
02:34 c'est pour ça que j'ai pris ma carte.
02:36 -Il y avait aussi un terreau familial
02:38 qui était propice, on va dire.
02:40 Vos parents vous ont un peu fait baigner
02:42 dans la culture gaulliste RPR, c'est ça ?
02:45 -Oui, mes parents étaient tous les deux des adhérents RPR.
02:49 Pour certains, ils ont été candidats à des élections.
02:52 La photo de mon père, c'était une cantonale en 82 ou 83,
02:55 dans un canton de Calais.
02:58 On l'appelait l'Ège Valéza, à l'époque.
03:00 -C'est vrai, il a un petit côté Valéza avec la moustache.
03:03 -Du coup, oui, c'était un terreau RPR, militant.
03:07 -Vous alliez même aux réunions du RPR,
03:10 à 7 ans. -Oui, c'était l'anecdote.
03:12 -Avec le T-shirt "Les jeunes avec Chirac".
03:15 -C'était la soirée électorale de 95,
03:17 l'élection présidentielle de 95,
03:19 et je me suis retrouvé avec un T-shirt.
03:21 "Les jeunes avec Chirac", dans un garage de Calais
03:24 qui avait été loué pour faire une permanence de campagne locale
03:28 pour les élections présidentielles.
03:30 J'ai baigné dans un terreau RPR, de droite,
03:32 mais par des parents qui incarnent aussi
03:35 cette envie de travailler, de toujours faire plus,
03:38 qui ont créé leurs propres entreprises,
03:40 qui sont partis de rien et qui ont réussi.
03:43 C'est aussi cette tradition, cette histoire familiale
03:46 que je cherche à honorer par mon engagement politique.
03:49 -Sur le papier, vous avez un parcours assez classique.
03:52 Il y a eu "Les jeunes pop", "Sciences Po Paris",
03:54 vous avez été collaborateur d'un député à l'Assemblée,
03:58 mais votre parcours est devenu une exception
04:00 pour les gens issus des classes moyennes,
04:03 et vous en faites un combat politique
04:05 au coeur de votre engagement.
04:07 -L'angle que je prends et la ligne directrice
04:09 que je me fixe pour mon engagement politique,
04:12 c'est faire en sorte que n'importe quel gamin,
04:14 dans le Pas-de-Calais, à Calais, dans Calaisie,
04:17 qui a envie de faire des études supérieures,
04:20 soit en mesure de pouvoir le faire.
04:22 Il ne faut pas que l'argent soit un frein.
04:24 Il faut être bien orienté, mais il y a aussi une question
04:27 de moyens publics. Les lycées, chez moi,
04:30 ne forment pas à rentrer dans des classes prépa,
04:33 à passer des concours. -Au lycée,
04:35 vous avez compris, la fac de sciences politiques
04:37 et pas l'école à Paris. -Exactement.
04:39 Du coup, moi, ce que je dis, c'est qu'il faut déjà
04:42 que tous les lycées forment aux mêmes choses,
04:45 pas simplement avoir le bac, mais préparer les études supérieures.
04:49 Là où on peut aider, c'est ce que j'ai fait dans ma commune
04:52 de Marconcalésie, quand j'étais maire,
04:54 quand un gamin de la ville veut faire des études en Erasmus
04:58 à l'étranger, on peut donner des bourses
05:00 qui vont jusqu'à 10 000 euros, on aide à passer le BAFA.
05:03 En gros, on donne les moyens aux jeunes de se réaliser.
05:06 -Il y a eu une nouvelle étape dans votre engagement en politique,
05:10 franchie en 2014. Vous vous êtes présenté
05:12 à la mairie de Marques, près de Calais.
05:15 C'est une ville historiquement ancrée à gauche.
05:17 Vos parents étaient convaincus que vous alliez perdre.
05:20 Pendant toute la campagne, vous avez martelé
05:23 que vous étiez le candidat le plus compétent.
05:25 A 26 ans, il faut un sacré culot pour faire ça,
05:28 parce que vous avez été élu. -Oui, j'ai été élu.
05:31 J'ai été élu conseil municipal d'installation en mars 2014.
05:34 J'ai été élu parce que les habitants de la ville
05:37 m'ont fait confiance. C'est une ville historiquement de gauche.
05:40 -Dire à 26 ans que c'est le plus compétent,
05:43 c'est factuel. -Non, c'est factuel.
05:45 J'étais face à des personnes qui avaient fait le travail de la ville,
05:49 qui commençaient à stagner, se transformaient en cité-dortoir.
05:52 Je suis arrivé avec un autre programme.
05:55 En effet, il faut quand même un peu de culot
05:57 pour arriver, débarquer comme ça.
05:59 C'est ma ville natale, c'est là où j'ai grandi.
06:02 Je faisais des allers-retours, car je travaillais à Paris la semaine,
06:06 mais c'était vraiment une belle aventure.
06:08 Le mandat de maire est le plus beau mandat
06:10 qu'on peut exercer dans la République.
06:13 On est aux prises avec les besoins du territoire.
06:15 C'est pour ça que, quand j'ai été élu député en 2017,
06:18 j'ai gardé mon mandat de conseiller municipal
06:21 et j'ai abandonné le mandat de conseiller départemental.
06:24 -Du culot, vous en avez eu aussi lors de vos premiers voeux
06:27 et vous avez convié tous les élus de l'agglomération
06:30 et vous leur êtes rentré dedans assez violemment.
06:33 On voit les articles de presse de l'époque,
06:35 ça fait la une des journaux localement.
06:38 C'est votre style en politique ? On cogne d'abord,
06:40 on discute après, éventuellement ? -Exactement.
06:43 Ma devise en politique, c'est d'abord on gueule
06:46 et après, on discute. Et là, je vais être très clair.
06:49 C'est efficace. Je vais vous dire ce qui s'est passé
06:52 après la cérémonie des voeux. J'ai visé trois cibles.
06:55 La première cible, c'était le président d'agglomération
06:59 de l'époque qui avait augmenté les impôts des ménages,
07:02 alors que moi, je les diminuais.
07:03 Les habitants disaient qu'ils ne voyaient pas la différence,
07:07 parce que pour eux, ça revient au même.
07:09 On s'est aperçu, après des rapports,
07:11 qu'il y avait de la cavalerie budgétaire.
07:14 J'ai soulevé un lièvre qui a coûté sa place
07:16 au président d'agglomération. On n'était plus investis.
07:19 Les investissements dans l'agglomération
07:22 avaient été gelés à cause de l'explosion
07:24 de la cavalerie. C'est la question de l'Etat et de Calais.
07:27 J'avais mis en doute la création du camp Jufféry,
07:30 qui a mené à la création de la fameuse jungle à Calais,
07:33 la frontière entre Calais et Marc.
07:35 10 000 personnes dans un bidonville.
07:37 J'avais alerté sur le fait que ça allait devenir ce que c'est devenu.
07:41 -On a vu vos premiers voeux musclés en tant que maire.
07:44 En 2017, à peine élu député,
07:46 vous avez aussi un peu secoué le cocotier,
07:49 mais cette fois, dans votre propre parti,
07:51 avec l'ambition de prendre la place des anciens, on va dire.
07:55 Votre mot d'ordre, c'est un peu plassogène.
07:57 C'est une forme de dégagisme, presque.
08:00 -Non, c'est pas plassogène.
08:01 C'est de dire que tout le monde doit trouver sa place.
08:04 C'est pas parce qu'on vient d'être élu
08:07 qu'on débarque de territoires où il n'y avait jamais eu d'élus
08:10 ou très peu, que ce soit moi dans le Pas-de-Calais,
08:13 Aurélien dans l'autre,
08:14 que ce qu'on dit n'est pas moins vrai
08:17 que ceux qui sont présents depuis longtemps.
08:19 Maintenant, en effet, qu'on a un peu vieilli tous,
08:22 pris un peu plus d'assurance,
08:24 c'est de pouvoir expliquer que le logiciel de la droite
08:27 doit changer, qu'on doit pas parler
08:29 aux classes moyennes supérieures,
08:31 mais qu'on a un terreau de gens de droite
08:33 qui sont nos électeurs dans nos circonscriptions,
08:36 qui croient dans la valeur travail,
08:38 qui se lavent tôt le matin pour travailler,
08:41 qui ne gagnent pas des milliers,
08:42 qui ont besoin de propositions, de textes de la droite.
08:46 -C'est cette idée-là,
08:47 c'est ce projet politique-là que vous portez,
08:50 vous, les jeunes trentenaires,
08:52 parce que vous formez un petit groupe
08:54 au sein du groupe Les Républicains.
08:56 Il y a qui, d'ailleurs, dans ce groupe ?
09:00 -Il y a plusieurs personnes.
09:01 C'est principalement des personnes qu'on connaissait déjà
09:04 avant de venir à l'Assemblée nationale,
09:07 c'était dans les réseaux jeunes populaires.
09:09 On en voit certains sur les photos,
09:11 c'est la précédente législature.
09:13 Evidemment, Julien Diff,
09:15 responsable départemental des jeunes de l'Aisne,
09:17 comme dans le Pas-de-Calais,
09:19 Aurélien, dans le Lot, Yann, dans le territoire de l'Ulfa.
09:22 -Yann Boucard.
09:23 -On est un petit groupe.
09:24 Géographiquement, on est déjà avec nos bureaux
09:27 côte à côte depuis le mandat.
09:29 Après, on s'entend bien, parce qu'on partage, à nage,
09:32 des territoires qui ne sont pas évidents,
09:34 qui ont à peu près les mêmes caractéristiques
09:37 d'un point de vue sociologique.
09:38 Et puis, ce côté un peu, on est débarqués de nulle part
09:41 et on essaie d'imposer un style peut-être un peu différent,
09:45 mais on en a besoin.
09:46 Aujourd'hui, la droite, c'est moins de 5 % en élection.
09:49 Soit on continue comme on fait depuis 15 ans,
09:51 dire toujours les mêmes choses,
09:53 et se retrouver dans une situation où on n'intéresse plus personne.
09:57 Soit on essaie de changer le logiciel,
09:59 faire comprendre que la population,
10:01 les Françaises et les Français ont évolué,
10:03 et que la droite doit toujours, en gardant ses valeurs,
10:06 proposer autre chose.
10:08 Le paroxysme, c'était la réforme des retraites.
10:10 On avait un axe sur la question des carrières longues.
10:14 On a pas voté le parti pour embêter la droite.
10:16 C'est pour dire que nous, on va pas commencer par pénaliser
10:19 ceux qui ont commencé en apprentissage,
10:21 ceux qui ont commencé le plus tôt,
10:23 et pas pénaliser les cadres et les cadres subs,
10:26 ceux qui ont fait les plus longues études,
10:28 mais on peut pas avoir un deux-poids-deux-mesures.
10:31 -C'est cette idée de renouer avec les classes populaires
10:34 qui a fait que, dans ce petit groupe,
10:36 vous avez tous voté la motion de censure contre le gouvernement
10:40 à l'occasion de cette réforme des retraites.
10:43 Vous avez respecté la consigne adoptée
10:45 à la majorité au sein de votre groupe.
10:47 -La Constitution dispose qu'il n'y a pas de mandat impératif.
10:50 -La politique, c'est aussi respecter un collectif,
10:53 le fait majoritaire. -L'engagement que j'avais pris
10:56 devant mes habitants, c'est celui que j'avais écrit
10:59 noir sur blanc lors de ma campagne électorale.
11:02 J'ai respecté mon engagement, pris devant mes électeurs,
11:05 et j'ai pas pris un engagement devant mon groupe.
11:08 -On va passer à notre quiz.
11:09 Le principe est assez simple.
11:11 Vous proposez des phrases et vous allez devoir les compléter.
11:15 C'est bon pour vous ? -Allez.
11:16 -Rien de tel qu'une partie de FIFA pour...
11:19 -Tisser le lien avec les jeunes et pour se détendre.
11:22 -Ouais, parce qu'en fait, à plusieurs reprises,
11:24 vous avez organisé des défis,
11:26 vous avez défié les jeunes de votre circonscription.
11:29 Venez défier votre député à FIFA. Ca marche ?
11:31 Vous arrivez à les intéresser à la politique ?
11:34 -Oui, mais en tout cas, on peut échanger sur leur quotidien,
11:37 et ça me donne des billes pour comprendre ce qui se passe.
11:41 Je suis peut-être jeune, mais ça fait longtemps
11:43 que j'ai pas mis les pieds dans une classe de BTS,
11:46 donc c'est aussi le moyen de savoir ce qui se passe
11:49 et échanger de façon plus détendue.
11:51 -Quand les sénateurs de droite me qualifient de sale gosse...
11:54 -Ils ont parfaitement raison.
11:56 -Vous êtes un sale gosse, vous l'assumez.
11:58 -Oui, mais... -Ils ont dit ça
12:00 quand vous avez voulu aligner leur régime de retraite
12:03 sur celui des députés. -Ce qui est normal.
12:05 Je le referai aujourd'hui.
12:07 -Enfin, si je fais trois mandats de député,
12:10 est-ce qu'il y en aura un quatrième ?
12:12 -C'est pas moi de le décider.
12:13 -Vous aviez pris un engagement. -Oui, c'est vrai.
12:16 -Vous aviez dit deux ou trois mandats,
12:18 mais après, je ferai autre chose.
12:20 -Non, l'envie de faire autre chose est toujours présente.
12:24 Député, ça prend du temps sur la vie privée, familiale,
12:27 sincèrement, et je vais arriver à un âge,
12:29 déjà à la fin de ce mandat, je reprocherai les 40 ans.
12:33 -Ouh là ! -Non, mais voilà,
12:34 je suis pas marié, j'ai pas d'enfant,
12:37 j'ai besoin de construire une vie privée, familiale.
12:40 -Peut-être qu'il n'y aurait pas de question.
12:42 -C'est une question qui m'étarode,
12:44 mais aussi beaucoup de députés de ma génération.
12:47 Quand on est arrivés à l'Assemblée, on n'était pas mariés,
12:50 contrairement à d'autres députés qui, eux,
12:53 venaient en milieu de parcours politique
12:55 où ils avaient déjà construit une vie familiale.
12:58 -Merci, Pierre-Henri Dumont.
13:00 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
13:02 Générique
13:04 ...