Alexandra Bensaid reçoit la comédienne Laure Calamy à l'occasion de la sortie du film "Iris et les hommes".
Retrouvez les entretiens de 7h50 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50
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00:00 Son nouveau film « Iris et les hommes » sort demain en salle et on y rit, on y sourit
00:04 beaucoup comme elle qui a la joie contagieuse.
00:07 Bonjour leur calamis, bienvenue, bonne année !
00:09 Bonjour Alexandra Benzaie, bonne année !
00:13 Comédienne de théâtre, arrivée il y a 10 ans à l'image avec la série 10%, devenue
00:18 premier rôle au cinéma, César de la meilleure actrice en 2021 pour le formidable Antoinette
00:23 dans les Cévennes.
00:24 Vous retrouvez donc sa réalisatrice Caroline Vignal pour raconter cette fois l'histoire
00:29 d'Iris.
00:30 Iris c'est une cadrage énergue qui ne vit plus rien au lit avec son mari, pourtant
00:34 bel homme, c'est Vincent Elbaz.
00:36 Depuis des années, elle décide donc de s'inscrire sur une application de rencontre.
00:40 Elle reconquiert sa sexualité, sa désirabilité, c'est jubilatoire à regarder leur calamis.
00:46 Est-ce que ça a été une jouissance pour vous à tourner ?
00:49 Oui, vous avez très bien résumé le film déjà, je vous remercie.
00:57 Oui, j'avais des partenaires extraordinaires, à commencer par Vincent Elbaz, puis Laurent
01:05 Poitronneau, Alexandre Steiger.
01:06 Laurent Poitronneau qui est un scriptiste d'anthologie.
01:08 Qui est extraordinaire.
01:09 C'était vraiment une très grande joie.
01:13 Quand vous avez reçu le scénario, vous vous êtes dit "j'ai envie de le faire", il
01:16 paraît qu'elle ne l'a pas écrit pour vous ?
01:18 Non, au départ, elle ne pensait pas du tout me proposer le rôle.
01:23 Mais comme on continue à se voir, elle m'en avait parlé, je me suis dit "ah d'accord",
01:27 elle me racontait un peu.
01:28 Et puis, je pense à cause de, peut-être, toute la première partie du rôle d'Iris
01:37 qui est quand même un personnage à l'inverse d'Antoinette, qui est quand même assez rentrée,
01:42 un côté un peu coincée.
01:44 Elle est dentiste, c'est une bourgeoise.
01:46 Voilà, bourgeoise, un peu contrôle fric.
01:49 Et puis, par exemple, la référence de Caroline dans le travail qu'on a fait ensemble, c'était
01:56 le film de Louise Bunuel avec Catherine Deneuve, "Belle de jour".
02:02 Voilà, dans une espèce de retenue, d'opacité.
02:06 C'est vrai qu'au premier abord, elle ne m'imaginait pas comme ça.
02:13 Et puis finalement, voilà.
02:16 Et vous l'incarnez parfaitement.
02:19 Alors, vous avez votre smartphone rouge en main, Iris, et elle découvre cette Iris
02:23 tout un monde.
02:24 Celui des rencontres sans lendemain, les textos coquins, les photos osées.
02:27 C'est une émancipation, sans morale, sans culpabilité.
02:32 C'est donc, encore une fois, quand même dans votre filmographie, un rôle de femme
02:35 déterminée, très libre.
02:37 C'est ça qui vous plaît ? Et est-ce que c'est ça qui correspond à l'époque pour
02:41 vous ? Ou aux envies de l'époque ?
02:44 En tout cas, oui, c'est une femme qui le devient.
02:48 Parce qu'on sent qu'elle n'a pas dû explorer beaucoup dans sa jeunesse.
02:51 Et que d'un coup, dans la quarantaine bien passée, elle part à la rencontre d'elle-même.
03:00 C'est là où il y a quelque chose en commun avec Antoinette, dans le parcours.
03:04 Et après, oui, il y a quelque chose, en tout cas, comment être en couple ? Quel chemin
03:16 de traverse quand il n'y a plus de désir ? On sent qu'il y a un tabou dans ce couple
03:21 là-dessus.
03:22 Et oui, je trouve que ça correspond à l'époque.
03:26 Parce que c'est une femme qui va renouer avec sa sexualité.
03:34 Par exemple, dans cette scène avec sa fille, elle tente de transmettre aussi à sa fille
03:43 qu'elle a perdu du temps sur la connaissance de son corps.
03:48 Ce qu'il anime, quels sont ses désirs.
03:52 Et à partir de là, ça correspond justement au combat féministe aussi.
03:57 La scène avec sa fille, c'est sa fille qui est une lycéenne et elle dit comment on leur
04:03 apprend le consentement.
04:04 On leur apprend à dire non.
04:05 Et Ricelle, elle dit, il faut apprendre à dire oui.
04:09 Oui, c'est ça.
04:11 Par exemple, il y a un journaliste qui disait « ce n'est pas dans l'ère du temps »,
04:16 et je lui dis, je ne vois pas en quoi c'est contradictoire.
04:19 C'est-à-dire qu'effectivement, il faut absolument apprendre à dire non, savoir
04:22 dire non à ce qu'on ne veut pas.
04:25 Et ne pas se laisser imposer les choses, bien sûr.
04:28 Et en même temps, ça va avec le fait de pouvoir dire oui à ce qu'on veut.
04:33 Ça n'est pas contradictoire.
04:34 - Vous êtes fille de médecin et de psychologue.
04:37 Vous avez dit, dans le fait de jouer, dans le fait d'être actrice, il y a aussi pour
04:40 moi quelque chose de l'ordre du soin.
04:43 Vous êtes en mission quand vous jouez ?
04:44 - Non, mais disons que c'est un sentiment que j'ai exploré peut-être d'abord au théâtre
04:56 parce que comme j'étais sur scène et que je trouve que chaque représentation est différente,
05:02 on sent que pour moi, d'abord parce que j'ai été jeune spectatrice et que j'avais des
05:08 questions face au monde, des angoisses, des tas de choses dans les premiers spectacles
05:15 que j'ai vus et que d'un coup, pour moi, ça pouvait être des déflagrations de sens,
05:22 d'un coup ça m'ouvrait l'esprit, le cœur, tout.
05:28 Ça venait m'envahir possiblement d'une manière très forte.
05:31 Et en cela, je trouve que c'est quelque chose de l'ordre du soin de l'âme.
05:36 - Et dans ce métier-là, Lorca Lamy, vous osez tout.
05:41 On vous l'a souvent dit, vous utilisez votre corps comme un outil de travail, vous vous
05:46 dénudez sans vous préoccuper apparemment de ressembler ou pas à un mannequin de magazine.
05:54 Vous vous lancez dans ce film.
05:55 - Oui, de toute façon, non, pas du tout dans ces canons-là.
06:01 Et puis de toute façon, oui, mais ça, ça vient aussi du théâtre où c'est comme les
06:05 danseurs, comme les acteurs du théâtre, je pense qu'on a un rapport, enfin notre corps
06:09 effectivement est un instrument, pour moi, un champ de bataille.
06:13 Moi, j'aime bien quand il y a quelque chose de l'ordre de la performance.
06:17 Enfin, j'aime bien, voilà, ça peut être aussi brutaliser, ça peut être secouer, enfin,
06:25 repousser les limites.
06:26 - Et là, vous faites même de la comédie musicale.
06:29 - Eh oui, le temps d'une scène.
06:31 - Ah là, j'ai réalisé un fantasme physique.
06:34 - Et cette audace, est-ce qu'elle vient aussi, il paraît que vous dites "je fais tout comme
06:39 si j'allais mourir demain".
06:40 Est-ce que ça vient de là, l'audace ? Et est-ce que c'est vrai ?
06:44 - Ah non, c'est vrai, ça c'était plus quand je devais faire des choix.
06:50 Parfois, je me disais "bon, si je dois mourir demain, qu'est-ce que je préfère faire
06:54 quand je devais faire des choix compliqués ?" Voilà, oui, oui, bien sûr, mais après,
06:58 oui, il y a quelque chose de l'ordre d'une urgence, oui.
07:02 - Je ne peux pas vous laisser partir sans l'actualité, évidemment, du "moi", qui est
07:08 cette affaire Depardieu.
07:09 Le monde du cinéma, l'or calamis, il est déchiré par ce complément d'enquête, les
07:15 trois plaintes pour viol ou agression sexuelle que cet acteur réfute.
07:19 Alors, il y a deux camps, il y a des tribunes, il y a deux camps, il y a ceux qui disent
07:23 "n'effacez pas Depardieu, c'est l'arc en attaque", et puis il y a ceux qui s'indignent,
07:27 comme vous.
07:28 La tribune à laquelle vous vous êtes associée, elle s'intitule "Adresse au vieux monde".
07:32 Est-ce que dans cette affaire, c'est ce à quoi on assiste ? Un combat de génération
07:37 qui déchire le monde du cinéma ?
07:38 - En tout cas, oui, je crois que là, c'est un "me too" à la française qui est en train
07:48 de se passer, et il y a quelque chose où, pour moi en tout cas, il me semblait primordial,
07:54 quand on voit la difficulté que c'est de porter plainte, surtout face à un homme puissant,
08:02 et que ces femmes, voilà, en tout cas les déclarations qui ont été faites par le
08:09 président de la République sont en fait mouflées, face au courage qu'ont ces femmes de porter
08:18 plainte, de surmonter la peur, la honte qu'on éprouve quand on est victime de viol, etc.
08:26 Après, la justice fera son travail, mais c'est important de faire corps et de soutenir
08:35 cette prise de parole, ce courage de ces femmes.
08:39 - Lorca l'ami, votre nouveau film "Iris et les hommes" sort en salle demain, on va dire
08:44 aux auditeurs d'y aller sans y réfléchir, qu'il y avait passé un bon moment au cinéma.
08:50 Merci d'avoir été avec nous ce matin.
08:51 - Merci beaucoup.