Évasion au Centre de Rétention Administratif de Paris-Vincennes : « On propose même de l'argent aux étrangers pour quitter la France »

  • l’année dernière

Aujourd'hui dans "Punchline", Mickael Dorian et ses invités reviennent sur l'évasion des 11 personnes du Centre de Rétention Administratif de Paris Vincennes.
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00:00 Merci Mathieu. Les 11 personnes évadées hier du centre de restentions administratives de Paris-Vincennes
00:07 sont toujours activement recherchées. Le préfet de police de Paris, Laurent Nouniez, est revenu sur le profil des évadées.
00:12 Il assure tout mettre en œuvre pour les retrouver et promet de renforcer la sécurité de l'établissement concerné.
00:19 Alors, je voudrais qu'on regarde d'abord ce sujet de Kylian Salé et puis qu'on écoute ce sujet de Kylian Salé,
00:25 puis on en parle juste après avec mes invités.
00:29 C'est par l'une de ces fenêtres que les 11 personnes se sont évadées du centre de rétention administrative.
00:35 Ils ont ensuite fait un trou dans un grillage avant de sauter d'une hauteur de 6 mètres et d'escalader un dernier mur.
00:41 Selon Laurent Nouniez, préfet de police de Paris, ces individus non radicalisés sont tous des délinquants.
00:47 Ce profil, c'est quand même celui d'individus qui sont connus pour des faits de délinquance,
00:52 souvent avec réitération, on a souvent des vols en réunion, des vols violents.
00:56 Encore une fois, c'est l'accumulation des faits qui fait que nous priorisons ces profils-là.
01:00 Selon le préfet de police de Paris, aucune erreur humaine n'est à déplorer au sein du centre.
01:05 Encore une fois, moi, je n'identifie pas dans cette affaire de défaillance humaine.
01:08 Bon, on va évidemment continuer à travailler avec la hiérarchie du CRA,
01:12 mais il faut absolument qu'on renforce la… il y a une protection physique à renforcer.
01:17 Et puis, il faut aussi qu'on soit présent à l'extérieur du périmètre.
01:21 La caméra extérieure placée sur le chemin de Ronda a mal fonctionné.
01:25 Laurent Nunez annonce un renforcement de cet équipement.
01:28 Sans attendre, nous allons installer des caméras mobiles
01:30 qui vont nous permettre de renforcer la surveillance extérieure du site.
01:35 Plusieurs incidents ont éclaté ces derniers jours dans ce centre.
01:38 Un incendie de matelas et une tentative d'évasion ont eu lieu ce samedi.
01:42 Des tirs de mortier contre le centre ce lundi.
01:45 Dans ces établissements, les policiers ne sont pas armés
01:48 et les retenus peuvent se déplacer où ils veulent,
01:50 entre leur chambre et les parties communes.
01:54 On l'a entendu, Laurent Nunez propose plein de choses,
01:56 plein de mesures pour améliorer la sécurité, la surveillance de ce site.
02:00 Jean-Christophe Couville, est-ce que ça va réellement changer quelque chose ?
02:03 Déjà, au moins, il y a des annonces.
02:05 C'est Noël, le petit sapin va peut-être emmener des effectifs
02:08 à mes collègues du centre de rétention administrative.
02:11 Écoutez, oui, il manque 60 effectifs, 60 personnes, 60 collègues.
02:15 Qu'est-ce que je vous dis ?
02:16 On peut faire tout avec les effectifs actuels,
02:19 on voit bien qu'on n'y arrive pas.
02:21 Encore une fois, c'est une question d'hommes et de femmes
02:23 qui sont avec nous, à nos côtés.
02:26 Donc, 60, ce n'est pas rien.
02:28 C'est aussi des locaux très vétustes, c'est très vieux là-bas.
02:32 Vous savez, les caméras ne marchent pas.
02:35 Le 22 novembre, on avait fait une réunion syndicale
02:38 avec justement les responsables du centre de rétention administration.
02:41 On avait pointé du doigt les défaillances.
02:43 On nous avait dit "oui, désolé, mais moi aussi, je pleure des effectifs,
02:46 mais il y a des arbitrages et on n'en a jamais".
02:48 Parce que les sorties d'école, par exemple, ne vont pas.
02:51 La priorité, ce n'est pas le centre de rétention administratif.
02:54 Ça va être d'autres effectifs, d'autres directions
02:59 qui sont eux aussi en manque.
03:01 On voit la police urbaine à Paris,
03:03 ils n'ont même pas assez d'OPJ, d'officiers de police judiciaire
03:06 pour traiter le tout venant.
03:08 Enfin, je veux dire, on est vraiment sur la corde.
03:12 Justement, cette évasion interroge.
03:15 Quel est l'objectif d'un CRA ?
03:17 Qui est concerné et dans quelles conditions ?
03:19 On va faire le point tout de suite avec notre journaliste Marine Sabourin.
03:22 On en parle juste après.
03:23 Il constitue un maillon essentiel de la chaîne d'éloignement.
03:29 Les centres de rétention administrative ont pour objectif
03:31 de maintenir dans un lieu fermé tout étranger
03:34 qui fait l'objet d'une décision d'éloignement
03:36 dans l'attente d'un renvoi forcé.
03:38 Cette année, la France dispose de 1869 places,
03:42 mais le ministère de l'Intérieur vise un objectif de 3000 places
03:45 à l'horizon 2027 dans 11 localités supplémentaires.
03:49 Alors, qui peut être concerné par cette rétention ?
03:52 Les individus sous OQTF datant de moins d'un an,
03:55 ceux concernés par une décision d'expulsion
03:57 ou par une interdiction administrative de retour du territoire français,
04:01 ou dans le cas d'une mesure d'éloignement dans le cadre de l'Union européenne.
04:05 L'année dernière, près de 16 000 personnes ont été placées
04:08 dans les 21 centres de rétention de métropole.
04:11 Les personnes retenues étaient à 96% des hommes,
04:14 principalement des ressortissants algériens,
04:16 des albanais puis des marocains.
04:19 Moins de la moitié de ces personnes ont été éloignées du territoire.
04:22 Excepté en cas d'activité terroriste,
04:24 la rétention est limitée à 90 jours et peut être prolongée par le juge
04:28 quand le départ immédiat de l'étranger est impossible.
04:31 Elle prend fin dans trois cas, le renvoi de l'étranger,
04:34 son assignation à résidence ou sa libération par le juge.
04:38 A noter que ces décisions ne dépendent pas uniquement de la France.
04:41 Si le pays d'origine n'accepte pas de récupérer son ressortissant,
04:45 les délais de rétention en France peuvent être dépassés,
04:48 entraînant la libération de l'étranger.
04:50 Exemple vendredi dernier, où un Algérien sous OQTF
04:53 condamné pour terrorisme a été libéré.
04:56 Son pays n'avait pas délivré de laissé-passer consulaire.
04:59 Hector, l'Ajoigny, on comprend bien,
05:02 un centre de rétention administrative, ce n'est pas une prison.
05:05 Tout à fait, mais le documentaire l'indique bien.
05:08 C'est qu'en réalité, c'est un étranger
05:12 qui fait l'objet d'une décision d'éloignement.
05:14 Ça ne veut pas dire que c'est un étranger délinquant,
05:16 ça veut dire que c'est un étranger qui n'a pas de titre valable
05:19 pour rester sur le territoire français.
05:21 Si vous et moi, on va habiter aux Etats-Unis
05:24 et qu'on dépasse notre visa,
05:25 on sera des étrangers en situation irrégulière.
05:28 Là, c'est exactement le cas.
05:30 Donc, de faire le raccourci...
05:31 Hector, l'Ajoigny, on entend régulièrement parler
05:34 du manque de place dans ces centres.
05:36 On imagine que mettre tous les étrangers en situation irrégulière
05:41 qui ne posent pas de problème dans ces centres
05:43 est mathématiquement impossible.
05:46 Donc, on peut penser quand même que ceux qui sont mis dans ces centres
05:50 ont, à un moment donné, posé problème.
05:51 Pas forcément.
05:53 Vous pouvez très bien faire l'objet d'un contrôle d'identité dans la rue,
05:55 vous n'avez pas de titre d'identité, vous n'avez pas de titre de...
05:57 Et vous vous retrouvez dans un centre administratif.
05:59 Oui, c'est tout à fait possible.
06:00 - C'est tout à fait possible. - Attendez.
06:02 - On ne peut quand même pas laisser... - Amine Elbaïe.
06:04 Il y a quand même le principe de réalité qui doit reprendre dessus
06:08 dans le débat politique sur la gestion des centres de rétention administratifs.
06:12 Vous avez 1 500 places de disponibles
06:16 dans les centres de rétention administratifs en France en 2023.
06:20 Vous avez 100 000 au QTF qui sont émises chaque année.
06:22 D'ailleurs, sur les 100 000 au QTF, 90 000 ne sont pas exécutées
06:26 puisque la France ne parvient pas à obtenir ce précieux laissé-passer consulaire
06:31 pour expulser les étrangers.
06:32 Mais revenons-en à la situation des centres de rétention administratifs,
06:35 l'ECRRA.
06:37 Pardonnez-moi, sur les 1 500 individus qui sont placés dans l'ECRRA,
06:41 c'est essentiellement des sortants de prison,
06:45 des individus qui représentent une menace grave à l'ordre public,
06:50 des individus qui ont déjà commis des crimes ou des délits
06:54 qui sont en attente d'être expulsés.
06:57 Et que l'État ne tienne pas compte de cet état de fait,
07:01 ne renforce pas la sécurité de ces centres de rétention administratifs,
07:06 désarme le service public, retire les effectifs de police.
07:10 Par exemple, la police aux frontières, on le disait tout à l'heure,
07:13 où les services de police aux frontières,
07:15 aujourd'hui, sont totalement déshabillés.
07:17 On met des fonctionnaires civils en lieu et place des policiers
07:22 pour assurer le contrôle de l'identité dans les gares et les aéroports.
07:26 On en est là aujourd'hui.
07:27 La carence du service public est en train de nous conduire droit dans le mur.
07:32 On n'a plus beaucoup de temps, je voudrais qu'on pose la question justement
07:34 à notre policier, Jean-Christophe Couville.
07:35 Est-ce qu'un sans-papier qui n'a commis ni vol, ni délit, ni agression,
07:40 a clairement une chance aujourd'hui d'être arrêté
07:43 et de se retrouver dans un centre de rétention administrative ?
07:46 Très peu de chance, parce qu'effectivement,
07:47 avant de le faire partir lui qui n'a rien fait,
07:49 la priorité pour l'instant du gouvernement,
07:51 c'est de mettre les gens qu'on appelle les "top",
07:54 les troubles à l'ordre public.
07:55 C'est ceux qui sont vraiment connus défavorablement
07:57 ou qui sortent de prison.
07:58 On essaie tout de suite de les transférer en centre de rétention.
08:00 Et c'est encore ce qu'a annoncé dernièrement Gérald Darmanin,
08:02 notamment au lendemain de l'assassinat de Dominique Bernard.
08:06 En priorité, cet individu aura, on va lui délivrer une QTF,
08:09 une obligation de quitter le territoire français.
08:10 Donc on va dire, voilà, vous avez un peu de temps pour partir,
08:13 organiser votre départ.
08:15 On peut même vous aider.
08:16 C'est ça en fait qui est fou, c'est qu'en fait,
08:17 on est le pays le plus accueillant et peut-être même,
08:20 avec la reconduite, la plus effective,
08:22 parce qu'on propose de l'argent à une personne pour partir.
08:25 Vous avez 150 euros, si on retrouve votre passeport,
08:29 on vous donne de l'argent.
08:31 Si vous partez, vous acceptez de partir,
08:32 on peut vous donner jusqu'à 1800 euros par personne, par individu.
08:35 On peut même vous proposer 10 000 euros
08:38 pour monter un business chez vous,
08:41 parce qu'en gros, vous avez un business plan.
08:43 Et on vous dit, on va vous donner de l'argent
08:45 pour aller là-bas au pays, monter votre business.
08:49 Enfin, je veux dire, on essaye tout par tous les moyens
08:51 et non pas que, justement, par le moyen fort.
08:54 On est quelqu'un qui n'aurait pas d'adresse et pas de passeport,
08:57 n'aurait pas ce qu'on appelle des garanties d'insertion,
09:00 enfin de représentation, et pourrait se retrouver dans un crâne,
09:02 alors même qu'il a un casier vierge.
09:04 Cette question des obligations de quitter le territoire français,
09:07 elles ne font malheureusement pas partie de la nouvelle loi immigration,
09:12 dont on va parler justement dans un instant,
09:14 avec les débats autour de cette loi qui se poursuivent,
09:17 alors que le texte est désormais entre les mains du Conseil constitutionnel
09:20 après le vote à l'Assemblée.
09:22 On en parle dans la dernière partie de Punchline,
09:25 en direct sur CNews et sur Europe 1.
09:27 - Restez avec nous. - Merci.
09:28 18h-19h sur Europe 1, Punchline, Michael Dorian.
09:33 [Musique]

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