DébatDoc - Dérèglement climatique : cote d'alerte dépassée ?

  • l’année dernière
Fonte des glaces, montée des eaux, catastrophes naturelles, virus, déplacement de population.. Tous ces phénomènes sont les conséquences du réchauffement climatique lié à l'activité humaine. Plus particulièrement la fonte des glaciers connait une accélération sans précédent ces dernières années et les prévisions déjà très pessimistes pourraient ne pas être à la hauteur de la catastrophe à venir. Ce phénomène est depuis plusieurs années au coeur des enjeux sociétaux . Malgré une prise de conscience de la classe politique, les décisions pour enrayer le réchauffement climatiques peinent à se mettre en place. Peut-on encore espérer enrayer ce phénomène aux allures dramatiques, directement lié au dérèglement climatique ? Pour en débattre, Heidi Sevestre, glaciologue, membre du programme de surveillance et d'évaluation de l'Arctique et enseignante à l'Université de Svalbard et Yannick Jadot, Sénateur EELV.LCP fait la part belle à l'écriture documentaire en prime time. Ce rendez-vous offre une approche différenciée des réalités politiques, économiques, sociales ou mondiales....autant de thématiques qui invitent à prolonger le documentaire à l'occasion d'un débat animé par Jean-Pierre Gratien, en présence de parlementaires, acteurs de notre société et experts.

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Transcription
00:00:00 Générique
00:00:02 ...
00:00:15 -Bienvenue à tous.
00:00:16 Débat d'octobre.
00:00:18 Pointe du doigt la réalité du dérèglement climatique
00:00:21 avec le documentaire exclusif qui va suivre,
00:00:24 "Ade is Ice", en Arctique,
00:00:25 avec une glaciologue réalisée par Pierre Dugovson.
00:00:29 Direction, vous allez le voir, l'archipel de Svalbard,
00:00:32 en Arctique, proche du pôle Nord,
00:00:34 une région qui se réchauffe six à sept fois plus vite
00:00:37 que le reste de la planète.
00:00:39 Là aussi, où la glaciologue française Heidi Seves
00:00:42 y observe depuis des années le recul des glaciers
00:00:45 avec, pour imparables conséquences, la montée des eaux.
00:00:48 Je vous laisse le découvrir,
00:00:50 puis Heidi Seves sera avec nous sur ce plateau,
00:00:53 en compagnie du dernier candidat écologiste
00:00:56 à l'élection présidentielle, Yannick Jadot.
00:00:58 Nous nous interrogerons sur ce qu'il est encore possible de faire
00:01:02 pour enrayer un phénomène qui s'annonce dramatique
00:01:05 pour l'avenir de notre planète. Bon doc.
00:01:07 Musique sombre
00:01:13 ...
00:01:41 ...
00:01:55 -C'est trop beau.
00:01:56 T'as vu les nuages, là, qui sont vraiment rouges ?
00:02:00 Super puissants, là.
00:02:01 ...
00:02:06 Je me demande si on voit encore le soleil, aujourd'hui.
00:02:10 Peut-être qu'il est déjà trop bas, au-dessous de l'horizon.
00:02:13 ...
00:02:15 On va voir.
00:02:16 On va guetter, parce que s'il sort, il va sortir juste là.
00:02:20 ...
00:02:21 Mais normalement, d'ici quelques jours,
00:02:23 c'est officiellement le début de la nuit polaire.
00:02:26 Là, on est vraiment à la frontière jour-nuit.
00:02:29 ...
00:02:35 Tu comprends ce que je te dis avec ces lumières,
00:02:38 du mois d'octobre ?
00:02:39 Si je le vois pas, dans l'année,
00:02:43 j'ai un besoin physique, tu vois, de voir ça.
00:02:46 ...
00:02:48 Y a rien de plus beau, quoi.
00:02:50 Mais là, t'arrives à voir qu'il se dessine
00:02:52 tout au fond du fjord.
00:02:54 ...
00:02:56 C'est ce que je préfère.
00:02:57 Ca, c'est un des plus gros glaciers qu'on a dans la région.
00:03:01 Et on devrait s'en rapprocher dans les prochaines heures.
00:03:05 ...
00:03:24 Là, on est en train de se rapprocher de ce glacier de fou,
00:03:27 qui s'appelle Nordensjøllbren.
00:03:29 Je pense que c'est un de mes glaciers préférés,
00:03:31 ici, aux Svalbard.
00:03:34 J'en reviens pas à quel point on s'approche.
00:03:36 ...
00:03:41 Regarde-moi toutes ces crevasses, quoi.
00:03:43 C'est un des glaciers qui est les plus crevassés par ici.
00:03:46 ...
00:03:48 T'as vraiment l'impression de voir les entrailles du glacier.
00:03:52 ...
00:04:06 C'est fou, c'est que le glacier change ultra rapidement ici,
00:04:09 comme tu le sais.
00:04:11 Chaque année, en fait, il est différent.
00:04:13 Là, cette grotte de glace, elle y était pas
00:04:16 il y a quelques mois à peine.
00:04:17 ...
00:04:24 Ah, c'est trop beau.
00:04:25 Mais tu vois tous ces glaciers qui se rapprochent de l'océan ?
00:04:31 C'est les glaciers qui se retirent aussi le plus rapidement
00:04:35 ici, aux Svalbard, parce que l'océan se réchauffe vachement,
00:04:38 aussi bien sur les températures de l'air.
00:04:40 Mais toute cette glace qui est encore en contact avec l'eau,
00:04:43 c'est vraiment la glace qui fond le plus rapidement
00:04:46 et qui remonte sur Terre.
00:04:48 Et là, tu vois, c'est une sorte de mécanisme de protection
00:04:51 du glacier qui recule, recule, recule.
00:04:53 Une fois qu'il est sur Terre, il fond un peu moins rapidement.
00:04:56 ...
00:05:01 Ah, là, c'est tellement beau.
00:05:03 D'avoir cette petite couche de neige
00:05:06 qui vraiment met les reliefs en valeur,
00:05:08 c'est somptueux, quoi.
00:05:10 Et tu vois souvent, là, près de ces grottes,
00:05:12 il y a plein d'oiseaux. On les voit, ils sont tout petits,
00:05:15 ils sont tout petits, ils sont tous petits.
00:05:17 Mais c'est parce qu'au front des glaciers,
00:05:20 il y a une sorte de contraste entre l'eau douce du glacier
00:05:23 et l'eau salée de l'océan.
00:05:24 Et toutes les petites crevettes, les petits organismes
00:05:27 qui, eux, aiment l'eau salée,
00:05:29 se retrouvent tout d'un coup baignés dans l'eau douce,
00:05:32 ne comprennent pas ce qui se passe, remontent à la surface
00:05:35 et les oiseaux vont les bêter.
00:05:37 ...
00:05:40 On dirait du marbre, presque.
00:05:42 C'est fou, hein ?
00:05:43 Je crois que le bleu de la glace, c'est quelque chose qui nous hypnotise.
00:05:47 Enfin, c'est une grande partie de la raison
00:05:49 pour laquelle je suis devenue glaciaire.
00:05:52 C'est voir des trucs comme ça, quoi.
00:05:54 C'est vraiment rare, en tout cas, de pouvoir voir la toute basse du glacier.
00:05:59 Et la raison pour laquelle la glace est tout aussi bleue,
00:06:02 c'est parce que la glace qui est à la base,
00:06:05 elle est tellement écrasée sous le poids de la glace au-dessus
00:06:11 que toutes les petites bulles d'air qui sont prises au piège dans la glace
00:06:14 se sont échappées sous la pression.
00:06:16 Plus il y a de bulles d'air, plus la glace a l'air blanche,
00:06:19 et moins il y a de bulles d'air, plus elle est bleue.
00:06:22 Le bleu, c'est la seule couleur qui ne passe pas au travers de la glace,
00:06:26 qui est rebondie, en quelque sorte.
00:06:28 C'est pour ça qu'on voit par nos yeux que la glace est bleue.
00:06:31 Voilà.
00:06:32 C'est fou, quoi.
00:06:36 Là, c'est sûrement un endroit qui est très actif,
00:06:38 où on a ce qu'on appelle ces fameux vélages d'icebergs,
00:06:41 là où la glace se casse, tombe dans l'océan,
00:06:44 et forme tous ces icebergs qui contribuent à l'augmentation du niveau des océans.
00:06:49 Il est magnifique.
00:07:02 Je vois plein de signes de la fonte, quoi qu'il y ait eu lieu cet été.
00:07:06 Ça a été un été juste désastreux pour les glaciers Osvaldo.
00:07:09 En fait, chaque été est pire que l'été précédent.
00:07:12 Et là, les glaciers ont perdu vraiment
00:07:17 un énorme volume de glace ces derniers mois.
00:07:20 Donc là, même si c'est très beau, je ne peux pas m'empêcher de remarquer
00:07:25 tous ces petits signes qui nous montrent que le glacier s'est vraiment aminci,
00:07:28 il a perdu beaucoup d'épaisseur.
00:07:30 On ne voyait pas du tout autant de roches l'année dernière.
00:07:34 Et le problème, c'est qu'un vrai cercle vicieux se met en place ici.
00:07:39 Tu vois, le glacier est déjà en contact avec l'océan,
00:07:42 et l'océan se réchauffe de façon catastrophique ici dans l'Arctique.
00:07:45 Mais aussi, plus il y a de roches exposées autour du glacier,
00:07:51 plus ces roches emmagasinent la chaleur du soleil,
00:07:53 et plus le glacier se retire.
00:07:55 Et là, tu vois, ce qui reste ici, c'est des lambeaux.
00:08:02 [musique douce]
00:08:04 Même si ça reste un monstre de glace,
00:08:12 tu te rends compte qu'ils sont hyper fragiles,
00:08:15 hyper sensibles à ce qui se passe.
00:08:17 Ah, petit oiseau.
00:08:19 Finalement, ces glaciers contribuent directement à tout un écosystème ici.
00:08:24 Ce n'est pas que important pour les glaciologues, c'est sûr.
00:08:31 Mais c'est magique.
00:08:32 Tu vois qu'il a quand même un corps de l'énergie, ce glacier.
00:08:36 Franchement, il se bat.
00:08:37 Le fait qu'il soit ultra crevassé,
00:08:39 ça nous montre qu'il y a encore énormément de glace qui pousse,
00:08:42 qui essaie de bouger toute cette masse en direction de l'océan.
00:08:45 Donc il en a un corps sous le pied, Nordensjøllbren.
00:08:48 Il est connecté à une énorme calotte juste derrière ici, les montagnes.
00:08:53 Donc il a de la chance, il a encore pas mal de décennies devant lui,
00:08:57 mais là, en partie basse,
00:09:00 tout montre que le glacier est en train de subir
00:09:03 un changement climatique catastrophique.
00:09:05 Je ne sais pas si tu arrives à voir, mais on voit ces veines,
00:09:13 ces lignes dans la glace.
00:09:15 Et en fait, chaque ligne,
00:09:20 c'est une année d'accumulation de neige sur le glacier.
00:09:22 C'est un peu comme les cernes d'un arbre.
00:09:26 En fait, tu peux, si on le faisait comme il faut,
00:09:28 tu peux compter le nombre de ces lignes
00:09:31 pour reconstruire l'âge du glacier.
00:09:35 Et donc là, on est en face d'un sacré vieillard, quand même.
00:09:39 Cette glace a facilement plusieurs centaines d'années.
00:09:43 Et toute cette mémoire,
00:09:46 on est en train de la voir disparaître sous nos yeux.
00:09:49 Il y a toujours un aspect de fou quand tu regardes ces glaciers.
00:09:53 Pour moi, c'est vraiment la pureté absolue.
00:09:56 Il n'y a pas plus beau, je trouve, sur Terre,
00:09:58 ou du moins dans l'Arctique, des glaciers pareils.
00:10:01 Mais tu sais que s'il y a un morceau de glace qui se décroche,
00:10:05 franchement, on est tellement proche, on est mort.
00:10:08 Et donc il y a toujours ce contraste où tu te dis, c'est super beau.
00:10:12 Et en même temps, tu sais que c'est "deadly",
00:10:14 des paysages comme ça,
00:10:15 ils sont toujours beaucoup plus forts que toi.
00:10:22 Si tout le monde pouvait voir ça sur Terre, t'imagines ?
00:10:25 Je pense que si les gens avaient l'occasion de voir ça,
00:10:30 de sentir l'air qui vient des glaciers,
00:10:33 t'as vraiment l'impression de sentir le pouls du glacier.
00:10:36 Je suis sûre qu'on s'intéresserait beaucoup plus à ce qui se passe ici.
00:10:40 Et déjà qu'on comprendrait leur force.
00:10:43 C'est quand tu vois ça,
00:10:45 et ça, c'est un glacier parmi des centaines de milliers d'autres.
00:10:51 Quand tu vois ça, tu comprends la force du truc.
00:10:53 C'est ça que j'essaie de partager,
00:10:55 c'est de montrer déjà à quel point c'est beau,
00:10:58 c'est magnifique, ces monstres de glace.
00:11:00 Mais à quel point, malgré leur beauté,
00:11:05 le fait qu'ils soient gigantesques, c'est ultra fragile, un glacier.
00:11:10 Il y a besoin de peu de choses pour que toute cette glace parte.
00:11:13 Et tout ça, ça contribue à l'élévation du niveau des océans.
00:11:20 En plein été, t'imagines des températures assez hautes,
00:11:23 énormément d'eau qui ruisselle du glacier,
00:11:26 et sans arrêt...
00:11:27 Sans arrêt, t'as des vélages,
00:11:32 des morceaux de glace qui se décrochent du fond du glacier.
00:11:35 T'as l'impression d'être dans un terrain miné,
00:11:38 t'as l'impression que c'est la guerre, tellement que le glacier est actif,
00:11:42 tellement qu'il est vivant et tellement qu'il fond rapidement.
00:11:48 Et maintenant, l'hiver arrive, tout se calme un petit peu.
00:11:51 Mais tu vois là, toutes ces petites îles,
00:11:56 toutes les roches qu'on a juste à côté de nous,
00:11:59 il y a quelques années, c'était sous la glace.
00:12:02 C'était complètement sous la glace.
00:12:04 Là, tu vois, même le trou là-haut,
00:12:11 il n'y était pas, ça n'y était pas il y a quelques mois.
00:12:16 Là, le glacier est en train de se faire attaquer de partout.
00:12:19 De partout.
00:12:20 Ce qui me touche, c'est que ce glacier, ça fait longtemps que je le connais.
00:12:24 Je crois que c'était en 2008,
00:12:27 la première fois où je suis allée sur le glacier,
00:12:29 c'était le premier glacier que j'ai étudié au Svalbard.
00:12:32 À l'époque, j'étais étudiante en licence,
00:12:33 donc je commençais vraiment mes études en glaciologie.
00:12:37 Et on nous avait fait camper juste là, sur la gauche,
00:12:40 pendant une quinzaine de jours.
00:12:42 Et je me souviens, avec mes profs, marcher au milieu des crevasses,
00:12:45 on n'était même pas encordés.
00:12:46 Je crois que je me souviens même plus, on avait des crampons.
00:12:48 Et les profs nous disaient juste,
00:12:50 "Évitez de tomber dans les crevasses quand même, ce serait sympa."
00:12:54 Et à l'époque, je pense qu'on ne se rendait pas du tout compte
00:12:56 à quel point le glacier était dangereux.
00:12:58 Et maintenant, ce n'est plus autorisé.
00:12:59 Maintenant, ils ne le font plus comme ça à l'université, mais...
00:13:03 Mais oui, ça fait longtemps que je le crois, ce glacier.
00:13:05 Et ça me désole, en tout cas, de voir l'état dans lequel il est aujourd'hui.
00:13:09 Musique douce
00:13:11 ...
00:13:21 -T'as l'impression d'avoir des écailles de dragon, non ?
00:13:25 Qui caressent les rochers.
00:13:26 ...
00:13:37 Je suis tellement contente qu'on voie ces couleurs.
00:13:39 ...
00:14:09 -Thank you so much for being here.
00:14:10 I must say it's always an absolute joy to be back at UNIS.
00:14:14 So my name is Heidi Silvestre.
00:14:16 My background is in biology.
00:14:18 And let me tell you, I've spent quite a bit of time
00:14:20 sitting in this room,
00:14:22 whether it was as a bachelor student
00:14:23 and then as a PhD student in the Department of Geology.
00:14:28 And it's truly during my time here at UNIS
00:14:31 that I got to learn this art of outreach.
00:14:36 And every single one of you here
00:14:39 is at the right place at the right time.
00:14:42 You must understand that by being here
00:14:45 in one of the fastest-warming environments on Earth,
00:14:49 you have great power.
00:14:51 You get to spend time in the field.
00:14:54 You get to witness incredible changes
00:14:57 from one year to the next.
00:14:59 You get to collect the data to synthesize it
00:15:02 for the scientific community.
00:15:05 But obviously, with this great power of knowledge
00:15:08 comes great responsibility.
00:15:10 And today, my talk is about the duty that we have as experts
00:15:17 to communicate on what we see in the field,
00:15:20 to communicate on what we learn, on what we understand,
00:15:24 and to tell the whole world
00:15:26 about what's taking place in the Arctic,
00:15:28 because what's happening here in Svalbard
00:15:30 is obviously affecting the rest of the world.
00:15:33 And this has led me to create a project
00:15:36 that took place last year,
00:15:38 which was called Climate Sentinels.
00:15:41 We tried to completely change
00:15:43 the way we do science up here in the Arctic.
00:15:46 First of all, we created a team of female scientists.
00:15:50 We also connected with schools around the world,
00:15:53 from Canada to Australia, France, the US.
00:15:58 And then, most importantly, we showed
00:16:00 that even in the most extreme environments,
00:16:03 we can try to reduce our carbon footprint
00:16:05 as much as possible.
00:16:07 Obviously, here in Svalbard, you don't have many options
00:16:09 when it comes to reducing your carbon footprint.
00:16:12 It's mostly connected to the way we travel in the field.
00:16:16 And the only option we were facing was to ski,
00:16:19 pulling a polka for a month,
00:16:21 skiing from Hornsund to Njällsund.
00:16:25 And this is what we did for 32 days.
00:16:27 And I can tell you, I'm still totally broken from the expedition.
00:16:32 It was hard, but we wanted to show that we can do better,
00:16:36 that we can do science differently,
00:16:38 even in the harshest of environments.
00:16:41 We collected snow samples over 450 kilometres
00:16:45 to better understand the deposition of black carbon
00:16:48 on the snow here in Svalbard.
00:16:50 As you know, pollution from further south
00:16:53 is coming all the way here,
00:16:54 changing the albedo of these environments,
00:16:56 making them melt even faster.
00:16:59 And today, our samples are at Western Washington University,
00:17:03 and they will help us understand where is the pollution coming from,
00:17:07 but also what has burnt in the first place.
00:17:11 And this really helped us to pinpoint those areas in the world
00:17:15 that are affecting the most the snow and ice here in Svalbard.
00:17:19 And this expedition, by far, was the hardest thing I've ever done.
00:17:26 And we didn't take pictures when the conditions were really horrible,
00:17:30 but they were really horrible.
00:17:32 I don't know if some of you were here in April last year,
00:17:35 but it was literally one storm after the other,
00:17:39 after the other, after the other.
00:17:41 We never saw the end of this.
00:17:43 Every day, we risked losing our tents, our camp.
00:17:47 We had to dig holes in the snow
00:17:50 to be able to avoid being evacuated by sissomanen.
00:17:54 And this helped us to continue
00:17:56 and to successfully complete the expedition.
00:18:00 What we faced day in, day out
00:18:03 was directly the result of climate change.
00:18:07 We saw what scientists have been saying for decades and decades,
00:18:10 that with every increasing degree,
00:18:14 what we get in Svalbard is higher temperatures,
00:18:17 wetter conditions,
00:18:19 but also completely unpredictable weather systems.
00:18:24 It was crazy for us to see this.
00:18:26 I mean, I've been coming to Svalbard since 2008.
00:18:29 I lived here for four years.
00:18:31 I had never seen anything like this before.
00:18:34 And I can tell you that we came back from this expedition
00:18:37 with such a rage
00:18:39 to tell the world about what we had faced,
00:18:43 to tell the world about the fact
00:18:44 that what's happening up here in the Arctic
00:18:47 is truly affecting the rest of the world.
00:18:50 I'm sure all of you guys are on LinkedIn,
00:18:53 on Facebook, on Snapchat,
00:18:56 on Twitter, whatever, Instagram, TikTok.
00:19:00 All of you have the tools available
00:19:02 to make this science accessible to as many people as possible.
00:19:06 It is our duty, as people in Svalbard,
00:19:09 who have the privilege to be here,
00:19:12 to communicate on these issues.
00:19:14 And so as soon as we came back from the expedition,
00:19:17 the first night I was back in town,
00:19:19 I was speaking to policymakers in France
00:19:21 about what we had experienced.
00:19:23 And I started receiving tons and tons of messages
00:19:26 about this expedition.
00:19:28 And still to this day, almost every day,
00:19:30 I get messages from kids around the world
00:19:33 asking me about climate change.
00:19:36 And a few years ago, I actually got these weird messages on Instagram
00:19:39 that was back in 2019.
00:19:43 I checked my Instagram and I started to see these messages
00:19:46 from an organization called Cumbres Blancas Colombia.
00:19:50 I'm like, "What is this?"
00:19:53 So I started reading the messages and it says,
00:19:55 "Dear Heidi, it would be great to have you here
00:19:58 and to visit our melting glaciers.
00:20:01 We have so much to learn about the tropical glaciers.
00:20:04 And sadly, these glaciers will not exist in the next 30 years."
00:20:08 So Cumbres Blancas Colombia are this incredible bunch of people
00:20:12 that are moving mountains in their country.
00:20:15 They're not scientists.
00:20:17 They are some of these youngsters, influencers, artists.
00:20:22 They work with indigenous communities
00:20:24 and they have realized that there are glaciers in their country.
00:20:29 And they will do whatever it takes to help preserve these glaciers
00:20:32 for as long as possible.
00:20:35 And five months after receiving this message,
00:20:37 there I was in a smoky tent for a day and half a night
00:20:43 speaking to these indigenous communities
00:20:45 to get permission to go and study the glaciers of Colombia.
00:20:50 They have 70 tiny glaciers that are called tropical glaciers.
00:20:56 They are straddling the equator and they are fighting hard to survive.
00:21:01 But today, sadly, there's nothing we can do to save these tropical glaciers.
00:21:05 There's nothing we can do to prevent them from totally disappearing.
00:21:10 Their temperature threshold is one degree Celsius.
00:21:12 If we go above that, these glaciers will disappear.
00:21:15 And as you know, we're already way above plus one degree.
00:21:20 The water goes into these crazy ecosystems called paramos.
00:21:27 The paramos are full of endemic species.
00:21:29 And this is a drone image looking down.
00:21:32 The paramos are these wetlands that are acting like natural sponges.
00:21:38 They get the water from the glaciers
00:21:40 and release the water throughout the year.
00:21:42 And eventually, the water goes down the valley.
00:21:46 And these glaciers can have an influence over tens of kilometres,
00:21:50 even hundreds of kilometres from where they're found.
00:21:54 And these glaciers help support entire economies in Colombia.
00:21:59 This is where the coffee places are.
00:22:02 This is where coffee is growing.
00:22:04 So this is why today these glaciers still matter so very much.
00:22:10 And we need to tell the whole world about these tropical glaciers.
00:22:14 Because if these glaciers disappear, what's coming next?
00:22:18 Next will be the glaciers of the Himalayas.
00:22:20 Next will be the glaciers of Patagonia, the glaciers of Alaska.
00:22:24 And all of these glaciers still matter so very much today.
00:22:28 It is crucial that you understand the duty we have
00:22:31 as people who roam around the field here in Svalbard,
00:22:36 as people who understand the science,
00:22:39 as people who are able to synthesise the science.
00:22:43 Because if not us, who will?
00:22:46 Who will tell the policymakers about those environments?
00:22:50 Who will tell the private sector about what's taking place here in the Arctic?
00:22:55 Who will tell your parents, your friends?
00:22:58 Who will tell your circle of influence about these changes?
00:23:01 Well, no one will.
00:23:03 This is very clear.
00:23:05 Do not expect anyone else but you to share your science,
00:23:10 to make your science more accessible.
00:23:13 And today we have absolutely zero time left
00:23:17 to start the fight against climate change.
00:23:19 And you're all aware of it here in this room.
00:23:22 So it's really high time that you speak up, that you speak out.
00:23:27 And I really hope to be able to count on every single one of you.
00:23:31 Thank you very much.
00:23:32 (Applaudissements)
00:23:34 (Applaudissements)
00:23:37 (Applaudissements)
00:23:39 (...)
00:23:41 (...)
00:23:44 (...)
00:23:47 (...)
00:23:50 (...)
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00:27:45 (...)
00:27:47 (...)
00:27:50 (...)
00:27:52 (...)
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00:27:56 (...)
00:27:58 (...)
00:28:00 (...)
00:28:02 (...)
00:28:05 (...)
00:28:07 (...)
00:28:09 (...)
00:28:11 (...)
00:28:13 (...)
00:28:15 -Mon glacier,
00:28:18 voilà ce que tu es devenu.
00:28:20 Les éclats de glace partout que tu laisses
00:28:24 dans l'océan glacial arctique.
00:28:26 (...)
00:28:28 (...)
00:28:30 Regarde-moi ça.
00:28:32 (...)
00:28:34 (...)
00:28:37 (...)
00:28:39 (...)
00:28:41 (...)
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00:28:52 (...)
00:28:54 (...)
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00:29:00 (...)
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00:29:39 (...)
00:29:41 (...)
00:29:44 (...)
00:29:46 (...)
00:29:48 (...)
00:29:50 (...)
00:29:52 Tout cet univers blanc, gigantesque...
00:29:55 (...)
00:29:57 ... se fait attaquer de toutes parts aujourd'hui.
00:30:00 (...)
00:30:03 Pourtant, ça fait longtemps que t'es là.
00:30:05 Si longtemps.
00:30:07 (...)
00:30:10 Que tu façonnes ce paysage.
00:30:12 (...)
00:30:14 Que tu amènes ton eau dans l'océan arctique.
00:30:17 (...)
00:30:19 C'est aussi riche qu'ils fertilisent les fjords et l'océan tout autour.
00:30:23 (...)
00:30:25 (...)
00:30:27 (...)
00:30:29 (...)
00:30:32 (...)
00:30:34 (...)
00:30:36 (...)
00:30:38 (...)
00:30:40 (...)
00:30:42 (...)
00:30:44 (...)
00:30:46 (...)
00:30:49 (...)
00:30:51 C'est fou de se sentir comme à la maison, dans un environnement pareil.
00:30:55 (...)
00:30:57 Alors que tout est froid, tout est blanc.
00:31:00 Tout est glacé.
00:31:02 (...)
00:31:04 (...)
00:31:07 Mais entourée par tes icebergs, c'est là où je me sens bien.
00:31:11 (...)
00:31:13 (...)
00:31:15 (...)
00:31:17 (...)
00:31:19 (...)
00:31:22 (...)
00:31:24 (...)
00:31:26 (...)
00:31:28 (...)
00:31:30 (...)
00:31:32 Il y a quelque chose de magique ici.
00:31:34 (...)
00:31:37 (...)
00:31:39 Quelque chose d'indescriptible.
00:31:41 (...)
00:31:43 (...)
00:31:45 C'est jamais pareil. Il y a toujours quelque chose qui s'y passe.
00:31:49 Que ce soit le vent qui caresse ces dunes de neige.
00:31:54 Ces icebergs qui se décrochent pour être pris au pied de leurs banquises.
00:32:00 (...)
00:32:02 (...)
00:32:04 (...)
00:32:06 Les sons. Le manque d'odeur.
00:32:10 (...)
00:32:12 (...)
00:32:15 Le froid qui nous paralyse, mais qui aussi nous remet bien les idées en place.
00:32:19 (...)
00:32:21 (...)
00:32:23 (...)
00:32:25 (...)
00:32:27 (...)
00:32:30 (...)
00:32:32 (...)
00:32:34 (...)
00:32:36 (...)
00:32:38 (...)
00:32:40 (...)
00:32:43 (...)
00:32:45 (...)
00:32:47 (...)
00:32:49 (...)
00:32:51 (...)
00:32:53 (...)
00:32:56 (...)
00:32:58 (...)
00:33:00 (...)
00:33:02 (...)
00:33:04 (...)
00:33:06 C'est vraiment un des environnements les plus puissants.
00:33:10 Un des environnements les plus mortels aussi.
00:33:15 (...)
00:33:17 (...)
00:33:19 (...)
00:33:21 (...)
00:33:23 (...)
00:33:25 (...)
00:33:28 (...)
00:33:30 (...)
00:33:32 (...)
00:33:34 (...)
00:33:36 (...)
00:33:38 (...)
00:33:41 Je me demande si tu te rends compte que chaque iceberg qui se décroche de toi
00:33:46 a les conséquences partout ailleurs sur Terre.
00:33:50 (...)
00:33:52 (...)
00:33:54 Chaque graine, chaque bloc de glace que tu perds
00:33:59 (...)
00:34:01 affecte des milliers, voire des millions de personnes bien au-delà de l'Arctique.
00:34:05 (...)
00:34:08 (...)
00:34:10 (...)
00:34:12 Est-ce que tu sais aussi que ton eau
00:34:15 permet à des millions, voire carrément des milliards de personnes
00:34:19 de boire, d'avoir une agriculture,
00:34:23 de produire de l'hydroélectricité ?
00:34:25 (...)
00:34:27 Alors aujourd'hui, pour te remercier,
00:34:31 on est carrément en train de te faire disparaître.
00:34:35 (...)
00:34:37 Je crois qu'on n'a vraiment rien compris.
00:34:40 (...)
00:34:42 (...)
00:34:44 (...)
00:34:46 (...)
00:34:49 T'en as tellement besoin de toi.
00:34:52 (...)
00:34:54 (...)
00:34:56 De ton eau, de ta couleur, de ta glace.
00:34:59 (...)
00:35:01 (...)
00:35:03 (...)
00:35:06 (...)
00:35:08 (...)
00:35:10 (...)
00:35:12 (...)
00:35:14 (...)
00:35:16 (...)
00:35:19 (...)
00:35:21 (...)
00:35:23 (...)
00:35:25 Si tu pouvais parler, je me demande ce que tu nous dirais.
00:35:29 Je me demande si tu nous demanderais de nous battre pour toi.
00:35:33 Ou juste d'accepter les choses telles qu'elles sont.
00:35:38 (...)
00:35:40 (...)
00:35:42 Je me demande si tu souffres, si tu ressens ce qui se passe.
00:35:46 (...)
00:35:48 (...)
00:35:51 (...)
00:35:53 Alors qu'aujourd'hui, regarde-toi.
00:35:56 Tes entrailles complètement exposées.
00:35:59 Tes crevasses qui te traversent.
00:36:03 (...)
00:36:05 (...)
00:36:07 (...)
00:36:09 (...)
00:36:11 (...)
00:36:14 (...)
00:36:16 J'ai bien conscience que...
00:36:19 Quand je te regarde aujourd'hui, je ne sais plus jamais
00:36:22 que je te reverrai aussi gros, aussi beau...
00:36:25 (...)
00:36:28 Aussi majestueux...
00:36:30 Qu'année après année, tu ne fais que reculer,
00:36:33 tu ne fais que partir.
00:36:35 (...)
00:36:37 (...)
00:36:40 C'est vraiment une mort à petit feu.
00:36:43 C'est une agonie qui continue et qui n'en finit pas.
00:36:48 (...)
00:36:50 (...)
00:36:52 (...)
00:36:54 Pour moi, c'est impossible d'imaginer ces paysages sans toi.
00:36:58 Sans toi qui les couronne, sans toi qui les domine.
00:37:02 (...)
00:37:04 Je te vois vraiment comme...
00:37:07 Un sage, comme un ancêtre.
00:37:10 (...)
00:37:12 Comme celui qui a toujours été là.
00:37:15 (...)
00:37:18 (...)
00:37:20 (...)
00:37:22 Quoi qu'il arrive, moi, je te regarde.
00:37:25 (...)
00:37:27 Et j'aimerais que tu tiennes.
00:37:29 (...)
00:37:31 (...)
00:37:34 (...)
00:37:36 (...)
00:37:38 (...)
00:37:40 (...)
00:37:42 (...)
00:37:44 (...)
00:37:47 (...)
00:37:49 (...)
00:37:51 (...)
00:37:53 (...)
00:37:55 Et hop, sur la plage.
00:37:57 Sur la plage de Adventfjorden,
00:38:01 qui est le fjord qui est directement connecté
00:38:04 à la capitale du Svalbard, Longyearbyen.
00:38:07 Et là, on est début mai.
00:38:09 Et comme vous pouvez le voir,
00:38:11 il n'y a pas du tout, du tout de banquise dans le fjord.
00:38:16 Et ce fjord, en fait, est connecté à un fjord encore plus grand,
00:38:20 qui est juste ici, sur la droite,
00:38:22 qui s'appelle Isfjorden.
00:38:24 (Bourdonnement)
00:38:26 Alors, cette année, ça a été super compliqué pour la banquise.
00:38:30 En fait, ça fait des mois, ici,
00:38:32 que les scientifiques de l'université prévoient
00:38:36 que ça va être presque un point de non-retour
00:38:39 pour les fjords d'ici, au Svalbard.
00:38:41 Dès le mois de novembre, ils nous annonçaient
00:38:45 que la température de l'eau était beaucoup trop chaude.
00:38:49 Alors là, je suis sûre que si je mets les doigts dedans,
00:38:52 ça ne va pas être à 20 degrés.
00:38:54 Elle est quand même bien fraîche.
00:38:56 Mais ce qui se passe, c'est que ces fjords, en fait,
00:39:00 ils reçoivent de l'eau qui vient du Gull Stream.
00:39:03 Et cette eau, malheureusement, est de plus en plus chaude.
00:39:06 Donc, on a de l'eau qui est beaucoup trop chaude, ici,
00:39:10 au Svalbard, dans ce fjord-là, en particulier,
00:39:13 pour que la banquise se forme.
00:39:15 C'est fou de voir que tout est lié,
00:39:17 que la perte de cette banquise au nord,
00:39:20 elle impacte directement notre population,
00:39:22 nos écossiscènes, notre économie,
00:39:25 beaucoup plus au sud, en Europe et en France.
00:39:28 Donc, ça dépend vraiment que de nous,
00:39:30 ce qu'on veut faire de cette banquise.
00:39:33 Chaque tonne d'énergie fossile que l'on brûle,
00:39:37 que ce soit du gaz naturel, du pétrole ou du charbon,
00:39:40 tout ça, ça participe activement à la disparition de la banquise.
00:39:45 Donc, très clairement, l'avenir de la banquise, il est entre nos mains.
00:39:50 Et notre avenir est directement lié à celui de la banquise.
00:39:54 Son avenir et notre avenir ne tient plus qu'à nous, aujourd'hui.
00:39:59 Sous-titrage ST' 501
00:40:02 "La Banquise"
00:40:04 "La Banquise"
00:40:06 "La Banquise"
00:40:08 "La Banquise"
00:40:10 "La Banquise"
00:40:12 "La Banquise"
00:40:14 "La Banquise"
00:40:16 "La Banquise"
00:40:18 "La Banquise"
00:40:20 "La Banquise"
00:40:22 "La Banquise"
00:40:24 "La Banquise"
00:40:26 "La Banquise"
00:40:28 "La Banquise"
00:40:30 "La Banquise"
00:40:32 "La Banquise"
00:40:34 "La Banquise"
00:40:36 "La Banquise"
00:40:38 "La Banquise"
00:40:40 "La Banquise"
00:40:42 "La Banquise"
00:40:44 "La Banquise"
00:40:46 "La Banquise"
00:40:48 "La Banquise"
00:41:14 Ce qu'on est en train de voir, là, c'est un énorme méandre
00:41:17 qui a été créé par l'eau au contact de la glace.
00:41:20 Et on a du mal à imaginer à quel point
00:41:23 cette glace peut complètement changer le comportement du glacier.
00:41:26 D'avoir de l'eau liquide ici, déjà, ça réchauffe le glacier de l'intérieur.
00:41:30 Et cette eau, au bout d'un moment,
00:41:32 elle arrive toujours à trouver le moyen
00:41:34 d'aller à la base du glacier.
00:41:36 Et lorsqu'elle arrive à la base du glacier,
00:41:38 elle peut lubrifier le mouvement du glacier
00:41:40 sur un socle rocheux
00:41:42 et en accélérer le mouvement.
00:41:44 Donc d'étudier ces cavernes de glace,
00:41:47 ces cathédrales de glace,
00:41:49 c'est ultra important pour comprendre
00:41:51 l'interaction entre l'eau et la glace
00:41:53 et la dynamique du glacier.
00:41:55 Ici, on voit un truc qui est assez rare, en fait,
00:42:10 dans ce genre de glacier,
00:42:12 qui a l'air complètement statique, qui ne bouge plus du tout aujourd'hui.
00:42:15 Ce qu'on voit, c'est l'indication
00:42:17 qu'il y a un sacré petit bout de temps,
00:42:19 probablement il y a 100, 150 ans,
00:42:21 le glacier était, au contraire,
00:42:24 ultra actif, ultra dynamique.
00:42:26 Et là, on voit bien la différence dans la couleur de la glace.
00:42:30 De part et d'autre de cet endroit très sombre,
00:42:33 on a de la glace de glacier normale.
00:42:35 Alors, c'est quoi de la glace de glacier normale ?
00:42:37 En fait, c'est tout simplement de la glace
00:42:39 qui est remplie de petites bulles d'air,
00:42:41 qui s'est créée par l'accumulation de neige
00:42:44 sur des dizaines, voire des centaines d'années.
00:42:47 Et ça, on s'attend à voir ça dans tous les glaciers,
00:42:50 c'est complètement normal.
00:42:52 Et tout d'un coup, on a cette veine ici,
00:42:55 où on a certes de la glace,
00:42:58 mais on voit qu'elle est complètement transparente
00:43:01 et qu'il n'y a plus une seule bulle d'air à l'intérieur,
00:43:04 ce qui est assez fou.
00:43:06 De part et d'autre de cette zone toute noire,
00:43:08 on a des sédiments.
00:43:10 Et en fait, ce qu'on est en train de regarder ici,
00:43:12 c'est une ancienne crevasse, une ancienne fracture
00:43:15 qui s'est formée à un moment où le glacier était hyperactif.
00:43:19 Hyperactif dans le sens où le glacier bougeait très vite à l'époque.
00:43:23 Le glacier s'étirait dans tous les sens.
00:43:25 Ça formait ces fameux cracs, ces fameuses fractures.
00:43:28 Et ce qu'on voit aussi, c'est cette zone sans bulles d'air,
00:43:32 qui est faite de glace, mais pas de glace de glacier cette fois-ci.
00:43:35 C'est tout simplement de l'eau qui a dû remplir ce crac
00:43:38 à la fin de la période dynamique de la glace.
00:43:42 Et ce qui est génial, c'est que cette énorme fracture,
00:43:44 on la retrouve tout du long.
00:43:46 Donc on voit que la fracture continue vraiment de part et d'autre ici,
00:43:50 du tunnel, et elle continue.
00:43:53 Et ça, si on n'avait pas ça,
00:43:55 on aurait vraiment du mal à reconstruire l'histoire du glacier.
00:43:58 Donc ça nous permet de comprendre que finalement,
00:44:00 les glaciers peuvent changer très vite de comportement.
00:44:04 [Musique]
00:44:07 Si on était venus ici il y a un an,
00:44:19 le sol de la grotte de glace, il serait juste ici.
00:44:22 Ce qu'on a ici, c'est l'ancien sol
00:44:25 sur lequel les gens marchaient au printemps de l'année dernière.
00:44:28 Ce qui se passe, c'est que l'eau de fonte,
00:44:30 elle creuse ces galeries qui sont monumentales,
00:44:33 ces canyons en fait dans le glacier.
00:44:36 Et l'eau est vraiment capable de couper dans la glace
00:44:40 comme dans du beurre. C'est vraiment ultra puissant.
00:44:43 On se retrouve avec des canyons gigantesques
00:44:45 comme celui qu'on a au-dessus de notre tête.
00:44:48 Et là maintenant, on doit avoir bien 20, 30 mètres de glace.
00:44:51 Et ce qui se passe, c'est que ce canyon,
00:44:54 le glacier en fait, il faut comprendre
00:44:56 qu'il essaie toujours de le refermer.
00:44:59 Donc pendant l'hiver, lorsqu'il n'y a plus du tout d'eau
00:45:02 qui va continuer à creuser,
00:45:04 lorsqu'il n'y a plus rien qui maintient ces canyons ouverts,
00:45:07 la glace naturellement de glacier va essayer
00:45:10 de boucher tous ces trous.
00:45:12 La glace, elle a l'air dure comme ça,
00:45:14 mais elle est quand même un petit peu visqueuse.
00:45:17 Et ainsi, on trouve ces canyons
00:45:19 qui petit à petit vont se refermer.
00:45:22 (son de clavier)
00:45:30 Symphonie pour un glacier !
00:45:34 (musique)
00:45:37 (musique)
00:45:41 (musique)
00:46:08 Ce glacier, c'est de loin
00:46:11 un des glaciers que je connais le plus sur Terre.
00:46:14 J'y ai passé mes dix jours, des semaines, des mois
00:46:17 à mesurer sa taille, à mesurer à quelle vitesse
00:46:20 ce glacier réagit au dérèglement climatique.
00:46:23 Et en revenant ici aujourd'hui, que je remarque déjà,
00:46:26 rien qu'en regardant le front du glacier, là où on est,
00:46:29 à quel point il a reculé ces dernières années.
00:46:32 C'est un glacier qui s'est complètement métamorphosé
00:46:35 au dérèglement climatique.
00:46:38 Et il faut dire qu'ici, au Svalbard,
00:46:41 on est à l'endroit sur Terre qui se réchauffe le plus vite aujourd'hui.
00:46:44 On mesure que le Svalbard se réchauffe 6 à 7 fois
00:46:47 plus vite que le reste de la planète.
00:46:50 Je pense que le petit oiseau qui est dans la falaise
00:46:53 est d'accord avec moi.
00:46:56 Les changements qu'on observe ici sont juste hallucinants.
00:46:59 Ce glacier-là, c'est ce qu'on appelle un petit glacier,
00:47:02 qui fait 4 à 5 kilomètres de long.
00:47:05 Mais c'est un glacier parmi les 200 000 glaciers dans le monde.
00:47:08 Et on sait qu'aujourd'hui, tous ces glaciers
00:47:11 réagissent au dérèglement climatique.
00:47:14 Et une des conséquences de leur perte de glace,
00:47:17 de leur perte de volume, c'est notamment l'élévation
00:47:20 du niveau des océans. Même si tu as un glacier ici au Svalbard
00:47:23 qui perd de la glace, cette glace va faire
00:47:26 augmenter le niveau des océans partout sur Terre.
00:47:29 Et on sait que tous les océans sont connectés.
00:47:32 Que l'on habite dans les Philippines,
00:47:35 que l'on habite à Miami ou au Havre,
00:47:38 on remarque déjà aujourd'hui que le niveau des océans
00:47:41 augmente et que cette augmentation,
00:47:44 et c'est ça qui est vraiment terrible, s'accélère.
00:47:47 Aujourd'hui, on est en train de suivre le pire scénario possible
00:47:50 au niveau du dérèglement climatique.
00:47:53 Et toute cette glace, on sait que si elle fondait aujourd'hui,
00:47:56 elle pourrait augmenter le niveau des océans de 65 mètres.
00:47:59 Et sur Terre, juste entre 0 et 10 mètres d'altitude,
00:48:02 il y a 700 millions de personnes.
00:48:05 Et c'est vraiment ces espaces littoraux,
00:48:08 ces espaces économiques qui sont extrêmement riches,
00:48:11 c'est là où il y a le plus de croissance,
00:48:14 c'est là aussi où il y a le plus de croissance au niveau des populations.
00:48:17 Et on sait que ces populations, si ça continue comme ça,
00:48:20 elles commencent déjà à se déplacer, mais il y aura des déplacements
00:48:23 de plus en plus importants qui vont toucher non pas que ces populations-là,
00:48:26 mais tous les autres territoires sur Terre,
00:48:29 puisque ces populations-là, il faudra bien qu'elles aillent quelque part.
00:48:32 Ces activités économiques, il faudra bien qu'elles se déplacent.
00:48:35 Et donc, que l'on habite au Svalbard ou pas,
00:48:38 on va tous être touchés par la fonte de ces glaciers
00:48:41 et par l'augmentation du niveau des océans.
00:48:44 [Musique]
00:49:02 Je travaille pour AMAP, le Arctic Monitoring Assessment Programme,
00:49:06 qui est un des groupes de travail du Conseil de l'Arctique.
00:49:09 Et on a un rôle vraiment clé dans la transmission des connaissances scientifiques.
00:49:13 En fait, on est l'intermédiaire entre les scientifiques,
00:49:16 le monde académique et les gouvernements.
00:49:19 C'est les gouvernements qui nous approchent avec une liste de questions.
00:49:24 Et c'est à nous d'organiser le travail scientifique pour pouvoir répondre à ces questions.
00:49:28 Donc nous, non seulement on leur produit des connaissances,
00:49:30 mais aussi, ce qui est vraiment très très important,
00:49:32 c'est qu'on produit des recommandations.
00:49:35 Après, une fois qu'on partage cette science avec les gouvernements,
00:49:38 nous, ce qu'on souhaite voir, évidemment,
00:49:40 et ce que le reste de la planète souhaite voir aussi,
00:49:42 ce sont des réactions, des décisions prises le plus rapidement possible.
00:49:46 Et on voit qu'il y a certains sujets où les gouvernements réagissent très très vite.
00:49:50 Notamment au niveau de l'Arctique, tout ce qui touche la santé humaine,
00:49:54 tout ce qui touche la dégradation des écosystèmes,
00:49:56 les pays sont en train de réagir très vite.
00:49:58 C'est de mettre en place vraiment des solutions très concrètes
00:50:03 pour leur population qui habite au nord du cercle polaire.
00:50:07 Il y a d'autres sujets qui sont super touchy,
00:50:10 où là, ça avance beaucoup moins vite.
00:50:12 C'est tout ce qui touche aux énergies fossiles.
00:50:14 Parce que pour l'instant, c'est clair que l'Arctique est une des dernières régions
00:50:19 où il y a encore énormément d'énergie fossile.
00:50:22 Que ce soit ici du charbon, en Osvalbard, il y a du charbon de partout,
00:50:26 du gaz et du pétrole.
00:50:28 Il y a beaucoup de terres rares, minerais rares, au niveau du Groenland notamment.
00:50:32 Et là, on se rend compte que, malheureusement,
00:50:35 comme partout ailleurs sur Terre, ça n'avance pas assez vite.
00:50:38 Ce qui quitte, au niveau de la Norvège notamment,
00:50:40 à ouvrir de plus en plus de champs de pétrole.
00:51:07 C'est quoi "Ide's Ice" ?
00:51:09 Oh là là !
00:51:11 C'est ma plus grande histoire d'amour, je crois, ces glaciers.
00:51:16 C'est mes ex qui ne vont pas être très contents d'entendre ça.
00:51:20 Mais pour moi, c'est tout mon être, quoi,
00:51:26 et habité par ces glaciers.
00:51:28 Et c'est vraiment...
00:51:30 Pour moi, c'est toute ma vie.
00:51:34 Je ne sais pas comment je peux me désolidariser,
00:51:37 me détacher de ces environnements-là.
00:51:40 Et pour moi, c'est extrêmement important aussi
00:51:43 de faire en sorte que ce ne soit pas que ma glace,
00:51:46 mais que ce soit la glace de tout le monde, quoi.
00:51:49 C'est ce que j'essaie de faire tous les jours,
00:51:51 c'est de faire en sorte que toutes les personnes auxquelles je m'adresse,
00:51:55 elles aussi prennent un petit bout de cette glace
00:51:58 et comprennent à quel point cette glace est majestueuse,
00:52:02 à quel point c'est magique quand tu regardes des paysages pareils,
00:52:05 mais surtout à quel point cette glace est importante.
00:52:08 Et qu'aujourd'hui, chaque mètre cube de glace qui disparaît
00:52:12 est en train de tous nous impacter,
00:52:14 et d'impacter nos enfants, leurs enfants, etc., etc.,
00:52:18 sur des générations entières.
00:52:20 Et pour moi, d'arriver à partager ce message,
00:52:23 ça passe avant tout par les émotions, quoi.
00:52:26 Au-delà des connaissances scientifiques,
00:52:29 il faut que ça passe par le cœur,
00:52:31 et c'est ce que j'espère que les personnes qui regarderont,
00:52:34 en tout cas, ces documentaires-là,
00:52:37 comprendront à quel point on a de la chance, quoi.
00:52:41 C'est un privilège pour nous, encore aujourd'hui,
00:52:44 d'avoir des glaciers sur Terre, et qu'il faut tous ensemble
00:52:47 tout faire pour les préserver le plus longtemps possible.
00:52:50 "AIDS Designs", en Arctique, avec une glaciologue,
00:52:54 documentaire exclusif pour notre chaîne,
00:52:56 est réalisé par Pierre Dugovson.
00:52:59 Un film, vous venez de le voir, tourné sur l'archipel de Svalbard,
00:53:02 en Arctique, proche du pôle Nord,
00:53:04 une région qui se réchauffe 6 à 7 fois plus vite
00:53:07 que le reste de la planète.
00:53:09 Là aussi, où la glaciologue française Heidi Svest
00:53:12 y observe depuis des années le recul des glaciers,
00:53:15 avec, pour conséquence imparable, la montée des eaux.
00:53:18 Peut-on encore espérer enrayer ce phénomène
00:53:21 aux allures dramatiques, directement liées
00:53:23 au dérèglement climatique ?
00:53:25 Eh bien, nous allons en débattre maintenant,
00:53:27 avec nos invités présents sur ce plateau de "Débat doc",
00:53:30 et Heidi Svest est avec nous. Bienvenue.
00:53:32 C'est la magie de télévision, on vient de vous quitter.
00:53:35 On vous retrouve ici même, sur ce plateau.
00:53:37 -Il est plus chaud ici. -Vous êtes une glaciologue
00:53:40 de renommée internationale, nous vous avons suivie
00:53:43 tout au long de ce film. Vous êtes, entre autres,
00:53:45 membre du programme de surveillance et d'évaluation de l'Arctique,
00:53:48 et enseignante à l'université de Svalbard,
00:53:51 la plus septentrionale qui soit.
00:53:53 C'est en Norvège, on verra une carte tout à l'heure.
00:53:56 Votre ouvrage a pour titre "Sentinelle du climat",
00:53:59 publié aux éditions HarperCollins.
00:54:02 Yannick Jadot est également avec nous.
00:54:04 Bienvenue à vous, Yannick Jadot. -Bonjour.
00:54:06 -Vous étiez le candidat Europe Ecologie Les Verts
00:54:08 à l'occasion de l'élection présidentielle de 2022.
00:54:12 Vous êtes aujourd'hui sénateur Europe Ecologie Les Verts de Paris.
00:54:16 Vous avez été pendant 14 ans député européen,
00:54:19 sous la même étiquette, d'ailleurs.
00:54:21 Et votre dernier ouvrage s'intitule, lui, "Faire face,
00:54:24 le défi du siècle".
00:54:26 C'est un ouvrage publié aux éditions Les Petits Matins.
00:54:29 Une carte, je vous l'avais promis, pour situer Svalbard,
00:54:32 où a été tourné en deux fois, ce film.
00:54:35 C'est une première fois, je crois, c'est au printemps 2022,
00:54:38 et ensuite, on est à l'automne 2022.
00:54:40 -Des périodes assez magiques.
00:54:42 On est dans la transition jour-nuit,
00:54:44 nuit 24h/24, jour 24h/24.
00:54:46 Et donc, pour des réalisateurs,
00:54:48 vraiment des périodes où on a des lumières extraordinaires.
00:54:51 -On l'a vu, d'ailleurs, avec ces très belles images,
00:54:53 filmées par Pierre Dugovson, Svalbard,
00:54:56 donc à l'intérieur du cercle polaire arctique,
00:54:59 là où cette région se réchauffe
00:55:03 six à sept fois plus vite que la planète.
00:55:06 On va y venir tout de suite.
00:55:07 C'est donc un archipel norvégien.
00:55:09 Et c'est la base d'avancée de recherche en Arctique, en réalité.
00:55:12 Vous avez été doctorante pendant quatre ans.
00:55:14 La première fois que vous y étiez, sur place, c'était en 2008.
00:55:16 Et les choses, on l'a vu, ont bien changé,
00:55:18 au fur et à mesure que vous y allez.
00:55:20 -C'est vraiment cataclysmique, les changements là-bas.
00:55:22 Il faut s'imaginer que, sur Terre,
00:55:24 globalement, les températures ont gagné 1,1, 1,2 degré.
00:55:27 Au Svalbard, c'est six à sept degrés d'augmentation de température.
00:55:30 -Alors pourquoi six à sept fois...
00:55:33 -Oui, c'est une très bonne question.
00:55:35 -Plus que de réchauffement que sur les autres régions du monde.
00:55:38 -En fait, on se rend compte vraiment que les régions de neige et de glace
00:55:41 sont les régions qui se réchauffent le plus vite sur Terre,
00:55:43 parce que, quand on regarde des images,
00:55:45 on voit que ces surfaces sont très blanches.
00:55:48 Et ces surfaces, plus elles sont blanches,
00:55:50 elles vont renvoyer la chaleur du soleil en direction de l'espace.
00:55:53 C'est comme quand on a une maison qui est peinte en blanc
00:55:56 ou quand on a un T-shirt blanc pendant l'été,
00:55:58 on a un peu moins chaud.
00:56:00 Ces régions-là, puisqu'elles ont beaucoup de glace,
00:56:02 elles sont un petit peu plus froides.
00:56:04 Le problème, c'est que cette glace, elle se réchauffe très vite,
00:56:07 à cause de l'augmentation des températures, donc elle disparaît.
00:56:09 À la place de surfaces blanches, qu'est-ce qu'on a ?
00:56:11 On a un océan qui, lui, va être beaucoup plus foncé,
00:56:14 si la banquise disparaît.
00:56:16 Lorsque les glaciers se retirent, on a des roches
00:56:18 qui sont beaucoup plus foncées en couleur.
00:56:20 Donc c'est assez simple.
00:56:21 Le fait que l'Arctique s'assombrisse avec la perte de la glace,
00:56:25 ça fait que l'Arctique absorbe beaucoup plus de chaleur.
00:56:27 Et donc ça explique pourquoi l'Osevalbard en particulier,
00:56:30 cet archipel, aujourd'hui se réchauffe 6 à 7 fois plus vite
00:56:33 que le reste de la planète.
00:56:35 - Vous avez eu l'occasion de vous y rendre, dans cette région ?
00:56:37 - Non, malheureusement non.
00:56:39 - Est-ce que vous avez été sur l'un des pôles ?
00:56:41 Parce que, si j'ai bien appris ma leçon,
00:56:43 90% des glaces ne se trouvent pas en Arctique,
00:56:45 mais sur l'autre pôle,
00:56:47 le pôle Sud, en Antarctique.
00:56:49 - Non, je n'ai pas eu le privilège d'aller voir ces régions magnifiques.
00:56:54 En revanche, j'ai vécu au Bangladesh.
00:56:57 Et vous allez dire, le Bangladesh,
00:56:59 quel rapport entre l'Arctique, l'Antarctique, les glaciers ?
00:57:02 En fait, le Bangladesh, comme l'Inde, comme la Chine,
00:57:06 vivent réellement du régime de fonte des glaciers de l'Himalaya.
00:57:13 Et que la question des glaciers, la question de la glace en général,
00:57:18 elle concerne en fait la planète entière.
00:57:21 Vous avez parlé de l'élévation du niveau de la mer,
00:57:23 c'est évidemment une des conséquences absolument dramatiques
00:57:27 de la fonte des glaces.
00:57:29 Mais il faut voir que beaucoup, beaucoup, des milliards de personnes
00:57:33 dans le monde, vivent du régime des glaces,
00:57:37 et que, par exemple, la fonte des glaciers dans l'Himalaya
00:57:40 aura des conséquences absolument dramatiques
00:57:43 pour la sécurité alimentaire en Inde, au Bangladesh, en Chine,
00:57:47 là où il y a aujourd'hui quasiment la moitié de la population mondiale.
00:57:50 Donc on est sur un régime global qui est en train de s'affaisser,
00:57:55 de s'effondrer, et dont on perçoit encore aujourd'hui,
00:57:59 y compris parce que c'est tellement anxiogène que se le dire,
00:58:04 c'est déjà flippant,
00:58:06 c'est qu'on est en train de changer totalement notre système mondial,
00:58:11 notre système de climat, d'eau, de sécurité alimentaire,
00:58:16 et que si on n'agit pas, on va vers le chaos.
00:58:19 -D'ailleurs, c'était pas en Arctique que vous étiez récemment,
00:58:22 mais en Colombie, pour peut-être donner suite à ce qu'on a vu dans ce film,
00:58:25 c'était peut-être suite à une demande d'associations colombiennes,
00:58:30 c'est ce qu'on a vu dans ce document.
00:58:32 Vous y êtes rendue il y a assez peu de temps, pour y découvrir quoi ?
00:58:35 -Oui, je reviens tout juste de Colombie.
00:58:37 En Colombie, il y a des glaciers.
00:58:39 Ça peut paraître complètement fou, mais il y a des montagnes
00:58:41 jusqu'à 5 000 m d'altitude en Colombie.
00:58:43 L'altitude, c'est vraiment ce qui permet, lorsqu'il y a des précipitations,
00:58:46 qu'elles tombent sous forme de neige, et donc de créer des glaciers.
00:58:50 Il y a 70 petits glaciers posés sur les montagnes de Colombie.
00:58:54 Il y a un glaciologue local, tout seul, qui doit surveiller ces glaciers.
00:58:58 En fait, ils sont cruciaux, comme l'a très bien dit Yannick.
00:59:01 En fait, ces glaciers, en Colombie, ce sont parmi les meilleurs
00:59:03 châteaux d'eau que l'on a dans ces montagnes.
00:59:05 En période sèche et chaude, lorsqu'on n'a plus de pluie,
00:59:08 l'eau va venir d'où ?
00:59:10 Elle va venir de la fonte de la neige, de la fonte de la glace.
00:59:12 En Colombie, on se rend compte qu'il y a toute une agriculture
00:59:15 qui en dépend, vous parliez très bien, de la sécurité alimentaire.
00:59:18 -C'est le café, en l'occurrence, souvent, en Colombie.
00:59:21 C'est ce qui est dit dans ce film.
00:59:23 -Les pommes de terre, aussi.
00:59:25 Une agriculture de subsistance, aussi, qui dépend de ces glaciers.
00:59:28 Et n'oublions pas, ça, c'est crucial,
00:59:30 l'importance culturelle, aussi, de ces glaciers.
00:59:33 C'est vrai que, chez nous, en France, on est très fiers, quand même,
00:59:36 d'avoir des glaciers dans les Pyrénées, dans les Alpes,
00:59:38 et bien, en Colombie, aussi.
00:59:40 Il y a une immense fierté à avoir encore des glaciers dans ces régions,
00:59:43 et c'est des glaciers qui ont une importance énorme
00:59:45 pour les communautés autochtones.
00:59:47 -On va voir si j'ai bien appris ma leçon.
00:59:49 1 % des glaciers se situent aujourd'hui en montagne,
00:59:52 mais 99 % de la glace se situe soit au pôle nord,
00:59:57 soit au pôle sud, et 90 % des glaces se trouvent plutôt au pôle sud,
01:00:02 en Antarctique.
01:00:03 Est-ce qu'on observe le même phénomène
01:00:05 que celui qui est décrit, ici, du côté arctique,
01:00:08 en Antarctique, justement,
01:00:10 là où se trouve l'essentiel des glaces sur la planète ?
01:00:12 -Pendant longtemps, et si on vient au tout premier rapport du GIEC,
01:00:15 qui date du début des années 90,
01:00:17 on avait vraiment une mauvaise idée de ce qui se passait en Antarctique.
01:00:20 C'est très loin, c'est très cher,
01:00:22 d'aller mener des expéditions là-bas.
01:00:24 Aujourd'hui, on sait très clairement ce qui se passe en Antarctique.
01:00:26 L'Antarctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète.
01:00:30 L'Arctique, c'est plus trois à quatre fois,
01:00:32 mais l'Antarctique, comme vous l'avez très bien dit,
01:00:34 contient beaucoup plus de glace.
01:00:36 Pour vous donner une petite idée,
01:00:38 si l'Arctique perdait sa glace,
01:00:40 si le Groenland perdait sa glace,
01:00:42 c'est 6 à 7 m d'augmentation du niveau des mers partout sur Terre.
01:00:45 Donc le Bangladesh, c'est vite vu, c'est 90 % du territoire.
01:00:49 L'Antarctique contient beaucoup plus de glace.
01:00:51 Si l'Antarctique perdait sa glace,
01:00:53 c'est 58 m d'élévation du niveau des mers partout sur Terre.
01:00:57 Et un dernier chiffre,
01:00:59 aujourd'hui, entre 0 et 10 m d'altitude,
01:01:01 il y a un milliard de personnes sur Terre.
01:01:03 Je suis tout à fait d'accord.
01:01:05 Tout le monde est concerné par la hausse du niveau des mers,
01:01:07 qu'on habite au bord de la mer ou pas.
01:01:09 C'est nos infrastructures, c'est nos ports,
01:01:11 c'est notre agriculture,
01:01:13 c'est des déplacements de population.
01:01:15 Ça, ça se prépare tout de suite, l'élévation du niveau des mers.
01:01:17 Il faut qu'on cravache, parce qu'on va droit dedans.
01:01:20 - Alors, ça se prépare tout de suite ?
01:01:22 - Oui. - Réellement, ça se prépare en ce moment ?
01:01:24 Au moment où nous nous parlons, ça continue à se préparer ?
01:01:26 - Non. - Non ?
01:01:28 - Non, malheureusement, la science est là,
01:01:30 depuis longtemps. - Oui.
01:01:32 - Depuis des décennies, maintenant, la science nous dit,
01:01:34 étape après étape,
01:01:36 voilà ce qui va nous arriver.
01:01:38 Et on a été très longtemps
01:01:42 dans le déni, en réalité,
01:01:44 collectivement,
01:01:46 malgré la science,
01:01:48 malgré ce que nous, nous pouvions dire ou faire,
01:01:50 et c'était,
01:01:52 même il y a encore dix ans,
01:01:54 dans les négociations internationales sur le climat,
01:01:56 on parlait de la science,
01:01:58 et on parlait des générations futures.
01:02:00 Moi, j'étais, pendant longtemps,
01:02:02 directeur des campagnes de Greenpeace.
01:02:04 - Oui. - Le dérèglement climatique,
01:02:06 c'était aussi les ours blancs,
01:02:08 quand on parlait des pôles.
01:02:10 Et aujourd'hui, en fait,
01:02:12 quand on parle de dérèglement climatique,
01:02:14 on parle de sa maison.
01:02:16 On parle des 70 % de logements,
01:02:18 notamment dans les quartiers populaires
01:02:20 où les gens étouffent.
01:02:22 C'est la précarité énergétique,
01:02:24 c'est l'agriculture qui sait plus bien
01:02:26 comment se situer par rapport
01:02:28 à ces changements météorologiques
01:02:30 liés au dérèglement climatique.
01:02:32 C'est les catastrophes qu'on voit absolument partout.
01:02:34 Et on a l'impression
01:02:36 qu'en fait, on est passé,
01:02:38 comme si on était passé d'un régime climatique
01:02:40 à peu près stable,
01:02:42 il n'y a pas de dérèglement climatique,
01:02:44 ça va venir, mais on a le temps,
01:02:46 un autre régime stable
01:02:48 qui serait le dérèglement climatique.
01:02:50 Comme si on n'était pas
01:02:52 à devoir courir aujourd'hui
01:02:54 après chaque dixième
01:02:56 de réchauffement de la planète.
01:02:58 Comme si on n'était pas simplement au début du chaos,
01:03:00 mais qu'on était dans un régime de chaos.
01:03:02 Voilà, c'est ça, le dérèglement climatique.
01:03:04 On a d'autres formes de déni.
01:03:06 Vous voyez bien que partout,
01:03:08 regardez, on a frôlé
01:03:10 les températures de 45 degrés
01:03:12 en Amérique latine ces dernières semaines.
01:03:14 Et on n'est pas encore en été.
01:03:16 45 degrés, ce sont des records.
01:03:18 Y compris en Argentine,
01:03:20 qui a élu un climato-sceptique,
01:03:22 qui dit,
01:03:24 "c'est totalement", il le dit avec son vocabulaire
01:03:26 d'une grossièreté, d'une vulgarité absolue,
01:03:28 qui dit, "le dérèglement climatique,
01:03:30 "ça n'existe pas, c'est des conneries
01:03:32 "pour les scientifiques gauchistes."
01:03:34 Voilà, c'est comme ça qu'il parle
01:03:36 du dérèglement climatique.
01:03:38 On a partout en Europe
01:03:40 et dans le reste du monde
01:03:42 une extrême droite,
01:03:44 une droite qui vient directement,
01:03:46 aujourd'hui, sur le déni du dérèglement climatique.
01:03:48 C'est-à-dire qu'au fond,
01:03:50 ces défis extraordinaires
01:03:52 qu'on a devant nous,
01:03:54 pour ne pas s'emmerder,
01:03:56 ils le disent un peu comme ça,
01:03:58 pour ne pas s'embêter avec ces défis-là,
01:04:00 on les met complètement de côté.
01:04:02 Et puis, il y a une troisième forme de déni,
01:04:04 qui est le solutionnisme technologique.
01:04:06 C'est-à-dire qu'au fond,
01:04:08 on a un problème avec le transport aérien,
01:04:10 en 2060, il y aura l'avion vert.
01:04:12 On a un problème de transport au quotidien,
01:04:14 plutôt que de faire des transports collectifs,
01:04:16 on va remplacer
01:04:18 des voitures thermiques
01:04:20 par des SUV électriques.
01:04:22 On a un problème d'alimentation en électricité,
01:04:24 ne vous inquiétez pas, dans 20 ans,
01:04:26 il y aura de nouveaux réacteurs nucléaires.
01:04:28 Donc, on essaye de fuir
01:04:30 la transformation
01:04:32 de nos habitudes, c'est pas simple.
01:04:34 On doit changer toutes et tous,
01:04:36 et puis, surtout,
01:04:38 nos gouvernements, reconnaissons-le,
01:04:40 évitent,
01:04:42 refusent de taper
01:04:44 les rentes, les lobbies,
01:04:46 qui, aujourd'hui, nous empêchent d'avancer.
01:04:48 On parle de l'Arctique, on est dans le cynisme absolu.
01:04:50 En fait,
01:04:52 la fonte totale de la banquise,
01:04:54 c'est une opportunité extraordinaire
01:04:56 pour aller chercher
01:04:58 un peu plus de pétrole
01:05:00 là où on ne pouvait pas y aller.
01:05:02 C'est-à-dire que la banquise disparaît,
01:05:04 les glaciers fondent
01:05:06 à cause du pétrole,
01:05:08 et c'est une opportunité pour
01:05:10 être encore plus addictif
01:05:12 au pétrole. Tout ça est dingue,
01:05:14 donc il va falloir une sacrée rupture.
01:05:16 - Vous venez de nous le dire,
01:05:18 les scientifiques nous alertent depuis des années.
01:05:20 Vous êtes une scientifique,
01:05:22 vous vous définissez comme une sentinelle du climat,
01:05:24 j'ai souvent lu ça.
01:05:26 Vous faites partie de celle qui alerte,
01:05:28 qui continue d'alerter.
01:05:30 Vous évitez tout votre coeur,
01:05:32 tout votre expérience,
01:05:34 qui commence à se construire aussi,
01:05:36 au cours des années.
01:05:38 Mais on a le sentiment que les choses
01:05:40 ne se passent pas entre responsables politiques
01:05:42 et scientifiques, que le courant ne passe pas.
01:05:44 Comment avez-vous envie de réagir
01:05:48 à ce que vient de dire Yannick Jadot, par exemple ?
01:05:50 - Je suis d'accord sur énormément de points.
01:05:52 - Vous voulez rester dans votre rôle
01:05:54 simplement de sentinelle en disant "attention"
01:05:56 ou est-ce qu'il n'y a pas un moment où il faut...
01:05:58 - C'est notre rôle principal.
01:06:00 - Il faut être plus présent, s'impliquer davantage.
01:06:02 - C'est ça, d'abord pour informer
01:06:04 et pour faire des recommandations.
01:06:06 Je vois au conseil de l'article, là où je travaille,
01:06:08 on a une façon de fonctionner qui est vraiment intéressante.
01:06:10 On est un peu un mini-GIEC, un nano-GIEC,
01:06:12 qui est le groupement intergouvernemental
01:06:14 des experts sur le climat,
01:06:16 qui publie ses grands rapports
01:06:18 toutes les quelques années.
01:06:20 Au niveau de l'article, c'est intéressant
01:06:22 comment on fonctionne. Les gouvernements
01:06:24 viennent vers nous, les scientifiques,
01:06:26 avec des questions. Comment le changement climatique
01:06:28 va-t-il impacter nos populations,
01:06:30 et nous, ensuite, notre groupe de travail,
01:06:32 avec 800 experts scientifiques,
01:06:34 d'arriver à produire des rapports
01:06:36 pour répondre à leurs questions ?
01:06:38 Il y a une attente des gouvernements.
01:06:40 - Vous répondez aux questions et vous faites des préconisations.
01:06:42 C'est ce que vous dites dans ce film.
01:06:44 - Exactement.
01:06:46 - Là où ça bloque avec les responsables politiques,
01:06:48 il y a des sujets où, semble-t-il, les choses peuvent avancer,
01:06:50 c'est ce que vous dites aussi.
01:06:52 Santé publique, biodiversité...
01:06:54 Mais énergie fossile, on n'avance pas du tout.
01:06:56 C'est ce que vous dites aussi.
01:06:58 - C'est exactement ça.
01:07:00 Il y a 7 millions d'habitants dans l'Arctique,
01:07:02 c'est quand même une bonne population,
01:07:04 et cette population subit directement au cœur
01:07:06 de sa santé les effets du changement climatique.
01:07:08 On voit notamment que les glaces
01:07:10 ont emmagasiné
01:07:12 énormément de mercure.
01:07:14 On va parler de sujets un peu brutaux.
01:07:16 Plus on brûle d'énergie fossile, plus on émet de mercure.
01:07:18 Ce mercure, en fait, il arrive à s'enterrer,
01:07:20 à se stocker dans les glaces.
01:07:22 Malheureusement, on est en train de les perdre,
01:07:24 toutes ces glaces dans l'Arctique,
01:07:26 le mercure est remobilisé,
01:07:28 et ça impacte directement les populations.
01:07:30 Donc là, quand on dit aux pays de l'Arctique,
01:07:32 "Attention, vous et vos populations
01:07:34 "sont en train de subir l'impact du mercure",
01:07:36 la réaction est très rapide, pas que dans l'Arctique,
01:07:38 voire carrément au-delà.
01:07:40 Là, ça marche. Là, on est contents.
01:07:42 Il y a des grandes conventions, comme la convention Minimata,
01:07:44 qui est mise en place. Le souci,
01:07:46 c'est quand on touche à des sujets comme
01:07:48 l'exploitation du gaz, du pétrole,
01:07:50 le deep sea mining... - Les pays de l'Arctique,
01:07:52 on a le Groenland, on a la Finlande,
01:07:54 on a la Norvège. La Norvège, c'est un bon exemple.
01:07:56 Sur les énergies fossiles, il y a encore
01:07:58 énormément de réserves fossiles,
01:08:00 au large de la Norvège.
01:08:02 Il y a des projets. On nous en annonce d'ailleurs
01:08:04 assez fréquemment. - Il faut juste pas y toucher.
01:08:06 - Voilà. On est d'accord. - À un moment donné.
01:08:08 On peut pas, à la fois,
01:08:10 être aussi bien informé
01:08:12 sur le chaos
01:08:14 vers lequel on va.
01:08:16 La température du globe, moi,
01:08:18 quand on en fait... On nous dit toujours
01:08:20 "Quel type de comparaison vous pouvez faire pour que les gens se rendent compte ?"
01:08:22 C'est toujours très compliqué, parce qu'on se dit
01:08:24 "2 degrés de réchauffement climatique,
01:08:26 600 en moyenne, au fond,
01:08:28 qu'est-ce que ça change dans nos vies ?" On voit bien qu'en fait,
01:08:30 c'est pas du réchauffement
01:08:32 linéaire, c'est du dérèglement.
01:08:34 C'est du chaos. C'est de l'instabilité.
01:08:36 Moi, je compare à
01:08:38 la température humaine.
01:08:40 Quand on est à
01:08:42 39 degrés, au fond,
01:08:44 on n'est pas bien. Mais
01:08:46 on continue. Quand on est
01:08:48 à 41, ce qui est
01:08:50 ce vers où on va,
01:08:52 plus 4 degrés,
01:08:54 au fond, dans nos régions à nous,
01:08:56 c'est
01:08:58 nos organes qui commencent à déconner
01:09:00 complètement, qui commencent à se dérégler
01:09:02 complètement. Et c'est nos organes
01:09:04 au niveau climatique, ce sont les pôles,
01:09:06 c'est nos grandes forêts,
01:09:08 c'est l'océan, c'est les courants marins,
01:09:10 c'est les courants d'air.
01:09:12 Et donc, au fond, on est en train...
01:09:14 - Donc là, on en est là, je suis votre raisonnement.
01:09:16 - On est en train de se dérégler
01:09:18 complètement.
01:09:20 Et là, on a quelque chose
01:09:22 qui ne va plus,
01:09:24 c'est qu'on voit la COP
01:09:26 qui arrive, qui démarre...
01:09:28 - Vous parlez de la COP 28 ? - La COP 28,
01:09:30 qui démarre à Dubaï.
01:09:32 On n'arrive pas à parler des énergies fossiles
01:09:34 comme ça.
01:09:36 On sait que c'est la principale
01:09:38 cause de nos émissions
01:09:40 de gaz à effet de serre et du dérèglement climatique.
01:09:42 On n'arrive pas à dire comment
01:09:44 on sort des énergies fossiles.
01:09:46 On sait que tout ce qui est emmagasiné,
01:09:48 il ne faut plus y toucher.
01:09:50 C'est une folie, il ne faut plus y toucher.
01:09:52 Et il va falloir arrêter
01:09:54 une partie
01:09:56 de l'exploitation pétrolière
01:09:58 et gazière qui a déjà commencé.
01:10:00 Et à la place de ça,
01:10:02 on a... Il y a eu une enquête
01:10:04 qui est sortie dans les journaux mondiaux
01:10:06 il y a quelques jours.
01:10:08 On a près de 400 bombes climatiques
01:10:10 de gisements pétroliers,
01:10:12 y compris en projet,
01:10:14 qu'on continue à financer avec de l'argent public,
01:10:16 que nos banques dans lesquelles on met nos économies
01:10:18 continuent à financer.
01:10:20 Là encore, si on n'est pas capable
01:10:22 collectivement d'avoir
01:10:24 ce qu'on appelle un traité de non-prolifération
01:10:26 des énergies fossiles,
01:10:28 on arrête.
01:10:30 Et bien, ça sera la catastrophe pour nous.
01:10:32 - Donc ça, très concrètement, ça fait partie
01:10:34 de vos préconisations. - Oui.
01:10:36 - Il n'y a eu aucun projet dans cette région
01:10:38 concernant les énergies fossiles. - Alors, pas dans cette région.
01:10:40 Franchement, sur la planète entière.
01:10:42 - Il faut savoir aujourd'hui,
01:10:44 il y a des réalités physiques qui sont liées
01:10:46 à ce changement climatique, avec lesquelles
01:10:48 on ne peut pas négocier. Aujourd'hui,
01:10:50 on sait que si on ouvre
01:10:52 un nouveau gisement de gaz
01:10:54 ou de pétrole, ou si on va chercher encore plus de charbon
01:10:56 pour le brûler, on va pulvériser
01:10:58 des seuils de température, notamment
01:11:00 le seuil des 1,5 degré d'augmentation
01:11:02 de température. Ce seuil n'est pas du tout tiré
01:11:04 d'un chapeau, il a une vraie réalité physique
01:11:06 derrière. On sait que si on franchit
01:11:08 les 1,5 degré
01:11:10 d'augmentation globale, donc partout
01:11:12 sur Terre de la température, nous,
01:11:14 ce que l'on observe dans les glaces, c'est que le Groenland
01:11:16 va commencer à s'effondrer de façon
01:11:18 irréversible. Donc, on aura 6 à 7 mètres
01:11:20 d'augmentation du niveau des mers.
01:11:22 - Donc là, on sera sur un point de non-retour.
01:11:24 - On sera sur un point de non-retour. C'est exactement cette notion-là,
01:11:26 la notion de point de non-retour. - D'accord.
01:11:28 - L'Ouest dans l'Antarctique aussi, 4 à 5 mètres d'élévation
01:11:30 du niveau des mers. Les glaciers de montagne,
01:11:32 chez nous, on peut leur dire ailleurs. - Il faut se rendre compte que
01:11:34 il y a un milliard de gens
01:11:36 qui sont directement impactés.
01:11:38 - Exactement. - Il y a un milliard de gens
01:11:40 qui vivent sur nos côtes.
01:11:42 Vous vous rendez compte ? On a un débat
01:11:44 totalement hallucinant aujourd'hui
01:11:46 dans nos parlements sur
01:11:48 l'immigration. Là,
01:11:50 en termes de migration,
01:11:52 on est dans une zone qu'on n'imagine
01:11:54 même pas, en fait. - Oui, oui, exactement.
01:11:56 Et dans les 17 prochaines années,
01:11:58 c'est 87 millions de personnes
01:12:00 qui vont être concernées, juste dans les 17 prochaines
01:12:02 années, sur Terre, par le fait que le niveau
01:12:04 de la mer augmente et, en cas
01:12:06 de tempête, de précipitation très intense,
01:12:08 ces personnes-là vont se retrouver les pieds dans l'eau.
01:12:10 - On parle de New York, Shanghai,
01:12:12 voilà, pour des grandes villes, Sinai,
01:12:14 par exemple, c'est pour un peu illustrer
01:12:16 nos propos. - Oui, on parle de Bordeaux,
01:12:18 Le Havre, La Rochelle, exactement,
01:12:20 le nord de la France, c'est chez nous directement.
01:12:22 - La Camargue. - La Camargue. Ces populations-là,
01:12:24 elles vont pas aller habiter dans
01:12:26 des déserts, elles vont aller habiter dans des endroits,
01:12:28 dans des pays suffisamment sécures,
01:12:30 dans des endroits où on peut
01:12:32 s'établir, s'installer,
01:12:34 développer sa famille en bonne santé.
01:12:36 Il va falloir vraiment réfléchir très
01:12:38 sérieusement à ce qu'en fait ces populations
01:12:40 qui vont se déplacer. - Yannick Jadot
01:12:42 vient de prononcer le mot de traité de
01:12:44 non-prolifération, pour illustrer vos
01:12:46 propos, pour dire stop, en fait,
01:12:48 aux énergies fossiles. - Oui, oui.
01:12:50 - C'est le lobbying industriel,
01:12:52 là, qui... Est-ce que
01:12:54 ce sont les responsables gouvernementaux
01:12:56 qui ne mettent pas ce type de
01:12:58 traité en place, qui n'arrivent pas à se mettre d'accord à l'échelle
01:13:00 de la planète, ou c'est pas eux
01:13:02 qui font la loi, et ce sont
01:13:04 les lobbyistes industriels, les acteurs
01:13:06 industriels de secteur qui font que
01:13:08 les choses ne peuvent pas se faire
01:13:10 dans ce sens-là. - Je suis curieuse de voir...
01:13:12 - Moi, je suis curieuse d'avoir votre avis.
01:13:14 - Je peux vous parler de la COP28 qu'on est en train de préparer,
01:13:16 qui est déjà en préparation depuis des mois et des
01:13:18 semaines. Ca va être
01:13:20 très compliqué. Moi, la première, je me souviens,
01:13:22 il y a quelques mois, je disais que c'était plutôt positif
01:13:24 finalement qu'on ait une COP, une conférence du
01:13:26 climat, dans un pays pétro-gazier.
01:13:28 Voilà, c'est important qu'on garde le
01:13:30 dialogue ouvert. Je pense que j'étais naïve,
01:13:32 mais à un point vraiment stratosphérique.
01:13:34 Il y a une étude qui est sortie de la BBC
01:13:36 hier ou avant-hier, qui nous
01:13:38 explique que, finalement, le
01:13:40 docteur Sultan Alphabert,
01:13:42 qui est le président de la COP28 cette année,
01:13:44 qui est quand même le CEO
01:13:46 de Adnok, qui est une grosse industrie
01:13:48 pétro-gazière, le PDG, voilà,
01:13:50 qui souhaite profiter de la
01:13:52 COP28 pour signer des contrats, pour créer
01:13:54 de nouvelles opportunités business
01:13:56 pour les énergies fossiles. - C'est le monde
01:13:58 à l'envers, quoi. - Vous savez, on est...
01:14:00 Il y a peu de moments
01:14:02 dans la vie... Vous savez, c'est un peu la fable
01:14:04 de la grenouille. Vous savez, si vous voulez ébouillanter
01:14:06 une grenouille, si vous la mettez
01:14:08 dans l'eau chaude, elle sort,
01:14:10 elle s'éjecte pour survivre.
01:14:12 Mais si vous la mettez dans l'eau froide et que vous montez
01:14:14 vraiment très...
01:14:16 très progressivement la température,
01:14:18 en fait, elle se neutralise,
01:14:20 elle... Voilà, et puis,
01:14:22 elle finit ébouillantée. C'est ça,
01:14:24 notre situation. Est-ce qu'on est capable,
01:14:26 au fond, d'avoir un
01:14:28 moment où on dit
01:14:30 "Stop, on change de modèle ?"
01:14:32 Est-ce que notre modèle est si
01:14:34 bienveillant, fraternel,
01:14:36 juste, que
01:14:38 respectueux de la nature et de nous-mêmes
01:14:40 qu'il faille absolument garder
01:14:42 ce modèle et nier ce qui
01:14:44 est en train de se passer ? Je ne crois pas.
01:14:46 Donc, il faut qu'on arrive, et ça, c'est notre
01:14:48 responsabilité aussi. C'est la responsabilité
01:14:50 des entreprises, c'est la responsabilité
01:14:52 des syndicats, c'est la responsabilité des citoyens,
01:14:54 des artistes, de tout le monde,
01:14:56 de dire, au fond, si on sort
01:14:58 du pétrole, est-ce qu'on rentre dans
01:15:00 un monde horrible ou pas ?
01:15:02 Est-ce que, c'est
01:15:04 ce que disent les experts scientifiques,
01:15:06 multiplier par trois les énergies
01:15:08 renouvelables, est-ce que c'est une catastrophe ?
01:15:10 Je ne crois pas. Est-ce que
01:15:12 agir sur nos logements,
01:15:14 les isoler, est-ce que
01:15:16 c'est une catastrophe ? Non.
01:15:18 Il y aura moins de pauvres énergétiques
01:15:20 l'hiver, moins de gens qui suffoquent l'été,
01:15:22 donc tout ça crée de l'emploi,
01:15:24 ça crée de l'activité
01:15:26 économique, ça crée du bien-être.
01:15:28 Est-ce que changer notre modèle agricole
01:15:30 pour avoir plus
01:15:32 d'alimentation de qualité,
01:15:34 moins de destruction de l'Amazonie
01:15:36 pour faire du soja qui alimente
01:15:38 nos élevages industriels, est-ce que c'est
01:15:40 aller vers le mal ou vers le bien ?
01:15:42 Donc, au fond, à un moment donné,
01:15:44 il faut qu'on ait des responsables politiques,
01:15:46 nous le sommes, nous le faisons à l'échelle
01:15:48 de ce que nous pouvons faire, nous, écologistes,
01:15:50 mais des responsables politiques qui n'aient pas peur
01:15:52 de ce que certains économistes
01:15:54 appellent le moment Pélarbourg,
01:15:56 c'est Lester Brown qui... C'est-à-dire qu'au fond,
01:15:58 comme les Etats-Unis, quand il y a eu l'attaque de Pélarbourg,
01:16:00 ils sont sortis du déni
01:16:02 qu'ils pouvaient être isolés de la guerre,
01:16:04 et ils ont mobilisé toute leur société
01:16:06 pour faire face à la guerre.
01:16:08 Et là, on a une guerre du climat,
01:16:10 c'est pas le moment de signer des armistices avec les lobbies.
01:16:12 - Exactement.
01:16:14 - Quelle image vous en avez des responsables politiques ?
01:16:16 - Alors,
01:16:18 j'ai la chance de pouvoir rencontrer...
01:16:20 - J'ai lu un portrait de vous dans "Le Quotidien Libération"
01:16:22 où vous étiez pas convaincue du tout
01:16:24 par l'implication politique, finalement.
01:16:26 - Alors, non, ça dépend lesquels. J'ai la chance de...
01:16:28 - Merci ! - Oui, vraiment.
01:16:30 - Parce qu'il y a pas "les" politiques.
01:16:32 - J'ai la chance de rencontrer beaucoup d'élus de terrain,
01:16:34 de petites communes, rurales ou urbaines.
01:16:36 C'est assez extraordinaire
01:16:38 de voir à quel point les choses bougent.
01:16:40 Je pense que ces personnes,
01:16:42 comme vous, se rendent bien compte
01:16:44 que si on parle pas du climat...
01:16:46 - Ils le perçoivent, pour leurs concitoyens,
01:16:48 très concrètement, c'est ça ?
01:16:50 - Je pense que le lien avec les concitoyens est beaucoup plus fort.
01:16:52 Et, pour moi, je suis convaincue
01:16:54 que la lutte contre le changement climatique
01:16:56 et l'érosion de la biodiversité,
01:16:58 elle sera locale ou elle ne se fera pas.
01:17:00 Après, on a besoin, bien sûr, des grandes instances politiques
01:17:02 pour mettre en place des réglementations.
01:17:04 - Les enjeux que nous avons évoqués ensemble, pour le moins.
01:17:06 - Tout à fait.
01:17:08 Mais c'est vrai qu'il y a énormément
01:17:10 d'envie, de motivation, de mobilisation
01:17:12 des élus de terrain.
01:17:14 On a vraiment besoin, jusqu'au plus haut niveau
01:17:16 de l'État, que les choses bougent.
01:17:18 - Tout à l'heure, vous avez évoqué des solutions
01:17:20 scientifiques, le progrès scientifique.
01:17:22 Les progrès scientifiques pourraient, en partie,
01:17:24 enrayer le phénomène dont nous parlons
01:17:26 aujourd'hui. Est-ce que vous voyez des solutions
01:17:28 scientifiques, vous, capables ?
01:17:30 Vous n'avez pas l'air d'y croire de trop.
01:17:32 - Ah, si, si, si. Vous vous détrompez.
01:17:34 - Vous allez répondre. - Scientifique ou technologique ?
01:17:36 - Technologique, pardon. Et scientifique.
01:17:38 - Oui, oui, les deux sont liés, bien sûr.
01:17:40 On est d'accord.
01:17:42 - On peut protéger les glaciers, très concrètement,
01:17:44 par rapport à ce qu'on a vu là. J'ai vu qu'en Italie,
01:17:46 certains essaient de bâcher des glaciers
01:17:48 pour les préserver un tant soit peu,
01:17:50 mais ça n'a pas l'air d'être une bonne solution,
01:17:52 parce que ça libère des fibres, qui, après, vont aller
01:17:54 dans des rivières, etc.
01:17:56 Il y a des solutions, quand même, technologiques
01:17:58 qui sont devant nous, et qui pourraient, quand même,
01:18:00 nous donner un petit rayon de soleil,
01:18:02 par rapport à tout ce qu'on vient de se dire.
01:18:04 - Ce qui est crucial, déjà, c'est qu'on n'y arrivera pas
01:18:06 sans sobriété. On n'y arrivera pas
01:18:08 sans des écosystèmes
01:18:10 qui soient en pleine santé, que ce soit les océans,
01:18:12 les prairies, les forêts, on a vraiment besoin
01:18:14 des écosystèmes qui marchent. Ça, en quelque sorte,
01:18:16 ce sont les meilleures technologies naturelles
01:18:18 qui nous permettent de lutter contre le changement climatique.
01:18:20 Ensuite, on se rend
01:18:22 de plus en plus compte qu'on aura certainement besoin
01:18:24 d'une partie de ce qu'on appelle
01:18:26 la géoingénierie. Alors, énorme prudence
01:18:28 sur ce sujet-là, vraiment,
01:18:30 faire très attention. On se rend compte
01:18:32 que plus le permafrost, donc ce sol
01:18:34 gelé en permanence... - Là, il s'agit de modifier le climat ?
01:18:36 - Alors, oui, alors,
01:18:38 en fait, il y a deux catégories de géoingénierie.
01:18:40 Il y en a une qui vise à essayer
01:18:42 d'attraper le carbone, d'attraper le CO2
01:18:44 et le méthane et de l'enfouir.
01:18:46 C'est une technologie qui marche
01:18:48 pas du tout à l'échelle dont on a besoin aujourd'hui,
01:18:50 qui coûte encore très cher.
01:18:52 Si on veut complètement compenser
01:18:54 nos émissions de gaz à effet de serre grâce à cette technologie,
01:18:56 ça nous demanderait tellement d'électricité
01:18:58 que c'est l'équivalent de la consommation mondiale
01:19:00 d'électricité aujourd'hui. Donc, pour l'instant,
01:19:02 on n'y est pas. Il y a d'autres, mais on va
01:19:04 en avoir besoin d'une petite partie de cette technologie,
01:19:06 c'est sûr. L'autre partie,
01:19:08 qui est très flippante, c'est la manipulation
01:19:10 du climat. Et là, notamment, il y a
01:19:12 beaucoup de start-up, notamment une qui s'appelle
01:19:14 Make Sunsets, qui est aux États-Unis,
01:19:16 qui m'ont blacklistée, je pense,
01:19:18 qui vise à rejeter
01:19:20 des particules de soufre dans la stratosphère.
01:19:23 Alors, en fait, les volcans font ça très bien,
01:19:25 de façon minime, mais lorsqu'on
01:19:27 plâtre notre stratosphère
01:19:29 de particules, en fait, ça bloque
01:19:31 une partie du rayonnement solaire sur Terre.
01:19:33 Je pense que ces personnes-là n'ont pas
01:19:35 tout à fait compris que le problème, c'était
01:19:37 les énergies fossiles, pas le soleil.
01:19:39 Le soleil, on en a encore plutôt pas mal besoin.
01:19:41 Je pense que les agriculteurs seront les premiers
01:19:43 à dire qu'on aimerait bien avoir un peu d'énergie
01:19:45 du soleil. Le souci de cette
01:19:47 technologie, c'est qu'on peut le faire dès aujourd'hui,
01:19:49 on peut en appuyer sur un bouton et le faire.
01:19:51 Le problème, il est multiple, c'est qu'on perturbe
01:19:53 le cycle de l'eau, qu'on acidifie encore
01:19:55 plus les pluies et les océans,
01:19:57 et qu'on risque aussi
01:19:59 de mettre notre climat sous perfusion.
01:20:01 C'est-à-dire que chaque année, on va devoir
01:20:03 balancer ces particules dans la stratosphère.
01:20:05 Et on sait jamais s'il y a une guerre mondiale,
01:20:07 s'il y a des problèmes économiques, et qu'une année,
01:20:09 on ne peut plus le faire, on peut se taper
01:20:11 une augmentation de température de plusieurs
01:20:13 degrés en quelques mois à peine.
01:20:15 Donc ça, c'est terrible. Faire très attention.
01:20:17 - Je vous ai coupé tout à l'heure. - Non, pas du tout.
01:20:19 - Pour revenir sur ces apports potentiels,
01:20:21 technologiques potentiels. Vous n'avez pas l'air
01:20:23 convaincu tout à l'heure. - Non, non, mais moi,
01:20:25 je suis pour l'innovation,
01:20:27 je suis pour la recherche scientifique.
01:20:29 On a des enjeux majeurs,
01:20:31 par exemple, dans le stockage de l'électricité.
01:20:33 On a des enjeux majeurs
01:20:35 d'innovation pour que
01:20:37 notre transition énergétique,
01:20:39 qui va reposer sur l'électricité,
01:20:41 ne se traduise pas par une nouvelle forme d'extractivisme.
01:20:43 Dans les pays du Sud,
01:20:45 on aura remplacé le pétrole
01:20:47 et les mines classiques par un nouvel
01:20:49 extractivisme, avec un...
01:20:51 Quand on va chercher le cobalt, le lithium,
01:20:53 dans certains pays, c'est une catastrophe
01:20:55 écologique et sociale.
01:20:57 Donc si c'est pour
01:20:59 reproduire en permanence
01:21:01 le même système qui
01:21:03 explose les limites de la planète,
01:21:05 en disant qu'il y aura une solution, on ne va rien
01:21:07 changer, mais il y aura une solution
01:21:09 technologique qui nous permettra
01:21:11 de conserver notre système
01:21:13 tel qu'il existe, c'est aberrant, ça.
01:21:15 Quand vous avez,
01:21:17 aujourd'hui, dans les forêts,
01:21:19 dans les champs, des paysans
01:21:21 ou des forestiers qui sont
01:21:23 en train à la fois d'utiliser
01:21:25 Internet pour se renseigner en
01:21:27 Australie, en Norvège
01:21:29 ou au Burkina Faso,
01:21:31 comment on adapte telle plante ?
01:21:33 C'est de l'innovation.
01:21:35 Pour faire en sorte qu'en fait, notre agriculture
01:21:37 reste paysanne et qu'elle
01:21:39 soit agroécologique.
01:21:41 Quand on, je l'ai dit, on fait de la recherche
01:21:43 sur le stockage d'électricité
01:21:45 et à mon avis, ça viendra vite,
01:21:47 c'est une formidable avancée
01:21:49 pour sortir du charbon,
01:21:51 du gaz, du pétrole,
01:21:53 pour aller
01:21:55 vers les énergies renouvelables de manière
01:21:57 extrêmement forte. Donc au fond,
01:21:59 on a besoin d'ingénierie,
01:22:01 on a besoin d'innovation,
01:22:03 mais attention, parce qu'à la fin, on finit
01:22:05 avec Elon Musk et on se dit qu'on va
01:22:07 recréer les conditions de la Terre
01:22:09 sur Mars. Je veux dire, vous finissez
01:22:11 parfaitement votre doc,
01:22:13 en disant au fond, c'est le beau
01:22:15 qu'on doit défendre. L'enjeu pour nous,
01:22:17 c'est pas de sauver la planète, la planète, elle se sauvera
01:22:19 sans nous. L'enjeu
01:22:21 pour nous, si on veut sauver l'humanité
01:22:23 et le vivant d'un humain,
01:22:25 c'est d'aimer la planète,
01:22:27 c'est d'aimer la nature, c'est d'aimer
01:22:29 une alimentation de qualité, c'est
01:22:31 de pas se satisfaire qu'on a
01:22:33 cherché ou qu'on brûle du charbon
01:22:35 en Chine pour consommer
01:22:37 n'importe quoi chez nous.
01:22:39 Pourquoi j'aime l'éolien ?
01:22:41 Les gens disent "on aime, on aime pas",
01:22:43 il y a ce grand débat. - C'est pas seulement parce que vous êtes Picard d'origine.
01:22:45 - Non, mais oui, mais
01:22:47 pourquoi ? Parce qu'au fond, c'est aussi
01:22:49 ce dont on a besoin,
01:22:51 on le produit à côté,
01:22:53 on doit assumer. Moi, pourquoi
01:22:55 je suis pour la relocalisation d'une partie
01:22:57 de nos industries polluantes ? C'est pour qu'on
01:22:59 se rende compte aussi de l'empreinte
01:23:01 de nos modes de vie, et on peut
01:23:03 être plus sobre.
01:23:05 La sobriété, c'est éviter la pénurie,
01:23:07 c'est éviter le gaspillage
01:23:09 et la pénurie. C'est pas
01:23:11 demander aux gens qui ont pas de moyens
01:23:13 d'en avoir encore moins.
01:23:15 Ceux qui sont les populations vulnérables
01:23:17 dans le monde et dans notre société,
01:23:19 ça doit être les premiers bénéficiaires
01:23:21 de nos mesures. C'est ceux qui
01:23:23 subissent le plus le dérèglement climatique,
01:23:25 ils morflent les pollutions,
01:23:27 le dérèglement climatique,
01:23:29 le chaos, mais ça doit être les premiers bénéficiaires
01:23:31 quand vous isolez un logement,
01:23:33 quand vous faites des transports collectifs,
01:23:35 quand vous assurez que, là où il n'y a pas
01:23:37 de transports collectifs, il y a une voiture
01:23:39 qui n'est pas chère et pas des SUV
01:23:41 à 70 000 balles, tout ça.
01:23:43 C'est participer, du mieux
01:23:45 vivre ensemble aussi. - Ca va bientôt être la fin
01:23:47 de l'émission. Le programme
01:23:49 d'Elise Sevès pour les mois qui viennent,
01:23:51 il s'établit comment ?
01:23:53 - Déjà, COP28.
01:23:55 Donc COP28 pendant
01:23:57 les prochaines semaines. - Donc là,
01:23:59 relation avec des responsables politiques
01:24:01 à nouveau, des décideurs.
01:24:03 - C'est ça, on va essayer de faire bouger des choses
01:24:05 et malgré le fait... - Elie a une
01:24:07 magnifique, moi je l'ai vue à Glasgow,
01:24:09 exposition justement sur
01:24:11 tous les enjeux de la glace.
01:24:13 C'est passionnant.
01:24:15 - Elle se balade, cette exposition ?
01:24:17 - Elle se balade surtout au COP en ce moment.
01:24:19 On essaie de faire bouger les décideurs.
01:24:21 - Faut le mettre dans les villes. - Je suis d'accord.
01:24:23 - Il faut que chacun puisse y accéder.
01:24:25 - L'éducation, c'est la clé.
01:24:27 En parlant d'éducation, je retourne
01:24:29 au Svalbard justement, donner des cours à l'université.
01:24:31 Il faut quand même que je retrouve mes étudiants
01:24:33 de temps en temps et puis ensuite toujours
01:24:35 en préparation de prochaines expéditions,
01:24:37 que ce soit sur les glaciers tropicaux.
01:24:39 On essaie avec mes équipes de partir en Afrique de l'Est,
01:24:41 là où les glaciers sont la source
01:24:43 la plus haute et la plus permanente
01:24:45 d'une île. On se rend compte que leur importance,
01:24:47 elle se voit sur des centaines, voire des milliers de kilomètres.
01:24:49 - Ça se trouve où en Afrique de l'Est ?
01:24:51 - Ça se trouve en Ouganda. - Ouganda.
01:24:53 - Les glaciers des monts, des Rwenzori, ça s'appelle.
01:24:55 - Et le Kilimanjaro, c'est quoi son espérance de vie ?
01:24:57 - C'est compliqué.
01:24:59 Le problème du Kilimanjaro, c'est lié en grande partie
01:25:01 à la déforestation, au-delà du changement
01:25:03 climatique de la montagne.
01:25:05 Il y a encore beaucoup de choses qu'on peut faire
01:25:07 pour les glaciers. Vraiment, l'objectif
01:25:09 dans tout ce que je fais, c'est de continuer à sensibiliser,
01:25:11 de parler avec le cœur, mais de faire en sorte
01:25:13 que tout le monde comprenne à quel point
01:25:15 ces glaciers, on en a bien besoin.
01:25:17 - Avec cette formidable lettre aux glaciers
01:25:19 que vous avez écrite,
01:25:21 j'imagine, de votre main,
01:25:23 citée avec votre voix
01:25:25 dans le documentaire que
01:25:27 nous avons vu à l'occasion
01:25:29 de cette émission, un grand merci vraiment
01:25:31 à tous les deux d'avoir participé à ce Débat Doc.
01:25:33 Vos réactions, ça sera sur #DébatDoc.
01:25:35 Alors là, à mon avis, c'est à espérer.
01:25:37 J'espère qu'il y aura beaucoup de réactions.
01:25:39 Vous serez là, d'ailleurs, pour réagir
01:25:41 à ce qu'elles seront, ces réactions.
01:25:43 Merci à Selma Sally et Sarah Ogil.
01:25:45 - Les glaciers, c'est chez nous aussi.
01:25:47 C'est les Alpes et les Pyrénées, vous avez raison de le citer.
01:25:49 - Qui m'ont aidé à préparer cette émission.
01:25:51 Prochain rendez-vous avec Débat Doc,
01:25:53 ça sera ici même, même place, même heure,
01:25:55 et toujours avec son documentaire et son débat.
01:25:57 A très bientôt.
01:25:59 ♪ ♪ ♪
01:26:09 [Musique]

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