La division Martel est un groupe de très jeunes néonazis parisiens, fans de combats et d’Hitler. Grâce aux #FAFLeaks, plus de 2000 vidéos, audios et SMS inédits, on vous raconte le quotidien de ces lycéens néonazis, entre ratonnades et Parcoursup.
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00:00 [Cris de joie]
00:02 [Musique]
00:04 [Cris de joie]
00:06 [Musique]
00:08 [Musique]
00:10 [Musique]
00:12 [Musique]
00:14 Ces vidéos de militants néo-nazis,
00:16 vous ne les avez jamais vues.
00:18 Je suis Mathieu Mollard, journaliste à Street Press
00:20 et depuis près de 10 ans, je travaille
00:22 sur l'extrême droite. Avec mon collègue
00:24 Christophe, nous avons mis la main sur plus
00:26 de 2000 documents inédits.
00:28 On les a baptisés les "Faflix".
00:30 Des photos, des audios et des vidéos
00:32 qui nous permettent une plongée au coeur
00:34 des groupes néo-fascistes les plus
00:36 violents et les plus radicaux de Paris.
00:38 On les voit faire la fête, s'entraîner à la baston
00:40 ou même passer à tabac des gens.
00:42 Des images inédites et passionnantes.
00:44 Certaines d'entre elles devraient même
00:46 intéresser la justice. On a donc décidé
00:48 d'en faire une série. Trois vidéos
00:50 diffusées sur notre chaîne YouTube
00:52 et trois enquêtes écrites publiées sur notre site
00:54 internet. L'essentiel de ces données
00:56 est d'un même téléphone, celui de Pierre, tout juste
00:58 18 ans, et militant dans un de
01:00 ces groupes néo-nazis, la division Martel.
01:02 Un groupuscule dont les membres sont très
01:04 jeunes et très violents. Ce premier
01:06 épisode leur est consacré.
01:08 Les "Faflix" regroupent des documents
01:14 très variés. Certains montrent
01:16 leur radicalité, comme cette vidéo
01:18 où on les voit faire des saluts nazis sur fond de musique
01:20 du 3ème Reich.
01:22 D'autres images montrent
01:24 l'extrême violence de ces jeunes qui s'entraînent à la baston.
01:26 Ici, on les voit tabasser quelqu'un.
01:28 Mais on voit aussi leur quotidien et leur soirée,
01:36 avec quelques pépites, comme ces
01:38 images de Marc de Cacré-Valmenier
01:40 qui chante à tue-tête du "Caty Perry"
01:42 sous des projecteurs rosé-blue.
01:52 Le Golgoth Fiché S est le leader
01:54 des néo-nazis parisiens. Il chapeaute
01:56 plusieurs dizaines de militants
01:58 ultra-violents. C'est un personnage clé.
02:00 On vous racontera son histoire dans le 3ème
02:02 épisode des "Faflix". Pour compléter
02:04 cette enquête, nous nous sommes procurés des documents
02:06 judiciaires, des comptes rendus de perquisition
02:08 ou des procès-verbaux d'audition
02:10 menés par la police au cours de garde à vue.
02:12 Mais revenons à la division Martel.
02:14 Leur nom est une référence à Charles
02:16 Martel qui, dans l'imaginaire "Faf",
02:18 a bouté les Arabes hors de France.
02:20 La division Martel regroupe
02:22 une grosse vingtaine de personnes très actives.
02:24 D'autres les rejoignent plus ponctuellement.
02:26 Ces militants sont très jeunes,
02:28 ils ont entre 14 et 22 ans.
02:30 Certains sont donc encore lycéens,
02:36 ils sont très antisémites, racistes,
02:38 homophobes et multiplient
02:40 les références nazies.
02:42 Ils ont aussi les préoccupations de jeunes de leur âge.
02:48 Plutôt classe moyenne ou un peu bourge.
02:50 Le mélange de références
02:56 issues de la pop-culture et de symboles
02:58 fascistes est plutôt détonnant.
03:00 Par exemple, sur ce petit montage vidéo qu'ils ont réalisé
03:02 eux-mêmes, on les voit tabasser quelqu'un.
03:04 En musique de fond, c'est du Free Score Leon.
03:06 Et ensuite, ils s'amusent
03:08 à une fête foraine.
03:10 *Musique*
03:12 Autre exemple, sur leur drapeau, on retrouve la croix celtique
03:22 écourtée. C'est le symbole
03:24 historique des groupuscules néofascistes
03:26 et nationalistes révolutionnaires,
03:28 notamment du GUD, et un Pokémon.
03:30 La division Martel est d'ailleurs en quelque sorte
03:34 le mouvement de jeunesse du GUD,
03:36 le groupe historique néo-nazi de Paris.
03:38 *Musique*
03:40 On vous parlait d'eux dans un précédent épisode de Facts,
03:42 regardez.
03:44 Le GUD, c'est l'acronyme de groupe, union, défense.
03:46 Après quelques années en sommeil,
03:48 ils se sont réactivés à Paris à l'automne
03:50 2022, et ils l'ont fait savoir avec beaucoup
03:52 de communications.
03:54 Comme le GUD, la division Martel se rapproche
04:02 plus d'une bande de hooligans néo-nazis
04:04 que d'un groupuscule politique
04:06 au sens militant du terme.
04:08 C'est pas vraiment le genre à organiser des conférences.
04:10 Leur truc à eux, malgré leur jeune âge,
04:12 c'est la baston.
04:14 *Cris de surprise*
04:16 Sur pas mal de vidéos, on les voit s'entraîner au combat.
04:18 *Cris de surprise*
04:20 *Cris de surprise*
04:22 *Cris de surprise*
04:24 Regardez ici, on est dans le jardin
04:26 de Pierre, le détenteur du téléphone
04:28 dont sont issues les vidéos.
04:30 Ou plutôt la maison de ses parents,
04:32 chez qui il vit toujours en banlieue sud de Paris.
04:34 *Rires*
04:36 *Cris de surprise*
04:38 *Cris de surprise*
04:40 *Cris de surprise*
04:42 Ils s'entraînent parfois aussi avec d'autres groupuscules
04:44 néo-nazis. En janvier, puis en avril,
04:46 une cinquantaine de gros bras
04:48 se sont retrouvés dans des parcs de la région parisienne.
04:50 En plus de la division Martel,
04:54 on retrouve des membres du GUD,
04:56 d'Octorum, de Luminis,
04:58 de l'équipe communautaire, et de l'Activ' Club
05:00 Paris. Ils ont ensuite
05:02 fait la pub de ces événements sur
05:04 WESCASUAL, la chaîne télégramme de la
05:06 Mouvance. En général, c'est Marc
05:08 de Cacré-Valmenier et sa garde rapprochée
05:10 qui dirigent ces entraînements.
05:12 Car en plus de se battre dans la rue, le boss des
05:14 néo-nazis parisiens fait du MMA.
05:16 Les néo-nazis
05:18 de la division Martel, comme leur
05:20 grand frère du GUD d'ailleurs, pratiquent une autre
05:22 discipline de fight très underground
05:24 qu'on appelle les forêts.
05:26 Le principe, deux groupes
05:30 de hooligans se filent rendez-vous sur un parking
05:32 de zone industrielle ou dans une forêt
05:34 pour se cogner pendant un temps
05:36 défini.
05:38 Deux, trois, cinq minutes,
05:40 ou parfois jusqu'à ce qu'aucun d'eux ne tienne
05:42 debout. C'est ultra violent,
05:44 et ce n'est pas rare que des combattants finissent à l'hosto.
05:46 Regardez ces vidéos de
05:48 la division Martel qui s'entraînent à cette
05:50 discipline.
05:52 En général, chaque bande
05:56 regroupe cinq à dix combattants.
05:58 Mais il arrive ponctuellement que plus d'une centaine
06:00 de houls se foutent sur la gueule,
06:02 comme on vous l'avait raconté
06:04 dans un article publié l'an dernier.
06:06 Dans ces forêts,
06:08 les fights sont très violents, mais se passent
06:10 entre personnes consentantes. Mais la division
06:12 Martel ne s'en contente pas,
06:14 et ils ont participé à plusieurs agressions.
06:16 On les voit par exemple, comme l'avait raconté
06:22 Mediapart, tabasser un passant
06:24 en marge du C9M, le défilé
06:26 néo-nazi organisé à Paris
06:28 en mai dernier. Grâce aux données contenues
06:30 sur le téléphone de Pierre, on a pu retracer
06:32 les circonstances d'une agression.
06:34 La victime est un jeune lycéen antifasciste,
06:36 il souhaite garder l'anonymat.
06:38 Mais on a pu discuter avec certains de ses
06:40 proches, et ils nous ont confirmé les
06:42 circonstances de ces violences. L'embuscade
06:44 se serait passé le 11 mai 2023
06:46 près du lycée de la victime dans le 19e
06:48 arrondissement. Écoutez
06:50 ce message de Pierre envoyé à ses
06:52 camarades de la division Martel.
06:54 Il détaille le sort qu'ils comptent réserver à leur victime.
06:56 Dans une autre conversation audio, on les entend
07:06 préparer l'embuscade.
07:08 - Moi je suis chaud de me ramener, il faut juste me dire c'est où,
07:10 il faut me dire où est-ce qu'on peut
07:12 se rejoindre en amont, et comment
07:14 on y va, si on y va tous ensemble ou pas.
07:16 Il faut juste que je rentre
07:18 pas trop tard si possible. Si c'est 17h30,
07:20 il faut vraiment que ce soit 17h30, il faut pas que ce soit
07:22 18h, pas que ce soit 19h ou quoi,
07:24 vraiment 17h30, on le pète, je repars,
07:26 et voilà. - Bon bah les gars,
07:28 moi je vais venir, je vais spoter avec vous,
07:30 on sait jamais, ça se trouve il finira plus tôt,
07:32 il sortira avant 17h30.
07:34 Moi le truc hyper casse-couille, c'est que
07:36 je commence tout le boulot à 17h,
07:38 donc ce qui est sûr et certain, c'est que
07:40 s'il finit pas plus tôt que prévu, je pourrai jamais être là.
07:42 - Moi je suis chaud de l'enculer, y'a pas de soucis,
07:44 mais faut vraiment pas faire ça en public,
07:46 enfin en public, tout est relatif,
07:48 si y'a 10 pélos,
07:50 on s'en bat les couilles, mais s'il y a vraiment des centaines de personnes,
07:52 faut éviter. Ouais non mais le, comme je l'ai
07:54 dit plus haut, le but c'est vraiment de l'humilier gros,
07:56 t'inquiète pas, t'inquiète pas.
07:58 Le lendemain, le 12 mai, une vidéo montée
08:00 par leurs soins est postée sur leur chaîne
08:02 Telegram favorite, ou est-ce casual.
08:04 On y voit une partie de l'agression.
08:06 Il y a aussi cette vidéo
08:20 où on les voit poursuivre un individu
08:22 qu'ils présentent comme un dealer.
08:24 C'est eux encore,
08:28 qui le 20 avril dernier, ont mené une ratonnade
08:30 sur le parvis du lycée Victor Hugo
08:32 à Paris. Une agression très violente
08:34 dont nous nous sommes procurés des images.
08:36 On reviendra plus en détail sur cette affaire
08:38 dans le deuxième épisode des Faflix.
08:40 Ils essayent autant que possible de filmer
08:42 ces agressions. Les images
08:44 servent ensuite à leur propagande. Écoutez
08:46 comment ils évoquent leur stratégie de com'.
08:48 Juste les gars, faut tout de suite se mettre
08:50 d'accord sur qui filme, parce que
08:52 à chaque fois, personne veut filmer au dernier moment.
08:54 Et aussi, là on est 7,
08:56 donc c'est évident qu'on va pas
08:58 être 7 à l'enculé, faut vraiment que la
09:00 majorité des mecs soient là pour juste mettre pression.
09:02 Donc il faut qu'il y en ait qu'un
09:04 qui le frappe, deux à la rigueur, si vraiment
09:06 vous y tenez, mais vraiment moi je suis pour qu'il y en ait
09:08 qu'un seul qui l'encule. Voilà, que ce soit
09:10 filmé et surtout qu'on prouve par la vidéo
09:12 qu'on a pas besoin de se mettre à 10 sur 1 pour les enculer
09:14 ces sales fils de pute.
09:16 Si on dit 1 vers 1 tout le temps, on gagnera jamais,
09:18 on va juste se faire pichiner la gueule.
09:20 On s'en fout, dans la rue si on en croise
09:22 évidemment qu'on va se mettre à 30 sur eux, y'a pas de soucis.
09:24 Le truc c'est que vu que c'est filmé,
09:26 si en plus on peut montrer
09:28 qu'on est pas à 10, ça va être un plus
09:30 pour notre camp je veux dire.
09:32 Gros, 1 vers 1, il se fait sauter sa mère,
09:34 vas-y quand la vidéo elle est finie,
09:36 il prend 2-3 petits coups de pied par la tronche
09:38 de la part de tout le monde, histoire qu'on ait pas fait le boulot pour rien.
09:40 Bah d'accord, en fait il faut plus une vidéo
09:42 qui marque les gens, dans les deux camps,
09:44 dans le nôtre ou chez les ennemis.
09:46 Faut faire un truc vraiment très très humiliant, pas juste
09:48 "bon allez on le tape et on filme"
09:50 On le met en sang, on met sa gueule en sang,
09:52 on le met devant la caméra, on lui fait dire des trucs de ouf,
09:54 faut que ça marque les gens en fait.
09:56 Faut voir lequel téléphone a la meilleure qualité,
09:58 je pense que je vais vous filer le mien,
10:00 parce que le mien il a le...
10:02 il a un truc sympa qui fait que ça évite les...
10:04 tu sais genre quand ton téléphone il bouge trop,
10:06 ça fait que de vibrer après sur la caméra, c'est chiant.
10:08 En fait le mien il a pas ça.
10:10 Son téléphone il a un truc anti-vibration,
10:12 c'est pas mal.
10:14 Une action à laquelle ils ont participé a même fait la une des journaux.
10:16 Le 14 décembre 2022,
10:20 la France affronte le Maroc en coupe du monde.
10:24 Une dizaine de néo-nazis se retrouvent sur Paris
10:26 et projettent de mener une grande ratonnade.
10:28 L'intervention de la police va tuer dans l'oeuvre cette opération.
10:32 38 militants se font cueillir à la sortie d'un bar,
10:36 dont 15 fichés S pour sûreté de l'état.
10:38 7 ont été jugés,
10:40 ils sont finalement sortis libres,
10:42 profitant d'une erreur de procédure.
10:44 Streetpress s'est procuré le dossier judiciaire.
10:46 Le commando comptait dans ses rangs plusieurs membres de la division Martel.
10:48 Notamment Pierre, le détenteur du téléphone,
10:52 dont est issue une partie des Faflix.
10:54 Il n'a à l'époque que 17 ans,
10:56 et sa maman ne va pas vraiment apprécier
10:58 que son fiston finisse en garde à vue.
11:00 Alors qu'en quelques semaines plus tard,
11:02 il veut se rendre à une manif d'extrême droite,
11:04 il est obligé de mentir à sa maman.
11:06 Écoutez cette note vocale tirée,
11:08 là encore, des Faflix.
11:10 "Salut, je suis un démineur qui va dormir chez toi,
11:12 bon ça fait un peu bizarre de dire ça comme ça,
11:14 mais du coup il me faut ton adresse,
11:16 parce que du coup moi j'ai menti,
11:18 j'ai menti à ma mère,
11:20 je vais dire que je suis invité
11:22 chez un pote de ma meuf,
11:24 et comme elle n'a pas trop confiance en ce moment,
11:26 parce que j'ai fait de la garde à vue,
11:28 faut que tu me mettes ton adresse."
11:30 La division Martel se compose surtout
11:32 de jeunes d'Ile-de-France et d'un ou deux Rouennais.
11:34 Mais ils entretiennent aussi des liens
11:36 avec d'autres bandes de néo-nazis.
11:38 Et les jeunes parisiens se font régulièrement
11:40 des week-ends avec leurs copains fascistes.
11:42 Ils sont par exemple allés à Besançon
11:44 pour faire un petit coucou
11:46 au Vandal-Bessac.
11:48 Ils ont aussi fait à cette occasion
11:50 les Corriganes, leurs potes renais,
11:52 et les Infréquentables de Dijon.
11:54 Ils se déplacent aussi parfois
11:56 pour participer à des manifs d'extrême droite.
11:58 Pour la cause "un peu", pour se bastonner surtout.
12:00 "On n'en sent plus chanter des Monts-Mérides,
12:02 on n'en sent plus chanter des Monts-Mérides."
12:04 Ils étaient par exemple
12:08 à Saint-Brévin, Loire-Atlantique,
12:10 pour un grand rassemblement
12:12 pour protester contre un centre d'accueil
12:14 de demandeurs d'asile.
12:16 "C'est un projet au coeur notamment de violents
12:18 affrontements en avril dernier entre opposants
12:20 d'extrême droite et soutien à l'accueil de réfugiés."
12:22 "C'est vous les terroristes ?"
12:24 "Si, fascistes, c'est vous les terroristes !"
12:26 Sur différentes vidéos
12:28 tirées du téléphone, on les voit
12:30 invectiver les contre-manifestants
12:32 ou même leur jeter des projectiles.
12:34 Certains sont déjà passés par la case
12:40 garde à vue, mais la plupart des militants
12:42 de la division Martel ont encore
12:44 un casier vierge, mais ça pourrait bientôt changer.
12:46 La semaine prochaine, dans un nouvel épisode
12:48 des Faflix, nous reviendrons
12:50 en détail sur la ratonnade
12:52 qu'ils ont menée sur le parvis du lycée
12:54 Victor Hugo à Paris.
12:56 Certains des agresseurs ont été
12:58 identifiés par la police et ils vont passer devant
13:00 le tribunal. Pour ne pas louper ce prochain épisode,
13:02 abonnez-vous et activez la cloche.
13:04 activez la cloche.