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Antoine Boudinet, gilet jaune, ancien conseiller municipal à Bordeaux

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00:00 Et il est 7h44 sur France Bleu, Gironde. Le mouvement des Gilets jaunes, né au départ
00:08 de la contestation de la hausse d'une taxe sur le carburant, démarrait il y a cinq ans.
00:13 Jour pour jour, on revient ce matin avec notre invitée sur cette mobilisation.
00:18 Ses conséquences, est-ce qu'il en reste aujourd'hui ? Stéphanie Brossard, vous recevez aujourd'hui
00:23 Antoine Boudinet et les Gilets jaunes Gironde, un ancien conseiller municipal à Bordeaux.
00:27 Bonjour Antoine Boudinet. Vous l'avez porté, celui, Gilet jaune, fièrement pour rentrer
00:32 au Palais Rouen quand vous avez été élu conseil municipal. Vous ne l'avez pas sur
00:37 les épaules aujourd'hui, ça veut dire quoi ? Il est rendu au placard, c'est derrière
00:41 vous ce combat ? Non, pas du tout. C'est simplement que moi,
00:43 le gilet, c'est vrai que j'ai pris l'habitude de ne pas le mettre parce que ça nous rend
00:48 très visibles dans les manifs et que je suis quelqu'un d'assez craintif, mine de rien,
00:56 notamment vis-à-vis de la police, vis-à-vis de plein de choses. Mais effectivement, oui,
00:59 du coup, j'essaie de ne pas trop me faire remarquer, garder le moignon dans la poche
01:03 et ne pas mettre le gilet pour le moment. Mais par contre, dans le cœur, oui, je reste
01:07 gilet jaune et je soutiens toujours mes camarades qui, eux, le portent fièrement.
01:11 Gardez le moignon dans la poche puisqu'on rappelle que vous avez été blessé en ramassant
01:18 une grenade, c'était lors de l'acte 3, le 8 décembre 2018 ?
01:22 L'acte 4, le 8 décembre 2018, oui, j'ai eu la malencontreuse rencontre avec la police,
01:31 avec des grenades, avec des LBD, à une époque où je n'étais pas prêt, à une époque
01:36 où on n'était pas particulièrement au courant de toutes ces armes, soi-disant non-létales.
01:42 On va y revenir. Vous n'étiez pas de l'acte 1, justement, vous n'êtes pas mobilisé
01:46 le 17 novembre 2018. Qu'est-ce qui fait que finalement, vous n'y êtes pas allé dès
01:51 le premier jour et qu'est-ce qui fait que vous avez adhéré, finalement, ensuite ?
01:55 Alors, au premier jour, j'avais un peu cette position un peu méprisante de dire que des
02:00 gens qui vont manifester contre une éco-taxe, c'est juste des gens qui veulent pouvoir
02:04 polluer tranquille, alors qu'en réalité, ce n'est pas du tout ça. C'est des réalités
02:09 socio-économiques de gens qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler parce
02:13 qu'ils n'ont pas d'autre alternative. Et comme d'habitude, c'est toujours les
02:17 plus pauvres, c'est toujours les plus précaires qui se retrouvent à payer de nouvelles taxes
02:20 encore et encore et toujours. Et ouais, c'est injustice, au bout d'un moment, il y a un
02:23 ras-le-bol. Moi, ce qui m'a fait que je me suis intéressé au mouvement des GJ, c'est
02:28 le moment où les revendications ont dépassé simplement ce truc de l'éco-taxe. On s'est
02:34 mis à parler de salaire, on s'est mis à parler de retraite, on s'est mis à parler
02:37 de conditions de travail. Et là, c'était des choses qui me parlaient beaucoup plus.
02:40 Et en fait, à un moment, je me suis dit « bah ouais, mais en fait, la colère sociale est
02:45 en train de monter, elle est en train de monter sans moi et là, j'ai envie de participer
02:48 et tout ça ». - Est-ce qu'il peut continuer aujourd'hui
02:52 ce mouvement qui est né spontanément, hors des syndicats et au départ contre une taxe
02:57 sur les carburants et qui a duré 53 actes, 53 samedis ?
03:01 - Moi, je dirais que le mouvement, en fait, il s'est jamais complètement éteint. C'est-à-dire
03:07 qu'en fait, il a plutôt infusé effectivement tout le tissu de colère sociale qu'il y a
03:12 aujourd'hui. Je pense que dans la réforme des retraites, dans tous ces rejaillissements
03:21 spontanés de colère qu'il y a, il y a un peu des gilets jaunes aussi qui y sont, même
03:26 si les gens ne portent plus forcément leurs gilets jaunes tous. Mais en fait, les gens
03:30 ne se sont pas calmés parce que les choses ne se sont pas améliorées. Au contraire,
03:33 il y a encore plus de précarité qu'avant, il y a encore plus de problèmes. Donc oui,
03:37 clairement, le mouvement des gilets jaunes, il ne s'est pas arrêté, il s'est juste
03:40 transformé. - Est-ce que ça pourrait repartir cinq ans
03:43 après aujourd'hui ? C'est la question qu'on a posée à Valérie qui habite Longon.
03:48 - Quelque chose risque d'arriver, mais je ne sais pas quoi. Sûrement un petit mouvement
03:51 de colère, c'est possible parce que la vie devient trop dure pour tout le monde. C'est-à-dire
03:54 qu'avant, il y avait des classes moyennes, des classes machin, la moyenne, elle n'existe
03:58 plus. Et c'est tout le monde est au bord de la précarité. Ou on est très dantier,
04:02 ou on est tous au bord de la précarité. Et peut-être que oui, effectivement, avec l'inflation,
04:06 avec tout ça, ça peut être un peu faire de la colère, faire de la tristesse, puisque
04:11 la misère grandit, je trouve. - Qu'est-ce qui ferait que ça pourrait repartir
04:14 selon vous, Antoine Boudinier ? - Pour moi, c'est déjà reparti, ne serait-ce
04:17 qu'avec la réforme des retraites. C'était beaucoup de gens qui étaient là aussi pour
04:21 dire qu'ils en avaient ras-le-bol. Parce que ça ne parlait pas que des retraites, de la
04:24 même façon que les gilets jaunes ne parlaient pas que de l'éco-taxe. On parle de la misère,
04:28 on parle effectivement de précarité, on parle de beaucoup de choses derrière ça.
04:33 On ne parle pas seulement de la retraite, on ne parle pas seulement de l'éco-taxe.
04:35 Donc, ce genre de colère, tout ça, c'est une continuité. Et avant les gilets jaunes,
04:40 on peut parler du mouvement Podemos, qui avait donné les indignés en France, qui eux aussi
04:45 s'indignaient contre toute cette misère, contre tout ça. Donc pour moi, c'est juste
04:49 une continuité. Et on escalade constamment dans la colère, parce que non seulement les
04:53 problèmes ne s'arrangent pas, mais en plus, ils ont l'air plutôt de se dégrader, et
04:58 qu'en fait, en face, on a de plus en plus de répression. Et donc oui, forcément, les
05:03 gens sont de plus en plus énervés, et à juste titre.
05:07 C'est justement ce que partage Patrick sur notre page Facebook ce matin, avec sa réaction.
05:11 Il dit "oui, je pense qu'il y a un tel ras-le-bol actuel, l'inflation, l'énergie, l'insécurité,
05:15 ça peut démarrer, ça peut redémarrer pour un rien".
05:18 Les syndicats ont repris leur place depuis ? Ils font le boulot finalement ? On l'a
05:23 vu sur les manifestations contre la réforme sur les retraites ?
05:26 Je pense que les syndicats étaient pendant un temps, au même titre que les partis politiques,
05:31 ils étaient un peu à la ramasse sur la question de la cohérence sociale, ils s'étaient
05:34 un peu embourbés dans une espèce de tranquillité, une espèce de routine, ce qu'on appelle
05:39 les manif merguez et tout ça.
05:40 Et c'est vrai que les gilets jaunes sont un peu venus casser tout ça, sont un peu
05:43 venus réapprendre comment prendre la rue, comment battre le pavé, comment faire en
05:47 sorte qu'on soit entendu, comment se rendre audible.
05:50 Moi je pense que les gilets jaunes, ils ont permis ça.
05:52 Ils n'ont pas été parfaits sur tout, on a fait des erreurs, mais pour moi, effectivement,
05:58 on a le mérite au moins d'avoir revitalisé les forces vives de la lutte sociale pour
06:04 moi.
06:05 Il est 7h50 sur France Bleu, Gironde, le mouvement des gilets jaunes 5 ans après, on en parle
06:08 avec notre invitée Antoine Boudin, un gilet jaune, girondin et ancien conseiller municipal
06:12 à Bordeaux.
06:13 Il y a 5 ans justement, vous demandiez, les gilets jaunes demandaient plus de démocratie
06:18 participative, il se trouve que vous souhaitiez vous aussi être plus écouté par l'État,
06:23 par le gouvernement, par les élus en place.
06:25 Vous avez été élu vous-même au conseil municipal et finalement vous en êtes parti,
06:29 alors il y a eu un différent avec Philippe Poutou, mais est-ce que finalement, c'est
06:33 pas plus difficile de rester dans l'institution plutôt que de manifester à l'extérieur
06:38 et d'essayer de faire avancer les choses de l'intérieur ?
06:41 Non pas du tout.
06:42 En vrai, être conseiller municipal, c'est pas très compliqué, on n'a pas particulièrement
06:47 besoin d'intervenir, on n'a pas besoin de nombre de conseillers municipaux qui n'occupent
06:53 même pas leur poste, qui font ce qu'on appelle des trucs fantômes.
06:56 Mais c'était un moyen de porter la voix de la colère, comme vous le disiez, à l'intérieur
07:00 du palais Rouen.
07:01 Non mais évidemment que c'était le moyen de porter la colère, ça il n'y a pas de
07:04 souci, mais en soi, oui, être conseiller municipal, en soi, c'est pas très compliqué,
07:09 au contraire, on se fait un peu railler de temps en temps, mais en soi, il n'y a rien
07:16 de très difficile.
07:17 Vous pourriez vous représenter pour être à nouveau conseiller municipal par exemple,
07:20 ou député ?
07:21 Pas de n'importe quelle façon, pas pour n'importe quelle raison, ça c'est sûr
07:26 et certain.
07:27 Pour porter la voix de la lutte sociale à l'Assemblée par exemple ?
07:32 Pour porter la lutte sociale, moi pour le moment je sais pas trop où je vais là-dessus,
07:38 j'essaie aussi de me reconstruire personnellement, là, depuis que j'ai perdu ma main.
07:41 Donc là, la priorité c'est pas du tout de relancer le mouvement, enfin moi c'est
07:50 pas mon combat.
07:51 Demain vous serez place de la Bourse à Bordeaux pour l'anniversaire des 5 ans mis en place
07:57 par les Gilets jaunes ?
07:58 Je serai aux côtés de ma camarade Myriam Ecker, effectivement, et ça me fait très
08:04 plaisir de la rejoindre, elle qui a reçu un traitement particulièrement odieux à
08:12 l'époque de la part du collectif Bordeaux en lutte, en tout cas de mon collectif.
08:17 Ça s'est passé au sein du conseil municipal de Bordeaux, c'est une autre histoire.
08:21 Merci Antoine Boudidet d'avoir été notre invité ce matin, Gilets jaunes et ancien
08:26 conseiller municipal à Bordeaux.
08:28 Bonne journée à vous.
08:29 Merci.
08:30 Il est 7h53 sur France Bleu, j'y rends sur France 3, à Kitten.

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