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Obsèques du professeur Dominique Bernard à Arras - Une collègue de l’enseignant a pris la parole dans la cathédrale: "Te voilà élevé au rang des martyrs, toi l'homme discret" - Regardez

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Transcription
00:00 Ta silhouette, je la vois sur le perron du lycée Gambetta, quand nous arrivions ensemble
00:07 pour aller enseigner et que nous gravissions ces quelques marches, alourdies par nos sacs,
00:14 nos copies, nos livres et nos idées.
00:17 Alourdies mais tellement légers, parce que toi et moi allions faire ce que nous aimions,
00:26 même ce pour quoi nous étions taillés et levés.
00:31 Ta silhouette, je la vois dans la salle des profs, je vois ta chemise, toujours, le gobelet
00:40 que tu tiens, ton sourire malicieux parce que tu as un truc marrant à dire.
00:45 Il était difficile de ne pas s'approcher, de ne pas t'écouter, de ne pas se laisser
00:53 ravir par un conseil de lecture, une anecdote, un rien, un tout.
01:01 Ta silhouette, je la vois dans les couloirs, devant une classe un peu dispersée que ta
01:08 présence ramenait au calme parce que c'est M.
01:11 Bernard, alors bonjour monsieur.
01:13 C'était aussi ça ton pouvoir avec les élèves, tu étais là pour eux, ils l'avaient compris
01:22 et se nourrissaient en désordre de ta passion dévorante pour la littérature, de ta foi
01:28 en l'homme, des espoirs que tu mettais en eux.
01:31 Ta silhouette, je la vois sur le perron du lycée Gambetta quand nous arrivions ensemble
01:40 et que tu disais aux fumeurs amassés devant l'entrée « alors, on se fume un petit
01:45 clou de cercueil ? » L'air satisfait et content de ta vanne.
01:51 Quelle ironie tragique que ce soit sur ce même perron où tu as usé tant de semelles
02:00 que la vie t'ait été ravie.
02:02 Tu ne l'as pas cherché, toi, ce clou.
02:05 Il s'est planté en toi au hasard d'une haine aveugle et primitive.
02:12 Quelle ironie aussi qu'un geste aussi sombre, aussi obscur ait frappé celui que Victor
02:21 Hugo aurait pu appeler un porteur de flambeaux.
02:24 Te voilà élevé au rang des martyrs, toi, l'homme discret.
02:32 Une passion en remplace une autre.
02:44 Et quelle perte pour le monde.
02:45 Je n'oublierai jamais ta silhouette sur le perron du lycée Gambetta.

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