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Dans son émission média, Thomas Isle et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui Gilles Bouleau, journaliste.
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Transcription
00:00 Europe 1.
00:01 Culture Média sur Europe 1 avec vous Thomas-Yves,
00:04 et avec votre invité,
00:05 le présentateur du premier JT de France,
00:08 Gilles Boulot, est avec nous ce matin sur Europe 1.
00:10 Et Gilles, j'ai calculé, vous avez passé plus de la moitié de votre vie à TF1.
00:13 Ça fait 35 ans que vous êtes dans cette maison.
00:15 Vous avez commencé stagiaire, je crois, là-bas.
00:17 J'ai commencé stagiaire en 86, j'avais 24 ans.
00:21 Il n'y a pas plus corporate que Gilles Boulot.
00:24 C'est pas de ma faute, cette maison est passionnante.
00:26 Elle m'a donné tout ce à quoi j'aspirais en termes de reportage, de rencontres.
00:33 Pourquoi changer quand on est bien ?
00:34 Et puis ce qui est fou, c'est que vous avez été appelé un jour en urgence
00:37 pendant vos vacances pour venir présenter le journal
00:39 parce que Laurence Ferrari démissionnait.
00:41 Et là, vous attaquez votre douzième saison à la tête du JT.
00:45 Donc c'était assez inattendu au départ.
00:46 Ça s'est fait un peu comme ça, quoi.
00:48 Le simple fait d'arrêter le reportage était inattendu
00:51 puisque j'étais correspondant à l'étranger.
00:53 J'étais aux États-Unis depuis six ans.
00:55 Et sur une piste de ski, j'ai reçu un appel de ma patronne de l'époque,
00:58 qui était Catherine Nel, qui m'a dit
01:00 "Voilà, il faut que tu t'achètes une chemise et un costard.
01:04 On fait des tests dans trois jours."
01:08 Donc voilà, on a fait les tests et puis ma vie a changé.
01:11 Je suis rentré des États-Unis et j'ai présenté le journal.
01:14 Et vous avez vécu des grands moments à la tête de ce journal,
01:18 comme cette interview réalisée aux côtés de Jean-Pierre Elkabbach,
01:20 du président Poutine.
01:21 C'était en 2014, au moment de l'annexion de la Crimée.
01:24 - On parle des États-Unis.
01:26 Dans quelques jours, vous serez à côté, à quelques mètres de Barack Obama.
01:30 Apparemment, il ne souhaite pas vraiment vous parler.
01:32 Comment les choses vont-elles se passer
01:34 entre deux des plus grandes puissances du monde ?
01:37 On imagine mal que vous ne parliez pas l'un avec l'autre.
01:40 D'autant plus qu'on a un besoin impérieux,
01:43 puisque la guerre n'est pas très loin,
01:44 à quelques centaines de kilomètres d'ici.
01:47 - D'abord, je pense que vous exagérez un peu
01:50 en disant qu'une guerre approche.
01:53 Vous êtes un peu agressif comme journaliste.
01:55 Pourquoi pensez-vous qu'une guerre approche ?
01:58 Pourquoi essayez-vous de faire peur à tout le monde ?
02:00 - Parce que l'Ukraine n'est pas loin d'ici.
02:02 - Pourquoi faire peur et parler de guerre ?
02:05 A postériori, cette interview est encore plus lunaire qu'à l'époque.
02:07 Vous avez réalisé cette interview avec Jean-Pierre Elkabbach,
02:09 qui nous a quittés la semaine dernière,
02:12 qui s'était beaucoup battu, il me semble.
02:14 Il le raconte d'ailleurs dans son autobiographie.
02:16 Pour décrocher cet entretien,
02:17 quels souvenirs vous gardez de lui, de Jean-Pierre Elkabbach ?
02:21 - Jean-Pierre, on a eu cette aventure commune
02:23 d'une interview de Nicolas Sarkozy,
02:26 qui sortait d'une très longue garde-vue,
02:27 puis l'interview avec Vladimir Poutine.
02:30 Je ne le connaissais pas si bien que ça, Jean-Pierre Elkabbach.
02:33 Et on a fait un partenariat incroyable.
02:35 On s'est enfermé pendant de longues heures.
02:38 Je dis toujours, on en reparlait de temps en temps,
02:39 on y allait pour jouer aux échecs.
02:40 C'est-à-dire qu'il imaginait le début d'une question,
02:44 j'imaginais la suite,
02:45 on imaginait à deux ce que devait être la réponse
02:47 de notre interlocuteur, A ou B.
02:49 Donc on allait en C.
02:51 Donc on construisait un jeu de go,
02:53 un jeu d'échecs qui se poursuivait.
02:55 Et on a passé des heures et des heures à boire du thé,
02:58 à dire voilà, si tu dis ça, Poutine,
03:00 ce n'est pas possible, il va s'échapper par cette porte-là,
03:02 il va t'annoncer ça.
03:03 Donc fais ça, fais ça.
03:04 Et après il y avait, ce qu'on a très bien entendu à la seconde,
03:07 le jeu à deux.
03:08 Une interview à deux, certes ce n'est pas facile,
03:10 mais c'est incroyablement productif.
03:12 Là en l'occurrence, je commence une question,
03:14 et Jean-Pierre,
03:15 "Ah ben parce que la frontière de l'Ukraine n'est pas loin, voyons !"
03:18 Et là, pour l'interlocuteur, pour Poutine,
03:21 ce n'est pas évident.
03:22 - Vous imaginiez que Poutine aurait pu dire de vous
03:24 que vous étiez un journaliste agressif ?
03:27 Comme il vous répond ?
03:29 - J'imaginais tout, connaissant le système soviétique et post-soviétique,
03:32 mais ce que je n'imaginais pas, c'est qu'après,
03:34 en nous offrant des vins pour essayer de nous saouler avec Jean-Pierre,
03:37 on ne buvait que du jus d'orange,
03:38 de nous dire,
03:40 "M. Boulot, heureusement que vous n'êtes pas russe,
03:41 sinon vous n'auriez jamais osé poser la question
03:43 et vous ne seriez plus en liberté."
03:45 Donc c'est quelqu'un qui,
03:47 hier comme aujourd'hui, n'a pas du tout peur
03:50 d'afficher sa force brute et brutale,
03:53 et de dire "J'ai les moyens de vous écraser."
03:55 Il ne cherche pas à paraître comme un dirigeant sympathique,
03:58 le Olov Palmeux, social-démocrate russe.
04:01 Je suis un homme autoritaire,
04:04 à la tête d'un pays qui n'a jamais connu la démocratie,
04:06 sauf pendant quelques mois,
04:07 et puis voilà.
04:08 Ça c'est moi, M. El-Khabache, M. Boulot, je vous en prie.
04:11 Allez-y. Et après on a parlé jusqu'au bout de la nuit.
04:13 Après nous avoir fait attendre pendant des heures et des heures.
04:15 Pendant 13 heures je crois qu'on a fait attendre.
04:17 Allez, on va revenir dans quelques instants.
04:19 On va parler sport et médias.
04:20 Ce sera avec Sacha Nokovitch.
04:22 A tout de suite sur Europe 1.
04:23 Culture Media sur Europe 1.