C'est la rentrée 2023 et la présidentielle 2027 a déjà commencé ! Et tous les hypothétiques candidats n'ont qu'un mot à la bouche : les classes populaires. Sauf que personne n'est d'accord sur la stratégie pour ''reconnecter'' avec elles. Dans ce premier épisode de la saison 2 de La tête dans le flux, notre chroniqueur fait un point sur ce débat qui agite les représentants politiques.
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00:00 Quoi ? Quoi ? C'est tard c'est ça ? Fin septembre pour prendre la saison 2 de ta tête dans le flux c'est trop tard ?
00:05 Oui bah 4 mois de vacances d'accord mais on va parler d'Armanin, de Le Pen, de Macron toute l'année !
00:10 Franchement 4 mois de vacances c'est le repos minimum !
00:12 C'est quoi d'ailleurs ? Je reprends ma temps des vacances, je me casse, allez générique !
00:15 *Musique*
00:24 Classe populaire, votez pour moi, je vous comprends, je suis comme vous. Classe populaire, votez, ce serait déjà beaucoup.
00:30 Et oui en cette rentrée tout le monde n'a que ce mot à la bouche, classe populaire, avec une arrière pensée, 2027.
00:36 Nous sommes désormais dans une ère de la campagne présidentielle permanente.
00:39 Macron a pourtant entamé son quinquennat que depuis un an et demi, bon je sais en ressentis 150, et déjà on ne s'inquiète que de ça.
00:46 Finalement c'est la tête montante de la droite contre la tête montante de la gauche, ce peut peut-être même un avant-goût du débat d'entre deux tours dans quelques années à l'élection présidentielle.
00:54 Nous n'irons jamais dans les primaires, pour une raison avérée par l'histoire, la primaire fait exploser tous ceux qui y participent, tous ceux qui ont fait des primaires n'en sont jamais ressortis vivants.
01:06 Je suis la candidate naturelle de mon corps à la présidentielle.
01:10 Et donc comme enjeu clé de ce scrutin pourtant bien lointain, il y a le vote des classes populaires.
01:16 Alors pourquoi ? Bah si on était cynique, mais c'est vraiment pas notre genre, on répondrait pour des raisons arithmétiques.
01:21 La présidentielle puis les législatives de juin 2022 ont montré une tripartition du paysage politique, avec un bloc macroniste, un bloc gauche nuppes et un bloc rassemblement national.
01:31 Les sondages montrent que ces blocs sont relativement stables. Aucun, en l'état, n'est en mesure de prétendre rassembler suffisamment large pour avoir une majorité stable.
01:40 Il faut donc aller chercher les voies qui échappent encore aux blocs.
01:43 Or, si on suit la catégorie socio-professionnelle des employés et des ouvriers, les classes populaires, c'est 40% de l'électorat. C'est énorme.
01:51 Et ça, un certain ministre de l'intérieur, qui se verrait bien à les viser en 2027, l'a bien compris.
01:56 Ce dimanche marque la rentrée politique de Gérald Darmanin dans son fief de Tourcoing, avec un thème, les classes populaires.
02:03 Le ministre de l'intérieur a réuni près de 1000 personnes, dont une dizaine de ministres, une centaine de parlementaires et même la première ministre qui s'est décidée à la dernière minute.
02:13 Ah bah oui, c'est sûr, oui, oui, 10 ministres, 100 députés, une garde de parti, tout ça, ça fait très populaire, c'est sûr.
02:17 Ok, on est un petit peu mauvaise langue, il a fait sa rentrée à Tourcoing, ville populaire, sa terre d'élection, histoire de se démarquer de l'étiquette versaillaise du président des riches, Emmanuel Macron.
02:26 Et il a même joué à la bourrele. Alors, mais si, la bourrele.
02:29 "Quand est-ce que tu viens refaire un match de bourrele à Tourcoing ? Puisque nous avons joué avec la première ministre à Tourcoing au bourrele, qui est un jeu traditionnel des flancs."
02:35 "Vous étiez content de jouer avec elle ?"
02:37 "Ah oui, bien sûr, elle a eu un jeu d'adresse, elle a réussi à mettre la bourrele au milieu de..."
02:41 "Ça se joue avec une paire de bourreles."
02:43 "Non, c'est pas une paire de bourreles, c'est sans venir."
02:46 "C'est une piste."
02:47 Ouais, alors, tu ferais quand même gaffe avec la blague de cul s'il était lui, vu le passif.
02:51 A gauche, la défense du prolétariat et une perspective historique.
02:54 Alors, on se moque un peu de cette tentative de séduire les prolos côté macroniste, cette bonne guerre, comme ici Fabien Roussel, à la fête de l'Humain.
03:01 "On dirait que pour eux, les classes populaires, ils vivent dans un autre pays. Ils parlent pas la même langue. C'est des gens à part. J'imagine le conseiller d'un ministre faire la sortie d'une usine.
03:10 "Monsieur le ministre, j'ai trouvé une classe populaire, c'est un monsieur, il est habillé tout en bleu. Je vous l'amène. Vous l'intraducteur, on va l'interroger."
03:17 C'est vrai que la conquête des classes populaires, pour un macroniste, c'est loin d'être une évidence, comme le rappellent dans le livre "Universitaires de la rentrée", les économistes Thomas Piketty et Julia Cagé.
03:26 "Là où la droite était capable d'aller chercher les communes rurales les plus modestes, Macron les a pas du tout.
03:31 "Et dans les 60% des communes les plus faibles, le vote Macron est beaucoup plus faible que tout ce qu'on a pu voir de vote de droite historiquement.
03:37 "Ce qui fait que sur l'ensemble de la distribution, des communes les plus pauvres aux communes les plus riches, on voit que parmi les votes de cette ampleur,
03:43 "c'est-à-dire des votes qui ont 20, 25, 30% de l'électorat, le vote Macron est le plus bourgeois de l'histoire."
03:49 Sauf que pour la gauche, bah c'est pas gagné non plus. A la présidentielle, 32% des catégories populaires, donc ouvriers + employés, ont voté Marine Le Pen.
03:58 Soit à peu près autant que le total gauche. 34%. Mais là on parle bien de ceux qui sont allés voter.
04:03 C'est oublié les 30% des ouvriers + des employés qui sont pas du tout allés aux urnes au premier tour de la présidentielle,
04:08 et c'est monté à 60% d'abstention pour les législatives.
04:11 Le niveau de défiance, voire d'indifférence, est super élevé, et les sentiments qui en découlent, que la politique ça change rien, que tout se vaut,
04:18 et ben c'est ce poison confusionniste contre lequel doivent se débattre les politiques au jour le jour, et comme les militants d'ailleurs.
04:23 Alors comment reconnecter avec ces classes ? La gauche n'a pas fini d'en débattre, comme l'insoumis et possible candidat François Ruffin.
04:29 Député de la Somme, c'est à partir de la réalité de son département, qui n'est pas celle de toute la France,
04:33 qu'il entend identifier la nécessité de reparler avec des classes plutôt rurales et précaires.
04:37 Je donne comme consigne aux militants qui m'entourent dans mon coin de pas aller parler d'ultralibéralisme, de pas parler de néolibéralisme,
04:44 de pas parler de néocapitalisme et ainsi de suite, parce que c'est des concepts.
04:48 Et donc les gens ils fonctionnent pas à base de concepts, ils fonctionnent à base de leurs factures d'électricité.
04:54 Pour moi faire de la politique c'est partir du réel des gens et de regarder ces factures d'électricité et se dire "mais c'est quand même fou,
05:01 pourquoi on lit le tarif de l'électricité français au prix du gaz européen, il y a quelque chose là qui va pas, on va le résoudre,
05:09 voilà comment on va le résoudre, et ça ça pose la question du marché, et on monte en généralité."
05:13 Derrière ce discours se joue la petite musique d'une gauche qui ne saurait plus s'adresser aux catégories populaires.
05:17 Enbourbée, supposément, dans des débats sur la mobilité douce, l'écoféminisme, le privilège blanc, les violences policières,
05:24 qui pourraient être autant d'épouvantail pour une partie des classes populaires qui ne seraient pas urbaines.
05:28 Car il est important de rappeler qu'on ne parle pas là d'un bloc homogène.
05:31 "C'est pas le conflit classiste entre les ouvriers et les patrons, il y a la question des ouvriers, des employés,
05:37 il y a la question du revenu, il y a la question du capital immobilier, puisque ce qui est vraiment important c'est que nous on parle de classe géosociale.
05:43 Il y a vraiment la question de l'ancrage dans le territoire, et notamment est-ce qu'on vient de territoires plutôt urbains ou de territoires plutôt ruraux,
05:50 et ce qu'on va voir c'est qu'aujourd'hui dans le retour de la tripartition, cette dimension géographique urbaine-rurale, elle joue vraiment un rôle extrêmement important."
05:57 Les classes populaires rurales ne se vivent pas forcément en tant que faisant partie de la même classe que les classes populaires urbaines.
06:02 Faut-il donc, s'il est impossible de convaincre les deux bouts des classes populaires, miser plus sur les unes que sur les autres ?
06:09 C'est le pari affiché de Jean-Luc Mélenchon.
06:11 "Faut aller chercher les milieux ruraux déclassés, qui va dire le contraire ? Bien sûr. Mais le gros de la troupe qui va nous faire gagner,
06:19 ce sont les quartiers populaires où on vote pour nous à 80% au premier tour, mais où 30% seulement vont voter."
06:27 Alors peut-être peut-on dire ceci, au-delà de la stricte question de la stratégie électorale.
06:31 Le livreur à vélo qui sillonne Paris avant d'aller dormir en sa tour de béton du 93, et la gilet jaune de Montluçon,
06:36 ils partagent une même alienation sociale, une même aspiration à davantage de pouvoir d'achat,
06:41 un même désir de tranquillité dans son quartier ou sa résidence, et un même besoin de protection et de réponse face aux incertitudes de l'avenir,
06:47 sociales comme climatiques. Et les deux sont liées bien sûr.
06:50 C'est cette même injustice qui fait le trait d'union. Encore faut-il la conscientiser à l'heure de l'éparpillement du prolétariat.
06:55 De son côté, l'extrême droite entend conserver leur social-capitaliste en réconciliant patronat et classe populaire autour de la même haine de l'étranger.
07:04 Et face à cela, il va falloir ne rien lâcher sur l'antiracisme, ne rien lâcher sur les violences policières,
07:09 mais aussi, urgemment, redésigner le capital comme adversaire.
07:12 La possibilité de reconquérir l'électorat populaire sur un socle de redistribution,
07:17 donc effectivement, il faut marquer beaucoup plus son territoire, c'est le cas de le dire, sur les questions de redistribution,
07:23 de service public, de protection face à la concurrence internationale excessive.
07:28 Et si vraiment c'est loupé, on se moque pas, et bien foutu pour foutu, vous pouvez toujours finir par dire des trucs comme ça.
07:33 Ce qui est très important pour nos français, c'est qu'on est attaché à la bagnole, on aime la bagnole.
07:37 Et moi je l'adore.
07:39 Ouais, ça va être long jusqu'en 2027, ça va être long, je comprends qu'il soit après fait de tourner la page, les autres là.
07:44 Voilà, c'est la fin de cette vidéo, merci d'être là pour la saison 2 de La Tête dans le flux, qui démarre un peu tardivement, on le sait.
07:49 N'hésitez pas à liker la vidéo, à la partager, à vous abonner à la chaîne ou au journal de l'humanité.
07:54 On se dit à dans 15 jours, allez, salut !
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