• l’année dernière
Les plats préparés constituent indubitablement le grand succès de ces dernières années dans le domaine de l'alimentation. Ils ont la cote auprès des Français. La preuve par les chiffres : nous consommons environ 22 kilos de plats cuisinés chaque seconde. Autrement dit, 700 000 tonnes de plats préparés sont vendus chaque année en France ! Ils sont faciles à transporter, rapides à cuisiner... et surtout bons marchés. Mais que valent réellement ces produits tout prêts ? Que cache notre assiette de hachis parmentier ou de lasagne ? Comment vérifier la qualité de ces plats et surtout, leur origine ? Quelles sont les astuces des fabricants pour les vendre moins chers ?
#business #cusine #coulisses

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00:00 6 heures du matin, sur le parking de ce supermarché, c'est l'effervescence.
00:06 Parmi les dizaines de palettes livrées aujourd'hui,
00:11 il y en a une qui requiert toute attention des employés.
00:14 Celle-ci.
00:16 Dans ces cartons, les plats préparés, des produits très stratégiques
00:22 pour le magasin.
00:22 Pour la mise en rayon, le directeur Alain Martinez ne laisse rien au hasard.
00:30 - Il va falloir qu'on sorte les produits d'hiver.
00:34 Les tripes, la choucroute, il va falloir les enlever.
00:38 Pour vendre beaucoup de plats préparés,
00:40 le directeur sait qu'il faut varier l'offre,
00:43 comme sur la carte d'un restaurant.
00:45 - Sur les plats cuisinés, on a environ une centaine de produits
00:49 que l'on fait tourner régulièrement, en laissant, bien évidemment,
00:52 les produits phares, comme le hachis parmentier ou les gratins au filet.
00:57 Ce matin, il accueille un client pas comme les autres.
01:00 - Bien le bonjour. - Bien le vu.
01:04 - Super, toujours content d'être un magasin.
01:07 Et là, c'est vrai, c'est pas des conneries.
01:09 C'est Olivier Dauvert, le spécialiste de la grande distribution.
01:13 Son métier, étudier les nouveautés et les tendances de la consommation.
01:17 Pour lui, les plats préparés sont devenus incontournables.
01:21 - C'est l'un des rayons les plus importants d'un magasin aujourd'hui,
01:25 tout simplement parce que ça marche très bien.
01:27 C'est sur les dix dernières années, c'est l'une des success stories
01:31 de l'agroalimentaire et de la distribution.
01:34 Disons qu'on est en moyenne sur une croissance d'à peu près 10%
01:37 tous les ans. Donc, c'est vraiment un rayon Eldorado.
01:40 Même si l'offre est toujours plus grande, en un coup d'oeil,
01:43 le spécialiste se fait une idée sur chaque plat.
01:47 - Je comprends pas comment vous faites ça.
01:50 Quelle est la promesse qu'il y a dessus?
01:55 C'est quoi le problème ici?
01:56 - Non, mais c'est qu'une marque premier prix en plat cuisiné,
02:00 c'est quand même pas le truc qui est le plus rassurant pour le consommateur.
02:03 Alors, évidemment, c'est pas cher.
02:06 A 2,09 euros pour un kilo, c'est imbattable pour une famille.
02:10 Dans ce rayon, pour un même plat préparé,
02:14 les prix peuvent varier du simple au triple.
02:16 Olivier Devers a une explication à cette prouesse commerciale.
02:21 C'est la viande.
02:24 - Dans ce produit là, qui est deux fois moins cher,
02:26 il n'y a que 20% de viande.
02:28 Dans celui ci, qui est plus cher, il y a 33% de viande.
02:32 Et là, on me garantit que la viande est française.
02:34 C'est juste normal parce que la viande, c'est ce qui coûte le plus cher
02:38 dans un plat préparé, que ce soit de la lasagne ou du hachis parmentier,
02:42 par exemple. C'est quelque chose qui coûte très cher.
02:44 La viande, c'est l'ingrédient clé pour les fabricants de plats préparés.
02:49 Celui avec lequel ils font varier les prix pour proposer des produits
02:53 à prix cassé en conservant leurs bénéfices.
02:56 Alors, quels sont les secrets de fabrication des industriels
02:59 et comment parviennent-ils à proposer des produits toujours moins chers?
03:02 Février 2013, des analyses révèlent que ce plat au bœuf
03:08 est en fait composé de cheval.
03:10 C'est l'affaire de la viande de cheval.
03:13 Elle ébranle toute l'industrie agroalimentaire.
03:16 On découvre les pratiques frauduleuses de certains fabricants.
03:21 Prêts à tout pour payer leur viande toujours moins cher.
03:24 Ces révélations effraient les consommateurs.
03:28 - J'ai aucune confiance dans ce qui est mis dans les plats préparés.
03:31 - J'ai pas confiance. - Franchement, ces deux là, merde.
03:34 Pourtant, l'an dernier, les Français en ont avalé 700 000 tonnes,
03:40 soit 22 kilos par seconde.
03:42 Fleury Michon, Marie, William Sorin, White Watchers,
03:48 Sodebo, Orion Frais, Épicerie ou Surgelé.
03:52 Ces grandes marques s'affrontent sur un marché qui pèse
03:55 aujourd'hui 3 milliards d'euros.
03:56 Trois ans après l'affaire de la viande de cheval,
04:00 les industriels ont-ils tiré les leçons du scandale?
04:04 Pour le savoir, nous avons enquêté sur le plat individuel
04:09 le plus consommé en France, le hachiparmentier.
04:12 La viande de bœuf utilisée par les fabricants est-elle de bonne qualité?
04:18 Et d'ailleurs, est-ce vraiment du bœuf?
04:20 Pour la première fois, des professionnels ont accepté
04:25 de nous dévoiler leurs secrets de fabrication.
04:27 - C'est sûr qu'on peut pas considérer ça comme de la viande.
04:31 C'est pas du bœuf. La viande, c'est du bœuf.
04:33 Après plusieurs analyses en laboratoire,
04:37 nous avons découvert que certains plats au bœuf
04:40 peuvent cacher d'autres viandes.
04:42 - Et ces plages, c'est des plages à manger de viande.
04:45 Des viandes low cost, venues de l'étranger
04:47 et élevées dans des conditions sanitaires déplorables.
04:50 - Tous ceux qui tricheront et qui se feront attraper,
04:59 eh bien, se feront sanctionner.
05:01 Tour de passe-passe économique et petit secret des industriels.
05:06 Enquête au coeur de la fabrication de nos plats préparés.
05:10 Dans la campagne vendéenne, à une heure de Nantes,
05:20 nous avons rendez vous à Pouzoges.
05:23 Après des mois de négociations, un fabricant de plats préparés
05:28 a accepté de nous ouvrir ses portes.
05:30 Et pas n'importe lequel, le leader du marché.
05:34 Comme ses concurrents, Fleury Michon a subi de plein fouet
05:39 la défiance des consommateurs après le scandale de la viande de cheval.
05:43 - C'est des bâtiments qui datent de 1913,
05:48 comme l'indique le panneau qui est juste au dessus.
05:51 Et donc, c'est ici qu'est né le démarrage du groupe.
05:55 A l'origine, le groupe, c'était ça, une boucherie charcuterie familiale
06:01 avec à sa tête deux beaux frères, Pierre Fleury et Gustave Michon.
06:08 Saucissons, jambons, pâtés, la marque envahit peu à peu
06:12 les rayons des commerces de la France entière.
06:14 En quelques années, la famille bâtit un empire
06:20 et se fait connaître à grands coups de spots publicitaires audacieux.
06:25 Ici, la marque s'amuse à imaginer des livraisons en parachute.
06:29 - Ils ouvrent leur parachute.
06:32 - Je te parie qu'ils vont être à l'aide.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 - Je vous apporte le déjeuner.
06:32 Je te parie qu'ils vont être à l'aise.
06:33 - À vous d'aller à l'aime ! - Merci !
06:36 - Je vous apporte le déjeuner. - Oh, j'en ai faim !
06:39 - Ça doit être le grand thèvre. - Et naturellement, c'est du *** du ***.
06:44 En 1981, l'entreprise invente le premier plat préparé sous vide, le boeuf bourguignon.
06:51 - Les mythes ennuys de *** font la bonne cuisine sans cuisine.
06:55 - Bonjour, mesdames.
06:57 Aujourd'hui, la marque vend 1,2 million de plats préparés par semaine.
07:02 120 barquettes chaque minute en France.
07:05 Si Gérard Chambay, le directeur, accepte aujourd'hui de nous dévoiler ses secrets de fabrication,
07:11 c'est purement stratégique.
07:13 Le groupe veut communiquer pour rassurer les consommateurs.
07:18 - Bonjour, Aïda.
07:20 Comme dans toute la filière, l'affaire a eu un impact sur les ventes,
07:24 même si ce fabricant n'a jamais utilisé de cheval dans ses plats.
07:28 Donc maintenant, je vais vous laisser pour la suite de la visite avec Aïda, qui est notre directrice d'usine.
07:33 - Alors ce qu'on va vous montrer aujourd'hui, c'est la fabrication d'un hachis parmentier.
07:39 Le hachis parmentier, c'est le best-seller de la marque.
07:43 Ici, pas de casserole ni de poêle.
07:47 Chaque jour, les chaînes automatisées de cette usine vendéenne assurent une production de 10 000 hachis parmentiers.
07:56 Dans ce bac de 200 litres, une préparation à base de viande cuite et assaisonnée.
08:04 - En fait, cette viande est acheminée dans une trémie pour pouvoir former ensuite un sec de viande
08:14 que l'on va retrouver et qui va composer en fait tout le bas du hachis parmentier.
08:18 Chaque barquette est calibrée.
08:20 Pour 200 g de purée, 56 g de viande.
08:24 Et pour rendre le hachis plus appétissant, la maison a une petite astuce, cette poudre.
08:31 - Ce qu'on appelle chez nous, en fait, le topping, qui est composé en fait d'émantales,
08:38 qui va permettre en fait de gratiner le hachis parmentier en surface, même s'il passe en fait en micro-ondes.
08:46 Et on obtiendra le même produit qu'un hachis parmentier qui est passé dans le four, en fait.
08:52 Mais ce qui nous intéresse ici, c'est la viande.
08:58 L'ingrédient par lequel le scandale est arrivé.
09:01 Direction la chambre froide, la zone la plus sensible de l'usine.
09:07 - Vous avez ici donc notre réception de bœuf hachis cru.
09:15 Donc on retrouve en fait la partie traçabilité de notre produit.
09:21 Pour réaliser son hachis parmentier, l'usine est livrée chaque matin par un fournisseur local.
09:27 La viande arrive hachée, prête à l'emploi.
09:31 - On a différents contrôles qu'on va effectuer.
09:33 On a des contrôles de goût, de visuel, de texture.
09:37 Et puis les contrôles de tous les documents de traçabilité qui sont joints à la réception.
09:43 - Vous, là, si par exemple il y a autre chose que du bœuf, en tant que spécialiste,
09:46 vous pourriez le voir ou pas ?
09:48 Si ça devient fraîche.
09:50 - Notre fournisseur ne travaille que de la viande bovine fraîche.
09:56 Donc oui, on...
10:00 Si la responsable qualité est embarrassée, c'est qu'il est presque impossible à l'oeil nu
10:06 de savoir si cette viande est composée uniquement de bœuf.
10:09 La directrice vient à son secours.
10:12 - C'est aussi l'une des raisons pour lesquelles on a décidé de travailler en viande fraîche.
10:17 C'est de pouvoir s'assurer une traçabilité qui est beaucoup plus maîtrisée
10:21 que ce que l'on peut avoir sur des viandes transformées,
10:24 c'est-à-dire des viandes hachées, par exemple, reçues en surgelée.
10:29 De la viande fraîche plutôt que surgelée.
10:33 Pour ce fabricant, c'est la garantie d'une viande plus sûre.
10:36 Mais ce n'est pas le choix de tous les industriels.
10:39 Pour payer le bœuf moins cher, certains optent pour le congelé,
10:44 une viande low cost dont les secrets de fabrication semblent bien gardés.
10:49 Pour s'en rendre compte, il faut aller à la source, dans les abattoirs,
10:56 un milieu très fermé que nous avons réussi à pénétrer.
11:00 Dans les verts pâturages de Lens, le petit village d'Automne,
11:08 la France compte 263 abattoirs,
11:12 des établissements qui ouvrent rarement leurs portes aux caméras.
11:16 L'un d'entre eux a pourtant fini par accepter de nous recevoir.
11:20 Pierre-Favre, le directeur, tient à nous montrer
11:23 quelle est vraiment la viande de nos barquettes
11:25 et comment fonctionne la filière.
11:27 - Il ne sera pas embêté que le grand. Il ne sera pas embêté que le grand.
11:31 Dans son établissement, on travaille de la viande de bœuf d'origine française.
11:36 Chaque semaine, 200 bovins passent par l'atelier de transformation.
11:41 - Voilà l'équipe.
11:43 C'est ici que la viande est découpée.
11:46 Pièce par pièce, les ouvriers désossent les carcasses
11:50 pour en extraire les muscles nobles.
11:53 Entrecôte, filet, rumpsteak, bavette,
11:58 les meilleurs morceaux sont réservés aux boucheries
12:01 et vendus entre 18 et 25 euros le kilo.
12:05 Les ouvriers retirent le gras et les nerfs
12:08 pour ne garder que le meilleur du muscle.
12:11 - Voilà, alors, pour arriver à ce muscle sans gras, paré et tout,
12:16 forcément, il y a de la chute, il y a de la perte.
12:19 Ces chutes ne sont pas perdues pour tout le monde.
12:24 Elles vont composer ce qu'on appelle le minerai de viande,
12:28 très convoité par certains industriels.
12:32 Nous apprenons qu'il en existe 3 sortes.
12:38 Donc on a un 1er qui va plus être dans des morceaux plus épais.
12:43 On appelle ça le capa. Voilà.
12:46 Le capa, une partie grasse que l'on trouve entre les côtes de la vache.
12:51 Vendu 2,60 euros le kilo, c'est le haut de gamme du minerai.
12:56 - Après, on en a un 2e, affranchi, gras, qui est gardé.
13:02 L'affranchi, autrement dit, les chutes de découpe.
13:06 Ici, on trouve plus de gras que de muscles.
13:10 Il est aussi moins cher.
13:12 L'affranchi se vend 1,60 euros le kilo.
13:15 Puis, en Bouchêne, le minerai le moins cher du marché.
13:20 A 1,10 euros le kilo, il est 20 fois moins cher qu'une pièce de bœuf.
13:25 - Donc les mustaris, vous voyez, il reste une pellicule de nerfs ou de peau.
13:33 Donc on passe dans une machine à parer pour que le morceau ressorte nickel.
13:38 Et donc, ça fait de la peau névrose.
13:40 La peau névrose, c'est cette matière.
13:43 - Voilà.
13:45 Aucun muscle, mais un mélange de peau, de tendons et de nerfs.
13:50 - Avant, on n'y vendait pas.
13:54 Je me rappelle, ça partait pour les carissages
13:58 ou certaines personnes y prenaient pour leurs animaux.
14:02 Et puis, maintenant, bah...
14:04 Cette matière, autrefois destinée aux chiens et aux chats,
14:08 est aujourd'hui très prisée de certains industriels de l'agroalimentaire.
14:13 Car cette viande de basse qualité, vendue à très bas prix,
14:17 est autorisée dans la fabrication de nos plats préparés.
14:21 - Et là, pour autant, ça reste de la viande pour vous, ça ?
14:26 - De la viande.
14:29 Vous le voyez de vous-même, hein ?
14:31 Ça, la couleur.
14:33 Maintenant, c'est sûr qu'on peut pas considérer ça comme de la viande.
14:37 C'est pas du muscle.
14:39 La viande, la viande, c'est du muscle.
14:41 C'est pas... Voilà.
14:43 Il faut rester lucide.
14:45 On va tout en faire un, là.
14:47 Le minerai est ensuite conditionné en blocs compacts
14:50 dans ces bacs de 25 kg, puis congelé.
14:53 L'abattoir le stocke en grande quantité
14:57 afin de le proposer à la vente.
14:59 - Et voilà ce que ça donne une fois congelé.
15:02 Alors, nous, on fait des palettes d'une tonne,
15:06 et après, on vend ça... On appelle ça des traders
15:09 ou des gens qui sont... Qui achètent ce genre de produits.
15:12 L'abattoir propose ensuite son stock à des négociants en viande,
15:16 qui le vendront en direct à des fabricants de plats préparés.
15:20 Aujourd'hui, le commercial a 16 tonnes de minerai à écouler,
15:26 soit un mois de production.
15:28 La transaction se fait par téléphone.
15:31 - Eric ? Ouais, bonjour, c'est...
15:35 C'est Christophe, la maison Gessler.
15:38 Au bout du fil, un trader en viande.
15:40 Il travaille pour une société de négoces alimentaires
15:43 et fait le tour des abattoirs européens
15:46 pour acheter le minerai au meilleur prix.
15:48 - Ouais, voilà, je...
15:50 On vient de faire le point, là, sur le...
15:52 Tout ce qui est congelé à vendre au niveau
15:54 de la machine et parage muscle chez nous,
15:57 bah, reste à discuter du prix éventuellement.
16:00 Comme à la bourse, le prix de la viande évolue
16:03 en fonction de l'offre et de la demande.
16:06 Par exemple, si le lundi,
16:08 le minerai polonais est moins cher que les autres,
16:11 il sera proposé aux industriels en France et dans toute l'Europe.
16:16 Le lendemain, le minerai pourra provenir d'un abattoir tchèque,
16:21 belge, italien ou français, s'il est moins cher.
16:26 Un système de fixation du prix
16:29 qui laisse très peu de marge de manoeuvre à l'abattoir.
16:32 - Voilà. On était, donc, dans les parages machines,
16:34 on était 1,10 au départ.
16:36 - Donc tu peux pas mieux faire, de toute façon.
16:38 Ca va être compliqué.
16:39 - Ca va être difficile, hein. - Bon.
16:41 - Parce que, bon, moi, j'ai un transport...
16:43 1,10 le kilo, c'est ce qu'il y a de moins cher
16:46 sur le marché de la viande de bœuf.
16:48 Des prix toujours plus bas.
16:50 C'est ça qui a conduit au scandale de la viande de cheval en 2013.
16:54 Nous en profitons pour demander au trader
16:57 la destination du minerai qu'il négocie.
17:00 - Bonjour, monsieur. Je suis la journaliste.
17:02 Et vous vendez à qui, la marchandise de Gessler ?
17:05 - C'est comme toutes les marchandises.
17:07 On va vers des industriels qui vont fabriquer soit des plats cuisinés,
17:10 on va s'adresser vers ces gens-là.
17:12 Chaque entreprise a ses spécialités.
17:16 Je vous dis, nous, c'est notre clientèle sur le marché français.
17:20 Cette viande de basse qualité
17:23 entre donc toujours dans la composition de certains plats préparés
17:27 en toute légalité.
17:29 Si la viande de cet abattoir français semble digne de confiance,
17:33 qu'en est-il du minerai acheté à l'étranger ?
17:36 Comment connaître l'origine des viandes utilisées par certains industriels ?
17:41 Vous allez voir que pour le consommateur,
17:44 il est encore très difficile de s'y retrouver.
17:47 3 ans après le scandale de la viande de cheval,
17:53 dans les rayons des supermarchés,
17:55 les clients sont à nouveau au rendez-vous.
17:57 - Les barquettes individuelles, tu sais quand on mange au magasin ?
18:00 Dans la région de Bordeaux,
18:02 cette mère de famille qui a 10 bouches à nourrir
18:04 a repris ses habitudes.
18:06 Il faut dire que pour elle, les plats préparés ont des atouts.
18:10 - Qu'elle comprend, ceux-là.
18:12 - Ils ont l'air bien, regarde, ces 3 personnes.
18:14 On va prendre les 3 derniers.
18:16 Ca fait 9 personnes.
18:18 - Et la zèle, on dirait 4 personnes.
18:20 - Ouais.
18:22 C'est vrai qu'en fin de semaine, c'est bien pratique.
18:26 - Pourquoi ?
18:27 - Parce qu'il y a pas de cuisine à faire, quoi.
18:29 Voilà, on met juste au micro-ondes, et voilà.
18:32 Le tour est joué.
18:34 Avec ses barquettes prêtes à réchauffer,
18:36 Karine se simplifie la vie à un prix abordable.
18:40 - Le prix, déjà, je regarde pour soi.
18:42 Parce que voilà, il est...
18:44 Mais je sais pas où... Il est 4,60 euros.
18:47 Ce hachis parmentier lui revient à 1,50 euro par personne.
18:52 Pour faire son choix entre les dizaines de plats préparés du rayon,
18:57 Karine a une méthode bien à elle.
18:59 - Voilà.
19:01 Voilà une blanquette de veau.
19:03 Là, il y en a une autre.
19:05 Voilà.
19:06 Mais moi, je vais aller vers là.
19:08 Parce qu'il y a plus de viande sur l'étiquette, quoi.
19:12 Alors que, bon, peut-être pas, hein.
19:15 - Là non plus, vous regardez pas forcément les étiquettes ?
19:18 - Non, mais là, si j'ai pas mes lunettes, eh bien, je vois pas.
19:21 - Ah, ouais. Là, vous pouvez...
19:23 - Non, là, je vois pas, là.
19:25 Je vais mettre mes lunettes pour regarder.
19:27 Je leur fais confiance, parce qu'on peut pas faire autrement, hein.
19:30 Si la confiance semble de retour,
19:32 les consommateurs ont-ils pour autant
19:34 toutes les informations nécessaires pour faire leur choix ?
19:38 Nous voulons vérifier si les étiquettes
19:40 nous disent bien toute la vérité sur nos barquettes.
19:43 Nous avons posé la question à Olivier Andraud,
19:50 spécialiste de l'étiquetage chez UFC Que Choisir.
19:54 - Tiens, si tu descends encore un peu...
19:57 L'association de consommateurs a passé au Cribble plus de 200 produits.
20:02 Leur but ? Évaluer la transparence des fabricants
20:05 sur l'origine des viandes utilisées.
20:08 - Là, on a un exemple typique de produit
20:11 qui n'indique pas le pays d'origine
20:14 et qui, pourtant, met un drapeau français.
20:16 Alors, ce drapeau français, en face avant,
20:18 donc, pour attirer l'attention du consommateur,
20:20 ne porte pas sur la viande,
20:22 puisqu'il y a pas de mention d'indication particulière sur son origine.
20:25 Elle porte, en revanche, sur le lieu de fabrication du produit.
20:28 Donc... Et on nous dit, de fait,
20:30 que le produit a été cuisiné en France.
20:32 Mais donc, ça n'est pas une garantie sur l'origine de la viande, bien évidemment.
20:36 Aujourd'hui, la loi européenne est très claire.
20:40 Pour la viande fraîche vendue à la coupe,
20:42 le pays d'origine doit obligatoirement être mentionné sur l'emballage.
20:47 Mais pour la viande transformée, comme dans le hachiparmentier,
20:52 la loi est nettement plus souple.
20:55 - Dès lors que le produit est un petit peu transformé,
20:58 y compris pour un carpaccio avec quelques gouttes de citron et d'huile d'olive,
21:01 réglementairement, c'est considéré comme un produit transformé,
21:04 et donc il n'y a pas d'obligation d'indiquer le pays d'origine.
21:06 Et a fortiori, dans des raviolis,
21:08 dans des produits transformés comme le boeuf aux fourignons,
21:11 des saucisses, de la charcuterie, etc., il n'y a pas cette obligation.
21:14 Dans son étude, parue en mars dernier,
21:18 l'association révèle qu'aujourd'hui,
21:20 plus d'un plat préparé sur 2
21:22 ne mentionne pas le pays d'origine de la viande.
21:25 En haut du podium, les produits à base de poulet,
21:28 74% d'entre eux n'indiquent pas d'où vient la viande,
21:32 suivi de ceux à base de porc, 57%.
21:35 Enfin, côté viande de boeuf,
21:37 un produit préparé sur 3 ne précise pas l'origine de la viande,
21:41 et ce, en toute légalité.
21:43 Nous voulons vérifier si des industriels
21:47 profitent de cette réglementation plutôt souple.
21:50 Les étiquettes ne nous diraient-elles pas toute la vérité ?
21:55 Nous décidons de faire analyser des hachis parmentiers
21:58 par un laboratoire.
22:00 Nous en achetons 4 au hasard.
22:04 2 plats d'enseigne discante,
22:08 un hachi de marque distributeur
22:11 et un autre d'une grande marque.
22:14 Sur tous ces plats, les étiquettes indiquent
22:17 qu'ils ont été préparés avec du boeuf.
22:21 Pour le vérifier, nous nous rendons à Montpellier,
22:25 dans un laboratoire indépendant.
22:28 En 2013, Jean-Philippe Coton a été l'un des premiers scientifiques
22:33 à découvrir de la viande de cheval dans des lasagnes.
22:37 - Donc c'est le 4.
22:41 Nos hachis parmentiers vont subir toute une batterie de tests.
22:46 L'objectif est d'extraire l'ADN des espèces animales,
22:50 afin de déterminer quelle viande est utilisée dans la recette.
22:54 24 heures plus tard, les résultats nous parviennent.
22:59 - OK, très bien, merci.
23:02 Et ils sont surprenants.
23:05 Si 3 des 4 produits testés contiennent bien exclusivement
23:09 de la viande de bœuf, ce n'est pas le cas pour le 4e plat.
23:13 - Voilà les rapports d'analyse sur le 4e échantillon.
23:18 Donc il s'agit d'un hachis parmentier au bœuf,
23:22 et pour lequel le bœuf a été détecté,
23:25 mais également, il y a une autre espèce bovine
23:28 qui a été détectée, qui est le bûfle. Voilà.
23:31 Cette fois, ce n'est pas du cheval qui a été mélangé au bœuf,
23:34 mais du bûfle, dans un hachis parmentier
23:37 qui ne fait mention que de bœuf.
23:40 Le laboratoire est formel, ce plat a été fabriqué
23:44 avec 2 viandes mélangées.
23:47 - Les 2 ont été détectés dans des proportions
23:50 qui ne relèvent pas de traces d'ADN,
23:53 mais qui sont des quantités significatives
23:56 suffisantes pour qu'on le détecte sans aucune ambiguïté.
24:01 Le bûfle, c'est cet animal aux grandes cornes,
24:05 originaire d'Asie, on en trouve très peu en Europe.
24:08 Il est élevé pour son lait, jamais pour sa viande.
24:12 Cette viande est a priori propre à la consommation
24:16 et n'est pas interdite en France,
24:18 mais elle doit être signalée dans la composition,
24:21 ce qui n'est pas le cas pour ce hachis parmentier.
24:25 - Sur cet échantillon-là, il y a une non-conformité
24:30 et le résultat ne correspond pas au contenu de la barquette.
24:33 Donc, voilà, c'est non conforme à la réglementation.
24:37 Dans le cas de ce hachis parmentier, la fraude est donc avérée.
24:43 Pour remonter la piste de la viande de bûfle,
24:46 nous contactons dans un premier temps l'enseigne Discount,
24:49 qui a vendu le produit.
24:51 Elle nous renvoie vers le fabricant du plat préparé.
24:55 Direction le sud-ouest de la France, dans le Lot-et-Garonne.
25:06 L'usine qui produit les hachis parmentiers contenant du bûfle
25:11 est installée dans cette zone industrielle.
25:14 A l'accueil, nous demandons à voir un membre de la direction.
25:22 Une heure plus tard, le directeur se présente.
25:37 Depuis plusieurs mois, nous multiplions les demandes d'interview
25:40 auprès de sa société.
25:42 Il ne souhaite pas être filmé. Nous l'enregistrons en caméra cachée.
25:47 - Je vais pas vous parler, que ce soit clair.
25:50 Ni être filmé, ni interviewé.
25:52 Ce que je vais faire, moi, je vous demande,
25:54 il est 10h30, de repasser vers midi.
25:56 A ce moment-là, je vous donnerai des éléments
25:59 qui correspondront à la raison de votre...
26:02 - Il y a du bûfle dans vos plats cuisinés au bœuf.
26:04 - Je vais vous répondre, vous allez le voir tout à l'heure. D'accord ?
26:08 - Vous avez une explication ?
26:09 - Ah, mais tout à fait. Je vais vous la donner par l'accueil.
26:12 L'entreprise a pris le temps de préparer sa réponse.
26:17 Quelques heures plus tard, le directeur nous présente un document
26:21 expliquant que suite à notre découverte, des tests ADN ont été réalisés.
26:26 - Nous avons nous-mêmes lancé une analyse
26:29 prenant en compte la détection d'ADN de bûfle.
26:32 Demande d'analyse qui a provoqué l'étonnement de notre laboratoire
26:37 car cette analyse n'est pas pratiquée habituellement.
26:40 A réception des résultats, nous avons constaté
26:44 une proportion faible d'ADN de bûfle.
26:47 A la fin de sa lettre, le fabricant rejette la responsabilité
26:52 sur son fournisseur de viande.
26:54 - S'il y avait suspicion de présence de viande de bûfle dans le lot,
26:58 c'était à notre fournisseur de nous en informer.
27:01 En résumé, le magasin disquante qui a vendu le hachiparmentier
27:08 nous a renvoyé vers le fabricant du plat préparé
27:11 qui lui-même rejette la faute sur son fournisseur de viande.
27:15 Bref, chacun semble profiter de la complexité du circuit
27:19 pour se renvoyer la balle.
27:21 Le fournisseur mis en cause, c'est la Socopa.
27:27 Avec 6000 salariés et 19 usines, c'est le numéro 1 de la viande en France.
27:33 Pour savoir pourquoi cette société a-t-elle mélangé du bœuf avec du bûfle,
27:38 nous décidons d'entrer en contact avec elle.
27:41 C'est l'assistante de direction qui répond à notre appel.
27:45 Sans réponse de leur part, nous profitons du salon de l'agriculture
28:04 pour tenter de rencontrer directement des responsables de la société.
28:09 Cet homme est le directeur des achats de la Socopa.
28:15 - Je m'appelle Pauline Jacquelin et je suis journaliste à TMC.
28:18 Je me permets de venir vous voir ici parce qu'en fait,
28:20 ça fait plusieurs mois qu'on essaie de vous joindre.
28:22 - Depuis l'affaire du cheval, depuis 2013, on contrôle beaucoup
28:26 parce que du bœuf, on n'achète pas, donc après...
28:30 - Pas du tout ? - Non.
28:31 - Alors comment ça se fait ?
28:33 Ça peut être dû à quoi, en fait ?
28:35 - Je sais pas, parce qu'après, on en a pas plein.
28:38 Enfin, il y en a quelques-plein en France, mais c'est dans les eaux hautes,
28:40 des choses comme ça, enfin, le bœuf.
28:42 Vous en avez en Italie plus, par contre ? - Oui.
28:44 Il nous explique que sa société achetait de la viande de bœuf en Italie
28:48 jusqu'en juin dernier.
28:50 - On connaissait le risque quand on faisait de l'Italie,
28:51 on connaissait ce risque-là, si vous voulez.
28:52 - Ah. - Oui.
28:53 - Pourquoi ? C'est quoi ?
28:54 - Parce que c'est pas la même génétique, le bœuf et le bovin.
28:57 On n'a jamais acheté de bœuf, si vous voulez.
28:59 Après, on achète du bovin.
29:01 Est-ce qu'il peut y avoir un contact, une trace
29:03 ou un quartier qui est arrivé par erreur ? Voilà.
29:06 En clair, pour ce responsable, il s'agit d'un accident.
29:10 Pourtant, cette viande de bœuf n'est pas interdite en France.
29:15 Alors pourquoi les industriels ont-ils tant de mal à admettre son utilisation ?
29:20 Ce silence cache-t-il une réalité peu avoable ?
29:26 Notre enquête se poursuit en Italie, de l'autre côté des Alpes.
29:31 Ce pays possède le plus grand chèpe tel de buffles d'Europe,
29:38 un demi-million de bêtes,
29:40 particulièrement ici, dans la région de Naples.
29:44 Au pied du Vésuve, la Campanie.
29:48 Une province italienne bien connue pour ses citrons et ses coteaux d'olivier.
29:56 Mais dans cette région, l'or blanc, c'est la mozzarella di buffala,
30:01 un fromage d'origine italienne réputé dans le monde entier.
30:05 On le fabrique avec le lait de cet animal, la bufflone.
30:09 C'est la femelle du buffle.
30:12 C'est la viande de cette bête que nous avons découvert dans nos plats préparés en France.
30:20 Letizia et Francesco Gallipoli sont les propriétaires de cette grande exploitation.
30:27 - Tu rentres ? - Oui, je vais rentrer tout seul.
30:31 Ce couple élève 500 bufflones pour leur lait qu'ils vendent pour faire de la mozzarella.
30:38 - Ca, c'est le code électronique de l'animal.
30:46 Ca correspond à son matricule, à son numéro d'oreille.
30:50 Chaque bufflone peut donner jusqu'à 20 litres de lait par jour,
30:55 et ce, pendant de très nombreuses années.
30:59 - La bufflone, la plus vieille, là ?
31:04 C'est celle avec les grandes cornes. Elle a 22 ans.
31:08 Que deviennent ces vieilles bufflones une fois qu'elles ne donnent plus de lait ?
31:15 Nous demandons au couple si leur viande est bonne à manger.
31:19 - La viande d'une bufflone adulte de 15 ans n'est pas aussi bonne
31:27 que la viande d'un jeune animal de 18 ou 24 mois.
31:32 Le muscle est beaucoup plus sombre.
31:37 La viande est moins tendre, parce que c'est clair que les muscles ont beaucoup travaillé.
31:43 Ils sont beaucoup plus durs.
31:46 Les gens n'aiment pas trop ce genre de viande, ici.
31:50 Une viande jugée de basse qualité, donc, boudée par les consommateurs.
31:58 Pourtant, ces éleveurs n'ont aucun problème à se séparer de leur bufflone âgée.
32:04 - Il y a des commerçants qui viennent nous acheter ces animaux,
32:10 ou alors on appelle directement l'abattoir, qui vient les chercher.
32:14 Ce que les abattoirs font de cette viande, le couple préfère ne pas le savoir.
32:20 - Non, non, on sait pas. - On peut pas savoir.
32:24 - Parce que les abattoirs passent des contrats de vente avec nous,
32:28 mais ne nous disent pas à qui ils vendent.
32:31 Donc, nous, on ne peut pas savoir ce que devient cette viande.
32:37 Ces bufflones en fin de vie, les marchands italiens les achètent 350 euros la bête.
32:44 C'est 4 fois moins cher que nos vaches laitières françaises.
32:48 La bufflone est la viande bovine la moins coûteuse d'Europe.
32:53 Alors quels sont les débouchés pour ces bêtes de 15 ans
32:57 que les Italiens ne veulent pas consommer ?
33:00 Une fois quittés la ferme, ces vieilles bufflones vont connaître un nouveau destin.
33:06 Notre enquête nous mène à 100 km de là, dans cet immense abattoir.
33:11 C'est ici que des milliers de bufflones âgés sont abattus chaque année.
33:18 Il appartient au leader de la viande en Italie.
33:21 Malgré nos multiples demandes...
33:24 - Buongiorno ! - Buona sera !
33:26 ...impossible de savoir à qui cette viande de buffle est vendue.
33:35 - Non, pour des raisons de sécurité, on ne peut pas vous autoriser à rentrer.
33:39 - S'il vous plaît, on ne peut vraiment pas rentrer ?
33:42 - C'est impossible. Je ne peux pas vous laisser entrer.
33:46 Le sujet est sensible dans la région. Difficile de récolter des informations.
33:55 Nous poursuivons donc notre enquête.
33:59 Nous voulons savoir si ces bufflones et ces buffles sont exportés vers la France.
34:05 Direction Rome, la capitale.
34:07 A deux pas de la célèbre place d'Espagne...
34:10 ...se trouve la puissante fédération des industriels de la viande italienne.
34:14 Après des semaines de négociations, François Tomei, le patron, a accepté de nous recevoir.
34:22 Très vite, il nous confirme que le marché français est une aubaine pour les producteurs italiens.
34:33 - Oui, nous exportons.
34:35 Car il y a des types de viande et des morceaux qui ne sont pas consommés en Italie, mais qui le sont en France.
34:43 - Comme le bif ? Comme la grande bif ?
34:50 - Disons que je parlais plus généralement.
34:54 En France, les consommateurs ont l'habitude de manger des plats préparés.
35:00 Des plats au micro-ondes, de la viande hachée en grande quantité.
35:06 En Italie, on reste très attaché aux morceaux de viande.
35:12 On aime les morceaux de viande entiers.
35:16 Du coup, on a une fenêtre de tir pour exporter ces viandes...
35:23 ...qui ne sont pas forcément moins bonnes, qui sont chères.
35:28 Qui sont simplement moins bonnes, qui sont juste plus dures.
35:33 Selon les statistiques européennes, l'Italie vend chaque année 330 000 tonnes de viande bovine à la France.
35:41 Mais le plus surprenant, c'est qu'aucune loi n'oblige les producteurs à préciser la race de la viande bovine qu'ils exportent.
35:49 - La législation européenne prévoit que sur le marché unique, la viande de buffle, tout comme la viande de bœuf, soit étiquetée de la même manière, viande bovine.
36:08 Autrement dit, derrière l'appellation "viande bovine", l'Europe regroupe différentes espèces.
36:16 Elles y aient aussi les bœufs, bien sûr, mais aussi les buffles et d'autres animaux plus étonnants encore, comme les bisons et même les ébus.
36:26 En toute légalité, l'Italie peut donc vendre son buffle sous l'appellation "viande bovine".
36:35 Alors si tout est légal, pourquoi les industriels français ne mentionnent-ils pas le buffle sur leurs emballages ?
36:42 Ce que vous allez découvrir maintenant est édifiant.
36:47 Dans la région de Naples, là où sont concentrées la plupart des buffles du pays, certains élevages sont confrontés à de graves problèmes sanitaires.
36:57 Il y a 5 ans, les médias italiens révèlent que la région est gangrénée par un scandale écologique qui a fait le tour du monde.
37:06 - Non, on ne peut pas rester ici. Et pourtant, quelqu'un doit nous montrer les conditions.
37:10 L'Italie découvre que depuis des années, la mafia locale enfouit des millions de tonnes de déchets toxiques de manière illégale dans les champs de la région de Naples.
37:22 Et cette pollution a un lien direct avec les buffles élevées sur ces terres.
37:30 Sur la route, avant même d'apercevoir les décharges illégales, nous sommes frappés par une odeur omniprésente qui se dégage de la terre.
37:42 - Vous sentez comme ça pue ? C'est ça, l'odeur du biogaz.
37:49 Angelo Ferrillo est le chef de file de la lutte anti-pollution en Italie.
37:56 Pour comprendre les conséquences de cette pollution sur l'agriculture, il veut nous montrer à quoi ressemblent ces décharges.
38:03 - Ça, c'est dangereux. C'est pas les gens qui jettent ça là. Tu vois cette bonbonne, là ?
38:12 - Ça vient pas d'une maison. C'est une activité criminelle. C'est la mafia qui fait ça.
38:20 Des ordures ménagères jonchent le sol, mais le plus grave se trouve derrière ce grillage.
38:28 - Ça, c'est toute une montagne de déchets. Là-dessous, y a des déchets urbains, y a aussi des déchets enterrés qui viennent des usines du nord de l'Italie et même des entreprises étrangères.
38:41 - Là, ici, si on le voulait, on pourrait rentrer. Mais vaut mieux pas, parce que c'est trop dangereux.
38:48 - Là-dedans, y a de tout. C'est inimaginable, ce qu'il y a là-dedans.
38:55 Sous ces bâches en plastique, des centaines de décharges qui ne respectent aucune réglementation. Elles sont disséminées un peu partout dans la région.
39:06 Des déchets toxiques, chimiques, industriels, des liquides dangereux, des métaux lourds et même des déchets nucléaires sont entassés ici.
39:18 Depuis la révélation du scandale, l'Etat italien paye des gardiens pour assurer la surveillance de ces sites dangereux.
39:28 - Il n'y a pas seulement l'air. Les naves phréatiques, surtout, sont contaminées.
39:36 - Ici, l'eau du robinet n'est pas potable. Il y a du cadmium, de l'amiante. Il y a aussi des huiles qui ont déjà servi, des déchets spéciaux.
39:49 - Mais personne ne vous dira où. Mais nous, on sait.
39:55 Le gardien nous explique que ces décharges toxiques qui polluent les champs se trouvent en fait à quelques mètres de certains élevages de bufflonnes.
40:05 Comme ici, dans cette immense exploitation de 650 animaux.
40:12 En caméra cachée, nous voulons savoir avec quels aliments l'éleveur nourrit ces bufflonnes.
40:21 La décharge est toute proche.
40:28 - Et vos bufflonnes, qu'est-ce qu'elles mangent ?
40:32 - Oh, elles mangent du maïs et de l'herbe. Cette herbe.
40:38 - Cette herbe ? - Oui.
40:41 - Elles mangent l'herbe de ce champ ?
40:43 - Oui, de l'herbe, du maïs, de la nourriture pour animaux. Elles mangent toute la journée.
40:51 Mais vous savez, ici, le problème, c'est l'eau.
40:54 - L'eau ? - Oui. L'eau n'est pas bonne à cause de la décharge d'à côté.
40:59 - Pourquoi ?
41:01 - Parce que ça cause des problèmes aux bufflonnes.
41:07 Quant à savoir comment ces animaux finissent leur vie, ici comme ailleurs, le même destin les attend.
41:14 - Vous les vendez pour la viande ?
41:16 - Oui. Quand les bufflonnes sont très vieilles, on les vend pour la viande.
41:22 La viande de ces bufflonnes, que nous pouvons trouver dans certains plats préparés, est-elle contaminée par ces décharges toxiques ?
41:31 Pour en avoir le cœur net, nous allons dans une dernière exploitation, à quelques kilomètres de là.
41:39 Pour cet éleveur, la présence des décharges n'a pas d'impact sur les animaux.
41:45 - Les déchets ? Non, la ville vient les ramasser de temps en temps. Ca ne va pas dans les sols.
41:53 Le problème, c'est l'image que ça renvoie.
41:55 Quand quelqu'un arrive de l'extérieur et voit tous ces déchets et ces russales, il se demande "Mais où je suis, là ? Je suis dans le tiers-monde ?"
42:05 Mais au détour de la conversation, nous allons pourtant comprendre que la pollution a bien un impact sur les animaux, à commencer par le lait des bufflonnes.
42:17 - Si tu as 500 litres de lait pollué, tu le mélanges avec 5000 litres de lait moins pollué, et là, d'un coup, tu fais tomber le taux de dioxine et tu atteins le taux légal autorisé.
42:29 Ici, tout le monde fait ça.
42:32 La dioxine est un polluant qui persiste dans l'environnement pendant de nombreuses années.
42:39 Considérée comme cancérigène, ces dioxines se logent dans le gras de l'animal, dans son lait comme dans sa viande.
42:47 Sans s'en rendre compte, l'éleveur avoue que les bufflonnes sont bel et bien touchées par la pollution.
42:55 Avant de partir, nous parvenons à faire quelques images de ces animaux.
43:02 En plus de la pollution, les bufflonnes sont attaquées par les parasites.
43:10 Leur dos est pelé, la peau est à vif.
43:17 Le personnel doit les traiter régulièrement. Nous assistons à une séance d'injection.
43:25 Quel est ce produit injecté aux bufflonnes ?
43:36 - Ce qu'on leur donne pour les parasites ? On leur donne de l'ivomèque, de l'ivomèque en seringue.
43:47 L'ivomèque est un traitement autorisé en Europe, mais très encadré.
43:55 Après l'injection du médicament, il faut attendre deux mois avant d'abattre la bête pour consommer sa viande.
44:03 Dans cet élevage, nous ne parviendrons pas à savoir si le délai est respecté.
44:11 - C'est un délai ? - Oui.
44:17 - C'est un délai ? - Oui.
44:23 - C'est un délai ? - Oui.
44:29 - C'est un délai ? - Oui.
44:35 Après une séance d'injection de l'agriculture, nous sommes allés à la rencontre du premier concerné.
44:41 Le ministre de l'agriculture, Stéphane Lefol.
44:47 - Voilà. - Voilà aux couleurs d'agneau, vous voyez ?
44:51 - Ouais, du poisson tout charrant.
44:53 Ce matin, avec des producteurs français, il fait la promotion d'un label censé rassurer le consommateur.
45:01 Le label "Viande bovine française".
45:05 - Donc ce logo, je le rappelle, c'est un message à la destination des consommateurs.
45:09 Lorsque vous avez ce logo, eh bien, c'est un produit avec des animaux qui sont nés, je le répète, en France, qui ont été élevés en France, qui ont été abattus en France, qui ont été transformés en France.
45:23 Depuis l'affaire Spanguero, la traçabilité des viandes est devenue le cheval de bataille du ministre.
45:29 - Ce qui a changé, c'est qu'on a quand même engagé un gros travail sur viande de France, sur les viandes fraîches.
45:34 Maintenant, l'étape supplémentaire, c'est les produits transformés.
45:37 Bon, bonne journée à vous. - Merci. - Merci.
45:40 Nous profitons de l'occasion pour expliquer au ministre que nous avons découvert de la viande de buffle dans un hachis parmentier censé être au bœuf.
45:48 - OK. - De bœuf ?
45:50 - Nous, on a analysé des plats préparés au hasard, cuisinés, et dans certains éthiques, les viandes bovines, il y avait du bœuf.
45:56 - Oui, mais je pense qu'il y a des gens qui, aujourd'hui, je vous l'ai dit, qu'il faut avoir du bœuf.
46:00 On a connu du cheval à la place du... Voilà. Bon, bref. Il y a des gens qui trichent.
46:05 Et c'est pour ça que les contrôles sont nécessaires. Et on en fera autant que nécessaire.
46:09 Et je le réaffirme, tous ceux qui tricheront et qui se feront attraper, eh bien, se feront sanctionner.
46:14 Le message se veut ferme. Reste à savoir si les arguments de Stéphane Le Foll convaincront la Commission européenne de faire évoluer la loi.
46:24 - Au miens, on est prêts.
46:26 En attendant d'éventuelles solutions politiques, peut-on tout de même manger des plats cuisinés industriels en toute confiance et au meilleur prix ?
46:36 La qualité, c'est le pari de Fabrice Carrier. Il fabrique des plats cuisinés 100% régionaux.
46:43 - Bonjour, Fabrice. - Ça va, Fred ?
46:45 - Toutes les cotatins ? - Oui, oui, oui.
46:46 - Ça y est, arrivé ?
46:48 Fabrice, lui, connaît bien l'origine de sa viande. Son fournisseur se trouve à quelques kilomètres de chez lui.
46:55 - Elles sont belles, ces cornes. - Pas mal, hein ? - Ouais, tout à fait, ouais.
46:57 Il élève des vaches françaises de race aubrac.
47:00 - Tu les avocates, tu as dit, celle-là ? - De même. - De même, d'accord.
47:03 - Pour nous, c'est quand même essentiel. Il faut qu'on vienne se rendre compte un peu de la qualité des animaux vivants que nous transforme Frédéric.
47:11 Et qu'après, on retrouvera dans nos plats cuisinés. C'est important pour nous.
47:16 De la ferme à la barquette, Fabrice a fait le choix de réduire au minimum ses intermédiaires.
47:24 Et c'est comme ça pour tous les ingrédients qu'il utilise.
47:27 - Mon livraison, elle fait... Voilà, donc, cette tombe fraîche a été... A été fabriquée hier. Voilà.
47:38 Avec ce fromage de la région, Fabrice prépare de l'aligot.
47:45 C'est un peu sa marque de fabrique. Il en met dans tous ses plats préparés.
47:49 - L'aligot, c'est le produit phare de l'Aveyron. Et c'est le produit phare de notre entreprise.
47:54 C'est vraiment notre terroir, c'est notre coeur, c'est tout.
47:57 Pour la viande, pas question d'utiliser du minerai congelé. Fabrice hache lui-même des morceaux entiers.
48:06 Pour produire le hachiparmentier, pas de chaîne automatisée, tout est fait à la main par une vingtaine de salariés.
48:15 - La purée est en haut. Et au fur et à mesure, ils vont mettre la purée sur chaque... Sur chaque barquette.
48:22 Chez Fabrice Carrier, on n'a pas honte d'afficher l'origine de la viande sur l'emballage.
48:29 C'est même un argument de vente.
48:33 - Vous voyez, on fait le parmentier au bœuf rassobra, gratiné au cantal.
48:38 Donc fabriqué en Aveyron, bien sûr, c'est ce qui fait vendre le produit. C'est vraiment la qualité de la viande.
48:43 Aujourd'hui, le consommateur est content de voir un petit peu la traçabilité, de voir un petit peu la qualité du produit qu'il y a à l'intérieur.
48:49 Cette barquette de hachiparmentier est vendue 3 fois plus cher que le 1er prix du marché.
48:55 Même si les plats préparés régionaux, comme les siens, sont encore discrets dans les rayons, les clients sont au rendez-vous.
49:03 En 10 ans, Fabrice Carrier a multiplié son chiffre d'affaires par 4.
49:09 Et il en est persuadé, l'avenir appartient aux produits de qualité.
49:14 [Musique]
49:18 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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