• l’année dernière
Avec les incendies, nos forêts sont soumises à rude épreuve, le climat change, elles souffrent. La chercheuse et archéobotaniste Stéphanie Thiebault, et l'ingénieure forestière à l'ONF et Régine Touffait, sont les invités de France Inter.

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00:00 Elles sont soumises à rude épreuve nos forêts. Le climat change et elles, elles souffrent.
00:06 Elles endurent sécheresse, feu, des incendies dévastateurs ces derniers jours en Grèce et en Sicile.
00:12 On en parle dans le Grand Entretien avec deux invités ce matin que je remercie d'être à mes côtés présentes dans ce studio.
00:19 Stéphanie Thiebaud, bonjour.
00:21 Vous êtes archéobotaniste, autrice de « La forêt, histoire, usage, représentation et enjeu »
00:27 et vous êtes la première d'entre nous à Paris cette année aux éditions du CNRS.
00:31 Et à vos côtés, Régine Touffet, bonjour.
00:33 Bonjour à tous.
00:34 Vous êtes ingénieure forestière à l'Office National des Forêts, l'ONF, à la Direction des Risques Naturels.
00:40 Le Var, on l'a dit tout à l'heure dans le journal, est en alerte rouge aujourd'hui pour risque d'incendie.
00:45 Mais depuis le début de l'été, en France en tout cas, la forêt a été plutôt épargnée par les incendies.
00:50 20 000 hectares ont brûlé, mais c'est loin des 72 000 de l'année dernière.
00:56 Pour lui, c'est vrai, ces dernières semaines, ça joue évidemment.
00:58 Est-ce qu'on a aussi tiré les leçons de l'année dernière, justement, en fermant des massifs, par exemple,
01:04 en mettant en place cette météo des forêts, Régine Touffet ?
01:10 Oui, tout à fait.
01:12 Plusieurs mesures ont été prises en lien avec l'État.
01:16 Et effectivement, il y a des arrêtés préfectoraux de fermeture des massifs.
01:20 Et il y a eu toute une organisation qui a été repensée pour surveiller, prévenir, intervenir dès les feux naissants.
01:30 Et par exemple, l'ONF a vu ses effectifs renforcés par rapport à la protection des forêts contre les incendies.
01:38 Il y a eu aussi des moyens complémentaires en matériel.
01:41 On a des équipes de terrain qui sont par exemple équipées de pick-up avec des citernes d'eau
01:45 et qui peuvent intervenir sur les feux naissants avant l'intervention des pompiers.
01:49 Et particulièrement depuis l'année dernière ?
01:51 Oui, tout à fait. C'est vrai que les 72 000 hectares de l'an dernier ont vraiment permis de prendre conscience.
01:59 Une vraie prise de conscience, l'été dernier.
02:02 Mais ce n'est pas nouveau cette politique-là.
02:04 Déjà dans les années 80, l'État, avec la politique de défense des forêts contre les incendies,
02:10 avait mis beaucoup de moyens et 80% des feux qui partaient avant les années 80 ont été stoppés.
02:20 On est revenu à des surfaces incendiées bien inférieures.
02:24 Oui, la forêt est épargnée relativement par les feux cet été.
02:28 Pour autant, Stéphanie Thiebault, est-ce qu'on peut dire que la forêt est en bon état aujourd'hui ?
02:34 Alors, je vais parler devant ma collègue de l'ONF, mais non.
02:37 Aujourd'hui, la forêt n'est pas du tout en bon état.
02:40 D'abord, ce que je voudrais dire, c'est qu'est-ce que c'est qu'une forêt ?
02:44 Parce qu'on confond souvent, de plus en plus d'ailleurs à l'heure actuelle,
02:48 ce qui est une plantation d'arbres pour le bois énergie, etc. pour l'exploitation, et une forêt.
02:55 Une forêt, c'est d'abord et avant tout un écosystème.
02:59 Et un écosystème, ça veut dire qu'il n'y a pas que l'arbre. L'arbre cache toujours la forêt.
03:05 Et de plus en plus, on s'intéresse aux arbres, mais on ne s'intéresse plus du tout aux forêts.
03:09 Mais la forêt, il y a effectivement un sous-sol avec des milliers et des milliers de bactéries,
03:16 de petits animaux aussi qui mangent les feuilles, qui préparent l'humus, qui préparent le sol.
03:23 Et puis, il y a aussi tous les animaux, tout le vivant qu'il y a dans la forêt au point de vue animal,
03:29 c'est-à-dire tous les mammifères et puis les oiseaux qui permettent aussi la régénération des forêts.
03:35 Alors aujourd'hui, elles sont de plus en plus malmenées pour plusieurs raisons.
03:39 Parce que d'abord, il y a de plus en plus de plantations d'arbres.
03:42 On faisait appel à la forêt des Landes, qui a brûlé effectivement l'an dernier,
03:47 mais la forêt des Landes n'est pas une forêt, c'est effectivement une plantation de pains maritimes.
03:52 Notre collègue de l'OEF rappelait 72 000 hectares. Il faudrait rappeler qu'en 1949,
03:59 la forêt des Landes, c'est 190 000 hectares qui ont brûlé.
04:02 Donc effectivement, ça brûle un petit peu moins.
04:05 Mais ce n'est pas pour autant que la forêt se porte mieux.
04:07 Le problème aujourd'hui, ce sont la sécheresse, effectivement.
04:12 Et notamment dans l'Est, je pense que notre collègue de l'OEF pourra en reparler bien mieux que moi.
04:17 Et puis aussi, avec l'arrivée d'un certain nombre d'espèces exotiques,
04:22 tous les perturbateurs et les maladies,
04:28 alors on peut parler du squelette, mais on peut parler d'autres choses aussi,
04:32 qui déciment pas mal les forêts actuellement.
04:35 Vous faites cette même différence, Régine Touffet, entre les forêts et les plantations.
04:40 On parle des forêts, c'est vrai qu'elles ne se ressemblent pas toutes entre les forêts
04:44 dans lesquelles la main de l'homme n'intervient pas. Et les autres, par exemple ?
04:48 Absolument. En fait, on a des forêts et non pas un type de forêt.
04:52 A l'ONF, par exemple, on régénère les forêts de manière naturelle.
04:57 Donc en fait, ça veut dire qu'il n'y a pas de plantation.
05:00 C'est des arbres en place, sur pied, les chênes qui donnent les glands qui vont donner les petites chênes de demain.
05:06 Les hêtres qui donnent les fènes qui vont donner les petits hêtres de demain.
05:09 Donc ça, c'est 75-80% de notre renouvellement.
05:12 Et dans d'autres situations où on doit adapter la forêt au changement climatique
05:18 parce que l'essence en place ne sera pas adaptée au climat de demain...
05:22 Pas suffisamment résistante.
05:24 Voilà. On a des essences qui ont besoin d'eau.
05:29 Les hêtres, par exemple, sont des essences qui ont besoin d'eau, d'humidité, etc.
05:35 On voit bien qu'actuellement et demain, ces essences-là ne vont pas tenir.
05:40 Et donc du coup, on intervient volontairement en remontant des essences.
05:44 C'est-à-dire qu'on prend des essences qui sont au sud, par exemple du chêne pubescent, du pin d'Alep,
05:48 et on les introduit plus au nord pour que nos forêts soient demain adaptées au climat
05:54 et soient en bonne santé et répondent à l'ensemble des objectifs qu'on leur donne.
05:59 C'est-à-dire que des forêts, c'est pour quoi ? C'est pour accueillir le public.
06:02 Les forêts sont des espaces de récréation.
06:04 On aime tous aller en forêt. Tout le monde va s'oxygéner en forêt.
06:08 C'est aussi préserver la biodiversité forestière.
06:11 Il y a une diversité, 80% de la biodiversité terrestre est dans les forêts.
06:16 Donc c'est vraiment important.
06:18 Les forêts, on parle beaucoup de risques en ce moment.
06:23 Elles ont un rôle de protection contre les risques, par exemple en montagne,
06:27 contre les chutes de blocs, contre l'érosion.
06:29 Contre l'érosion, avec les racines.
06:31 Exactement. En bordure du littoral atlantique,
06:35 elles ont un rôle en matière de protection contre l'érosion du nerf,
06:39 contre le recul du trait de côte.
06:41 Et puis les forêts, c'est aussi du bois.
06:43 C'est aussi la production de bois.
06:45 Le bois étant un matériau écologique, renouvelable
06:48 et qui est incontournable dans une économie décarbonée.
06:52 Récolter du bois, c'est continuer à stocker le carbone dans nos meubles.
06:57 Et c'est éviter d'utiliser de l'aluminium, de l'acier,
07:01 qui est très émetteur en matière de dioxyde de carbone.
07:04 Tout à l'heure, Stéphanie Thiebaud, comment est-ce qu'on trouve le bon équilibre
07:08 entre la récolte de bois dans les forêts françaises
07:12 et l'équilibre qu'une forêt doit pouvoir conserver ?
07:16 Ça c'est un vaste problème.
07:18 Il faut d'abord rappeler que 75% de la forêt française est une forêt privée.
07:23 C'est-à-dire que finalement, la forêt publique, la forêt de Manial,
07:28 je parle aussi sous le contrôle de la FQ qui en a la charge,
07:31 c'est relativement...
07:33 - Et des collectivités territoriales, des communes ?
07:35 - Voilà, c'est soit communal, soit de Manial.
07:38 Et c'est très peu finalement.
07:39 Et le problème aussi de cette forêt privée, si on peut dire,
07:44 c'est qu'il y en a énormément, je crois, qui est inférieur à 10 hectares.
07:51 C'est-à-dire un morcellement extrême.
07:53 Et on en discutait tout à l'heure,
07:55 quelquefois on ne sait même pas à qui appartient la parcelle sur laquelle on veut...
08:00 - La personne propriétaire l'ignore peut-être même elle-même.
08:03 - Exactement. Et en plus avec le fait des successions, etc.
08:07 Donc on a un morcellement extrême de cette forêt privée.
08:10 Je reviendrai tout à l'heure peut-être sur votre question que j'ai pratiquement déjà oubliée.
08:15 Mais je voulais aussi dire que...
08:17 - Le petit dimanche, on a un récord de bois dans les forêts.
08:19 - En France, il ne faut pas oublier que la plus grande forêt française,
08:23 elle n'est pas dans l'Hexagone, elle est en Outre-mer, en Guyane.
08:26 C'est 8 millions d'hectares, c'est la forêt amazonienne.
08:28 C'est extrêmement important, c'est la plus grande forêt européenne.
08:31 Il ne faut pas l'oublier aussi.
08:33 Et puis on parlait des traits de côtes.
08:36 Dans le monde, on a une forêt, et aussi en Outre-mer, qui est la mangrove par exemple.
08:42 Les forêts de mangroves sont absolument des forêts à préserver
08:46 parce que là, elles protègent énormément nos côtes et elles sont en danger.
08:51 - Ma question était sur la filière bois,
08:54 qui représente un chiffre d'affaires de 60 milliards d'euros en France,
08:57 plus de 400 000 emplois.
08:59 Comment est-ce qu'on trouve le bon équilibre
09:01 entre celui de la récolte du bois et de la préservation de la forêt ?
09:05 - Le problème de la filière bois, c'est que, comme vous dites,
09:08 ça rapporte, mais ça coûte aussi parce qu'elle est déficitaire.
09:11 Le rapport de la Cour des comptes a bien montré
09:13 qu'on apporte aujourd'hui du bois en France.
09:17 Donc la filière bois, à quoi elle sert ?
09:19 Dans la filière bois, il y a tout le bois énergie qui est vendu.
09:23 Il y a le bois aussi pour la construction.
09:26 Il y a beaucoup de bois et d'autres.
09:28 Par contre, le problème aussi, c'est qu'en France,
09:31 il n'y a plus de cirie, par exemple, traditionnelle.
09:34 Donc il y a tout un tas de bois qui sont envoyés à l'étranger pour revenir.
09:38 Par exemple, le cas du chêne qui est souvent cité,
09:41 qui est envoyé en Chine pour revenir.
09:43 Et donc, aujourd'hui, on a un vrai problème.
09:46 La forêt, c'est quoi ? C'est un régulateur du climat.
09:49 Ça permet, effectivement, on a parlé de l'eau.
09:52 Depuis une vingtaine d'années, il y a tout ce volant touristique.
09:58 Effectivement, on aime la forêt, on va se promener.
10:01 Il y a une espèce d'appropriation du public de la forêt.
10:04 Et donc, gérer une forêt aujourd'hui est extrêmement difficile.
10:07 C'est-à-dire qu'on ne peut plus couper d'arbres, on ne peut plus couper le bois.
10:10 Et en même temps, il faut que ça rapporte aussi,
10:12 parce que à quoi sert la forêt ?
10:14 Donc c'est toujours cette question du but.
10:18 Est-ce que c'est un enjeu économique ?
10:20 C'est un enjeu social ? C'est un enjeu récréatif ?
10:23 Et dedans, il y a toujours ce problème de l'arbre, finalement.
10:28 Je pense que l'ONF peut mieux en parler que moi.
10:31 Dès que l'ONF, par exemple, veut couper un arbre,
10:34 parce que les arbres, c'est comme les hommes, ça vit et puis ça meurt.
10:38 Et de temps en temps, il faut les couper, parce que ça peut être un peu dangereux.
10:41 D'autre part, il y a des espèces qui poussent et qui sont,
10:45 je pense notamment en forêt de Fontainebleau,
10:47 quand l'ONF a voulu remplacer les pins par des chênes,
10:51 il fallait les couper, sauf que le public ne voulait pas qu'on coupe les pins.
10:55 Donc ça devient complètement un peu un cauchemar.
10:59 Oui, c'est vrai que ce n'est pas facile d'être forestier ou forestière au XXIème siècle,
11:04 mais ceci dit, c'est passionnant.
11:06 Et ce qui est triste, ce n'est pas de couper un arbre ou couper des arbres,
11:09 c'est de voir nos arbres qui dépérissent.
11:11 Et donc tout l'enjeu, c'est d'adapter les forêts au changement climatique
11:15 pour que, comme je le disais tout à l'heure,
11:17 les forêts assurent l'ensemble de leurs hôles et produisent ce bois
11:21 dont on a tant besoin dans l'économie verte du pays.
11:26 Il y a un chiffre qui est assez marquant, qui date de l'année dernière,
11:28 c'est le taux de plantation en échec qui approche les 40%.
11:32 Ça, c'est la mortalité des arbres en réalité.
11:35 Est-ce que ça veut dire qu'on plante mal ?
11:37 Ou comment est-ce qu'il faut interpréter ce chiffre, Régine Touffet ?
11:41 C'est vrai que c'est difficile actuellement, avec le manque d'eau,
11:46 d'avoir des arbres adultes et aussi des petits plants qui se portent bien.
11:51 C'est juste qu'il faut choisir la bonne essence
11:56 qui nécessite le moins d'eau possible pour qu'elle s'en sorte.
12:01 Et d'où ce qu'on appelle la migration assistée,
12:06 c'est pas très joli, mais qui vise à faire remonter les essences méridionales.
12:11 Les essences qu'on a actuellement, le chêne pubescent, le pin d'Alep,
12:15 le sadro d'Atlas, voire des essences d'un peu plus loin,
12:18 comme le chêne de Hongrie, le chêne des Canaries.
12:21 Avec le risque de l'arrivée de nuisibles, c'est ce que disait tout à l'heure Stéphanie Thiebaud.
12:27 Oui, je suis...
12:29 Le problème c'est qu'on a peu...
12:32 Il y a un débat sur les espèces qu'il faut ramener et à quel endroit dans les forêts.
12:37 Oui, tout à fait. C'est-à-dire qu'on ne connaît pas bien comment se comportent les essences, etc.
12:41 C'est-à-dire que c'est quand même... La recherche sur la façon dont se comportent les tolérances des arbres,
12:47 c'est relativement nouveau.
12:49 C'est-à-dire qu'un chêne, un sadro d'Atlas est très bien peut-être,
12:54 mais comment va-t-il se comporter en Bretagne ou autre ?
12:58 Le cèdre d'Atlas est déjà présent en France.
13:02 Si on va sur le mont Ventoux, on a toutes ces pentes du mont Ventoux avec ces bels cédrets.
13:07 Et ensuite, c'est maîtrisé en fait.
13:12 On expérimente sur vraiment de toutes petites surfaces, ce qu'on appelle les îlots d'avenir.
13:19 On plante une essence sur 0,5 hectare, c'est tout petit.
13:24 On prend des essences qui n'ont pas de caractère invasif dans leur milieu actuel,
13:29 et on les installe, on regarde comment elles vont se développer,
13:33 et on aura le résultat dans 30, 40, 50 ans.
13:36 Nos successeurs pourront dire "ah bah oui, cette essence, elle résiste très bien au climat,
13:41 on peut la planter davantage dans les forêts".
13:46 Ce qu'il faut, c'est vraiment une diversité en fait.
13:48 Une diversité des essences, une diversité des espaces dans nos forêts.
13:54 On a des milieux dans lesquels on fait de la production de bois,
13:58 avec tous les autres enjeux, la préservation de la diversité,
14:01 des espaces dans lesquels on laisse en libre évolution,
14:04 c'est par exemple nos réserves biologiques, nos îlots de ses naissances.
14:08 Et au sein des espaces, on va dire, gérés, on a différents types de gestion.
14:13 On a des parcelles avec des arbres du même âge, de la même taille,
14:16 et des parcelles avec des âges différents.
14:18 C'est ce qu'on appelle dans nos jargons de forêt, ici à l'ONF, la forêt mosaïque,
14:21 mais qui est assez représentative de ce qu'on veut pour nos forêts.
14:24 Le gouvernement a fait cette promesse, planter un milliard d'arbres d'ici à 10 ans,
14:28 c'est l'équivalent de 10% de la forêt française.
14:31 Le rapport objectif forêt a été présenté cette semaine,
14:34 il estime que ça nécessite entre 8 et 10 milliards d'euros sur 10 ans.
14:38 Régine Touffay, est-ce que c'est vraiment réaliste, planter un milliard d'arbres en France d'ici 10 ans ?
14:43 Un milliard d'arbres sur 10 ans, ça fait 100 millions d'arbres par an.
14:48 Il faut savoir qu'actuellement, nous plantons 70-75 millions d'arbres.
14:53 On voit bien que le gap est raisonnable.
14:56 Et si on revient un peu en arrière, qu'on se remémore l'époque du Fonds Forestier National,
15:03 le nombre de plantations et de produits dans les pépinières et ensuite installés en forêt était bien au-delà.
15:10 Donc oui, c'est tout à fait faisable, et c'est effectivement une partie de la solution
15:15 pour adapter les forêts et pour faire en sorte qu'on ait des surfaces de forêt
15:21 qui captent le dioxyde de carbone, parce que c'est quand même bien ça aussi l'enjeu,
15:24 et qui se transforment en biomasse, en bois, pour nos meubles,
15:28 je reboucle tout le temps, mais pour nos meubles, nos charpentes, etc.
15:32 - Il faut-il qu'il y ait suffisamment de graines ?
15:34 La sécheresse a entraîné une pénurie ces derniers temps ?
15:37 - Les graines, il y a deux grandes sources d'approvisionnement.
15:42 On a des peuplements classés dans nos forêts de manière à dire,
15:45 ce sont des beaux peuplements, de chênes, de pin, de cèdre,
15:52 dans lesquels on va récolter les graines.
15:54 Donc effectivement, quand les arbres manquent d'eau, la fructification peut être moindre.
15:59 On a aussi des vergers à graines, ce sont des surfaces sur lesquelles on a installé des arbres
16:08 pour leur qualité génétique très intéressante, et dans lesquelles on récolte les graines.
16:14 Donc en fait, on a deux grandes sources d'approvisionnement pour les graines
16:18 qui seront ensuite élevées dans les pépinières.
16:20 - Stéphanie, Thiebaud, vous dites que la forêt, il faut la laisser tranquille.
16:25 - Oui, quand on parle d'un milliard d'arbres, c'est d'abord quels arbres ?
16:28 Où est-ce qu'on va les planter ? Pourquoi planter des arbres ?
16:31 Est-ce que justement, une sylviculture raisonnée ne pourrait pas faire affaire ?
16:38 En plus de ça, des arbres, il y en a quand même beaucoup.
16:42 Où est-ce qu'on va les mettre ? Dans quels espaces ? Quel type ? Comment les adapter ?
16:48 Et je pense qu'aujourd'hui, ce dont on a besoin aussi, quitte à planter des arbres,
16:53 enfin, vaut mieux laisser les forêts se régénérer, faire des vraies forêts,
16:57 laisser la biodiversité travailler, refaire, à la limite, on pourrait dire planter des arbres,
17:02 mais faire revenir aussi les oiseaux ou les animaux qui, dans leur déjection,
17:07 permettent de trimballer les graines et d'avoir une régénération naturelle.
17:14 Et je pense qu'aussi, les arbres, on en a vraiment besoin en ville.
17:18 Aujourd'hui, si on veut avoir, protéger et faire face au changement climatique,
17:24 parce que moi, je ne suis bien entendu, je n'ai pas d'opinion sur l'économie de la forêt,
17:29 mais je pense qu'effectivement, face au changement climatique, face au captage de CO2,
17:35 l'arbre en ville est fondamental.
17:37 Là, aujourd'hui, on a bien prouvé que les îlots de fraîcheur, ça vient des arbres en ville.
17:42 Donc, oui, plantons des arbres, plantons-les dans les villes,
17:45 plantons-les dans toutes les villes de France, partout, pour qu'ils se développent.
17:50 Et ne plantons pas n'importe quoi.
17:53 Le botaniste Francis Salé a ce projet de recréer une forêt primaire dans les Vosges, les Ardennes.
18:00 Il réclame l'appui des politiques. Est-ce que c'est une voie à suivre, Stéphanie Thibault ?
18:03 C'est une voie qui n'a jamais été suivie, parce qu'on trouve toujours que c'est complètement dingue.
18:07 Mais effectivement, Francis Salé a le souhait de laisser une vraie forêt.
18:13 On a comme modèle toujours celle qu'on cite, c'est la partie polonaise de la forêt de Bielowieza,
18:19 qui est une forêt.
18:20 L'intérêt aussi, c'est que dans les forêts, il faut laisser les arbres qui sont morts,
18:25 parce que ça permet de développer toute une faune, etc.
18:29 Mais aujourd'hui, on n'a aucun exemple d'une forêt tempérée qui se développe toute seule sur le long terme.
18:38 Le retour à une forêt primaire, Régine Touffet, faut le souhaiter.
18:41 Primaire, attention, on ne sait pas ce que c'est qu'une forêt primaire aujourd'hui.
18:44 En tout cas, une forêt qu'on laisse tranquille, on peut le dire comme ça, Régine Touffet.
18:49 Un mot de la fin ?
18:51 Je crois qu'il ne faut pas mettre tous nos oeufs dans le même panier.
18:54 Donc effectivement, qu'on laisse des espaces, des forêts en libre évolution, c'est très bien.
19:00 Au côté d'espaces pour la production de bois, c'est déjà ce qu'on pratique à l'ONF avec notre forêt mosaïque.
19:07 On induxe l'exposition des surfaces en libre évolution et des surfaces dans lesquelles on travaille pour produire du bois.
19:14 Je vous remercie toutes les deux grandement d'être venues ce matin sur France Inter.
19:19 Régine Touffet, ingénieure forestière à l'Office National des Forêts.
19:23 Et Stéphanie Thiebaud, archéobotaniste, autrice de l'ouvrage "La forêt, histoire, usage, représentation et enjeu"
19:32 paru cette année aux éditions du CNRS. Merci à vous.

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