Face à l'effondrement de la biodiversité, le réensauvagement de territoires peut-il être une solution pour maintenir des écosystèmes riches et vivants en Europe ? Des exemples très prometteurs semblent le montrer.
Avec Béatrice Kremer-Cochet et Gilbert Cochet, naturalistes
Avec Béatrice Kremer-Cochet et Gilbert Cochet, naturalistes
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00:00:00 -Ravi d'être là devant vous
00:00:03 pour traiter d'un aspect intéressant et actuel,
00:00:08 à savoir en quoi la biodiversité,
00:00:13 son retour, le ré-ensauvagement,
00:00:17 qu'est-ce que cela peut nous apporter
00:00:20 par rapport au fonctionnement des écosystèmes
00:00:24 et à la nature de la biodiversité ?
00:00:27 -Au fonctionnement des écosystèmes et qui vont permettre, par exemple,
00:00:33 de remettre un peu de l'ordre dans tout ce qui est climatique.
00:00:39 On va voir quelques exemples à partir de ça.
00:00:43 L'idée de départ, c'est que le ré-ensauvagement,
00:00:47 il y en a en France, on va le voir, bien sûr,
00:00:50 mais il y en a eu plus en Europe.
00:00:53 L'Europe, comme bien souvent, a inspiré la France.
00:00:57 Il y a parfois un peu plus d'ambition
00:01:01 dans la préservation de la biodiversité
00:01:04 dans les autres pays d'Europe que le nôtre,
00:01:06 mais pas toujours non plus.
00:01:08 Cette belle Europe est intéressante, comme on la voit ici.
00:01:15 Quelques petites remarques.
00:01:17 Ce qui apparaît très net,
00:01:20 c'est l'ensemble des montagnes qui vont de l'Espagne jusqu'au Caucase,
00:01:25 au-delà de la mer Noire.
00:01:28 C'est une caractéristique assez particulière.
00:01:33 On aura l'occasion d'en reparler.
00:01:35 Et puis, quand vous avez les grandes plaines du milieu,
00:01:39 de ce continent,
00:01:43 vous voyez qu'il n'y a pas de montagne.
00:01:46 Les pluies peuvent rentrer assez profondément,
00:01:50 jusqu'à près de 1 000 km à l'intérieur des terres.
00:01:54 C'est quelque chose d'assez étonnant.
00:01:57 Sinon, pour le reste, on a du Grand Nord,
00:02:02 mais il y en a dans d'autres pays.
00:02:03 On a du bord méditerranéen, mais il y en a sur l'Afrique du Nord.
00:02:07 On a un bord atlantique, mais il y en a aussi en Amérique du Nord.
00:02:11 Donc, on s'était posé la question
00:02:14 des caractéristiques spécifiques à l'Europe,
00:02:18 et notamment sur les péninsules.
00:02:22 Une caractéristique intéressante,
00:02:27 on voit apparaître les animaux,
00:02:29 le Milan royal, l'hizar,
00:02:31 les différentes espèces de chamois, le bison d'Europe,
00:02:35 ces espèces-là sont confinées à l'Europe au sens strict.
00:02:40 Et ça montre que cette Europe qui va...
00:02:43 Vous vous souvenez peut-être, c'était l'Europe de Charles de Gaulle,
00:02:47 donc de l'Atlantique à l'Oural.
00:02:51 Eh bien, cette Europe-là, c'est vraiment une entité.
00:02:55 Et par exemple, le Milan royal, que vous avez en photo en haut à droite,
00:03:00 le Milan royal n'est présent en Europe
00:03:03 qu'Espagne, Portugal, France, Allemagne et Royaume-Uni,
00:03:09 et un petit peu dans d'autres pays un peu plus au nord, mais guerre.
00:03:12 Limité à ça.
00:03:14 Alors que le Milan noir, par exemple, est présent dans toute l'Eurasie,
00:03:17 en Australie, en Afrique noire.
00:03:19 Donc on a vraiment une caractéristique européenne.
00:03:23 Et puis l'hizar, le chamois des Pyrénées,
00:03:28 mais qu'on retrouve dans les différentes péninsules,
00:03:30 pareil, il est spécifique à l'Europe et aux montagnes européennes.
00:03:35 Quand on sort d'Europe, plus d'hizar.
00:03:38 Et enfin, le bison qui avait quasi disparu,
00:03:40 mais qui fait un retour tenitruant.
00:03:44 Donc c'est une espèce typiquement européenne.
00:03:48 - À ne pas confondre avec le bison d'Amérique.
00:03:52 Il y a un petit souci technique sur la projection.
00:03:59 - Ça sautille un peu.
00:04:03 C'est pétillant.
00:04:06 Non ?
00:04:07 Petit à petit.
00:04:13 Ah, voilà.
00:04:16 On l'a pas, mais ce n'est pas grave.
00:04:18 Si on essaie de suivre l'image...
00:04:29 Voilà.
00:04:31 Alors, nous avons trois péninsules.
00:04:35 La péninsule ibérique, la péninsule italienne ou ligure
00:04:39 et la péninsule balkanique.
00:04:41 Pourquoi on évoque ça ?
00:04:43 Parce que quand il va y avoir un ré-ensauvagement,
00:04:47 le retour de la nature,
00:04:48 il y a quelques petites règles géographiques
00:04:52 qui vont obliger, en quelque sorte, à une évolution particulière.
00:04:59 Ainsi, quand vous avez les glaciations,
00:05:03 vous avez les glaciers dans le nord de l'Europe,
00:05:05 ça repousse les espèces vers le sud.
00:05:07 Elles vont trouver refuge dans une des trois péninsules.
00:05:10 Elles vont rester comme ça à peu près 100 000 ans, séparées,
00:05:14 chaque espèce dans sa péninsule.
00:05:16 Quand on vit séparément, en termes d'évolution,
00:05:19 chacun change.
00:05:22 Il change au point que quand on se retrouve,
00:05:24 on est tellement différents que ça fait deux espèces différentes.
00:05:27 Et donc, là, comme ces espèces vont rester dans les refuges
00:05:31 à peu près 100 000 ans,
00:05:33 ça laisse du temps pour l'évolution.
00:05:36 Résultat, quand les glaces sont remontées,
00:05:41 les espèces se sont répandues à nouveau.
00:05:44 On s'est rendu compte qu'on avait, par exemple,
00:05:47 des espèces de pins qui étaient présents,
00:05:50 chacun dans une péninsule.
00:05:52 Les taupes...
00:05:54 Il y a eu une taupe... Ah, c'est revenu ici.
00:05:57 On a la taupe ibérique, la taupe italienne ou ligure
00:06:03 et la taupe balkanique.
00:06:05 Chacun sa taupe.
00:06:06 C'est comme les fromages en France.
00:06:10 Dans chaque petit village, on fait le fromage qui est différent
00:06:14 de celui d'à côté.
00:06:15 Là, c'est un peu pareil avec l'évolution.
00:06:17 Même chose avec le loup, par exemple.
00:06:20 Le loup espagnol, Cygnatus,
00:06:23 c'est un loup beaucoup plus sombre que le nôtre.
00:06:27 Il n'a pas encore passé les Pyrénées.
00:06:31 Et puis, le loup italicus, c'est celui-là
00:06:35 qui a envahi tout le reste de l'Europe,
00:06:38 notamment la France, toutes les Alpes.
00:06:41 Et puis, enfin, on retrouve le loup le plus classique,
00:06:47 dans la péninsule balkanique.
00:06:49 Vous avez ici un élément qui explique la diversité.
00:06:56 -Un autre facteur d'évolution
00:06:59 qui a fait que les montagnes sont devenues des refuges,
00:07:03 c'est la pression synergétique.
00:07:06 La pression d'occupation des sols aussi,
00:07:09 qui, petit à petit, au fur et à mesure de l'évolution du Néolithique,
00:07:14 a repoussé certaines espèces, notamment les grands prédateurs,
00:07:18 dans les massifs montagneux.
00:07:21 Ce qui fait qu'actuellement,
00:07:23 les montagnes constituent des sanctuaires,
00:07:26 notamment pour ces grosses espèces,
00:07:28 telles que les ours bruns, par exemple.
00:07:31 On ne les trouve plus en Europe,
00:07:33 mis à part en Europe complètement au nord,
00:07:36 donc en Scandinavie, en Finlande, en Carillie.
00:07:40 On ne les trouve plus que dans les massifs montagneux,
00:07:42 parce que partout ailleurs, ils étaient un peu gênants,
00:07:45 donc on les a exterminés jusqu'au dernier.
00:07:47 Et ils ont fini par se réfugier.
00:07:50 Ce qui montre tout l'intérêt des montagnes
00:07:55 en tant que zone de préservation de la biodiversité.
00:07:59 Finalement, il y a eu très peu de disparitions d'espèces en France
00:08:04 grâce à ces refuges difficilement accessibles
00:08:06 qu'ont constitué les montagnes.
00:08:08 Actuellement, la plupart des parcs nationaux
00:08:10 sont localisés sur les montagnes, et ce n'est pas un hasard.
00:08:14 Quand nous avons écrit notre livre sur l'Europe réanimée,
00:08:18 on s'est amusé à faire des...
00:08:19 Amuser, ce n'est peut-être pas tout à fait le bon mot,
00:08:21 mais on a fait des cartes inédites
00:08:23 qui montrent la répartition de différentes espèces un peu iconiques,
00:08:28 dont l'ours.
00:08:29 On a eu l'idée de mettre un symbole, un pictogramme de l'animal
00:08:33 qui est proportionnel à la population de l'endroit.
00:08:36 Si on regarde cette carte, c'est assez intéressant,
00:08:39 parce qu'on voit qu'en Europe,
00:08:41 l'endroit où il y a le plus d'ours, c'est les Carpathes.
00:08:47 Les Carpathes, où vous avez plus de 6 000 individus.
00:08:50 Et si vous allez dans les Carpathes,
00:08:52 la cohabitation de l'ours avec notamment le pastoralisme,
00:08:56 il y a beaucoup de troupeaux de moutons là-bas,
00:08:57 ça ne pose strictement aucun problème.
00:09:00 Au contraire, dans les pays de l'Est, l'ours est un petit peu un symbole.
00:09:04 Alors, ils n'aiment pas trop le loup,
00:09:06 mais l'ours, par contre, dans l'imagerie populaire,
00:09:09 c'est vraiment un animal qui est chéri, adulé, protégé et respecté.
00:09:15 Alors que là où vous avez le plus petit symbole,
00:09:18 je vous laisse le chercher, c'est dans les Pyrénées.
00:09:21 Et curieusement, c'est là qu'il y a le plus de problèmes de cohabitation.
00:09:25 Alors, trouvez l'erreur.
00:09:26 Je vous laisse méditer là-dessus.
00:09:29 Alors, je parlais de parcs nationaux qui se sont créés
00:09:34 particulièrement dans les montagnes,
00:09:36 parce que ce sont justement des zones de refuge
00:09:38 dans lesquelles on avait une biodiversité,
00:09:40 et notamment une biodiversité concernant les gros animaux,
00:09:43 qui est plus importante.
00:09:45 Et le premier parc...
00:09:47 Alors, ce n'est pas le premier parc national qui a été créé en Europe.
00:09:50 Il y en a eu d'autres juste avant le parc national suisse.
00:09:53 Il y en a eu d'autres en Finlande,
00:09:56 qui en a créé neuf d'un coup,
00:09:58 à l'image des parcs nationaux américains,
00:10:01 et notamment du parc national de Yellowstone,
00:10:03 qui a été un des premiers créés au monde.
00:10:06 Et les parcs nationaux finlandais, eux, ils ont été créés
00:10:08 un petit peu comme les parcs américains,
00:10:10 sur des bases paysagères.
00:10:12 C'est-à-dire que c'était un intérêt essentiellement floristique
00:10:15 et géologique qui a conduit à la création de ces parcs nationaux.
00:10:20 Mais pour autant, on ne laisse pas la nature en libre évolution,
00:10:24 et on autorise encore certaines activités synergétiques
00:10:27 réservées notamment aux peuples autochtones.
00:10:30 Avec la petite différence qu'à l'époque,
00:10:32 les habitants autochtones utilisaient
00:10:36 des méthodes très traditionnelles.
00:10:37 Maintenant, ils continuent leur chasse,
00:10:39 mais avec des motoneiges, des hélicoptères.
00:10:42 Donc on n'est plus tout à fait dans les mêmes conditions.
00:10:43 Par contre, le parc national suisse, à notre avis,
00:10:47 il est très intéressant, parce que ça a été le précurseur
00:10:50 de ce qu'on va appeler la libre évolution.
00:10:52 C'est-à-dire qu'en 1914, ça fait déjà plus d'un siècle,
00:10:56 du jour au lendemain, les Suisses ont décidé
00:10:58 que sur cet espace de 17 300 hectares,
00:11:01 il n'y aurait plus de pâturage, donc ils ont...
00:11:03 Plus de pâturage domestique, donc ils ont retiré toutes les vaches.
00:11:07 Il n'y aurait plus de coupe de bois,
00:11:09 et on n'extrairait plus le bois mort non plus.
00:11:12 Et aussi difficile pour les Suisses que pour les Français,
00:11:15 ils ont décidé qu'il n'y aurait pas de chasse.
00:11:17 Donc ça fait maintenant plus d'un siècle
00:11:19 qu'on a du recul sur ce qui se passe
00:11:22 quand on laisse un espace relativement vaste
00:11:25 en libre évolution.
00:11:27 Et ça a été très intéressant, très pédagogique, très didactique,
00:11:31 parce qu'on s'est rendu compte que certaines idées,
00:11:35 qui étaient même très ancrées chez les écologues,
00:11:38 ont été complètement battues en brèche.
00:11:39 Après plus d'un siècle, par exemple,
00:11:41 on constate que, contrairement à toutes les prédictions
00:11:44 qu'il y avait pu y avoir,
00:11:45 il y a toujours des espaces ouverts
00:11:49 dans le parc national suisse.
00:11:50 Nous y sommes allés en 2019, et nous avons vu,
00:11:53 donc contrairement à ce qui est souvent annoncé,
00:11:55 si vous laissez faire "Ouh là là, il va y avoir de la forêt partout",
00:11:59 là, en l'occurrence, vous trouvez encore...
00:12:02 Il y a eu certainement des endroits
00:12:04 où les prairies pâturées par les vaches
00:12:06 se sont redensifiées et repeuplées en arbres,
00:12:11 mais vous avez aussi de magnifiques prairies fleuries,
00:12:14 très riches en biodiversité végétale, simplement.
00:12:17 Ce ne sont plus les vaches qui viennent les brouter,
00:12:19 ce sont le soie, où vous voyez sortir les biches avec leur fang,
00:12:23 ou les bouctins, ou les chamois, suivant les endroits,
00:12:25 ou les chevreuils.
00:12:26 Donc c'est la faune sauvage, en fait,
00:12:28 qui a joué le rôle des animaux dynastiques.
00:12:31 Et finalement, quand on laisse faire la nature,
00:12:33 on a parfois des belles surprises.
00:12:36 Et ce n'est pas nécessairement la catastrophe.
00:12:38 Et non seulement ce n'est pas la catastrophe,
00:12:41 mais le Parc national suisse est également très intéressant
00:12:44 parce qu'il nous démontre qu'économiquement,
00:12:46 ça peut être aussi une activité extrêmement intéressante.
00:12:50 Donc vous voyez, 150 000 visiteurs par an.
00:12:54 Nous avons discuté avec le directeur du Parc national suisse
00:12:57 lorsque nous l'avons visité,
00:12:59 et il nous a annoncé un revenu
00:13:03 de pratiquement 20 millions d'euros chaque année
00:13:06 pour les 4 communes qui sont propriétaires du foncier
00:13:08 de ce Parc national.
00:13:09 Alors ces revenus, c'est quoi ?
00:13:10 C'est un tout petit peu...
00:13:12 Ca, c'est très spécifique à la Suisse.
00:13:15 Comme c'est l'Etat suisse, l'Etat fédéral suisse,
00:13:19 qui a décidé la création du Parc national
00:13:21 et que le foncier appartient à des communes,
00:13:23 donc l'Etat reverse une toute petite location
00:13:26 à chacune des 4 communes propriétaires du foncier.
00:13:28 Mais en réalité, la très grosse majorité de ces revenus
00:13:32 est liée au produit de l'écotourisme.
00:13:35 C'est-à-dire que cette région, dans laquelle on ne fait rien,
00:13:39 attire énormément de randonneurs
00:13:42 qui sont canalisés sur des sentiers balisés
00:13:44 dont on leur demande de ne pas sortir,
00:13:46 même lorsqu'ils font des pauses.
00:13:48 Il n'y a pas de bivouac autorisé non plus,
00:13:50 sauf dans 2 endroits très spécifiquement réservés à cela.
00:13:54 Donc ça permet de préserver une certaine intimité à la faune
00:13:58 qui est tranquille en dehors de ces sentiers,
00:14:00 qui y vient quand elle en a envie,
00:14:03 ce qui permet aux visiteurs d'avoir le bonheur immense,
00:14:06 parce qu'en un siècle,
00:14:08 les animaux ont un petit peu perdu la peur de l'homme.
00:14:11 Je dis "un petit peu", pas totalement,
00:14:12 parce que 17 300 hectares, c'est quand même relativement petit,
00:14:15 ça ne couvre pas le territoire nécessaire à certaines espèces.
00:14:19 Notamment en hiver, les cervidés descendent un peu dans la vallée
00:14:23 et là, les chasseurs les attendent.
00:14:24 Donc ils n'ont pas totalement perdu la peur de l'homme,
00:14:27 mais quand même, ils savent que dans cet endroit-là,
00:14:32 ils sont relativement tranquilles, ils ne craignent pas les humains.
00:14:35 Et donc, ces gens qui viennent utilisent les hébergements,
00:14:38 achètent, quand ils sont en location dans un appartement,
00:14:42 achètent des produits au supermarché du coin, vont au restaurant,
00:14:45 et ça permet aux habitants de ces 4 communes
00:14:48 de vivre très largement des revenus de l'écotourisme.
00:14:51 Et ça, c'est très intéressant,
00:14:53 parce que quelques dizaines de kilomètres plus loin,
00:14:55 vous avez la station de ski très huppée
00:14:57 et très renommée de Saint-Maurice,
00:14:59 et on se rend compte que finalement,
00:15:01 protéger la nature, ne rien faire
00:15:03 et ne pas développer d'infrastructures
00:15:05 qui abîment l'environnement,
00:15:07 ça rapporte autant, si non plus, que la station de ski de Saint-Maurice.
00:15:11 -En fait, l'économie de la contemplation
00:15:15 rapporte plus que l'économie de l'exploitation.
00:15:19 Mais l'espèce humaine, vous savez, il faut qu'elle existe.
00:15:23 Donc il faut qu'elle construise, qu'elle creuse, qu'elle détruise.
00:15:28 Quand vous prenez un petit enfant, vous allez en bord de mer.
00:15:31 Cet imbécile, il devrait regarder le flux, le reflux
00:15:35 et se dire "c'est merveilleux, c'est beau".
00:15:37 Mais non, il faut qu'il prenne sa pelle, son râteau, son seau
00:15:43 et puis qu'il va construire des châteaux.
00:15:45 Je vous découpe pied dedans, je le reconstruis.
00:15:48 Quand il va grandir, il va devenir ingénieur.
00:15:50 Il ne peut pas lui arriver de pire.
00:15:52 Et il va se mettre à construire, on écoutait ce matin
00:15:55 les annonces faites par notre cher président
00:15:59 pour fabriquer des piles pour les voitures de la Terre entière
00:16:02 et de la planète Mars réunie.
00:16:05 Donc c'est un hyperactif, l'homme,
00:16:10 alors qu'on lui offre des spectacles absolument magnifiques.
00:16:14 - Dans le Parc national, suite à la libre évolution,
00:16:19 on a eu un certain nombre de retours spontanés,
00:16:22 dont le loup qui n'a été réintroduit nulle part en Europe.
00:16:25 Et il y a eu également des espèces
00:16:28 dans lesquelles le retour spontané était un peu plus compliqué.
00:16:31 On a donné un petit coup de pouce en les faisant revenir.
00:16:33 Vous allez me dire, réintroduire une espèce,
00:16:37 c'est complètement artificiel,
00:16:39 ce n'est pas vraiment de la libre évolution.
00:16:41 Mais si on réfléchit et qu'on remet les choses dans l'ordre,
00:16:44 ce qui était vraiment artificiel, c'est de l'éradiquer totalement.
00:16:48 Et là, personne n'a rien dit sur...
00:16:51 Ce n'est pas naturel.
00:16:53 La réintroduction, on ne l'a fait que quand,
00:16:56 en des cas exceptionnels, quand le retour spontané n'est pas possible.
00:16:59 Mais de temps en temps, on est obligé de réparer nos erreurs.
00:17:03 Notamment dans le Parc national suisse,
00:17:05 il y a eu des réintroductions de Boutin et de J. Paet,
00:17:09 qui est une espèce de vautour.
00:17:11 Et là, sur cette image à gauche,
00:17:14 vous avez une peinture qui est intéressante.
00:17:17 C'est une peinture qui date de l'époque romantique.
00:17:19 Elle est localisée en Suisse.
00:17:21 On peut la localiser très précisément grâce au massif enneigé
00:17:25 que vous avez là au fond.
00:17:26 Pour les gens qui connaissent un peu la Suisse,
00:17:29 on reconnaît très facilement le massif de la Jungfrau.
00:17:32 Pas très loin, un peu plus à l'ouest du Parc national suisse.
00:17:36 Ce qui est intéressant aussi, quand on regarde cette peinture
00:17:39 qui date du XIXe siècle,
00:17:41 c'est qu'on voit un oiseau
00:17:43 dont on reconnaît, quand on le regarde d'un peu près,
00:17:47 qu'il s'agit d'un J. Paet barbu.
00:17:49 Et surtout, ce qu'on voit, c'est l'imaginaire qu'on avait à l'époque
00:17:53 de cet oiseau.
00:17:54 Vous voyez qu'il tient un animal dans ses pattes.
00:17:57 On devine que c'est un mouton.
00:17:58 D'ailleurs, les moutons dégringolent la colline.
00:18:00 Elle a l'air complètement affolée,
00:18:01 pendant que le chien, qui est ici, aboie en direction de l'oiseau,
00:18:04 vient d'enlever dans ses cerfs, redoutable, un petit agneau du troupeau
00:18:09 que le pauvre berger s'efforce de garder.
00:18:11 D'ailleurs, il est très en colère contre le J. Paet.
00:18:14 Sauf que ça, c'est de l'imaginaire.
00:18:16 Entre-temps, en un siècle, on a étudié un peu la biologie
00:18:19 et la physiologie du J. Paet, qui est un vautour.
00:18:22 Comme tous les vautours, on s'est rendu compte que leurs cerfs,
00:18:26 dans la façon dont ils sont constitués,
00:18:28 sont absolument incapables d'agripper et de soulever dans les airs
00:18:32 un animal de ce poids-là.
00:18:33 Voilà comment, à partir d'un imaginaire
00:18:38 et d'une réputation tout à fait usurpée,
00:18:43 on en est arrivé à exterminer totalement cet oiseau
00:18:46 dont on sait maintenant qu'il est extrêmement utile,
00:18:49 comme l'ensemble des autres vautours.
00:18:52 Puisque ces animaux jouent le rôle d'écarisseurs naturels.
00:18:56 Non seulement, lorsqu'ils sont présents à proximité de zones de pastoralisme,
00:19:03 ou encore mieux, quand il n'y a pas de pastoralisme,
00:19:06 ils font le travail sur la faune sauvage,
00:19:09 ils évitent la propagation des maladies.
00:19:11 Parce que quand un groupe de vautours repère un animal mort,
00:19:16 en général, nous, on l'a vu, c'est très caractéristique.
00:19:18 Vous avez un 1er vautour qui arrive, il tourne d'une certaine façon,
00:19:22 il descend.
00:19:22 Les vautours, on ne les voit pas, mais eux, ils ont une vue très perçante.
00:19:26 Ils sont capables de communiquer à des dizaines de kilomètres,
00:19:28 ils se voient à des dizaines de kilomètres.
00:19:30 Quand il y en a un qui commence à amorcer cette descente-là,
00:19:33 tous les autres savent qu'il y a quelque chose d'intéressant.
00:19:36 Tout à coup, vous voyez apparaître 10, 15, 20, 30, 40 vautours
00:19:39 qui surgissent de nulle part, qui convergent tous vers le cadavre,
00:19:43 qui descendent.
00:19:44 Et en 20 minutes, c'est terminé.
00:19:48 Il n'y a plus rien.
00:19:49 Et très important, en général, parfois, quand l'animal est mort,
00:19:53 c'est parce que vous avez une pathologie, des microbes.
00:19:56 Le pH de l'estomac des vautours est tellement acide
00:20:00 que pas un microbe n'y résiste.
00:20:02 Ils évitent la propagation des maladies.
00:20:05 En plus, quand vous êtes sur du pastoralisme,
00:20:07 maintenant qu'on a le droit de faire des placèdes d'écarissage,
00:20:10 on a eu des témoignages des l'éleveur qui nous racontaient
00:20:12 qu'avant l'autorisation des placèdes d'écarissage naturel
00:20:16 avec nettoyage par les vautours,
00:20:18 le cadavre, surtout dans certaines régions reculées des montagnes,
00:20:22 il restait sous une bâche parfois 15 jours
00:20:24 avec tous les problèmes de propagation des maladies.
00:20:27 Et puis le camion d'écarissage venait, il vient dans une ferme,
00:20:31 il arrive dans une deuxième et il transporte comme ça
00:20:33 tous les microbes.
00:20:34 Il les propage bien d'un endroit à l'autre.
00:20:36 Et en général, quand vous êtes dans le massif central,
00:20:39 le point d'écarissage le plus proche est à Lyon.
00:20:41 Donc c'est plus de 100 km.
00:20:42 Donc autant d'émissions de CO2.
00:20:44 Et donc finalement, laissez faire les vautours.
00:20:47 Ça permet d'éviter la propagation des maladies,
00:20:49 de limiter les émissions de CO2.
00:20:51 Et en soi, c'est une merveilleuse solution
00:20:54 qui permet en plus à l'éleveur de faire des économies
00:20:57 parce qu'il est partiellement exonéré d'un truc fantastique.
00:21:00 Ça n'existe qu'en France.
00:21:02 La contribution volontaire obligatoire pour l'écarissage.
00:21:07 Il a une titre, il se tourne sur cette contribution.
00:21:10 C'est du gagnant-gagnant.
00:21:14 -Si on revient juste sur le diapo précédent.
00:21:18 Voilà.
00:21:20 Les effectifs, vous avez sur cette carte,
00:21:23 dans le massif des Alpes, 51 couples.
00:21:26 Depuis, les effectifs ont augmenté.
00:21:29 Cette année, on en est à 77 couples.
00:21:33 Sur l'ensemble des Alpes, dont 26 en Suisse
00:21:37 et à peu près la même quantité en France.
00:21:41 Il y en a en Italie, en Autriche, un peu dans tous les pays.
00:21:45 Alors, dans les Alpes, mais pas que,
00:21:52 dans les Alpes françaises, on est dans le Vercors précisément,
00:21:56 le paysage est de redevenu riche et vivant.
00:21:59 C'est-à-dire que pendant longtemps, on disait
00:22:04 que le paysage est une carte postale, mais sans vie.
00:22:09 Grâce au retour spontané des espèces,
00:22:12 grâce à leur réintroduction, on va voir ce qui s'est passé.
00:22:17 Toutes ces espèces-là sont de retour.
00:22:23 C'est vraiment du ré-enfauvagement.
00:22:26 Pour un certain nombre, elles ont été réintroduites.
00:22:31 Le bouquetin, à gauche, le gypaï de barbu, au milieu.
00:22:37 Et puis, voilà, la forêt à vide est revenue.
00:22:41 Donc, les gloroyales, les effectifs ont augmenté.
00:22:45 Les vautours-faux ont été réintroduits.
00:22:49 Les chamois, moins tirés, ont vu leurs effectifs progresser un peu.
00:22:55 Devant toute cette nourriture, le loup est arrivé.
00:22:59 Les grands-ducs ont augmenté leur densité.
00:23:04 Les lynx se sont mis à se nourrir sur le chamois et sur le chevreuil.
00:23:10 Et puis, le cerf, qui était absent, est revenu bramer dans le secteur.
00:23:16 Donc, ça, ce sont de bonnes nouvelles.
00:23:20 On ne le dit pas assez.
00:23:23 Mais la biodiversité en France,
00:23:25 vous avez à la fois des pans entiers avec une progression.
00:23:29 Et puis, il faut quand même malheureusement dire
00:23:32 qu'il y a 2 domaines où ça ne va vraiment pas.
00:23:35 C'est le domaine agricole, avec l'utilisation des pesticides,
00:23:40 qui limite très fortement les densités en papillons, par exemple.
00:23:46 Il y a des tas de calculs, de recensements qui ont été faits.
00:23:48 C'est très net.
00:23:50 Et puis, l'autre domaine où ça ne va pas du tout,
00:23:52 c'est la pêche en mer.
00:23:53 La pêche en mer, c'est une exploitation honteuse,
00:23:58 avec les chaluts qui reculent le fond.
00:24:01 On ne peut pas imaginer pire.
00:24:02 Et ça passe.
00:24:03 Il n'y a pas de... très peu de réaction.
00:24:06 Ça laisse pantois.
00:24:09 Alors, les forêts ont progressé.
00:24:13 La carte est malheureusement incomplète.
00:24:16 Il y a eu un problème de cartes hauts.
00:24:19 Mais les forêts progressent.
00:24:21 En France, par exemple,
00:24:23 au 20e...
00:24:27 première moitié du 20e siècle,
00:24:30 ça a progressé d'environ 60 000 hectares chaque année,
00:24:37 la forêt en France.
00:24:38 60 000 hectares chaque année.
00:24:40 Pour vous donner une idée, en 10 ans, ça fait 600 000 hectares.
00:24:44 600 000 hectares, c'est l'équivalent d'un département français.
00:24:48 Donc, un département français tous les 10 ans.
00:24:51 Donc, il y a une progression énorme.
00:24:54 Et 60 000 hectares,
00:24:56 c'est exactement ce qui a brûlé l'an passé dans les Landes.
00:25:00 Donc, ça vous donne un peu une idée.
00:25:02 Et pendant longtemps, notamment en Provence,
00:25:06 sur le massif des Morts, le massif de Vestorelle,
00:25:09 la forêt a gagné
00:25:13 de bien plus grandes surfaces que les surfaces brûlées.
00:25:18 Les surfaces brûlées, c'était 4 000, 5 000 hectares,
00:25:22 alors qu'au niveau du retour,
00:25:27 c'était plusieurs dizaines de milliers d'hectares.
00:25:29 Donc, voilà, ça, c'est un premier fait.
00:25:31 Alors, ça permet d'évoquer les solutions
00:25:34 pour s'adapter d'urgence, notamment au changement climatique.
00:25:38 Ces forêts qui se réinstallent,
00:25:41 c'est du CO2 qui est capté et qui va se stocker.
00:25:46 Malheureusement, en Europe, c'est plutôt ce qui se passe,
00:25:50 mais on était en Colombie la semaine passée,
00:25:55 donc, tous les deux, on a participé
00:25:58 à un forum de conférences sur les forêts,
00:26:03 notamment sur la forêt amazonienne.
00:26:05 Et là, on était, nous, pour donner des exemples
00:26:08 de ce qu'on fait en Europe, et notamment en France.
00:26:13 Et c'est là qu'on s'est rendu compte que, malheureusement,
00:26:17 on a beau faire de notre côté, ça défait,
00:26:19 du côté forêt amazonienne, c'est assez terrible.
00:26:23 Mais bon, il y a la protection qui est mise en place aussi.
00:26:28 - Alors, il faut quand même signaler qu'en France,
00:26:31 et en Europe, d'une manière générale, on revient de loin.
00:26:34 Si on prend la situation telle qu'elle était,
00:26:37 la forêt telle qu'elle est apparue
00:26:39 à la sortie de la dernière glaciation,
00:26:41 une fois qu'elle s'est installée,
00:26:43 on a découvert à peu près 80 % de la surface de l'Europe.
00:26:46 80 %.
00:26:48 Au milieu du XIXe siècle,
00:26:53 lui, c'est ça, au milieu du XIXe siècle,
00:26:54 ça a été le moment le plus bas en termes de surface forestière.
00:26:59 Et donc, on est passé de 80 % à 12 %
00:27:02 de surface forestière en France.
00:27:04 Donc, tout ça, essentiellement,
00:27:06 sous l'influence de ce qu'on appelle le néolithique,
00:27:10 c'est-à-dire, en fait, le développement de l'agriculture,
00:27:13 l'exploitation du bois, le bois énergie, etc.
00:27:16 Le retour de la forêt en France et en Europe
00:27:19 a été permis principalement
00:27:22 grâce à la découverte des énergies fossiles.
00:27:23 A partir du moment où on a découvert le charbon,
00:27:27 le charbon et puis le pétrole
00:27:28 ont remplacé le bois énergie en très grande partie.
00:27:32 Première chose. Deuxièmement, ça a permis
00:27:33 le développement de l'industrie
00:27:35 et donc un appel de population, des campagnes vers la ville.
00:27:39 Et donc, ce sont les zones les plus défavorisées
00:27:42 qui ont été abandonnées en premier.
00:27:43 Et dans ces zones défavorisées
00:27:45 sur lesquelles on gagnait chichement sa vie,
00:27:48 eh bien, les terrains ont été abandonnés
00:27:50 et la plupart du temps,
00:27:52 il y a eu une reforestation spontanée
00:27:56 qui a permis le reboisement dont parlait Gilbert,
00:27:59 cette fameuse progression.
00:28:02 Et donc, actuellement, on est à peu près, en France,
00:28:04 à 30 % de surface forestière.
00:28:06 Alors, pourquoi je vous dis ça ?
00:28:08 Parce qu'aujourd'hui, nous sommes arrivés à un autre tournant.
00:28:11 C'est-à-dire qu'on voit l'épuisement des ressources fossiles
00:28:14 et tout le monde commence à se retourner vers le bois.
00:28:17 Et donc, moi, mon message, c'est le bois,
00:28:20 c'est un matériau super, noble, utile.
00:28:24 On peut effectivement l'utiliser,
00:28:26 mais si on ne veut pas retomber très rapidement
00:28:29 dans la situation du milieu du XIXe siècle,
00:28:32 il faut quand même qu'on ait une vraie réflexion en amont
00:28:35 sur la façon dont on utilise le bois.
00:28:38 Et notamment, il faut que cette utilisation soit durable.
00:28:41 Il faut que le tronc qu'on va utiliser, son utilisation,
00:28:46 soit au moins aussi longue que le temps qu'il va falloir
00:28:50 pour faire pousser l'arbre qui va le remplacer.
00:28:52 Et donc, notamment, l'utilisation en bois énergie,
00:28:55 à mon avis, elle n'est pas durable.
00:28:57 Parce que, calculez le temps qu'il faut pour brûler un tronc de bois,
00:29:00 le temps qu'il faut pour faire repousser l'arbre équivalent,
00:29:03 on ne va pas s'y retrouver.
00:29:04 Rapidement, il va y avoir un problème.
00:29:06 -Alors, avec le retour de la forêt,
00:29:10 des espèces forestières sont en train de revenir,
00:29:13 avec le mastodonte le plus gros de toutes ces espèces,
00:29:18 à savoir le bison d'Europe.
00:29:19 Le bison d'Europe a failli disparaître.
00:29:22 Il a été sauvé grâce à quelques individus gardés dans des zoos.
00:29:26 Et on l'a réintroduit en Pologne, d'abord,
00:29:30 puis en Slovaquie, une partie de la Hongrie aussi,
00:29:34 autour des Carpathes, en Roumanie, mais aussi en Allemagne,
00:29:38 dans un secteur où il y a pratiquement 600 habitants au km2.
00:29:42 Et on a eu l'occasion de faire des conférences en Belgique.
00:29:49 On a parlé du bison.
00:29:51 Et il y a eu une revue qui se cortait juste après.
00:29:54 Et donc, ils avaient mis le bison en couverture.
00:29:58 Et donc, ils sont maintenant prêts à partir
00:30:02 sur une réintroduction du bison d'Europe.
00:30:04 Alors, c'est intéressant de voir comment on considère
00:30:07 les différents pays d'Europe.
00:30:09 Dans cette revue, les Belges disent
00:30:13 qu'on peut réintroduire du bison, notamment en Wallonie,
00:30:18 parce qu'on a de faibles densités humaines.
00:30:20 Entre parenthèses, 231 habitants au km2.
00:30:24 Et nous, dans le massif de la Margeride,
00:30:28 il y a 5 habitants au km2.
00:30:30 Mais c'est quasi impossible de parler de réintroduction,
00:30:34 parce que c'est la grosse bête.
00:30:37 Mais bon, ça se fera petit à petit.
00:30:39 Les Allemands l'ont fait, comme je disais.
00:30:41 Et puis, l'Ukraine aussi.
00:30:45 Donc Roumanie.
00:30:48 Voilà.
00:30:49 Il y a une dizaine de pays.
00:30:52 Et en tout, on est à plus de 6 000 bisons sauvages en Europe.
00:30:57 Et ça progresse assez rapidement.
00:31:00 Donc, c'est vrai que vous voyez,
00:31:02 une petite balade à Fontainebleau,
00:31:05 on croise 2-3 bisons,
00:31:08 ça mettrait un petit peu de relief.
00:31:11 Et puis, s'il y a des petits problèmes dans les écoles,
00:31:17 vous savez, des fois, ils se comportent mal,
00:31:20 un ou deux bisons qui traversent la cour,
00:31:24 ça calmerait.
00:31:26 Moi, je l'ai vu, ça, en vrai, au Niger, avec l'éléphant.
00:31:30 Quand l'éléphant rentrait dans le village,
00:31:34 la maman disait à son petit, "Si t'es pas gentil..."
00:31:37 Je peux vous dire que dans le monde entier,
00:31:40 pour Roland-Surmars aussi,
00:31:42 ces mots-là, cette situation-là, on la comprend tout de suite.
00:31:47 Et on dit pas, "Oui, mais..." Non, il n'y a pas de "oui, mais".
00:31:51 "L'éléphant", comme disent les enfants, "l'éléphant, il est là."
00:31:55 Donc, je suis bien gentil.
00:31:57 La cigogne noire.
00:32:00 La cigogne noire, c'est un joyau,
00:32:03 une discrétion extraordinaire qui avait complètement disparu.
00:32:06 Il y a à peu près 70, 80 couples en France.
00:32:11 Il lui faut des grandes forêts, il lui faut des très gros arbres
00:32:15 avec des branches horizontales énormes, la taille d'un tronc.
00:32:20 Et là, elle va mettre son nid gigantesque.
00:32:23 Et voilà.
00:32:25 Elle est suivie, notamment par les services de l'Office national des forêts.
00:32:30 Chaque couple est connu, répertorié.
00:32:32 Chaque année, c'est en légère augmentation.
00:32:36 Et ensuite, vous avez des espèces indicatrices,
00:32:41 comme le pic à Doblan, qu'on voit en haut à droite.
00:32:45 Ce pic ne vit que dans les forêts
00:32:49 qui ont des êtres, notamment,
00:32:53 qui ont 200, 300, 400 ans.
00:32:56 Parce que les forêts, nous, on les coupe à 100 ans, les arbres.
00:33:01 Parce qu'au-delà, je pense que...
00:33:03 Au-delà, c'est par jalousie.
00:33:05 Vous comprenez ?
00:33:07 Je préside le Conseil scientifique
00:33:12 de la réserve naturelle des Gorges-de-l'Ardèche.
00:33:16 Et là, ils coupaient les chênes verts tous les 40 ans.
00:33:19 Et donc, actuellement, la réserve, elle a un peu plus de 40 ans.
00:33:25 Donc ils disent, maintenant, il faut couper les chênes verts
00:33:28 parce que... Alors, je leur dis, rassurez-vous.
00:33:31 Allez faire un tour à Assise.
00:33:33 À Assise, il y a le quartier Rhi.
00:33:36 Et il y a là le chêne vert devant lequel
00:33:39 Saint-François d'Assise se recueillait.
00:33:41 Donc il y a à peu près 1 000 ans.
00:33:44 Le chêne vert, il est toujours là.
00:33:46 Et il regarde le bonhomme et il dit, "Mon petit, tu vas bien ?
00:33:50 Tu verras quand tu auras mon âge."
00:33:52 1 000 ans.
00:33:54 C'est insupportable.
00:33:56 Et dans les Gorges-de-l'Ardèche, dans les falaises des Gorges-de-l'Ardèche,
00:33:59 on a des arbres, les genivriers de Phénicie, qui ont 1 500 ans.
00:34:04 Et par calcul, on pense qu'il y a quelques individus qui ont 2 000
00:34:08 et même un très petit nombre d'individus qui ont 2 500 ans.
00:34:12 2 500 ans.
00:34:14 C'est terrible, hein ?
00:34:17 Oui.
00:34:19 On a monté une association avec Francis Allais
00:34:23 pour retrouver une forêt primaire.
00:34:28 L'association Francis Allais pour une forêt primaire.
00:34:30 Et donc Francis Allais est venu nous voir.
00:34:33 Et donc quand il nous a parlé de ça, on parlait de 800 ans.
00:34:37 Moi, je commence à avoir quelques cheveux blancs.
00:34:39 Bon, une association pareille, je signe.
00:34:43 Et voilà.
00:34:44 On a essayé de faire revenir cette forêt.
00:34:47 Il faut qu'on accélère...
00:34:49 pour le temps.
00:34:52 Voilà. Sinon, vous avez d'autres exemples.
00:34:57 La chouette chevêchette, en bas, la chouette de l'Oural.
00:35:00 Ce sont des espèces qui ont été préservées dans les pays de l'Est,
00:35:03 où ils ont beaucoup plus protégé la forêt que chez nous
00:35:07 et qui, actuellement, reviennent dans nos territoires.
00:35:11 -En fait, on ne peut pas vraiment parler de protection
00:35:15 pour les forêts des pays de l'Est.
00:35:16 C'est simplement une méthode d'exploitation différente
00:35:20 entre l'Europe occidentale et l'Europe de l'Ouest.
00:35:23 En Europe occidentale, on fait les choses
00:35:25 de manière très cartésienne, pays d'écarte,
00:35:27 c'est-à-dire, c'est rationnel.
00:35:29 On élimine une parcelle, on la coupe, on l'exploite,
00:35:31 on passe à la suivante, et comme ça,
00:35:33 petit à petit, on ratiboise tout le pays.
00:35:35 Alors qu'en Europe de l'Est, ils sont plus négligents,
00:35:38 c'est-à-dire qu'ils prennent le bois dont ils ont besoin,
00:35:39 là où il est bien, et le reste, ils laissent.
00:35:41 C'est ce qui a permis de constituer des réservoirs
00:35:44 grâce auxquels, petit à petit,
00:35:46 il y a une conquête de l'Ouest qui est en train de se faire,
00:35:49 mais cette fois-ci par les animaux sauvages
00:35:51 qui se réapproprient au fur et à mesure
00:35:53 et qui protègent à nouveau les forêts
00:35:55 dans l'Europe de l'Ouest,
00:35:56 qui se réapproprient leurs territoires ancestraux.
00:35:58 Très intéressant aussi, les fleuves et rivières,
00:36:01 après avoir été corsetées, endiguées,
00:36:05 ratiboisées sur leurs rives,
00:36:08 retrouvent aussi, petit à petit, leur espace de liberté.
00:36:11 Il y a un changement de mentalité
00:36:13 qui se met petit à petit en place en Europe.
00:36:16 Et là, vous avez une très belle image à gauche
00:36:19 qui vous montre le delta du Danube,
00:36:21 avec notamment la ripicible,
00:36:23 la forêt de bord de Courdeau qui s'est redéveloppée,
00:36:26 qui est très belle
00:36:28 et dont on va voir qu'elle est extrêmement importante
00:36:31 dans les solutions pour s'adapter à certains problèmes actuels,
00:36:36 notamment le réchauffement climatique ou d'autres.
00:36:39 Dans ce delta du Danube,
00:36:41 comme on a un espace de liberté,
00:36:43 vous avez évidemment une faune extrêmement abondante,
00:36:47 notamment les deux espèces de pélicans,
00:36:49 pélican blanc, pélican frisé.
00:36:51 Et ce qu'on s'est dit aussi,
00:36:54 c'est que quand on protège un milieu,
00:36:56 quand on veut le ré-ensauvager,
00:36:58 la définition anglaise vient du mot "rewilding" en anglais,
00:37:03 qui veut dire...
00:37:04 Il n'y a pas de définition de ré-ensauvager
00:37:05 dans le dictionnaire français.
00:37:07 Pour l'instant, il n'existe pas encore, c'est trop récent.
00:37:09 Mais les Anglais,
00:37:10 ça fait depuis les années 90 qu'ils ont sorti ce concept,
00:37:14 plus exactement, c'est nord-américain.
00:37:16 Donc, si vous regardez dans le dictionnaire anglais,
00:37:19 ce qu'ils vous disent, c'est protéger un endroit
00:37:21 pour lui permettre de retrouver petit à petit son état d'origine
00:37:25 et surtout toutes ses fonctionnalités,
00:37:28 notamment en permettant le retour de la faune sauvage
00:37:30 qui assure ses fonctionnalités.
00:37:32 Retour spontané, idéalement,
00:37:35 ou retour par réintroduction si c'est nécessaire.
00:37:38 Et là, dans le delta du Danube,
00:37:40 il y avait historiquement un animal qui était présent
00:37:44 qui a totalement disparu d'Europe, c'est le buffle-d'eau.
00:37:48 Et donc, la fonctionnalité qui est liée à ce buffle-d'eau,
00:37:50 on ne la retrouvera jamais.
00:37:52 Sauf, sauf, si on y ré...
00:37:55 Alors, j'allais dire réintroduit, j'allais faire l'erreur.
00:37:58 Sauf si on y introduit, pour le coup,
00:38:00 un animal qui est très proche,
00:38:03 génétiquement, du buffle-d'eau européen,
00:38:06 qui n'existe plus,
00:38:08 et qui va, par sa présence,
00:38:11 permettre justement de retrouver la fonction
00:38:14 qu'avaient ces buffles-d'eau, l'action, l'impact
00:38:17 et les interrelations qu'avait ce buffle-d'eau
00:38:18 avec les autres êtres vivants, animaux ou végétaux de l'écosystème.
00:38:22 Et donc, il y a quelques années,
00:38:25 les pays qui sont riverains du Danube ont décidé de faire,
00:38:28 cette fois-ci, plus une réintroduction,
00:38:30 mais une introduction d'un buffle asiatique
00:38:33 qui est génétiquement très proche du buffle-d'eau européen.
00:38:36 Et on est en train d'observer pour voir justement ce qui se passe
00:38:39 avec la présence de cet animal.
00:38:41 Donc l'étude est en cours.
00:38:42 Pour l'instant, on n'a pas encore les réponses.
00:38:43 C'est à venir.
00:38:46 Je vous parlais de l'intérêt de la répicilve
00:38:48 et une des solutions apportées par la répicilve,
00:38:51 c'est que ce sont des stations d'épuration naturelle.
00:38:54 Pourquoi ?
00:38:56 Parce que les arbres, comme tous les végétaux d'ailleurs,
00:38:59 puisent les éléments minéraux au niveau de leurs racines
00:39:03 en l'associant avec le CO2 qui est absorbé au niveau de leurs feuilles
00:39:07 et grâce à des éléments chimiques qui sont présents à l'intérieur des feuilles,
00:39:10 ils réalisent ce qu'on appelle la photosynthèse,
00:39:12 c'est-à-dire qu'ils transforment ces éléments minéraux,
00:39:14 et notamment les nitrates, les phosphates, en matière organique
00:39:18 qui leur permettent de fabriquer les feuilles, les fleurs, les troncs,
00:39:21 les branches, les fruits, etc.
00:39:23 Des études ont été faites.
00:39:26 On a mesuré le taux de nitrate et de phosphate dans les rivières
00:39:29 en amont de la répicilve et en aval.
00:39:33 Sans rien faire, on constate qu'il y a une diminution du taux
00:39:37 de ces éléments minéraux dans l'eau.
00:39:39 Nitrate, phosphate, vous savez que c'est les principales fléaux
00:39:42 issus de l'agriculture industrielle qui polluent les nappes phréatiques
00:39:46 et qui les rendent parfois impropres à la consommation.
00:39:48 Un taux de nitrate trop élevé chez une femme enceinte ou un jeune enfant,
00:39:52 ça peut provoquer des désordres physiologiques
00:39:54 relativement graves sur le long terme.
00:39:57 Donc en fait, vous avez une station d'épuration naturelle.
00:40:00 Il n'y a jamais eu un arbre qui tend la branche pour dire
00:40:03 "Donnez-moi 10 euros, je vous ai fait de l'eau propre."
00:40:05 C'est gratuit.
00:40:06 Et certaines villes l'ont très bien compris.
00:40:10 À New York, par exemple, vous avez toute la forêt qui est située
00:40:15 au nord-ouest de la ville.
00:40:16 C'est une surface assez conséquente qui a été préservée.
00:40:19 Et donc en plus, comme c'est des forêts d'altitude,
00:40:21 il n'y a pas besoin de pomper l'eau.
00:40:23 Elle arrive naturellement à la ville.
00:40:24 90 % de l'eau qui arrive au robinet des New-Yorkais
00:40:27 n'a besoin d'aucun traitement.
00:40:29 Elle arrive de ces forêts.
00:40:30 Alors si, les Américains font quand même un petit traitement,
00:40:34 et ça c'est très américain.
00:40:37 Ils mettent un petit peu de fluor dedans parce que ça atténue les caries
00:40:40 ou un truc comme ça.
00:40:41 Mais à part ça, il n'y a aucun traitement possible.
00:40:43 Et l'Américain, il paye son eau, avec les taux de chance,
00:40:47 ça peut varier un petit peu, mais c'est de l'ordre de 1 euro le mètre cube.
00:40:50 Alors en France, je me suis renseignée, je me suis dit "Ah tiens,
00:40:54 nous payons en moyenne 4 euros le mètre cube d'eau au robinet."
00:41:00 Il y a des régions où c'est un petit peu moins
00:41:02 parce que c'est un peu moins pollué.
00:41:03 Il y en a d'autres où c'est beaucoup plus.
00:41:05 Voilà, c'est une moyenne, mais ça vous donne une idée.
00:41:08 Et en Europe, pour rester plus près de nous,
00:41:11 certaines villes ont très bien compris l'intérêt de préserver
00:41:14 les forêts de pente et les forêts alluviales.
00:41:16 Vous retrouvez exactement le même phénomène sur les forêts de pente.
00:41:20 Munich, par exemple, que vous voyez ici à gauche,
00:41:25 a complètement préservé la forêt des Préalpes bavaroises
00:41:29 qui est au sud.
00:41:30 Et ceci lui permet d'avoir de l'eau.
00:41:34 Vous avez le slogan qu'on trouve sur les services municipaux
00:41:38 de la ville de Munich qui se targue d'avoir de la meilleure qualité
00:41:45 possible au prix le plus équitable.
00:41:47 Et donc le prix le plus équitable, c'est à peu près 1,70 euros
00:41:51 le mètre cube.
00:41:52 Donc le municois paye son eau moins de la moitié
00:41:55 de ce que paye le français moyen, sans rien faire,
00:41:58 simplement en préservant les forêts.
00:42:02 Donc s'il y a un message à faire passer,
00:42:04 la forêt à préserver prioritairement,
00:42:08 celle qui est la plus en danger et celle qui rend peut-être
00:42:11 un service immense, c'est la forêt alluviale.
00:42:13 Et sur cette image que nous avons prise à partir d'un hélicoptère,
00:42:19 on voit très bien les 2 principales menaces
00:42:22 qui affectent les forêts alluviales.
00:42:24 C'est l'expansion des zones agricoles qui grignotent
00:42:27 de plus en plus et vont parfois jusqu'aux rives,
00:42:29 avec tous les problèmes de pollution
00:42:31 des nappes phréatiques qu'on connaît.
00:42:33 Et le 2e, c'est l'expansion des villes qui, elles aussi,
00:42:37 ont tendance à aller de plus en plus près.
00:42:39 Et à Paris, vous connaissez bien le système.
00:42:43 Avec donc la nécessité du coup d'en diguer.
00:42:45 Et puis de temps en temps, vous avez une crue centenale
00:42:48 ou millénale qui déborde et ça entraîne
00:42:50 des inondations catastrophiques avec des destructions de maisons,
00:42:55 des situations humainement dramatiques,
00:42:58 comme celles qu'on a connues dans la vallée de la Roya en France
00:43:00 et celles que les Allemands, les Belges ont connues
00:43:03 au bord de la Meuse il y a 2 ans.
00:43:06 -Alors, quelques mots sur la biodiversité liée à ces cours d'eau.
00:43:14 On a notamment les esturgeons d'Europe.
00:43:18 Il y a plusieurs espèces, 7 ou 8 espèces,
00:43:21 qui sont pour la plupart des migrateurs.
00:43:23 C'est-à-dire qu'ils vont en mer pour se nourrir
00:43:26 et ils remontent dans les cours d'eau, dans les fleuves,
00:43:30 pour se reproduire.
00:43:32 Et quand on regarde cette carte,
00:43:36 eh bien, on voit sur chacun des cours d'eau
00:43:41 une petite barre noire qui représente un barrage,
00:43:45 le 1er barrage.
00:43:46 Et au-delà, il n'y a plus de reproduction possible
00:43:50 parce que ce sont des très grands barrages.
00:43:52 Par exemple, celui sur le Danube, il y a 2 barrages, en fait,
00:43:56 qui sont à 1 km de distance.
00:43:59 Et c'est impossible de faire une passe à poisson, par exemple.
00:44:03 C'est beaucoup trop grand.
00:44:06 Et donc, ça a stérilisé toutes les parties amonts.
00:44:10 Alors, pour une fois, la France peut faire cocorico
00:44:15 parce qu'on a réussi à éviter le drame de la disparition
00:44:21 de l'esturgeon à 6 pinceurs sturiaux,
00:44:27 qu'on peut appeler l'esturgeon d'Europe.
00:44:30 Et celui-là, il a été sauvé au dernier moment
00:44:33 dans l'estuaire de la Gironde, où il a été capturé par des filets.
00:44:38 On a capturé un mâle et une femelle,
00:44:40 et ensuite, reproduction en pisciculture.
00:44:43 Et actuellement, on produit plusieurs centaines de milliers d'alvins,
00:44:49 d'esturgeons sturiaux, qui sont déversés dans la Dordogne,
00:44:53 dans la Gironde.
00:44:54 Et même maintenant, on commence à réfléchir
00:44:57 pour le mettre dans le Rhin, dans l'Eau d'Air,
00:45:01 et d'autres fleuves européens.
00:45:06 -J'en profite simplement pour faire une petite parenthèse.
00:45:12 On parle beaucoup, notamment dans les programmes scolaires,
00:45:16 du devoir de mémoire.
00:45:18 On s'est placé dans un contexte bien particulier,
00:45:20 notamment par rapport à la Shoah,
00:45:22 qui a eu lieu pendant la Deuxième Guerre mondiale.
00:45:24 Mais je pense qu'on devrait aussi avoir un devoir de mémoire écologique.
00:45:29 Il y en a combien dans cette salle qui se souviennent
00:45:33 qu'on a eu du caviar made in Valais-du-Rhône ?
00:45:36 Même quand on demande à des Rhônes alpins,
00:45:41 personne ne se souvient. -Ca remonte à loin.
00:45:42 -Et pourtant, on pourrait penser que ça remonte à loin,
00:45:45 mais nous avons dans certains ouvrages des images d'archives
00:45:48 dans lesquelles on montre des pêches d'esturgeon.
00:45:51 Quand je dis "des images", c'est des photos d'archives
00:45:54 qui montrent des pêches d'esturgeon dans la Valais-du-Rhône.
00:45:58 Donc ce n'est pas si vieux que ça.
00:46:00 Et pourtant, on l'a complètement oublié.
00:46:02 Il y a une espèce d'amnésie écologique
00:46:04 de la situation telle qu'elle existait.
00:46:06 C'est une des causes pour lesquelles, finalement,
00:46:09 on s'accommode très bien de milieux qui sont complètement vides,
00:46:12 parce que nous les avons toujours connus comme ça
00:46:15 et nos arrière-grands-parents ne sont plus là pour nous dire
00:46:18 comment c'était avant. Et on l'a oublié.
00:46:20 -Alors, parfois, en France, on est audacieux.
00:46:29 Et c'est notamment le cas de l'effacement du barrage de Maison-Rouge.
00:46:35 C'est un barrage qui était installé à l'aval de la confluence
00:46:41 de la Vienne et de la Creuse.
00:46:43 Si vous regardez bien la photo, sur le haut, on devine les deux bras.
00:46:48 Celui de droite, c'est la Vienne. Celui de gauche, c'est la Creuse.
00:46:52 Et on est en 1925. Le barrage a été construit.
00:46:57 Il n'est pas très haut. Bon, il rend quelques services.
00:47:00 Et ensuite, on est en 1998 et il menace de s'effondrer.
00:47:06 Donc, deux options.
00:47:09 Le reconstruire ou le détruire.
00:47:12 Et c'est là que c'est intéressant, c'est innovant.
00:47:16 Donc, on décide de l'effacer.
00:47:19 Vous avez la photo à gauche. Il y a encore le barrage.
00:47:23 Et à droite, il n'y est plus. Donc, la Vienne coule.
00:47:27 Si vous regardez de près, vous avez une petite ligne blanche.
00:47:32 C'est du béton qui a été mis là.
00:47:37 C'était l'emplacement du barrage.
00:47:40 C'est l'homme qui a coulé du béton.
00:47:42 Il a dit que si on ne met pas le béton, la rivière va creuser et partir.
00:47:48 En fait, c'était pour dire...
00:47:51 On a peur de démontrer que la rivière fonctionne très bien sans nous.
00:47:57 Donc, on va mettre du béton.
00:48:00 C'est grâce à moi.
00:48:02 Encore un autre exemple.
00:48:04 Tout ce qui est revenu, c'est absolument merveilleux.
00:48:08 Quand on a enlevé le barrage,
00:48:12 un castor, un phoque, vos marins, on y reviendra,
00:48:16 des loutres, ensuite, les poissons migrateurs,
00:48:19 halos, lamprois, anguilles, saumons,
00:48:23 tout cela est revenu et ne pouvait pas passer à cause du barrage.
00:48:27 Et puis, des libellules de la famille, des gonfidés.
00:48:33 C'est une famille qui vit bien dans les zones de libre évolution.
00:48:38 Le petit gravelot, la grande mulette, le mollusque,
00:48:41 la bergeronne à des ruisseaux et plein d'autres espèces.
00:48:44 Ça a été vraiment des surprises.
00:48:46 Par exemple, le phoque vos marins,
00:48:50 quand il a été vu sur un banc de gravier,
00:48:54 dans les journaux, ils ont dit qu'une otarie s'est échappée d'un cirque.
00:48:59 Les pompiers ont essayé de la capturer, mais ils n'ont pas réussi.
00:49:03 C'est ni cirque ni otarie.
00:49:06 C'est le phoque vos marins qui avait complètement disparu de France.
00:49:11 On les avait tous tués.
00:49:12 On ne savait pas à quoi ça ressemblait.
00:49:15 On les a protégés et ils sont revenus petit à petit.
00:49:18 Actuellement, il y a entre 500 et 1 000 phoques vos marins.
00:49:22 Pareil avec les phoques gris.
00:49:24 Pour vous montrer la différence de considération de la faune sauvage
00:49:29 entre la France et le Royaume-Uni,
00:49:32 phoque gris, en France, il y en a à peu près 500.
00:49:36 Il y a une association de pêcheurs anti-phoque gris,
00:49:40 anti-phoque, alors anti-phoque, ils veulent les réguler,
00:49:45 leur tirer dessus, il y en a 500.
00:49:47 Au Royaume-Uni, il y en a à peu près 90 000.
00:49:51 Mais il n'y a personne qui demande...
00:49:54 Je pense que les phoques gris de feu de sa majesté étaient véganes.
00:50:01 Donc, vous ne pouvez pas poser de problème.
00:50:04 Mais c'est intéressant de voir cette réaction.
00:50:08 Le bec de Vienne, pourquoi j'ai mis ça ?
00:50:11 Parce que quand on a enlevé le barrage,
00:50:14 à ce moment-là, le sable est parti, transporté par la Vienne.
00:50:19 Ici, vous avez le cours d'eau qui est en bas, c'est la Vienne.
00:50:23 Le cours d'eau qui est au-dessus, avec les bancs de sable, c'est la Loire.
00:50:26 Donc, on est à la confluence de la Vienne et de la Loire.
00:50:29 Et ce sable va continuer, va descendre jusqu'à Nantes
00:50:32 et va finir par être repris en mer.
00:50:37 Donc, ça, c'est un retour vers une fonctionnalité transport de sédiments.
00:50:43 Les plages vont pouvoir être refaites.
00:50:46 Dans ces sédiments, il y a du calcium.
00:50:48 Ce calcium est utilisé avec le CO2 de l'atmosphère
00:50:52 pour former du CaCO2, le carbonate de calcium,
00:50:56 et du calcaire, c'est-à-dire CaCO3.
00:51:01 Donc, quand vous fabriquez un petit coquillage,
00:51:06 vous stockez du CO2.
00:51:08 Ça, il va devenir fossile,
00:51:10 donc pour Ad vitam aeternam, pour des millions d'années.
00:51:14 Et donc, si demain, on laissait les fleuves
00:51:19 redéverser à nouveau les sédiments dans la mer,
00:51:22 si on arrêtait le chalutage du fond de mer,
00:51:25 à ce moment-là, immédiatement,
00:51:28 on aurait un stockage de CO2 efficace, sans retour.
00:51:33 Mais on préfère rasseler les fonds.
00:51:36 Voilà un bel exemple.
00:51:39 Quand on a effacé un barrage, et que ça se fasse bien,
00:51:42 mais après, on peut en effacer d'autres.
00:51:45 Là, vous avez, en haut à gauche, le barrage de Poutès,
00:51:48 qui est assez haut,
00:51:51 et il empêche le saumon de passer.
00:51:54 Donc, photo de droite, toujours en haut,
00:51:56 le même barrage, il a été effacé.
00:51:59 Et l'eau s'est remise à couler,
00:52:03 les sables se sont étalés,
00:52:06 et les saumons peuvent remonter maintenant.
00:52:08 Là, on est à pratiquement 1 000 km,
00:52:10 on est sur l'Allier, on est à 1 000 km de la mer.
00:52:14 Et les saumons, des saumons d'un mètre de long,
00:52:16 on dit que c'est le saumon des 3 000.
00:52:18 Il fait 1 000 km en eau douce,
00:52:21 il arrive à 1 000 m d'altitude,
00:52:24 et il fait 1 000 mm de long à 1 m de long.
00:52:26 Voilà.
00:52:28 S'il avait disparu,
00:52:29 c'était la fin du grand saumon atlantique d'Europe.
00:52:32 Et là, on a réussi à le sauver,
00:52:34 et notamment en effaçant le barrage.
00:52:37 Alors, vous avez, en bas à droite,
00:52:40 un grand barrage effacé dans...
00:52:42 Je ne me rappelle plus quel pays, en Lituanie, je crois.
00:52:45 Et donc, voilà.
00:52:47 C'est, au niveau européen,
00:52:49 on estime qu'on a à peu près 1 million de barrages.
00:52:53 Et sur 1 million de barrages,
00:52:54 il y en a beaucoup qui ne servent plus à rien.
00:52:56 Donc l'objectif, c'est d'en effacer un par jour.
00:53:00 Et on en est là.
00:53:02 Mais un par jour, 365, quand il y en a 1 million,
00:53:06 il y a du boulot.
00:53:08 Voilà.
00:53:09 -Alors, rapidement, la façade océanique.
00:53:14 Comme Gilbert vous l'a dit, c'est peut-être l'endroit
00:53:16 où on a le plus de mal à trouver de bonnes nouvelles,
00:53:19 parce que les océans sont, pour l'instant,
00:53:23 écologiquement sinistrés encore.
00:53:24 Alors, on s'est posé beaucoup de questions
00:53:26 sur le fait qu'on a réussi à inverser la tendance
00:53:29 sur le continent, mais que, malheureusement,
00:53:32 au niveau des océans, on est encore au point le plus bas
00:53:35 et on continue même à descendre.
00:53:37 Et notre ami François Sarrano, qui est océanographe
00:53:40 et qui est océanologue,
00:53:41 et qui a beaucoup travaillé avec l'équipe Poustot,
00:53:45 qui a donc beaucoup étudié ce problème-là,
00:53:48 lui, il pense que c'est parce que ce qui se passe sous l'eau,
00:53:51 sous les océans, il y a très peu de gens qui en ont conscience.
00:53:54 Il y a très peu de gens, d'abord, qui ont la chance d'aller y voir.
00:53:57 Et puis, du coup, comme on ne voit pas ce qui se passe,
00:54:00 il y a une espèce d'ignorance, d'indifférence
00:54:03 qui retarde un petit peu le processus de protection efficace.
00:54:09 Vous avez là une image du grand pingouin
00:54:12 qui fait partie des très rares animaux européens
00:54:15 qui ont totalement disparu du continent.
00:54:18 Là, actuellement, vous ne pouvez plus les voir, malheureusement,
00:54:20 que sur les gravures et empaillés dans les musées,
00:54:23 comme c'est le cas de ces deux exemplaires que vous voyez ici.
00:54:27 Il y a quand même quelques bonnes nouvelles,
00:54:29 quand on regarde d'un petit peu plus près,
00:54:30 notamment l'histoire des fous de bassan.
00:54:33 Les fous de bassan ont été chassés...
00:54:36 Contrairement au grand pingouin, qui, lui, n'était chassé que par plaisir,
00:54:41 les animaux empaillés et les œufs
00:54:44 servaient à garnir ce qu'on appelait les cabinets de curiosité
00:54:48 qui se sont créés à peu près au 18e siècle.
00:54:51 C'était très chic, quand on avait un petit peu d'argent,
00:54:54 d'avoir une pièce comme ça dans sa belle demeure
00:54:59 et de pouvoir montrer et pâter tous les copains
00:55:01 en montrant sa collection.
00:55:04 Il y en a qui font des collections de timbres,
00:55:06 eux, ils collectionnaient les oiseaux empaillés, les œufs, etc.
00:55:10 Sinon, le grand pingouin, on ne l'utilisait pour rien d'autre.
00:55:13 On ne s'en servait pas ni pour le plumage,
00:55:16 ni pour la viande, on ne le mangeait pas.
00:55:19 Il était un peu indigestre, trop élastique.
00:55:21 Par contre, le fous de bassan, lui, était très apprécié.
00:55:24 On trouve des écrits, notamment dans les archives écossais,
00:55:27 qui permettent de savoir un petit peu ce qu'il en était.
00:55:30 Notamment au 16e siècle,
00:55:34 ils en faisaient ce qu'ils appelaient des gougas.
00:55:37 C'était un peu des amuse-gueules
00:55:39 qui étaient servis dans les cours royales et très prisés.
00:55:42 Ils en s'en servaient également pour garnir les édredons.
00:55:47 Il fait relativement froid dans ces contrées.
00:55:49 Quand on sait qu'il fallait 250 oiseaux
00:55:52 pour confectionner l'édredon duvé d'un seul lit,
00:55:56 on imagine le massacre que ça pouvait être
00:55:59 pour fournir tout le Royaume-Uni,
00:56:02 enfin toute l'Écosse, en édredons.
00:56:05 L'animal a été protégé,
00:56:07 mais bien entendu, toutes les règles générales ont une exception.
00:56:10 Le seul endroit où on le chasse encore,
00:56:12 c'est une petite île qui est localisée au nord de l'Écosse.
00:56:17 Ce sont les pêcheurs, chasseurs,
00:56:20 d'un petit village situé sur une des îles écossaises,
00:56:24 qui, chaque année, font un petit voyage sur l'île en question.
00:56:27 C'est intéressant, c'est au nom des chasses traditionnelles.
00:56:30 Vous avez peut-être déjà entendu ce discours ailleurs.
00:56:32 Vous avez sur l'image de gauche une image d'archive
00:56:35 qui vous montre les chasseurs-pêcheurs
00:56:38 et le tas de foudres bassans qu'ils ont abattus dans la journée et plumés.
00:56:42 Là, vous avez une image beaucoup plus récente,
00:56:44 qui date d'il y a 4 ou 5 ans.
00:56:46 Vous avez toujours la même tradition qui perdure.
00:56:49 Mais à part ça, l'oiseau a été protégé.
00:56:51 Grâce à la protection, on s'est rendu compte
00:56:54 que quand on ne les tue pas, ils vivent et se reproduisent.
00:56:57 C'est le grand concept qui est en vogue.
00:57:02 Il a fallu de longues études scientifiques pour arriver là.
00:57:05 Pour le foudre bassan, on est passé en 1889,
00:57:08 un siècle après la Révolution française,
00:57:10 de 50 000 couples répartis en 9 colonies sur l'ensemble de l'Europe
00:57:14 à actuellement plus de 400 000 couples
00:57:17 qui représentent 36 colonies que vous voyez représentées sur l'image.
00:57:22 Chacun des points rouges est une colonie de foudre bassan.
00:57:25 La protection, finalement, permet de très belles choses.
00:57:29 Même chose pour le pigargue à queue blanche.
00:57:31 On a connu une spectaculaire expansion.
00:57:34 1 000 couples au début du XXe siècle, 15 000 couples aujourd'hui.
00:57:38 Et bonne nouvelle, cet oiseau qui était devenu quasiment absent de France
00:57:44 a fait l'objet d'un problème de réintroduction autour du lac Léman.
00:57:49 On est en train de relâcher un certain nombre de pigargues.
00:57:53 Pour une fois, les pêcheurs,
00:57:55 bien que ce soit l'aigle pêcheur, il mange du poisson,
00:57:58 les pêcheurs ne trouvent pas trop à redire
00:58:01 parce qu'une des premières proies capturées par les oiseaux
00:58:05 a été les cormorans.
00:58:07 Les pêcheurs n'aiment pas les cormorans,
00:58:09 parce qu'ils ont le malheur de manger les poissons.
00:58:12 On s'en sort pas trop mal.
00:58:14 -Une petite balade dans le Grand Nord.
00:58:22 On est en Islande.
00:58:24 On arrive sur un secteur où tout est abandonné.
00:58:28 On regarde un petit peu l'histoire.
00:58:32 En fait, c'est lié à la pêche aux harangs.
00:58:35 Donc, les Islandais ont pêché le harang
00:58:39 pendant quelques dizaines d'années, pas plus,
00:58:43 parce qu'ils ont épuisé très vite les populations.
00:58:48 Et donc, pendant qu'ils pêchaient le harang,
00:58:52 il y avait une activité.
00:58:54 Ils salaient les harangs,
00:58:56 ils les mettaient dans des espèces de conteneurs
00:59:00 et puis ils vendaient ça.
00:59:02 Et puis, ça a péricluté.
00:59:04 Actuellement, on a des ports fantômes.
00:59:07 Donc, c'est assez étonnant.
00:59:10 Et puis, on a une surprise, une exception.
00:59:15 Un port, le port d'Aouzavik.
00:59:17 Aouzavik, ils ont vite compris que le harang, c'était terminé.
00:59:24 Tout le monde allait être au chômage.
00:59:26 Et a commencé l'observation des baleines.
00:59:31 Donc, ils ont mis en place un système d'observation des baleines,
00:59:36 "well-watching".
00:59:37 Et quand on est arrivé là, il y avait deux bateaux.
00:59:42 C'est des anciens bateaux de pêche qui ont été recyclés,
00:59:45 en quelque sorte, tout pimpant.
00:59:48 Les hôtels étaient complètement remplis de touristes.
00:59:54 Et les restaurants, etc.
00:59:56 Le petit village était riant.
00:59:59 Et encore une fois, c'est ce qu'on avait vu tout à l'heure,
01:00:04 l'économie de la contemplation
01:00:08 rapporte beaucoup plus que l'économie de l'exploitation.
01:00:11 Et les Islandais, pendant longtemps, ont pêché la baleine,
01:00:16 ont chassé la baleine.
01:00:17 Et là, tout dernièrement, ils ont arrêté définitivement.
01:00:22 On ne sait jamais certain, mais en tout cas, ils ont arrêté.
01:00:27 C'est la baleine à Bosse,
01:00:29 une baleine dont les effectifs ont énormément augmenté,
01:00:33 et qui est magnifique.
01:00:36 Alors, le monde méditerranéen,
01:00:39 là aussi, on a des retombées économiques intéressantes.
01:00:44 Vous avez ici un mérou.
01:00:47 Le mérou était présent dans le parc national de Port-Croz,
01:00:52 donc en 1963, quand on l'a créé.
01:00:55 Et il restait moins de 10 mérous.
01:00:58 Et les pêcheurs sous-marins, qui pratiquent la chasse sous-marine,
01:01:03 disaient que c'est la pollution de la Méditerranée.
01:01:07 Ils disaient, "C'est pas nous, nous, on tire les mérous,
01:01:11 mais ils ressuscitent."
01:01:13 Je ne sais pas trop ce qu'ils disaient.
01:01:15 Et on s'est mis à compter les mérous.
01:01:18 Et un demi-siècle après,
01:01:22 il y avait à peu près 800 mérous.
01:01:25 Donc là où il y en avait moins de 10.
01:01:27 Et puis ensuite, il est allé s'installer sur Port-Croz.
01:01:32 Et tout dernièrement, il s'est installé sur le continent.
01:01:37 Alors, le parc national de Port-Croz a fait un calcul.
01:01:43 Il a calculé combien rapportait un mérou vivant.
01:01:46 Vous avez un mérou,
01:01:48 vous faites une plongée pour aller l'observer.
01:01:51 Donc, la palanquée, vous avez 3, 4 personnes,
01:01:54 ils regardent le mérou, ils sont contents,
01:01:56 ils peuvent faire une photo, il est beau, le mérou.
01:01:58 Et puis ensuite, il fait un chèque, puis il repart.
01:02:02 Mais un détail très important, on n'a pas tué le mérou.
01:02:06 Donc le lendemain, un autre groupe de plongeurs vient,
01:02:10 "Oh, il est beau le mérou", un chèque.
01:02:14 Et comme ça, on s'est rendu compte qu'un mérou vivant
01:02:19 rapportait pendant sa vie, il vit 40 ans.
01:02:22 Il vit 40 ans.
01:02:24 Donc il rapportait pratiquement 400 000 euros,
01:02:28 à comparer avec le prix du mérou dans la casserole.
01:02:32 Donc le mérou qui n'est pas dans la casserole
01:02:35 rapporte infiniment plus que le mérou cuit.
01:02:40 Donc ces exemples-là sont intéressants,
01:02:44 parce qu'ils montrent qu'on est des imbéciles.
01:02:48 Les ressources naturelles,
01:02:50 elles sont toutes gratuites, sans aucune exception.
01:02:53 Personne n'a payé pour fabriquer le mérou.
01:02:57 Le mérou, il est fabriqué.
01:02:59 Et tant qu'il est dans la mer en train de nager comme ça,
01:03:01 il n'appartient à personne.
01:03:04 Et vous le tuez, ils avouent.
01:03:06 Le mérou, c'est un mauvais exemple, parce qu'il est protégé,
01:03:09 il n'a plus le droit de le tuer.
01:03:10 Il y a trois espèces de poissons protégées en mer.
01:03:14 Donc ce n'est pas terrible.
01:03:18 Donc c'est ce calcul qui a été fait par le Parc national,
01:03:22 qui montre vraiment l'intérêt de préserver,
01:03:27 avec une vision économique.
01:03:31 -La protection a du bon,
01:03:36 parce que les tortues, par exemple,
01:03:37 c'est un exemple positif pour la mer Méditerranée.
01:03:40 On ne vous les citera pas tous.
01:03:42 Elles se réapproprient les plages de Méditerranée occidentale.
01:03:45 Elles étaient relativement préservées
01:03:47 sur la partie orientale de la Méditerranée.
01:03:51 Vous trouvez encore la tortue verte,
01:03:52 ce sont les points verts que vous voyez ici,
01:03:55 qui pour l'instant restent cantonnés
01:03:56 sur cette partie orientale de la Méditerranée.
01:03:59 Et en noir, vous avez une autre espèce de tortue,
01:04:01 qu'on appelle la tortue kawan.
01:04:03 Et elle, petit à petit, a commencé à migrer.
01:04:06 Pareil, vous aviez un réservoir.
01:04:08 C'est toujours les pays les plus à l'est qui servent de réservoir.
01:04:11 Je pense que c'est un peu une coïncidence,
01:04:13 mais c'est un peu comme pour les forêts.
01:04:15 Et petit à petit, elle s'est rependue
01:04:17 sur la partie occidentale de la mer Méditerranée.
01:04:21 Et par exemple, en 2017, en 2018, on l'a vue réapparaître.
01:04:27 Elle a pondu sur l'île d'Elbe.
01:04:28 C'était très amusant,
01:04:30 parce que personne ne s'était rendu compte qu'elle avait pondu.
01:04:32 Et puis un jour, normalement, les éclosions se font la nuit.
01:04:36 Mais là, ça s'est fait la journée.
01:04:38 Vous aviez les gens en train de se faire blanc-bronger sur la plage.
01:04:41 Et puis tout à coup, plein de petites tortues qui sont sorties,
01:04:44 qui ont commencé à zigzaguer entre les corps enduits d'huile solaire
01:04:47 et puis à essayer d'aller vers la mer.
01:04:49 Et c'était évidemment un spectacle étonnant et réjouissant.
01:04:55 Et on a vécu la même chose à Palavas-les-Flots en 2018.
01:05:02 Ainsi qu'à Fréjus et à Saint-Tropez.
01:05:04 Donc petit à petit, cette tortue kawane recolonise
01:05:07 les plages de Méditerranée occidentale.
01:05:12 Vous avez comme ça plein d'autres retours réjouissants.
01:05:16 L'aigle de Bonnelly, dont les effectifs augmentent lentement,
01:05:20 mais sûrement.
01:05:21 Le lynx pardel, qui est le lynx méditerranéen par excellence,
01:05:25 que les Espagnols ont très bien protégé
01:05:28 et dont les effectifs sont redevenus très intéressants aussi.
01:05:31 Alors on attend le retour du lynx pardel
01:05:33 sur la partie méditerranéenne française.
01:05:36 Pour l'instant, les Français ne sont pas encore prêts
01:05:39 dans leur tête à l'accepter,
01:05:40 mais sa présence serait tout à fait justifiée.
01:05:43 Le cormorant de Desmarais, le phoque moine également,
01:05:46 sont des retours attendus, espérés, avec des passages ponctuels.
01:05:53 Voilà.
01:05:55 Donc dès qu'on protège, en fait, tout va bien.
01:05:57 Par contre, la vraie question,
01:05:59 c'est quelle est la signification d'une aire marine protégée ?
01:06:03 Vous savez qu'on a créé le parc national des Calanques.
01:06:06 Vous avez... Pardon.
01:06:07 Je confonds le bouton.
01:06:10 Vous avez ici l'ensemble des aires marines protégées méditerranéennes.
01:06:14 Donc quand on voit ça, on se dit "Waouh, il y en a beaucoup."
01:06:18 Sympa.
01:06:19 Et là, vous avez l'exemple particulier du parc national des Calanques.
01:06:24 Alors ça, c'est ce que Gilbert aime bien appeler le parc national canular.
01:06:29 Parce qu'en réalité, c'est très intéressant,
01:06:31 le parc national, vous avez une partie terrestre.
01:06:34 Donc on ne va pas aborder là.
01:06:35 Ce qui nous intéresse, c'est la partie marine.
01:06:37 La partie marine, elle fait 40 000 hectares.
01:06:39 C'est tout ce qui est en bleu moyen, là, vous voyez ?
01:06:43 Et puis vous avez le coeur...
01:06:45 Enfin, disons, vous avez une partie plus restrictive de la partie marine.
01:06:49 C'est le bleu foncé, où là, on n'a pas le droit de pêcher.
01:06:53 4 000 hectares.
01:06:55 Donc un dixième, en fait, du parc national.
01:06:57 Dans le reste du parc...
01:07:00 Alors, simplement pour vous dire que cette partie-là,
01:07:04 dans cette partie-là, vous avez les égouts de Marseille.
01:07:07 Donc de toute façon, les poissons sont impropres à la consommation.
01:07:11 Donc voilà, on a bien choisi les aires intégralement protégées.
01:07:15 Dans le reste du parc, la pêche est réglementée, on va vous dire.
01:07:19 Vous avez droit, grosso modo, à 12 kilos par personne et par jour de poissons.
01:07:23 Si vous êtes un pêcheur sous-marin.
01:07:26 Et puis pour chaque bateau, vous avez droit à 30 kilos.
01:07:28 C'est un petit peu comme si vous allez dans la Vanoise,
01:07:31 vous voyez un chasseur qui revient avec un bouclet sur son dos
01:07:33 et vous dit "Voilà, ça, c'est ma prise du jour,
01:07:35 je reviendrai demain pour le suivant."
01:07:37 Vous voyez ? Bon, on peut appeler ça protection si on veut.
01:07:41 Si on veut.
01:07:42 En réalité, si on regarde l'ensemble de la Méditerranée,
01:07:44 vous avez, en vraiment protection stricte et donc efficace,
01:07:48 vous avez 0,06 % de la surface méditerranée qui est protégée.
01:07:52 Alors, vous savez sans doute, vous avez peut-être entendu parler
01:07:56 de directives européennes qui demandent à ce que l'Europe,
01:07:59 chaque pays de l'Europe, protège 30 % de sa surface,
01:08:03 dont 10 % en protection stricte.
01:08:05 Donc vous voyez que là, en ce qui concerne le milieu marin,
01:08:08 on est encore très, très loin du compte.
01:08:11 En ce qui concerne les protections,
01:08:14 quand on a écrit notre livre sur l'Europe pré-en-sauvagé,
01:08:16 on s'est posé des questions.
01:08:18 Parce qu'on s'est rendu compte qu'on a beaucoup de choses
01:08:20 qui nous arrivent des États-Unis.
01:08:21 Coca-Cola, le McDonald's, vous voyez,
01:08:25 plein de choses qui naissent là-bas
01:08:27 et qui sont importées en Europe.
01:08:29 Par contre, les Américains, de temps en temps,
01:08:30 ils font des belles choses aussi.
01:08:32 Notamment en termes de protection de l'environnement.
01:08:34 Ce sont les premiers qui ont créé les parcs nationaux.
01:08:38 On ne peut pas leur enlever ça.
01:08:40 Et surtout, ils ont eu une idée novatrice.
01:08:44 Ils se sont rendus compte, en faisant des marquages de loup,
01:08:46 que souvent, les parcs nationaux ne sont pas suffisants,
01:08:50 même s'ils sont grands,
01:08:51 pour couvrir les besoins réels de certaines espèces.
01:08:53 Il y a une loupe qui a été marquée
01:08:55 dans le parc national de Banff, au Canada.
01:08:58 Elle avait un radioémetteur,
01:09:00 un colis avec un radioémetteur, un émetteur.
01:09:04 Ils ont suivi son transect et se sont rendus compte
01:09:06 qu'en deux ans, elle est descendue aux États-Unis
01:09:09 jusqu'au parc national de Yellowstone,
01:09:11 où elle a fait un petit cours.
01:09:12 Elle est remontée au-delà du parc de Banff
01:09:15 et elle est revenue au bout de deux ans à son point de départ.
01:09:18 C'est là qu'ils se sont rendus compte
01:09:19 qu'en fait, vous avez besoin de plus que de sanctuaires
01:09:25 sous forme de parcs nationaux.
01:09:26 Vous avez aussi besoin, c'est indispensable, de corridors
01:09:29 qui permettent la circulation des espèces
01:09:31 qui ont besoin de plus d'espace.
01:09:33 Ils ont créé un grand programme qu'ils appellent "Y2Y",
01:09:36 Y2Y, si vous voulez, c'est un petit peu un jeu de mots.
01:09:39 Le premier Y, c'est pour Yellowstone, ici,
01:09:43 jusqu'au Yukon, qui est la région du Canada.
01:09:47 Ils ont lancé un grand programme d'études
01:09:49 pour voir quels sont les obstacles au passage de faune,
01:09:52 notamment les voies ferroviaires, les autoroutes, etc.,
01:09:55 et supprimer ces obstacles d'une façon ou d'une autre,
01:09:59 soit en créant des passages à faune,
01:10:01 soit en supprimant certaines choses qui pouvaient être supprimées.
01:10:04 Ils ont lancé comme ça un grand programme.
01:10:06 Nous, on s'est dit, est-ce qu'on ne pourrait pas importer,
01:10:09 c'est notre idée, cette belle idée américaine en Europe,
01:10:14 en France notamment,
01:10:16 mais en Europe, parce que là, on fonctionne à l'échelle...
01:10:18 Les Etats-Unis, c'est l'équivalent de l'Europe en termes de surface.
01:10:22 Il faut qu'on se replace aux mêmes échelles.
01:10:24 En réfléchissant bien, on s'est dit,
01:10:26 nous avons déjà une zone de sanctuaires.
01:10:28 Je vous ai parlé des montagnes au début, vous vous rappelez ?
01:10:31 Nous avons déjà plein de parcs nationaux
01:10:33 et de surfaces protégées dans toutes les montagnes européennes.
01:10:37 Pourquoi est-ce qu'on n'imaginerait pas
01:10:39 les corridors qui relient tous ces sanctuaires ?
01:10:41 On pourrait appeler ça le programme "Si, tout, si".
01:10:43 Nous aussi, on peut faire un petit jeu de mots.
01:10:45 Si, comme la mer, donc on irait de l'océan Atlantique,
01:10:49 la mer Atlantique,
01:10:50 jusqu'à la mer Noire, voire la mer Caspienne,
01:10:53 si on est assez audacieux pour aller jusqu'au Caucase,
01:10:55 en passant par la Turquie,
01:10:57 ou alors au pire, la mer Noire,
01:10:59 en s'arrêtant au niveau des Carpathes.
01:11:02 Voilà.
01:11:03 Si, c'est la façon anglaise de prononcer "si".
01:11:06 Donc on lance l'idée
01:11:08 et on espère qu'elle va germer dans les cerveaux assez rapidement
01:11:11 pour qu'elle puisse effectivement être appliquée.
01:11:16 - Alors, nous, dans ces forêts et dans ces forêts,
01:11:19 dans ces montagnes,
01:11:20 ce qui est important,
01:11:22 c'est de montrer qu'on a appris, grâce aux parcs nationaux,
01:11:27 certaines notions qu'on ne pouvait pas imaginer,
01:11:30 notamment les densités naturelles des ongulés sauvages.
01:11:33 Quand on a créé le parc national de la Vanoise, en 1963,
01:11:36 comme le parc de Port-Cro, qu'on a évoqué,
01:11:39 eh bien, il y avait à peu près 400, 500 chamois
01:11:43 dans le parc national.
01:11:44 On les a protégés et on est arrivé à 1 000.
01:11:48 Et là, notamment les chasseurs disaient
01:11:51 qu'il y en avait trop, qu'ils allaient être malades,
01:11:55 qu'ils allaient avoir des maladies, etc.
01:11:56 Bon, on est dans un parc national, donc on les a préservés.
01:12:00 De 1 000, on est passé à 2 000, puis après à 3 000, 4 000.
01:12:04 Ils se trouvaient par terre, c'est la fin du monde.
01:12:07 Et on est arrivé à 6 000.
01:12:09 Et quand on est arrivé à 6 000 chamois,
01:12:12 ça s'est arrêté, ça ne s'en a plus augmenté.
01:12:14 C'est resté à 6 000.
01:12:16 Or, le parc national de la Vanoise, il fait 60 000 hectares.
01:12:19 Donc on était à une densité de 10 chamois pour 100 hectares,
01:12:24 ou 10 chamois pour 1 km2.
01:12:26 Eh bien, quand le chamois arrive à cette densité,
01:12:29 il met en place le planning familial.
01:12:31 Cherchez pas, c'est un truc qu'on ne connaît pas.
01:12:35 Donc il met en place le planning familial
01:12:38 et par différentes attitudes, systèmes,
01:12:42 eh bien, ils vont réduire très fortement la production de jeunes.
01:12:47 Donc c'est intéressant de voir qu'on peut avoir de fortes densités
01:12:51 et qu'en plus, les espèces s'autorégulent.
01:12:53 Et ça, c'était avant l'arrivée du loup.
01:12:56 Et depuis que le loup est arrivé, il participe à cette régulation.
01:13:01 Mais il y a toujours autant de chamois, malgré tout.
01:13:04 Et il est en parfait équilibre au niveau densité avec son milieu naturel.
01:13:09 Voilà. Et pour finir,
01:13:14 j'ai eu l'immense privilège de visiter la grotte Chauvet, la vraie.
01:13:19 Et quand on est dans cette grotte,
01:13:23 on voit tous les détails qui ont été représentés par l'homme de Cro-Magnon,
01:13:28 qui n'avait ni jumelles, ni téléobjectifs.
01:13:32 Eh bien, on se rend compte qu'il y avait une diversité extraordinaire,
01:13:38 pas mal d'espèces, une abondance.
01:13:42 Donc on voit la fresque des lionnes.
01:13:46 Et puis, la proximité,
01:13:49 c'est-à-dire de voir tous ces animaux de près.
01:13:52 Et donc, reconstituer, ré-ensauvager l'Europe et la France,
01:13:57 c'est remettre de la faune.
01:14:00 Et ça ne nous fera que du bien.
01:14:02 C'est vraiment...
01:14:04 Notre espèce est née et a vécu avec la grande faune.
01:14:10 Et c'est peut-être pas par un pur hasard
01:14:14 qu'il n'y a que l'Afrique noire qui a gardé toute sa grande faune.
01:14:19 Parce qu'ils ont toujours vécu ensemble.
01:14:23 Alors qu'en Europe, l'homme est arrivé par vagues successives
01:14:29 ou quand il est allé en Australie, par exemple, il y a 50 000 ans,
01:14:33 il a fait disparaître un grand nombre d'espèces géantes de grandes faunes.
01:14:39 Alors qu'en Afrique, il a toujours vécu.
01:14:42 Et l'éléphant, si on fait une bêtise, il est là.
01:14:48 Voilà. On vous remercie.
01:14:50 (Applaudissements)
01:14:58 -Il reste un petit quart d'heure pour d'éventuelles questions.
01:15:02 Il doit y avoir un micro qui circule.
01:15:05 -Je vais faire circuler un micro.
01:15:08 Je n'hésitais pas à lever la main.
01:15:10 On va consacrer environ un quart d'heure aux questions
01:15:14 avant la balade pour ceux qui se sont inscrits.
01:15:26 -Merci pour votre travail qui nous inspire et nous motive.
01:15:31 J'ai une question sur les forêts.
01:15:34 Je suis moi-même sylviculteur et je suis un peu en but.
01:15:39 Je suis pris dans les deux grandes écoles de sylviculture,
01:15:42 la traditionnelle, l'extractiviste, la productiviste,
01:15:45 et la "plus naturelle",
01:15:48 où on essaie de pratiquer ce qu'on appelle la futé irrégulière,
01:15:52 le mélange d'espèces, d'essences,
01:15:55 et un choix très qualitatif des arbres à exploiter.
01:16:00 Mais on est en but, très souvent, du côté des institutions forestières,
01:16:04 à un argument concernant le stockage du CO2.
01:16:07 Ils nous disent que si on n'exploite pas,
01:16:11 pour les réserves intégrales ou de façon très sélective, les forêts,
01:16:16 on ne stocke pas autant de carbone
01:16:20 que si on l'exploite de façon productiviste,
01:16:23 en faisant des coupes abondantes et en replantant abondamment les forêts.
01:16:27 Je ne sais pas si vous avez un élément de réponse sur ce sujet.
01:16:30 -Effectivement, c'est un discours qui a été très en vogue
01:16:34 jusqu'à ce qu'il y ait, très peu de temps,
01:16:37 des travaux qui ont été faits par des Anglo-Saxons,
01:16:40 parce qu'on dispose maintenant de technologies plus perfectionnées.
01:16:44 Je n'ai pas personnellement travaillé sur la question,
01:16:47 mais il y a une publication sortie assez récemment
01:16:50 qui bat en brèche cet argument
01:16:52 et qui montre que, contrairement à ce qu'on a longtemps dit
01:16:56 et que vous venez de relater,
01:16:58 une forêt en libre évolution stocke...
01:17:01 Je ne voudrais pas me tromper sur les chiffres,
01:17:04 mais je crois à 36 ou 36 fois plus de CO2 qu'un espace cultivé,
01:17:10 et même 9 à 10 fois plus qu'un espace cultivé
01:17:15 avec des méthodes de permaculture bio
01:17:18 comme l'acidiculture raisonnée que vous prenez.
01:17:22 Voilà ce que je peux vous répondre.
01:17:24 Je n'ai pas d'argument personnel.
01:17:28 Je ne cite que des travaux de recherche qui ont été faits.
01:17:31 -Oui, je voulais parler de ce que vous pensez...
01:17:45 Je ne voulais pas aborder le sujet.
01:17:49 C'est sur les insectes.
01:17:51 Il y a eu une biodiversité qui a nettement chuté,
01:17:55 puis le nombre d'insectes.
01:17:58 Qu'est-ce qu'on peut faire pour essayer de "ré-ensauvager"
01:18:04 avec les insectes ?
01:18:05 Ça me semble beaucoup plus difficile que par des animaux.
01:18:09 Qu'est-ce que vous pensez ?
01:18:11 -Vous avez raison. C'est presque un paradoxe.
01:18:14 C'est plus facile de réintroduire l'ours
01:18:16 dans le massif central, par exemple,
01:18:21 que de faire revenir des espèces de papillons.
01:18:25 Les insectes sont d'excellents indicateurs.
01:18:29 Comme il y a un très grand nombre d'espèces,
01:18:32 on voit qu'ils sont extrêmement sensibles.
01:18:38 Je prendrai deux exemples.
01:18:42 Dans les papillons, il y a un papillon qui s'appelle l'ermite,
01:18:48 qui vit sur des terrains un peu calcaires.
01:18:52 On a sa carte de répartition, tout simplement par département,
01:18:58 présence-absence.
01:18:59 À quelques décennies de distance, actuellement,
01:19:04 ce papillon, un très beau papillon, l'ermite,
01:19:09 est présent dans un tiers seulement
01:19:15 des départements où il était présent auparavant.
01:19:18 On va le retrouver dans le sud des Alpes,
01:19:21 dans les coins complètement abandonnés du massif central.
01:19:24 Voilà, c'est le premier exemple.
01:19:28 Le deuxième exemple, ce sont les éphémères.
01:19:31 Les éphémères qui vivent dans les cours d'eau.
01:19:34 Il y a de rares endroits où on a fait des inventaires
01:19:38 au XIXe siècle.
01:19:40 On peut les comparer avec actuellement.
01:19:43 Il y a eu une chute absolument drastique
01:19:46 du nombre d'espèces d'éphémères.
01:19:48 Pareil, quand on prend l'autre groupe, les plécoptères,
01:19:52 on a la même chose.
01:19:54 Les tricoptères aussi, les trois groupes d'insectes
01:20:00 qui vivent à la fois dans l'eau et dans l'air,
01:20:04 ont énormément diminué à cause de la baisse de la qualité.
01:20:07 Enfin, je prendrai un autre exemple,
01:20:12 cette fois-ci chez les mollusques.
01:20:14 J'ai beaucoup travaillé sur cette espèce.
01:20:16 C'est la moule perlière.
01:20:19 C'est une moule d'eau douce qui ne supporte pas,
01:20:23 qui ne peut pas se reproduire
01:20:24 s'il y a plus de 1 mg de nitrate par litre.
01:20:28 1 mg de nitrate par litre.
01:20:30 Je suis expert au Conseil de l'Europe
01:20:33 quand on échange sur les invertébrés.
01:20:35 Plusieurs fois, j'ai fait une conférence
01:20:38 où j'arrivais avec une bouteille de volvic
01:20:41 que je pose sur le pupitre.
01:20:43 Je lui dis que c'est l'eau que l'on recommande
01:20:45 pour les petits bébés français.
01:20:48 On regarde sur la bouteille.
01:20:51 Il y a 7,4 mg de nitrate par litre.
01:20:54 Je lui dis que le bébé français est très résistant.
01:20:58 Ce n'est pas un problème.
01:21:00 J'ai essayé de discuter avec la moule perlière.
01:21:03 Je lui dis que je force un peu le trait.
01:21:06 1 mg, il ne faut pas exagérer.
01:21:08 Elle dit que c'est moins d'un mg ou rien.
01:21:12 C'est intéressant d'avoir ces espèces
01:21:17 hyper exigeantes qui nous montrent,
01:21:21 comme disait Beatrice, avec les références gluissantes,
01:21:24 on oublie, qui nous montrent ce qui a existé.
01:21:28 Pour la moule perlière,
01:21:30 j'ai des amis qui travaillent dans des bureaux d'études.
01:21:33 Ils m'ont dit que ça n'a jamais existé, moins d'un mg.
01:21:37 J'ai retrouvé des données anciennes
01:21:41 dans le barabon,
01:21:44 dans un affluent de...
01:21:46 de la Haute-Dordogne.
01:21:52 Un affluent des données qui montrait
01:21:55 qu'on avait 0,5, 0,8 mg de nitrate par litre.
01:21:59 Et ça, que faire ?
01:22:02 Ce n'est pas compliqué.
01:22:04 Il faut arrêter d'utiliser des engrais chimiques.
01:22:06 Il faut arrêter de labourer le sol.
01:22:10 On sait faire, maintenant.
01:22:12 Labourer un sol, c'est une aberration.
01:22:15 Le sol, c'est quelque chose qui se fait petit à petit,
01:22:18 avec des horizons.
01:22:20 Ce qui est en haut doit être en haut,
01:22:22 ce qui est en bas doit être en bas.
01:22:23 Il y a les vers de terre qui vont chercher en haut,
01:22:26 qui redescendent, ils savent faire ça.
01:22:28 Nous, on arrive avec la charrue.
01:22:30 Voilà.
01:22:32 C'est la catastrophe.
01:22:34 Et puis, tous les substances chimiques,
01:22:37 en gros, tous les polluants,
01:22:40 qu'ils soient d'origine agricole ou d'origine industrielle,
01:22:46 il faut arriver à supprimer tout ça.
01:22:50 Mais il n'y a pas de moyenne, il n'y a pas de situation.
01:22:55 C'est à peu près de compromis.
01:22:57 Ça n'existe pas, le compromis dans la nature.
01:22:59 Ça passe ou ça ne passe pas.
01:23:02 Notamment avec le monde des invertébrés.
01:23:06 Mais ces bio-indicateurs sont vraiment remarquables et imparables.
01:23:11 C'est très difficile.
01:23:15 Je faisais présente,
01:23:17 j'étais à l'Agence de l'eau Loire-Bretagne.
01:23:23 On parlait des nitrates.
01:23:26 En Bretagne, dans le Scorfe, les Lornes,
01:23:29 vous avez jusqu'à 50, voire même parfois 100 mg de nitrate par litre.
01:23:35 Dans le Scorfe, 100 mg de nitrate par litre.
01:23:39 On disait qu'on allait passer à 50.
01:23:41 Je prenais l'image en disant
01:23:44 "C'est comme si on tire 10 balles dans la tête de quelqu'un.
01:23:48 Il sera bien mort, bien sûr."
01:23:51 On a dit "On va améliorer les choses, on n'en tire que 5."
01:23:55 Le gars a dit "Vous me tirez 15 balles dans la tête, c'est bon, merci."
01:24:00 C'est pareil, vous avez 10 doses de nitrate,
01:24:05 quand vous en mettez 5, ça ne change rien du tout.
01:24:09 C'est bien plus difficile.
01:24:11 On est bien d'accord que nous, on est un peu des imposteurs.
01:24:16 On vient avec notre monde où tout va bien.
01:24:19 On n'est pas du tout dupes.
01:24:22 Mais en même temps, ça donne envie de montrer le positif.
01:24:28 -Le constat du catastrophisme a été fait et tout le monde en est pénétré.
01:24:32 Nous, on essaie de montrer qu'on n'est plus au point le plus bas.
01:24:36 Des progrès ont été faits, des choses ont déjà été faites.
01:24:39 Ca marche.
01:24:41 Il faut s'appuyer sur ces réussites pour pouvoir aller plus loin
01:24:45 et retrouver un monde un peu moins pollué.
01:24:47 Clairement, par rapport aux insectes,
01:24:49 ça passe par un changement des pratiques agricoles
01:24:52 qui n'est pas encore généralisé, mais qui est en cours.
01:24:55 Un certain nombre d'agriculteurs pratiquent la permaculture bio,
01:25:00 l'agroforesterie.
01:25:01 C'est encore timide, mais ça se développe de plus en plus.
01:25:04 Et puis après, il y a aussi, je dirais,
01:25:06 notre comportement de consommateur à tous.
01:25:08 C'est ce que vous mettez dans votre caddie
01:25:10 qui va dicter le modèle de production qui est derrière.
01:25:14 Donc on peut, chacun à notre échelle,
01:25:17 jouer un rôle dans ce changement.
01:25:19 -Merci.
01:25:23 Merci.
01:25:25 Merci.
01:25:26 Merci.
01:25:28 -Merci.
01:25:29 -Qu'est-ce que la biodiversité des sols et des plantes
01:25:37 dans les espaces protégés,
01:25:40 où il y a des animaux sauvages, etc.?
01:25:45 Comment ça se passe pour eux ?
01:25:47 -Ca se passe bien.
01:25:50 -Est-ce qu'il y a de nouvelles espèces ?
01:25:54 Comment les plantes et les sols...
01:25:58 Parce que tous les vivants,
01:26:02 ils sont aussi importants les uns que les autres.
01:26:06 -Absolument.
01:26:07 -Nous parlons beaucoup des animaux,
01:26:09 mais les plantes, chacune a son histoire.
01:26:14 Elle est unique.
01:26:15 Elle a son devenir.
01:26:16 Elle a un fonctionnement radicalement différent de l'humain.
01:26:21 C'est encore plus difficile.
01:26:23 Qu'est-ce que vous voyez,
01:26:26 qu'est-ce que vous constatez par rapport à elle ?
01:26:30 -Il y a les plantes et les bactéries.
01:26:32 Il est clair que dans les endroits qui sont préservés
01:26:35 depuis un temps suffisamment long,
01:26:37 parce qu'il faut du temps pour reconstituer un sol,
01:26:41 vous avez une richesse et une biodiversité dans le sol,
01:26:44 avec les champignons microscopiques,
01:26:46 ce qu'on appelle des micro-rices,
01:26:48 qui ont colonisé les racines des arbres, notamment.
01:26:52 Vous avez également un développement de bactéries,
01:26:55 de divers micro-organismes.
01:26:56 On est d'accord sur le fait
01:26:58 que cette petite biodiversité est extrêmement importante,
01:27:01 c'est même la plus importante.
01:27:03 Par contre, elle est invisible.
01:27:05 C'est plus parlant, quand on explique les choses,
01:27:09 de s'appuyer, comme on l'a fait, sur quelques espèces iconiques,
01:27:12 qui ont quand même l'avantage que lorsqu'elles sont présentes,
01:27:16 ça veut dire que le reste est là aussi.
01:27:18 Ça va être un peu ce qu'on appelle des espèces parapluies.
01:27:20 C'est-à-dire qu'on va s'appuyer sur ces espèces iconiques,
01:27:23 qui ont des besoins très exigeants,
01:27:26 à la fois en espace et en qualité de milieu,
01:27:30 pour protéger par effet cascade
01:27:33 tout un ensemble d'organismes animaux ou végétaux
01:27:36 qui vont bénéficier de cette protection-là.
01:27:39 J'espère que vous n'êtes pas choqués du fait
01:27:42 qu'on n'ait pas parlé de la biodiversité du sol, etc.
01:27:46 On s'est attachés à certaines choses un peu marquantes,
01:27:49 mais bien entendu, derrière la protection de ces espèces iconiques,
01:27:53 il y a aussi, par effet ricochet, toutes les espèces qui sont protégées.
01:27:57 Et là, j'en profite, puisque vous parlez de tout ce qui est dans le sol,
01:28:00 pour faire un petit aparté
01:28:02 et simplement attirer votre attention sur une chose.
01:28:05 Très souvent, dans les espaces protégés,
01:28:07 vous avez des sentiers de randonnée,
01:28:08 pour que l'être humain puisse quand même fréquenter ces espaces,
01:28:12 en retirer tous les bénéfices au niveau de sa santé, de son psychisme,
01:28:16 de la beauté, au niveau esthétique également.
01:28:19 C'est très agréable de se promener dans des endroits comme ça,
01:28:21 rencontrer un animal sauvage, sur toute grande taille.
01:28:25 C'est un événement rare et donc ça nous apporte de la joie.
01:28:27 Vous ne revenez pas dans le même état d'esprit
01:28:29 quand vous avez rencontré un bouctin
01:28:31 que quand vous avez vu un beau paysage alpin vide de tout animal.
01:28:35 Mais surtout, ce qui est très important, c'est rester dans ces sentiers.
01:28:40 Parce que si vous sortez des sentiers, vous allez piétiner les sols,
01:28:43 vous allez les tasser.
01:28:44 Et sans le vouloir, vous allez écraser quelques petites espèces,
01:28:48 des hulikens, etc., qui mettent des siècles pour se développer
01:28:51 et se régénérer.
01:28:53 Et vous allez tasser les sols, ce qui va tuer les mycorhizes,
01:28:57 ce qui permet par ricochet le meilleur développement de l'arbre.
01:29:00 Donc la protection, elle ne passe pas par la mise sous cloche
01:29:06 et la fermeture à l'espèce humaine,
01:29:07 mais simplement par un respect d'un certain nombre de règles
01:29:11 et de comportements qui permettent à chacun de se développer en bonne entente.
01:29:15 -Merci de rappeler ça.
01:29:17 Dans la Corée des Fronts-Cameaux, c'est la 4.
01:29:20 Par rapport à la marche sur les sols, c'est la 4.
01:29:27 -Excusez-moi.
01:29:28 On va juste prendre une dernière question courte
01:29:30 pour respecter à peu près l'horaire.
01:29:32 Je vous donne le parole.
01:29:34 -Bonjour. Merci beaucoup pour votre exposé.
01:29:38 Je voulais avoir votre avis concernant les espèces animales invasives.
01:29:42 -Les espèces animales invasives.
01:29:47 Il y en a pour des jours et des jours.
01:29:51 Non, en fait, malheureusement, il y en a de plus en plus
01:29:56 et il y en aura de plus en plus avec le développement des échanges.
01:30:00 Donc voilà, on a des mondes, que ce soit l'Amérique du Nord
01:30:06 ou que ce soit l'Asie, où il y a plein d'espèces très concurrentielles.
01:30:10 Donc si on les amène chez nous, où on est moins concurrentiel
01:30:14 parce qu'on a subi les glaciations, eh bien, elles s'imposent.
01:30:19 Donc je vais vous donner simplement un élément
01:30:23 qui me paraît le plus important à prendre en compte.
01:30:25 On s'est rendu compte, et ça s'est bien démontré,
01:30:28 que quand un écosystème est en bonne santé,
01:30:32 qui fonctionne normalement, qu'on ne s'occupe pas de lui,
01:30:36 il est beaucoup plus résistant aux espèces invasives.
01:30:40 Je vous donne l'exemple très précis des gorges de l'Ardèche.
01:30:43 La réserve naturelle des gorges de l'Ardèche
01:30:44 fait 30 km de long.
01:30:46 Donc à l'amont et à l'aval, on a fait de l'entretien de rivières.
01:30:53 C'est-à-dire on a coupé un tronc ici ou là pour que la lumière arrive, etc.
01:30:57 On a fait du jardinage.
01:30:59 Je me suis opposé à ce qu'on fasse dans la partie de la réserve.
01:31:04 Résultat, hors réserve, là où on a fait du jardinage,
01:31:07 on a mis de la lumière qui est venue,
01:31:09 qui a fait exploser la renouée de saccalines.
01:31:12 C'est des plantes invasives absolument terribles,
01:31:17 et à l'aval aussi.
01:31:18 Sur les 30 km de la rivière laissée naturelle,
01:31:24 il n'y a aucune renouée.
01:31:28 Donc c'est vraiment l'élément factuel, positif de réaction.
01:31:37 C'est comme un corps humain.
01:31:41 C'est bien de traiter la maladie,
01:31:43 mais souvent il faut traiter le bonhomme
01:31:45 pour qu'il n'attrape pas la maladie.
01:31:47 C'est un peu la même approche.
01:31:50 Sinon, il y a des situations...
01:31:52 Les écrevisses américaines qui sont dans nos rivières,
01:31:55 plus jamais elles disparaîtront.
01:31:57 On a trois espèces d'écrevisses en France.
01:32:02 C'est ridicule, mais c'est comme ça.
01:32:04 C'est l'histoire évolutive qui veut ça.
01:32:06 En Amérique du Nord, dans le genre Conectes,
01:32:08 il y a 100 espèces d'écrevisses.
01:32:11 Dans d'autres genres, il y a plusieurs centaines
01:32:13 qui sont toutes en compétition.
01:32:15 Donc les écrevisses yankees qui arrivent dans le pays des Gaulois,
01:32:21 ils ne sont que trois.
01:32:24 On va se les bouffer.
01:32:26 Voilà. C'est ça, les Américains.
01:32:29 Merci pour votre attention,
01:32:34 merci pour vos questions et votre intérêt.
01:32:37 Merci.
01:32:38 (...)