• l’année dernière
Lorsque l’on s'inscrit sur un réseau social, celui-ci nous demande d’inscrire certaines informations sur notre vie privée (sexe, âge, lieu de naissance et de résidence). Aujourd’hui, certains réseaux sociaux en demandent davantage, jusqu’à savoir quelle est notre film préféré. Ces requêtes sont expliquées dans les conditions d’utilisations générales, que très peu lisent intégralement. Avec toutes ces informations, la plupart des réseaux sociaux vont vendre ces informations à des entreprises afin de cibler la demande et faire de vous un surconsommateur.
Transcription
00:00 Anne va franchir le pas et contribuer sans le savoir au business du premier des réseaux sociaux.
00:06 L'inscription est bien gratuite, mais en répondant à d'innocentes questions,
00:12 elle va devenir une source potentielle de revenus pour Facebook.
00:16 - Prénom, nom, adresse électronique.
00:20 Donc ça, je la vois.
00:22 Très vite, Facebook va se montrer plus indiscret.
00:26 Anne doit aussi lui révéler sa date de naissance.
00:29 C'est obligatoire pour s'inscrire sur le site.
00:32 Mais une fois son compte créé, les questions ne vont pas s'arrêter pour autant.
00:36 - Là, je crée, hein. Allez.
00:38 - Tu rentres dans la communauté.
00:40 - Bienvenue sur Facebook, Anne.
00:42 - Paramètres de confidentialité...
00:44 Une fois inscrite, ce n'est pas encore le moment pour Anne de s'amuser.
00:48 Car les questions continuent, Facebook veut toujours en savoir plus sur elle.
00:52 Le site aimerait connaître les écoles qu'elle a fréquentées,
00:56 le nom de son employeur, son adresse actuelle et même son lieu de naissance.
01:00 Un interrogatoire des plus serrés, auquel elle ne s'attendait pas.
01:04 - Oh là là ! - Ah, bah là, c'est ta vie.
01:07 - Ah, faut que je remplisse tout ça ? - Oui.
01:10 Le réseau social est du genre très curieux.
01:13 Il veut tout savoir des passions d'Anne.
01:16 Comme les films qu'elle a vus, ses livres préférés, ses lieux de vacances.
01:23 La marque de sa voiture est plus surprenante si elle est inscrite comme donneuse d'organe.
01:29 Officiellement, rien de bien méchant.
01:32 Ce serait avant tout pour l'aider à retrouver ses amis
01:35 et les tenir au courant de ses activités.
01:38 Pourtant, Facebook a une autre idée derrière la tête.
01:42 Pour s'en rendre compte, il suffit de jeter un oeil aux conditions générales d'utilisation
01:47 que Anne a acceptées d'un simple clic en s'inscrivant,
01:50 sans même prendre le temps de les lire, un peu comme tout le monde.
01:53 - On sait pas, voilà. - Mais on est d'accord.
01:55 - On est d'accord, parce que de toute façon, tout le monde est d'accord, donc y a pas de raison.
01:58 Sans le savoir, Anne vient de signer un chèque en blanc à Facebook.
02:02 Elle vient en particulier d'autoriser le site à monnayer des informations qu'elle lui fournit.
02:07 En clair, Facebook a maintenant le droit de gagner de l'argent grâce à sa vie privée.
02:12 - Vous nous autorisez à utiliser vos noms, photos de profils et informations
02:17 dans le cadre d'un contenu commercial, sans vous verser de dédommagement.
02:21 Et la traque aux informations ne s'arrête pas avec l'inscription.
02:27 Désormais, chaque fois qu'Anne se connectera,
02:30 elle donnera sans s'en rendre compte de nouvelles infos à Facebook.
02:34 Ses moindres faits et gestes vont être observés et enregistrés par le site,
02:39 qui va continuer dans son dos de remplir sa fiche de renseignements.
02:43 Et pour l'encourager, Facebook a mis au point une arme imparable.
02:48 Ce pouce, levé vers le haut, le fameux "like", "j'aime" en français.
02:57 Un petit symbole a priori inoffensif et qui, pourtant, rapporte très gros aux géants des réseaux sociaux.
03:03 Chaque fois que vous aimez la page d'une marque, d'un artiste ou d'un sportif,
03:10 Facebook l'enregistre et stocke méthodiquement vos préférences.
03:15 Elles lui serviront plus tard.
03:17 Mais où vont toutes ces données ? Où sont-elles stockées ? Et à quoi servent-elles ?
03:22 Eh bien, instantanément, toutes ces informations voyagent depuis nos ordinateurs
03:28 et parcourent des milliers de kilomètres, pour la plupart du temps atterrir ici, aux Etats-Unis,
03:34 dans des hangars géants qui appartiennent à Facebook.
03:38 On appelle cela des "data centers", des centres de données,
03:42 des kilomètres de disques durs ultra-puissants, des mémoires géantes.
03:46 Dans ces machines, nos données personnelles vont être analysées,
03:50 triées et classées parmi les informations de centaines de millions de gens.
03:56 Ces "data centers" ultra-sécurisés contiennent les informations
04:00 qu'un milliard d'utilisateurs ont confiées à Facebook, un vrai trésor de guerre.
04:05 Et celui qui veille jalousement sur ce fichier mondial, c'est le créateur du réseau, Mark Zuckerberg.
04:12 Car ces informations, le jeune milliardaire américain les revend ensuite dans le monde entier.
04:20 Des milliers d'entreprises en ont besoin pour leur business,
04:24 et elles sont prêtes à payer cher pour ça.
04:27 L'homme peut vous dire merci, son entreprise affiche un chiffre d'affaires
04:31 de près de 8 milliards de dollars, grâce à vous et à ce que vous lui confiez jour après jour.
04:37 Souvenez-vous, les fameuses conditions générales d'utilisation de Facebook.
04:43 En vous inscrivant, vous avez accepté que le site vende les informations qui vous concernent.
04:48 Or, ces informations intéressent des gens qui sont prêts à payer pour savoir
04:53 qui vous êtes, ce que vous aimez.
04:56 Ils sauront exactement quoi vous vendre.
05:00 Pour en savoir plus sur la politique commerciale de Facebook,
05:04 nous avons sollicité les représentants de l'entreprise en France,
05:08 qui n'ouvrent que très rarement leurs portes.
05:11 Malgré nos nombreux e-mails, pas de réponse écrite,
05:14 c'est par téléphone qu'ils refuseront nos demandes de tournage et d'interview.
05:18 Alors pour y voir plus clair, nous sommes allés voir ceux qui, jour après jour,
05:22 contribuent à faire grandir la fortune du site.
05:26 A Paris, c'est une petite boutique qui n'aurait jamais connu un tel succès à l'époque du Minitel.
05:32 Un business lancé grâce aux réseaux sociaux.
05:36 A 28 ans, Alexis a lâché le monde de la finance pour se lancer dans la confection de cookies.
05:42 Et ce soir-là, c'est déjà l'ouverture de sa 2e boutique qu'il fête au champagne.
05:49 - Ah bah tout le monde est servi. Super.
05:52 - Ça va ? - Salut.
05:53 - Ta forme ? - Très bien.
05:54 - C'est sympa d'être venu. - C'est cool.
05:55 Pour l'occasion, il a convié tous ses amis et ses meilleurs clients,
05:59 histoire de trinquer à une réussite qu'il doit en bonne partie à Facebook.
06:03 - Ça, c'est un truc, si tu veux. - C'est à toi, les gars.
06:05 - Tiens. Au premier milliard.
06:07 Car si en un an, Alexis a pu se faire un nom dans le monde de la pâtisserie,
06:11 c'est grâce à un bon réseau d'amis, un ordinateur et au coup de pouce des réseaux sociaux.
06:16 - L'avantage des réseaux sociaux aujourd'hui, c'est que ça permet d'accélérer la connaissance d'une marque
06:21 pour pas trop cher, si on arrive à être malin dans sa communication.
06:25 Et clairement, il y a 5 ou 10 ans, les entreprises qui se créent
06:29 devaient avoir un budget com bien plus conséquent que le nôtre
06:32 pour arriver à avoir la même notoriété, même si la nôtre est encore toute petite.
06:36 Mais si son affaire marche aussi bien,
06:39 c'est grâce à l'outil que Facebook met à sa disposition sa fameuse base de données.
06:44 Vous allez voir que le réseau lui permet de piocher dedans pour trouver de nouveaux clients
06:49 à partir des données que les internautes lui donnent. Alors insu.
06:53 Le lendemain matin, nous retrouvons Alexis en pleine séance de pâtisserie
07:02 en train de tester une toute nouvelle recette de gâteau.
07:06 Et ses cookies si tôt enfournées,
07:08 il troque son tablier de pâtissier contre le costume d'un chef d'entreprise du 3e millénaire.
07:14 Direction Facebook, d'où il s'apprête à lancer une vaste campagne de publicité.
07:20 C'est comme cela qu'il déniche ses clients en utilisant la base de données géantes
07:24 que Facebook met à sa disposition.
07:27 - Donc là, je crée une nouvelle campagne de publicité sur Facebook.
07:33 Ce jour-là, Alexis a décidé de faire de la pub pour ses deux boutiques.
07:38 Dans quelques minutes, certains internautes pourront découvrir ce petit panneau publicitaire
07:43 sur leur page Facebook. Et pas n'importe quel internaute.
07:47 Le jeune homme va pouvoir sélectionner ceux qui verront sa pub
07:50 parmi le milliard d'abonnés du site. Et la méthode proposée a de quoi surprendre.
07:55 - Ça, c'est l'étape cruciale. C'est le moment où on cible l'audience de la campagne de publicité.
08:01 Cibler l'audience, cela veut dire qu'Alexis ne va s'adresser qu'à un type très précis d'abonnés,
08:08 uniquement ceux qui ont une chance de devenir ses clients.
08:12 Alors sur le site, il va faire ses courses et choisir ses cibles.
08:16 Le jeune homme commence par déterminer un pays, la France.
08:20 Mais surtout la ville où résident les abonnés Facebook qu'il a dans sa ligne de mire.
08:26 Ce sera Paris et les communes alentours. Pas utile d'aller voir plus loin.
08:32 - Comme aujourd'hui, mes boutiques sont uniquement à Paris et qu'on ne livre...
08:37 On fait beaucoup de ventes à distance, mais qu'à Paris.
08:40 Voilà, je suis pas très intéressé par le fait qu'un Lyonnais ou un Bordelais
08:45 entendent parler de la fabrique cookie, pour le moment, en tout cas.
08:48 Ensuite, Alexis va pouvoir choisir l'âge de ses cibles. Il ne veut que des majeurs.
08:54 Mais s'il le voulait, il pourrait être encore plus difficile,
08:57 car Facebook propose des dizaines de critères différents.
09:01 Alexis pourrait par exemple choisir de ne s'adresser qu'à des célibataires,
09:05 des hommes ou des femmes des couples mariés, des passionnés de lecture,
09:09 de jardinage, de cuisine ou de bricolage.
09:13 Grâce à ce programme, Alexis peut donc s'adresser directement
09:17 aux personnes qui l'intéressent le plus.
09:20 Et si Facebook connaît aussi bien son monde, c'est parce que ce sont les usagers eux-mêmes
09:25 qui lui ont fourni toutes ces informations.
09:28 Souvenez-vous d'Anne. Quand elle s'est inscrite, elle aussi a dévoilé son âge,
09:32 sa ville, sa formation, son employeur.
09:35 Elle a nourri la base de données dans laquelle Alexis est en train de faire son marché.
09:40 Une fois tous ces critères sélectionnés, il ne reste plus à Alexis qu'à choisir
09:47 la durée de sa campagne et le budget qu'il est prêt à dépenser pour faire sa pub.
09:52 - Je rentre un budget de 200 dollars.
09:56 200 dollars, moins de 150 euros. Voilà le budget choisi par Alexis.
10:02 Pour ce prix-là, son affiche sera présente sur Facebook pendant un mois.
10:07 Facebook casse les prix du marché pour séduire les annonceurs.
10:11 Car si Alexis avait voulu s'offrir une campagne de pub de cette envergure
10:14 dans la presse écrite, par exemple, cela lui aurait coûté plus de 2000 euros.
10:18 - Pour 200 dollars, évidemment, aucune presse papier, aucune télé, aucune radio
10:26 ne s'intéresse à une entreprise qui souhaite dépenser 200 dollars.
10:30 Donc le seul moyen qu'on a aujourd'hui avec un si petit budget,
10:34 c'est de faire de la publicité sur les réseaux sociaux ou sur Google.
10:39 Mais clairement, non, je ne peux pas m'attaquer aux médias traditionnels
10:44 avec un budget aussi faible.
10:46 - Autre avantage offert par Facebook, à la fin de sa campagne,
10:49 le site va fournir à Alexis des statistiques très précises.
10:54 En un mois, Facebook lui assure que 70 000 membres ont vu son encart publicitaire
11:00 au moins 3 fois. Et parmi eux, Alexis aura même récolté
11:04 610 nouveaux adhérents sur sa page.
11:07 Aujourd'hui, plus d'un million d'annonceurs dans le monde payent Facebook
11:12 pour faire la promotion ciblée de leurs produits.
11:15 Et Facebook développe chaque jour de nouvelles technologies
11:18 pour en apprendre toujours plus sur les cibles, c'est-à-dire sur nous.

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