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Chroniqueur : Thomas Sotto 


Ce matin, Thomas Sotto reçoit Yaël Braun-Pivet, président de l'Assemblée nationale, dans les 4 vérités. 

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Transcription
00:00 [Musique]
00:02 Bonjour et bienvenue dans "Les 4 V", Yael Broun-Pivet.
00:04 Bonjour.
00:05 Vous êtes la présidente de l'Assemblée nationale, vous êtes le quatrième personnage politique de l'État,
00:09 vous serez reçu en fin de journée par le chef de l'État, au côté du président du Sénat Gérard Larcher.
00:13 Que se passe-t-il dans notre pays depuis quelques jours pour que ça déraille comme ça ?
00:19 Quelle question pour commencer cette émission.
00:22 Il se passe des choses graves.
00:25 Et on voit qu'il y a une révolte qui s'exprime et il y a aussi des exactions qui ont lieu
00:34 et que nous devons tous condamner.
00:36 Et il ne faut pas confondre la révolte qui peut être légitime après le drame qu'il y a eu
00:42 et les exactions qui n'ont strictement rien à voir avec cette révolte.
00:45 Donc il faut entendre la révolte et condamner les exactions et ne surtout pas mélanger les deux ?
00:48 Il ne faut surtout pas faire d'amalgame.
00:50 Et moi je trouve que depuis plusieurs jours, on fait beaucoup d'amalgame sur beaucoup de sujets.
00:54 Et c'est très grave parce que les amalgames c'est la simplification, c'est la binarisation.
01:00 Et ce n'est pas de cela dont nous avons aujourd'hui besoin.
01:02 Nous avons besoin de discours nuancés et de rentrer dans la complexité des choses.
01:07 Mais lorsque l'on voit tous ces pillages, ces scènes de violence…
01:12 On s'en prend aux écoles, aux mairies, aux commissariats, on tire sur des policiers,
01:15 on brûle le bus cœur des femmes par exemple.
01:18 Des criminels ont tenté de mettre le feu à la maison du maire de La Hille-et-Rose
01:21 au risque de tuer sa femme et de tuer ses enfants.
01:24 Quand il n'y a plus de limite, quel sens reste-t-il à la parole politique ?
01:27 Ce qui est fou c'est qu'ils s'en prennent à tous ces lieux qui font société.
01:32 C'est ceux qui sont au siège de l'autorité, on peut penser aux commissariats, aux préfectures, etc.
01:38 Mais pas seulement, parce que quand on incendie un bus,
01:42 des femmes qui serrent au dépistage de ces femmes qui vivent dans les quartiers…
01:47 Et je ne sais pas si vous avez vu les images, on entend des jeunes rire.
01:51 Rire quand ils brûlent, c'est ce bus qui sauve la vie de leur maman.
01:57 Je trouve ça absolument sidérant.
01:59 Mais qu'est-ce qu'on fait derrière ça ?
02:00 Parce qu'on a entendu Elisabeth Borne, après notamment la tentative de meurtre à La Hille-et-Rose,
02:05 "nous ne laisserons rien passer".
02:06 "Nous ne laisserons rien passer", c'est ce qu'on entend à chaque fois,
02:08 on l'a entendu dix fois ces dernières semaines.
02:10 On a l'impression que ce sont des propos de plateau,
02:12 que les jeunes ils s'en foutent d'entendre la Première ministre dire "nous ne laisserons rien passer".
02:15 Mais ça mettait Gale qu'ils s'en foutent,
02:17 parce qu'ils ne doivent pas s'en foutre parce que la justice va passer.
02:22 Vous savez, nous, depuis 2017, on a beaucoup agi.
02:26 Probablement, il faut faire encore beaucoup,
02:28 et nous allons examiner cet après-midi un texte sur la justice.
02:32 Mais nous avons mis les moyens sur la justice, plus 60% de budget,
02:36 et nous avons mis les moyens sur la police.
02:37 Nous avons voté une loi de programmation avec 8 500 policiers de plus.
02:43 Pas tellement sur les quartiers.
02:44 Vous voyez, ça, c'est typiquement un des amalgames qu'on entend.
02:48 Pardon, mais je vais vous citer le maire de l'Aïlée-Rose dans le Parisien ce matin.
02:51 "Rien ne serait plus coupable que de continuer à fermer les yeux
02:53 sur les îlots sécessionnistes qui se répandent dans nos quartiers."
02:58 Non, ce que j'entends, c'est qu'on ne fait pas suffisamment sur la politique de la ville.
03:01 Moi, dans ma circonscription, j'ai une ville,
03:03 qui s'appelle Sartrouville, 50 000 habitants.
03:05 Vous savez combien on met sur la politique de la ville juste pour la rénovation urbaine,
03:09 sur la cité ? 280 millions d'euros.
03:11 On a fait une cité éducative, on crée un nouveau collège,
03:14 une nouvelle école primaire, on a fait une cité de l'emploi,
03:17 on a une mission locale, on a une maison France Service.
03:19 Moi, j'en ai marre d'entendre dire que la politique de la ville a été laissée à l'abandon.
03:23 Ça n'est pas vrai. Et dans ces quartiers, vous avez la plupart des gens qui y habitent,
03:28 qui sont des gens qui sont très respectueux de la règle et de l'autorité.
03:31 Et moi, je connais beaucoup de jeunes qui deviennent des ingénieurs, des avocats, des magistrats.
03:35 Il faut arrêter de se dire qu'on a tout raté.
03:38 Or, évidemment, on a une frange de ces jeunes qui est une frange d'élan de compte.
03:43 Oui, mais parce qu'on a une frange délinquante de ces jeunes qui sont les mêmes
03:46 qui vont nous faire des rodéos urbains et qui vont pourrir la vie des habitants du quartier.
03:50 Ce sont les mêmes qui font ces petits vols à la tire, ces actes de délinquance commun.
03:54 Ce sont les mêmes qui font probablement un peu de trafic de stupéfiants.
03:58 C'est un problème de délinquance d'une partie de la jeunesse qui est complètement partie
04:04 dans le non-respect de l'autorité, des règles et qui, finalement, rien ne les arrête.
04:11 Je ne sais pas si ils ont quelque chose...
04:15 Lorsqu'ils s'attaquent à un maire avec une voiture bélier, lorsqu'ils s'attaquent à un bus,
04:20 lorsqu'ils s'attaquent à une école, là où vont leurs petits frères,
04:23 si ça se trouve, c'est là où ils ont été à l'école.
04:25 C'est absolument désespérant.
04:28 Désespérant, j'ai envie de vous dire parfois aussi, de bêtise.
04:31 Est-ce que l'instauration de l'état d'urgence est une option ?
04:33 Pour vous, certains le demandent.
04:34 Le maire de l'Aiderose, Éric Ciotti, le demandent.
04:36 Est-ce qu'il faut instaurer l'état d'urgence ?
04:37 Vous savez, l'état d'urgence, c'est un outil juridique.
04:40 Ça vous pose un cadre juridique pour pouvoir avoir une action en réponse à une situation donnée.
04:45 Aujourd'hui, moi, je vois que les forces de l'ordre ont la réponse adéquate.
04:50 J'en profite pour les saluer, évidemment, et saluer leur courage.
04:54 Mais on ne va pas pouvoir mettre 45 000 policiers et gendarmes, toutes les nuits, sur le terrain.
04:59 On le sait, ça.
05:00 Eh bien, tant que ça durera, je sais que la police sera mobilisée.
05:03 Maintenant, il y a des outils tels que des couvre-feux qui ont été utilisés localement.
05:08 L'état d'urgence, si la situation devait empirer, mais c'est la décision, évidemment, de l'exécutif.
05:14 Le Parlement, vous savez, en cas d'état d'urgence, se prononce au bout de 12 jours.
05:18 Est-ce qu'il existe un lien, Yael Broun-Pivet, entre les scènes auxquelles nous assistons et l'immigration ?
05:24 Il existe un lien entre les scènes auxquelles nous assistons et la délinquance,
05:30 chez des jeunes qui sont bien souvent issus des quartiers.
05:33 Je ne dirais rien d'autre parce que ce sont des jeunes qui, la plupart du temps,
05:38 nous verrons, nous pourrons avoir une analyse statistique,
05:40 mais la plupart du temps, ce sont des jeunes qui sont nés ici, de deuxième, troisième génération d'immigration.
05:45 Parce qu'Emmanuel Macron, sitôt élu à l'automne 2007, avait lancé une mission destinée, disait-il,
05:49 à faire revenir la République dans les quartiers face au repli identitaire et communautaire.
05:54 Et il s'est passé quoi depuis, sur ce sujet-là ?
05:57 Nous ne cessons d'agir, mais c'est une action qui s'inscrit dans le long terme et qui s'inscrit collectivement.
06:03 Nous avons adopté une loi sur le séparatisme, justement parce que nous avions conscience
06:08 des ruptures dans notre lien républicain dans certains quartiers.
06:14 Moi, l'autre jour, je me suis exprimée sur la laïcité dans l'espace public, dans les écoles publiques.
06:18 Et je me suis pris une bronca sur les réseaux sociaux, simplement parce que j'ai dit
06:24 que les abaya ne devaient pas être portées dans une école publique
06:27 et que j'ai dit que les jeunes enfants de moins de 10 ans qui faisaient le ramadan,
06:32 nous n'avions pas à prendre en charge leur surveillance.
06:35 Ça me paraît être frappé du coin du bon sens, et manifestement pas pour tout le monde.
06:40 Et ça, ça m'inquiète.
06:41 Et sur le fond, est-ce qu'il y a un problème avec la police, avec les forces de l'ordre en France ?
06:44 Non.
06:45 Nous avons une… Non, non, mais ça fait partie aussi des amalgames qu'on entend.
06:50 Ce n'est pas des amalgames, on essaie de comprendre toutes les causes qui amènent à la situation aujourd'hui.
06:54 Et si je vous pose cette question, c'est parce que l'ONU a appelé la France
06:56 à se pencher sérieusement sur les problèmes de racisme dans la police.
06:59 Et je vais vous lire ce qu'a dit la porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU au droit de l'homme.
07:02 "C'est le moment pour le pays de s'attaquer sérieusement au profond problème
07:06 de racisme et de discrimination raciale parmi les forces de l'ordre."
07:09 Est-ce qu'il faut l'entendre, cet avertissement, ou est-ce qu'il est hors sujet ?
07:12 Il faut toujours entendre toutes les organisations et tous ceux qui portent un regard sur notre action.
07:18 Cela étant dit, la police nationale et la gendarmerie exercent leur métier dans le respect de nos règles
07:25 et à chaque fois qu'il y a un manquement, il y a des inspections qui sont diligentées,
07:30 des sanctions qui peuvent être disciplinaires ou pénales qui sont prononcées.
07:34 Donc il ne faut pas penser, et c'est un amalgame à nouveau, que parfois il pourrait y avoir quelques faits,
07:41 mais il ne s'agit pas de jeter l'opprobre sur une profession dans son ensemble
07:45 qui, à nouveau, exerce sa mission de façon merveilleuse.
07:48 Moi, j'ai été voir les bandes vidéo lorsque les policiers interviennent sur le terrain
07:53 et on se disait avec le maire qui était à mes côtés, il faut avoir du courage pour y aller.
07:58 Ils en ont du courage et donc nous devons être derrière eux.
08:01 Vous savez, pour faire société, il faut des élus qui s'engagent, comme le maire, comme les parlementaires,
08:06 parce que nous avons besoin de gens qui s'occupent du bien commun.
08:10 Et nous avons besoin de policiers qui permettent de faire respecter les règles.
08:15 On en a entendu plusieurs ces derniers mois, notamment au moment de la réforme des retraites,
08:18 on s'en est pris au maire, là on s'en prend au maire.
08:20 Le président de la République a été alerté il y a un mois à peine par une trentaine de maires
08:24 qui avaient signé une tribune pour dire que les quartiers étaient au bord de l'explosion,
08:27 qu'il fallait un plan vite pour les banlieues.
08:29 Ça, c'est le maire de Trappes, Ali Rabé, qui le dit et qui le disait dans Le Monde.
08:32 On attend toujours le plan quartier 2030 qui a été promis par Emmanuel Macron.
08:35 Mais ces maires, justement, je crois que pourquoi ils sont à ce point parfois en colère,
08:39 c'est que ce sont eux qui, tous les jours, vont chercher des financements pour monter une maison de quartier,
08:44 pour soutenir une association, pour rénover une école.
08:48 Et c'est vrai que voir leur travail qui est pas enfumé,
08:51 alors qu'ils se démènent jour et nuit pour le bien de leurs habitants,
08:54 c'est effectivement désespérant.
08:56 Et quand on s'en prend à eux physiquement, à leur famille,
08:58 là, effectivement, ça dépasse toutes les limites acceptables.
09:02 Et c'est pour ça qu'il faut que nous ayons collectivement un sursaut.
09:05 Et le sursaut, il doit venir aussi des habitants des quartiers.
09:08 Je le disais au début, pas d'amalgame.
09:11 La grande majorité des habitants de ce quartier soutiennent leur maire,
09:14 soutiennent les efforts qu'ils font et que nous faisons.
09:17 - Vous serez au Rassemblement des maires, moi, midi, tout à l'heure ?
09:19 - Je serai probablement à l'Assemblée nationale,
09:22 mais nous aurons évidemment une pensée,
09:25 et moi, vous savez, je suis élue municipale aussi,
09:27 et donc il nous faut avoir une solidarité sans faille entre les élus,
09:31 entre tous ceux qui font que, finalement, la République tient debout.
09:34 - Vous êtes présidente de l'Assemblée, devant une assemblée diverse,
09:38 parfois cacophonique, là, on est loin de l'Union nationale.
09:40 Rappelons le tweet de Jean-Luc Mélenchon, mercredi, après les premières violences.
09:44 "Les chiens de garde nous ordonnent d'appeler au calme,
09:46 nous appelons à la justice."
09:48 Est-ce que vous diriez, comme Jordane Bardella,
09:50 que la France insoumise pourrait s'appeler la France incendiaire ?
09:53 - Ce qui est sûr, c'est qu'en ce moment, il y a des pompiers pyromanes,
09:58 et dans une situation telle que celle-ci,
10:02 il n'y a pas d'option dans la parole publique que l'on doit porter,
10:06 et cette parole publique-là est effectivement inacceptable,
10:11 parce que, à nouveau…
10:12 - C'est un pompier pyromane, Jean-Luc Mélenchon, aujourd'hui ?
10:14 - Bien sûr, bien sûr, il ne fait que cela,
10:16 vous savez pourquoi ?
10:17 Parce qu'il se nourrit du chaos, il se nourrit de la désorganisation,
10:23 parce qu'il croit, vainement, que c'est cela qui lui sera profitable.
10:28 Elle ne profitera à personne, ce chaos ne profitera à personne.
10:32 - La nuit, on le disait, dans les journaux, a été un petit peu plus calme,
10:34 et tout le monde s'en réjouit, évidemment.
10:36 Est-ce que vous ne craignez pas qu'une fois que tout cela fera retomber,
10:38 une fois de plus, on remette le couvercle sur la casserole
10:40 et que cela continue à bouillir en dessous ?
10:42 - On n'a jamais mis le couvercle sur la casserole,
10:44 on agit au quotidien, on prend des lois, on vote des lois,
10:49 il y a des actions très concrètes sur le terrain.
10:51 On a réformé la justice des mineurs, il n'y a pas plus loin que trois ans,
10:55 cette réforme se met en place, elle produit des effets.
10:58 Il faut aller plus loin, moi je crois,
11:00 surtout qu'il ne faut plus rien laisser passer.
11:02 Et donc, à chaque fait commis, quel que soit l'âge de la personne,
11:06 il faut qu'il y ait une sanction.
11:07 - Quitte à durcir la justice des mineurs et la loi pour les mineurs ?
11:10 - Il ne s'agit pas de la durcir, il s'agit de l'appliquer tout le temps.
11:13 Nous avons voté des alternatives aux poursuites pour les premiers faits,
11:16 parce que le premier fait en général est assez bénin,
11:19 mais c'est lui qui va entraîner l'escalade bien souvent.
11:21 Il faut qu'il y ait une première sanction qui peut être stage de citoyenneté,
11:25 réparer, aller réparer le dommage lorsqu'on a dégradé un mur
11:29 en faisant un graffiti et tout ça.
11:30 Nous l'avons voté, ça se met en place,
11:33 mettons-le en place systématiquement
11:35 pour que nous ne laissions plus rien passer vis-à-vis de ces jeunes délinquants.
11:38 - Aujourd'hui, c'est le sursaut ou la chute, a dit Vincent Jambrain,
11:40 le maire d'Ali-les-Roses, vous êtes d'accord avec ça ?
11:43 - Je suis assez d'accord, sauf que moi, je ne suis pas fataliste,
11:47 et je ne sais pas s'il l'est,
11:49 mais je ne crois pas que ce soit aussi binaire que ça.
11:53 Mais en revanche, nous devons collectivement avoir une vraie prise de conscience.
11:57 - Merci Elbron-Pivet d'être venu dans les 4V.
11:58 Bonne journée à vous.
11:59 Rappelle ce rassemblement à midi devant toutes les mairies de France.

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