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00:00 *Musique*
00:07 Bonjour à tous et bienvenue dans cette interview.
00:09 Mon invité aujourd'hui, Pierre Dubreuil.
00:11 Bonjour.
00:12 Bonjour.
00:13 Directeur du domaine national de Chambord.
00:14 Vous nous accueillez ici dans les jardins à la française du château.
00:18 Six mois maintenant que vous avez pris la suite de Jean Dossonville.
00:21 On va parler de votre parcours, de vos objectifs.
00:24 Pour ce site historique et touristique, plus d'un million de visiteurs l'an dernier.
00:28 Troche du record de 2019.
00:30 Alors votre parcours d'abord en quelques mots.
00:32 Vous avez dirigé le muséum d'histoire naturelle, l'institut national de recherche archéologique préventive
00:37 et l'office français de la biodiversité.
00:39 Chambord, ces 500 ans d'histoire qui donc contemple.
00:43 Est-ce que vous avez eu un petit peu le vertige au moment de recevoir les clés du château ?
00:46 Le vertige non, mais une grande émotion, des frissons, une joie mêlée d'émotions.
00:55 Des grandes émotions que j'ai d'ailleurs quand je regarde le château et quand je vous parle en y pensant.
01:00 Ça fait frissonner Chambord évidemment.
01:05 Donc c'est quelque chose d'assez impressionnant en effet que d'être le gardien de ce patrimoine exceptionnel,
01:14 culturel et naturel puisque vous l'avez dit, ma vie professionnelle c'est essentiellement de servir la cause
01:20 du patrimoine culturel et du patrimoine naturel.
01:22 Le domaine de Chambord est le deuxième château le plus visité de France derrière Versailles.
01:27 Presque des records de fréquentation battus l'an dernier.
01:32 Or le gouvernement lance un plan de lutte contre le surtourisme accusé de menacer les lieux les plus fréquentés.
01:40 Est-ce que vous allez prendre des mesures pour limiter la fréquentation alors que Chambord n'est pas du tout concerné ?
01:44 Chambord n'est pas aujourd'hui concerné par le surtourisme dans la mesure où nous arrivons à faire face à cet afflux exceptionnel.
01:51 Vous l'avez dit, la saison a très bien démarré.
01:54 Donc une grande fréquentation peut-être historique, nous verrons à la fin de la saison.
01:58 Mais nous arrivons pour l'instant à gérer cette situation, à accueillir le public et les visiteurs dans des conditions qui restent correctes
02:07 même si elles sont améliorables.
02:10 Nous allons devoir avoir une réflexion, notamment dans les grandes périodes de fréquentation comme les week-ends que nous avons vécu
02:18 et en très haute saison, pour savoir comment adapter cette fréquentation, non pas pour la réduire,
02:24 parce que moi j'ai la conviction qu'on peut toujours accueillir plus de monde,
02:27 mais par contre les accueillir dans de meilleures conditions et il y a des solutions, une réflexion est engagée.
02:33 Et mon projet pour Chambord c'est aussi de faire en sorte qu'à Chambord on ne vienne pas voir que le château,
02:39 on ne visite pas que le château.
02:40 Chambord c'est un domaine, un domaine à patrimoine naturel, comme vous l'avez dit, une forêt,
02:44 avec des îlots de visite qui ne se résument pas au château.
02:49 Qui reste encore inexploré ou pas assez visité.
02:52 Exactement. Qui sait qu'il y a une vigne à Chambord, avec un chai, avec du vin,
02:57 il y a un potager qui est magnifique, qui va d'ailleurs être de plus en plus beau et qu'il faut savoir visiter,
03:04 il y a des spectacles, la caicastre, il y a des vélos à louer,
03:09 il y a 30 km de pistes cyclables à Chambord, la Loire à vélo, des bateaux, nous avons la place du village.
03:16 Tout ça pour orienter, mieux gérer les flux de visiteurs.
03:20 En parlant de fréquentation, puisqu'on y est, les 5 premiers mois de l'année ont été excellents.
03:26 Les français toujours locomotive du tourisme ici, la région Centre-Val de Loire notamment ?
03:31 Oui, bien sûr, je salue d'ailleurs les téléspectateurs et les habitants du Centre-Val de Loire,
03:38 les Loiréchériens, mais les départements limitrophes sont les premiers visiteurs de Chambord.
03:45 Mais moi, mon ambition, c'est que chaque habitant du Centre-Val de Loire ait pu visiter Chambord,
03:53 le château et ses abords, ait pu vivre l'expérience de Chambord.
03:57 Ça reste donc la locomotive de la fréquentation, mais aujourd'hui on voit que la fréquentation est également très tirée
04:03 par une fréquentation française de la France entière, européenne, qui revient en masse,
04:08 et bien au-delà, puisque nous avons des visiteurs américains et asiatiques, ça recommence aussi.
04:14 Bref, tous les curseurs sont plutôt en hausse et les visiteurs reviennent en masse.
04:21 Sous la gouvernance de Johnsonville, les recettes du mécénat ont bondi.
04:25 On est ici dans les Jardins à la Française, qui ont été justement financées par le mécénat.
04:28 Ils sont passés de 100 000 euros par an à environ 2 millions.
04:31 C'est un mécénat qui continue d'être une source de financement importante pour vous.
04:37 Quels sont vos objectifs en la matière ?
04:39 Il faut poursuivre cette politique.
04:41 Vous savez, Chambord, les gens ne le savent pas assez, c'est un établissement public, industriel et commercial,
04:46 qui est donc financé presque exclusivement, pour ses dépenses de fonctionnement, par l'auto-financement.
04:52 Donc nous avons besoin des recettes de fréquentation, ça, ça va bien,
04:56 mais aussi de recettes annexes, de locations, de diversification et notamment de mécénat.
05:02 Et moi, mon ambition, c'est d'avoir un mécénat raisonnable, d'attirer des personnes.
05:09 Je rappelle que le mécénat, c'est un don, avec certaines contreparties qui sont très encadrées par la loi.
05:14 Mais nous avons la chance, à Chambord, avec ce patrimoine exceptionnel,
05:19 d'avoir nombre de donateurs potentiels qui s'intéressent à Chambord
05:23 et qui ont envie de contribuer finalement au rayonnement de Chambord.
05:27 Donc bien entendu, nous continuerons d'accueillir des mécènes, d'entretenir un lien fort avec ces mécènes,
05:34 qui sont des mécènes amoureux du patrimoine culturel et du patrimoine naturel,
05:38 parce que beaucoup aussi viennent par la forêt, pas seulement par le château.
05:43 Est-ce que ça veut dire, par contraste, que l'État n'a plus forcément les moyens d'entretenir un château comme Chambord ?
05:50 Attention, l'État, je parle de dépenses de fonctionnaires,
05:54 s'agissant de l'investissement, même si, comme vous l'avez fait remarquer,
05:57 des mécènes ont pu financer notamment ces magnifiques jardins à la française,
06:01 le patrimoine monumental de Chambord, le château, doit être entretenu par l'État.
06:07 Et c'est l'État. Je rappelle que les France Relance, le plan de relance,
06:12 a permis de contribuer à hauteur de plusieurs millions d'euros à la rénovation et à la restauration du château.
06:19 Donc l'État nous soutient. Notamment les Lanternons.
06:22 Notamment les Lanternons, en partie. Et l'État nous soutient et va continuer de nous soutenir.
06:27 Donc ça, c'est vraiment très important. Et je vais même demander à l'État des efforts supplémentaires.
06:31 Parce que Chambord, vous l'avez dit, c'est le premier château visité en dehors de l'île de France, en France.
06:37 Le deuxième parce qu'il y a Versailles.
06:39 Mais ce patrimoine monumental, exceptionnel, qui est une part de l'histoire nationale,
06:45 doit absolument être rénové par l'État dans le programme de restauration des monuments historiques.
06:50 Il y a d'autres chantiers qui sont prévus, qui sont en train de venir ?
06:52 Oui, enfin, c'est un peu tôt pour vous répondre. Je suis arrivé il y a moins de six mois.
06:56 Je réfléchis à un schéma directeur de rénovation et d'aménagement.
07:00 Et évidemment, vous savez, depuis 500 ans, Chambord ne s'est pas fait en un jour.
07:06 1519, la construction a été achevée environ vers 1549.
07:12 Louis XIV a remanié. C'est un château qui a toujours été remanié.
07:16 Jusqu'à récemment, en effet, avec les travaux que mon prédécesseur a engagés,
07:19 notamment au Jardin de la Française et puis la restauration des Lanternons.
07:23 Un château en évolution constante.
07:25 En évolution constante et surtout qui doit être entretenu constamment.
07:28 Et les projets que j'ai, évidemment, pour permettre un meilleur confort de visite
07:32 et remettre le visiteur au centre de l'expérience à Chambord, vont nécessiter des nouveaux travaux, bien entendu.
07:37 Alors, justement, parmi les nouveautés, il y a tout un tas de produits dérivés.
07:41 Une cuvée de vin, Chambord, des produits dérivés de l'eau de boulot,
07:46 des licences d'exploitation pour l'utilisation de la marque Chambord.
07:49 Est-ce que cette stratégie va s'intensifier ?
07:51 Ah oui, cette stratégie va s'intensifier et va même sans doute monter d'un cran.
07:55 Puisque la marque Chambord, la marque individuelle Chambord que nous défendons, va devoir l'être encore plus.
08:02 Évidemment, Chambord a des atouts exceptionnels.
08:05 Moi, mon idée, ma conviction et mon projet, ce sera de défendre Chambord d'abord.
08:11 Et de faire en sorte que Chambord soit un lieu de consommation des produits agricoles faits à Chambord.
08:18 Vous avez évoqué le vin, les légumes, l'eau, l'eau de boulot.
08:23 L'eau de Chambord, soit dit en passant, est d'ailleurs d'une qualité exceptionnelle.
08:27 Bref, et ça n'est pas fini, le bois, puisque nous avons une forêt exceptionnelle.
08:31 Nous allons vendre du bois de Chambord aussi, ce qu'on fait déjà, mais on va essayer de le faire de manière massifiée.
08:36 La venaison, le gibier, qui n'est pas...
08:40 Le gibier français, c'est un... je ne peux pas dire un scandale,
08:43 mais moi en tout cas, ça me choque de savoir que le gibier consommé en France est pour 80% d'origine étrangère.
08:50 Alors que nos forêts, et notamment Chambord, regorgent de faune sauvage et de gibier d'excellente qualité gustative, écologique et sanitaire.
09:00 Donc si vous voulez, moi je pense en effet qu'il faut mieux faire connaître les produits de Chambord,
09:05 et que les visiteurs qui viennent à Chambord dégustent Chambord.
09:10 Alors justement, la chasse, parlons-en, vous venez de l'Office de la biodiversité,
09:18 L'Office français de la biodiversité, qui regroupait l'Agence de la biodiversité, l'Office national de la chasse et de la faune sauvage,
09:24 biodiversité, chasse, est-ce que c'est vraiment compatible, notamment ici à Chambord ?
09:28 Mais c'est plus que compatible, c'est intimement lié.
09:31 En fait la question n'est pas de savoir si on doit chasser, c'est que si on ne chasse pas, la forêt se porte mal.
09:38 C'est encore plus simple, la chasse est au service de la biodiversité.
09:42 Là encore, c'est une question méconnue, vous me donnez l'occasion de faire comprendre à ceux qui l'ignoreraient,
09:47 que sans la chasse, une forêt est mal entretenue.
09:51 Il y a une faune sauvage exceptionnelle dans ce parc, dans la forêt de Chambord, qui est close, je le rappelle, d'un mur de 32 km de long.
10:00 Cette faune sauvage, elle existe depuis longtemps, de cervidés, d'ongulets sauvages, de sangliers.
10:06 Cette faune sauvage, si elle n'est pas régulée, sa diversité génétique s'appauvrit,
10:12 et elle abîme la forêt qui doit être en permanence aménagée, entretenue,
10:17 parce que la forêt, ce n'est pas une forêt primitive, la forêt sans l'homme, ça ne se porte pas bien.
10:22 C'est quoi, une douzaine de battues par an ?
10:25 Oui, une douzaine de battues avec des chasses de différentes pratiques.
10:30 Moi, je veux faire deux choses. D'abord, la chasse à Chambord, elle est historique.
10:34 Avant le château, il y avait la chasse. François 1er est venu chasser ici.
10:38 Elle a un atout diplomatique, la chasse, c'est-à-dire que la chasse a permis à la France aussi d'être,
10:45 comme à Versailles, qui est un lieu diplomatique, par exemple aujourd'hui pour Choose France ou pour des salons,
10:50 eh bien ici, la chasse sert la diplomatie française.
10:53 Justement, ça soulève pas mal de fantasmes. Qui est présent lors de ces battues ?
10:56 Ça, il y a des catégories d'invités, de la Défense nationale, des gens qui sont là parce qu'ils sont chasseurs,
11:05 qui contribuent à une mission de service public de régulation. Je le rappelle, c'est une mission de service public.
11:10 Donc, je comprends qu'il y ait des fantasmes, mais il faut démythifier la chasse.
11:14 Ces personnes contribuent à une mission de service public qui est inscrite dans les statuts de Chambord
11:21 et qui est une nécessité écologique. Donc moi, mon ambition aussi, c'est de faire évoluer les pratiques de chasse
11:27 parce qu'à Chambord, la chasse doit être exemplaire et la chasse doit être d'excellence,
11:32 ce qui veut dire que les pratiques doivent évoluer.
11:35 Par exemple, il y avait de la chasse à courre à Chambord quand François 1er chassait.
11:39 Il n'y a plus de chasse à courre à Chambord, pour ceux qui ne le sauraient pas.
11:41 Mais aussi, il y a des pratiques qui doivent être toujours renouvelées.
11:45 Mais la chasse à Chambord, c'est l'une de mes missions, non seulement doit continuer, mais doit être pérennisée.
11:51 On doit même être le vaisseau amiral de la chasse française, l'exemple de la chasse française.
11:55 Le vaisseau amiral de la chasse française ?
11:57 Oui.
11:58 Une dernière question, Pierre Dubreuil, le domaine de Chambord sera le cadre d'un concert du groupe Imagine Dragons en septembre,
12:04 ce après avoir reçu Sting, et ses 20 000 spectateurs.
12:08 Alors, à l'époque, déjà, il y avait des petits soucis d'organisation.
12:10 Là, il va y avoir potentiellement 30 000 personnes.
12:12 Qu'est-ce qui va être fait pour que tout se passe bien ?
12:15 D'abord, nous allons continuer à faire des événements, des grands événements de ce type,
12:20 parce que c'est extraordinaire d'accueillir 20 000, 30 000 personnes, vous voyez,
12:25 avec ce décor derrière, historique, d'accueillir des grands noms de niveau mondial,
12:33 parce que Chambord, c'est de niveau mondial.
12:35 Vous avez les pyramides, vous avez le Taj Mahal, vous avez Chambord,
12:38 c'est une merveille du monde, peut-être la huitième.
12:41 Eh bien, oui, nous allons accueillir Imagine Dragons au mois de septembre,
12:46 nous accueillerons d'autres artistes, et chaque année, on répétera peut-être même qu'on amplifiera ce type d'événements.
12:52 Sous forme de festival, par exemple, ça pourrait être le cas ?
12:54 C'est une hypothèse, c'est une hypothèse.
12:56 Alors, même si on a un seul lieu ici, le fer à cheval, mais on peut imaginer en effet d'en avoir plus souvent.
13:04 Et nous travaillons avec l'ensemble des acteurs territoriaux, locaux, collectivités territoriales,
13:10 bien sûr le département, la région, la communauté de communes, et aussi, bien sûr, la préfecture,
13:17 avec les services de sécurité, pour que les flux de visiteurs,
13:21 parce que c'est un vrai problème à Chambord, puissent être gérés et accueillir 30 000 personnes dans les moins mauvaises conditions.
13:27 Après, il ne faut pas être... il faut être lucide, hein.
13:30 On est dans un lieu clos, on sort pas avec des entrées, on sortira pas en cinq minutes,
13:34 et on entrera pas en cinq minutes, 30 000 personnes, c'est 30 000 personnes.
13:37 Par contre, nous devons garantir un maximum de sécurité et de plaisir, parce que ça doit être une soirée exceptionnelle.
13:43 Merci beaucoup, Pierre Dubreuil, directeur du domaine national de Chambord, pour cette interview.
13:47 Merci à vous.
13:48 Voilà, c'est la fin de cette interview. Merci à vous de l'avoir suivie.
13:51 Très bonne journée sur TV Tour Malde-Loire.
13:53 [Musique]
14:00 Merci.