Aujourd'hui, dans "Bienfait pour vous", Mélanie Gomez et Julia Vignali ouvrent le dossier santé du jour avec le professeur Jean-Philippe Spano, Chef de service oncologie à la Pitié-Salpêtrière.
Retrouvez "La question du jour" sur : http://www.europe1.fr/emissions/vite-fait-tres-bien-fait
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00:00 On va donner la parole à notre invité du jour, éminent spécialiste en cancérologie, c'est vous professeur Jean-Philippe Spano, bonjour !
00:06 - Bonjour, merci !
00:07 - Avec plaisir, vous êtes chef de service oncologie à la Pitié-Salle-Pétrière.
00:10 Alors professeur Spano, vous avez organisé il y a la semaine dernière le congrès national de cancérologie à Paris.
00:17 Le but c'était de réunir tous les experts français du cancer et pas seulement, il y avait des médecins mais aussi des ingénieurs spécialisés dans l'intelligence artificielle.
00:25 Pourquoi on a réuni tous tous beau monde alors ?
00:27 - Parce que justement on a essayé de réunir toutes les personnes, les professionnels impliqués, y compris les patients d'ailleurs, il y avait des associations de patients,
00:37 pour pouvoir échanger, pour pouvoir mettre en place des collaborations et pour pouvoir effectivement répondre encore plus vite comme l'intelligence artificielle aux attentes de nos patients.
00:46 - Alors avant de voir ensemble toutes les innovations, on va donner quelques chiffres pour commencer professeur.
00:52 À combien on estime le nombre de nouveaux cancers chaque année en France ?
00:56 - Alors récemment à peu près 380 000 nouveaux cas par an en France, ce qui représente à peu près 3,8 millions de personnes concernées par le cancer en France.
01:09 - Et parmi ces 380 000 à peu près de nouveaux cancers par an, quels sont les plus répandus ?
01:14 Je veux dire aujourd'hui, en 2023, est-ce qu'on est toujours... moi je sais pas, j'ai un trio de tête qui me vient, mais prostate, sein, poumon, c'est toujours ça ?
01:21 - Oui c'est ça, et plus colorectal.
01:23 - Et puis, ce qui est important aussi de préciser, c'est que la mortalité quand même diminue.
01:28 C'est important de le noter également.
01:32 Donc en effet, pour l'homme, vous allez retrouver le cancer du poumon, de la prostate et colorectale,
01:38 et chez la femme, il y a le cancer du poumon aussi, je pense qu'on va en reparler peut-être tout à l'heure, le cancer du sein et le cancer colorectal.
01:44 - Et c'est un chiffre qui, vous nous l'avez dit en préparant l'émission, est en augmentation, ces 380 000 nouveaux cancers.
01:50 Pourquoi ça augmente ? C'est lié justement à l'espérance de vie qui elle aussi augmente ?
01:54 - Entre autres, puisqu'on vit de plus en plus longtemps, heureusement, et donc du coup on a un plus grand risque à développer un cancer, mais pas que.
02:06 Pas que, il y a aussi eu des études récemment qui ont démontré le mode de vie.
02:11 L'alimentation... - Ça c'est dégradé encore ?
02:15 - Encore un tout petit peu, oui. - Mais les gens fument moins non, pourtant ?
02:18 - On essaye, mais pas encore, autant qu'on ne le voudrait, en effet, et vous soulignez un point important qui est la prévention.
02:24 - Voilà, justement, j'allais être en train de me dire, si ça continue d'augmenter, c'est-à-dire le nombre de nouveaux cas,
02:28 vous avez dit "oh Dieu", heureusement, la mortalité elle baisse, des cancers en général,
02:33 mais si ce nombre de nouveaux cas ne cesse d'augmenter, ça veut dire quoi ?
02:36 Par exemple, tous les dépistages organisés qu'on fait aujourd'hui sur le cancer du sein, le cancer colorectal,
02:41 enfin voilà, il y a des choses qui sont faites quand même, ça ne suffit pas en tout cas en diguer l'augmentation des nouveaux cas ?
02:46 - En fait, il ne faut pas confondre prévention et dépistage.
02:48 S'il y a une augmentation du nombre de nouveaux cas, c'est parce qu'aussi on les dépiste de plus en plus, et de mieux en mieux.
02:54 - On ne les aurait pas vus à d'autres époques ? - Exactement, bravo, c'est exactement ça.
02:57 - À l'époque, on nous disait "vous êtes mort d'une longue maladie".
02:59 - Exactement, ou on n'atteignait pas un âge aussi, effectivement, qui permettait d'être à un risque un peu plus supérieur,
03:06 de développer effectivement un cancer. Donc ça, c'est le dépistage.
03:09 Au contraire, alors peut-être qu'aussi, le nombre de nouveaux cas qui augmente est peut-être aussi lié, en partie, à ce dépistage.
03:15 - Bien sûr. - Puisqu'on diagnostique de plus en plus de cancers, mais à un stade de plus en plus précoce.
03:21 - Et la malbouffe, vous en parlez, pour vous c'est le cœur du... - C'est un des cœurs.
03:27 - Ça démontre scientifiquement vraiment que ça peut augmenter le risque de cancer ?
03:30 - Oui, surpoids, obésité, les campagnes qu'on a faites sur manger des fruits et des légumes, 5 fruits et légumes par jour,
03:37 c'est justement pour mettre en exergue le fait qu'il faut manger des fibres, en fait.
03:42 Peut-être un peu moins de viande rouge, certains disent, effectivement, qui peuvent abîmer.
03:49 Alors ce qui peut abîmer aussi, c'est le microbiote. Vous savez, dans le tube digestif...
03:53 - Il faut surveiller son microbiote ?
03:55 - Il y a de grands experts dans le monde, donc en particulier en France, qui s'intéressent au microbiote,
04:00 et qui pourraient être... En fait, notre malbouffe, comme vous dites, pourrait être responsable d'une modification de ce microbiote.
04:05 - Très bien. Merci à vous, professeur. On va poursuivre dans quelques minutes cet éclairage sur les innovations en cancérologie.
04:11 Les bonnes nouvelles à venir pour toujours mieux soigner les patients, et notamment grâce à l'intelligence artificielle.
04:16 On va vous expliquer comment tout ça fonctionne. Alors, à tout de suite sur Europe 1.
04:20 Europe 1. Bien fait pour vous.
04:24 Mélanie Gomez, Julia Vignali.
04:28 - Bien fait pour vous. Nous sommes toujours en direct avec vous.
04:31 Si vous nous rejoignez, sachez qu'on s'intéresse aux bonnes nouvelles en matière de cancérologie,
04:35 au progrès, parce qu'il y en a pas mal, et on en parle avec l'un des meilleurs experts français,
04:39 le professeur Jean-Philippe Spano, chef de service oncologie à la pitié salpétrière.
04:44 Alors, on va voir à présent les grandes avancées concernant les traitements contre le cancer.
04:48 Il y a du nouveau, par exemple, concernant le cancer du poumon, avec de nouvelles thérapies ciblées. Comment ça fonctionne ?
04:54 - Alors, c'est nouveau, mais c'est aussi une preuve que le concept existe.
04:59 C'est-à-dire qu'en fait, ces thérapies ciblées, on les connaît depuis à peu près une vingtaine d'années.
05:03 En fait, on identifie une cible, comme son nom l'indique.
05:07 C'est-à-dire que ça peut être une protéine, une substance, ça peut être un gène,
05:11 et qui est donc anormale, ce qu'on appelle une mutation.
05:14 Et on va essayer, en fait, d'annuler l'effet négatif de cette mutation,
05:19 qui est responsable du développement de la division des cellules.
05:22 - Vous n'annulez pas la mutation, mais vous annulez les effets délétères, c'est ça ?
05:25 - Absolument. Voilà. Et donc, du coup, si vous voulez, la cellule n'a plus son point clé pour pouvoir se diviser.
05:32 Donc, c'est ce qu'on appelle le concept de la thérapie dite "ciblée".
05:35 - Et avec ce traitement, on donne une réelle chance de survie aux patients qui ont un cancer du poumon ?
05:39 On en est où à ce stade ? C'est peut-être encore que des essais cliniques, je ne sais pas.
05:42 Est-ce que ça fonctionne sur tous les types de cancers de poumon ? Parce qu'il y en a plusieurs en plus.
05:45 - Absolument. Alors, ça ne fonctionne que sur les patients ayant un cancer du poumon avec cette mutation,
05:49 avec cette anomalie génétique.
05:52 Et donc, c'est à peu près, pour ce qui est justement de cette mutation qui concerne le GFR,
05:56 qui est un récepteur à la surface des cellules cancéreuses, ça concerne à peu près 10 à 15 %.
06:00 - C'est déjà ça.
06:01 - C'est déjà ça, mais la grande avancée, là, c'est une confirmation, non, ce n'est plus un essai thérapeutique.
06:05 L'essai est confirmé avec un recul suffisant que ça fonctionne.
06:08 On opère, on enlève la tumeur. Si la tumeur a cette anomalie, on donne un comprimé à la patiente ou aux patients
06:15 pendant quelques années et bien entendu, on améliore de manière significative ce qu'on appelle la survie de ces patients.
06:21 - Alors, il y a un autre moyen d'éradiquer les cellules cancéreuses, c'est l'utilisation d'anticorps monoclonaux conjugués.
06:28 Il faut nous expliquer de quoi il s'agit. Vous comparez ce traitement à un cheval de Troie contre le cancer.
06:33 - Ah oui, ça, c'est un nouveau concept qui est vraiment, pardonnez-moi l'expression, génial.
06:37 C'est-à-dire qu'en fait, au lieu d'utiliser de la chimiothérapie un médicament qu'on va injecter,
06:43 en fait, vous utilisez un anticorps qui va porter cette molécule de chimiothérapie comme s'il jouait le rôle de vecteur.
06:50 Et en fait, il va aller repérer à la surface de la cellule, donc un récepteur.
06:55 L'anticorps va se poser et il va rentrer dans la cellule.
06:58 Et en rentrant dans la cellule, il a planqué avec lui, grâce à un petit lien, la petite molécule de chimiothérapie.
07:03 Et donc du coup, la molécule de chimiothérapie est libérée dans la cellule, détruit le noyau et la cellule...
07:07 - Bazooka ! C'est génial, c'est beaucoup plus ciblé, quoi.
07:10 - Exactement. Et donc du coup, vous ciblez plus spécifiquement les cellules cancéreuses parce qu'elles portent le récepteur
07:16 et que l'anticorps s'est fixé dessus. C'est pour ça que j'appelle ça un cheval de Troie.
07:19 - Ah oui, c'est très efficace, très ingénieux. Mais alors en plus, je crois que l'autre avantage de ces traitements-là,
07:23 c'est qu'il y a moins d'effets secondaires, je crois, pour les patients.
07:26 - Notre objectif et l'objectif des chercheurs, c'est d'essayer bien entendu de gagner en efficacité,
07:31 mais tout en préservant la qualité de vie et diminuer les effets secondaires.
07:34 Donc en ciblant, normalement, il faut diminuer les effets indésirables.
07:37 Alors, on ne peut pas toujours, bien entendu, les éviter, ça c'est clair.
07:40 - Oui, parce qu'on a tous en tête effectivement les effets, notamment de la chimiothérapie, qui sont terribles.
07:44 - La perte du cheveu, les nausées... - Effectivement, si on peut éviter au moins quelques effets.
07:47 - A ce stade, ce type de traitement, le cheval de Troie dont on vient de parler, c'est réservé à quel type de cancer ?
07:51 - Alors là, on a quelques preuves aujourd'hui et des autorisations de lui sur le marché
07:56 pour des cas de cancer du sein, pour des cas de cancer colorectal,
07:59 justement parmi les plus fréquents finalement de ces cancers.
08:02 Et il y avait une étude justement, vous savez, il y a eu un gros congrès de l'ASCO.
08:05 - Congrès de l'ASCO, le grand congrès américain de cancérologie.
08:07 - Et en fait, on a testé 7 anticorps sur plusieurs types de cancers
08:13 après avoir identifié cette fameuse cible, ce qu'on appelle la cible HER2,
08:17 et ça semble marcher pour un grand nombre de cancers.
08:20 Donc ça, on attend maintenant effectivement que les études pour les autres types de cancers
08:23 puissent continuer et montrer, et prouver en tout cas, l'efficacité.
08:28 - Alors ça fait également quelques années que l'on entend parler de l'immunothérapie.
08:31 Alors là, le principe, c'est de booster le système immunitaire du patient
08:34 pour qu'il s'attaque à ses cellules cancéreuses, c'est bien ça ?
08:37 - Absolument, parce que notre système immunitaire, il ne faut pas l'oublier,
08:40 c'est sa mission première, c'est de détruire tout ce qu'il ne reconnaît pas
08:43 comme étant normal ou en tout cas propre à l'organisme.
08:46 Tout ce qui est étranger, il veut le détruire, donc ça peut être un virus,
08:48 ça peut être une bactérie, et une cellule cancéreuse.
08:50 Donc le but, là, c'est de stimuler notre propre système immunitaire,
08:53 là encore une fois en utilisant des anticorps,
08:55 et c'est ces cellules, des gobules blancs, tueuses,
08:59 qui vont aller détruire directement les cellules.
09:01 - On donne des armes en fait, c'est ça ?
09:02 - On stimule en même temps.
09:03 - C'est super, on voit que l'arsenal thérapeutique est de plus en plus varié,
09:06 donc l'immunothérapie, j'y reviens, alors on sait aussi qu'avec ce traitement-là,
09:09 quand ça fonctionne, ça peut fonctionner très bien,
09:11 mais ça ne marche pas sur tous les cancers.
09:12 - C'est vrai.
09:13 - En revanche, ce qui est étonnant, et que ce qu'on peut peut-être expliquer aux auditeurs d'Europe 1,
09:15 c'est que ça peut marcher aussi bien sur un cancer du sein que sur un cancer du poumon.
09:19 Comment ça se fait comme ça que c'est un même traitement, entre guillemets,
09:21 pour des cancers très différents ?
09:23 - Parce que là, vous stimulez le système immunitaire,
09:24 et comme je l'ai dit, le système immunitaire, il ne fait pas de différence.
09:26 En fait, normalement, s'il est efficace, il doit être efficace pour tout.
09:29 Alors, en revanche, ce que vous dites, c'est très important. Il faut relativiser.
09:33 C'est-à-dire que l'immunothérapie est une très belle évolution thérapeutique,
09:36 une nouvelle stratégie aujourd'hui qui a fait ses preuves,
09:38 mais elle n'a pas fait ses preuves pour tous les types de cancers.
09:41 Et pour un type de cancer, ou en général, comme le cancer du poumon, là encore une fois,
09:46 ou des cancers de mauvais pronostic, comme le mélanome,
09:49 où ça marche, ça ne marche pas non plus tout le temps, et il faut le reconnaître aussi.
09:52 - Alors, il y a des virus qui peuvent provoquer des cancers,
09:55 on parle de plus en plus des papillomavirus.
09:57 C'est pourquoi vous militez d'ailleurs pour la vaccination contre ce virus dès l'adolescence,
10:01 et pas uniquement des jeunes filles, c'est bien ça ?
10:03 Nos jeunes garçons, il faut les emmener.
10:04 - Nos garçons sont vaccinés, ils sont vaccinés, on l'a fait.
10:07 - Je vous félicite, et ça me permet effectivement d'évoquer la campagne de vaccination
10:12 qui va démarrer sous l'impulsion justement du président de la République,
10:15 qui va démarrer en septembre ou en octobre, pour les classes de cinquième.
10:19 - Il faut le faire avant l'activité sexuelle, c'est ça ?
10:23 - C'est l'idéal, ou alors dans l'année qui suit.
10:25 Mais en effet, c'est justement pour prévenir d'un virus qu'on appelle le papillomavirus,
10:31 qu'on connaît bien, et qui est responsable de trois ou quatre types de cancers aujourd'hui.
10:35 - Et garçons et filles sont bien concernés ?
10:37 Parce qu'au départ, on a vacciné pendant un moment,
10:39 mais ce n'est pas un vaccin qui a très bien marché,
10:40 il n'a pas été très fait dans la population.
10:42 Mais pourquoi que les petites filles, tout d'un coup, on dit "ah, les petits garçons aussi" ?
10:45 - Alors, le vaccin marche très bien, c'est en fait l'adhésion au vaccin,
10:48 à la vaccination en France, qui n'a pas été bonne,
10:51 et c'est la raison pour laquelle il faut communiquer là-dessus.
10:53 - Non, ce virus peut être transmis de manière sexuelle,
10:56 donc du coup, il n'y a pas de raison qu'on le vaccine que les jeunes filles.
11:00 - Oui, c'est parce que les filles ont le cancer du col,
11:02 mais on vaccine par exemple contre la rubeole les petites filles,
11:04 alors que c'est surtout pour les petits garçons qu'on s'inquiète en fait, on est d'accord.
11:07 - Oui, mais il ne faut pas oublier que ce virus peut être aussi responsable d'autres cancers,
11:10 comme par exemple de la gorge, de l'oropharynx, ou du canal anal,
11:14 donc tout le monde est concerné.
11:16 - Eh bien merci professeur, c'est clair.
11:18 On vous retrouve dans un très court instant sur Europe 1.
11:20 On fait le point aujourd'hui sur les progrès en cancérologie.
11:23 On va voir dans un instant que l'intelligence artificielle
11:25 va pouvoir nous aider elle aussi à mieux combattre les cancers.
11:28 Alors pour en savoir plus, restez avec nous sur Europe 1.
11:31 - Europe 1, bien fait pour vous.
11:34 - Julia Vignali et Mélanie Gomez.
11:37 - On est avec vous jusqu'à midi, bienvenue si vous nous rejoignez sur Europe 1,
11:40 et merci si vous êtes avec nous depuis 11h.
11:42 Focus sur les avancées pour mieux combattre le cancer ce matin.
11:46 Et celui qui nous éclaire sur tout ça, c'est vous professeur Jean-Philippe Spano.
11:49 Je rappelle que vous êtes chef de service oncologie à la Pitié-Selpêtrière.
11:53 Alors on va voir à présent que l'intelligence artificielle
11:56 peut aider à mieux traiter les cancers.
11:58 Alors là, il ne s'agit pas, je le disais tout à l'heure,
12:00 de chat GPT dont on parle beaucoup ces derniers temps.
12:02 De quoi on parle quand on dit "intelligence artificielle en médecine"?
12:06 - En fait, l'intelligence artificielle, c'est l'utilisation d'une machine,
12:10 alors ça peut être un ordinateur, comme ça peut être un robot,
12:12 qui permet d'analyser peu rapidement que l'homme des données.
12:16 Donc de raisonner, de planifier,
12:19 et donc de produire peut-être aussi des algorithmes plus rapidement que l'homme.
12:23 - D'ailleurs, vous avez, je crois, l'histoire d'un patient atteint d'un cancer du rein
12:26 qui a pu être traité à temps grâce à l'intelligence artificielle, c'est ça?
12:30 - Alors ça, c'est une expérience qui a été rapportée par Sarah Watson de l'Institut Curie.
12:34 Alors, je tiens quand même à préciser que lorsqu'on fait un diagnostic de cancer,
12:39 l'anatomopathologiste, c'est-à-dire la personne qui va examiner la biopsie,
12:43 les lames, jouent un rôle essentiel.
12:46 L'intelligence artificielle n'enlèvera pas quand même le rôle humain
12:49 joué par les professionnels, ça c'est important.
12:51 Et dans ce cas qu'a rapporté Sarah Watson,
12:53 qui est un médecin-chercheur de l'Institut Curie,
12:56 c'est qu'ils avaient un patient dont ils n'arrivaient pas à retrouver l'origine du cancer.
13:00 C'est vrai qu'il y a des cancers pour lesquels on ne sait pas d'où ça vient.
13:02 - On ne sait pas s'il vient du rein, du lave-essie, du foie...
13:04 - Du sein, du foie, du côlon, etc.
13:06 Et alors en fait, ils ont analysé, après la biopsie,
13:09 le prélèvement, et ils l'ont injecté dans un logiciel
13:14 qu'ils ont eux-mêmes créé, qui contient 20 000 données,
13:18 par exemple, issues de différents cas.
13:20 Et en fait, le résultat, c'est que l'ordinateur,
13:23 donc l'intelligence artificielle, leur a dit
13:25 "c'est probablement un cancer du rein avec telle mutation".
13:28 On en revient à ces anomalies.
13:29 - Donc c'est l'ordinateur, l'intelligence artificielle,
13:31 qui a trouvé l'origine de ces fonds-là.
13:33 - Voilà. Et donc du coup, ils ont démarré un traitement,
13:36 dirigé, adapté, bravo, et le patient est toujours en vie.
13:42 Après plusieurs années, ils ont rapporté ça,
13:44 et ils essayent aujourd'hui de développer ce logiciel,
13:47 en tout cas, cette stratégie diagnostique.
13:49 - Vous comprenez bien que c'est en combinaison
13:51 avec les médecins, c'est ça ?
13:52 - Ah oui, non, non, non.
13:53 - Vous n'avez pas peur d'être remplacé ?
13:54 - Non, les médecins avant tout.
13:55 - Vous pensez que vous ne serez pas remplacé un jour, justement ?
13:57 - Non, non.
13:58 - Pourquoi ?
13:59 - Parce que je crois, d'abord, dans une relation
14:01 entre médecin et patient, c'est la relation humaine...
14:03 - Vous avez vraiment envie de votre soigner par un robot, Julien ?
14:05 - Oui, c'est tellement performant, je me dis,
14:08 qu'est-ce qui fait que vous êtes meilleur,
14:10 au-delà de l'humain ?
14:12 - Parce qu'il faut contrôler l'homme,
14:13 une machine, parfois, elle peut être incontrôlable,
14:15 l'homme en arrive encore, en tout cas, à le contrôler,
14:18 mais en fait, ça va plus vite sur des stratégies,
14:21 ça peut faciliter les choses.
14:23 - Les prises de décisions.
14:24 - Les prises de décisions planifiées.
14:25 - Et puis l'homme, il écoute le patient en face,
14:26 et le patient en face, il voit qu'il n'est pas en état, là,
14:28 de recevoir, je ne sais pas, la deuxième dose de chimio,
14:30 on peut dire, on patiente un peu, le robot, il ne pourra pas voir ça, on est d'accord ?
14:33 - Exactement, et puis je veux dire, encore une fois,
14:35 surtout dans le domaine de la cancérologie,
14:37 la relation humaine, l'empatie,
14:39 ce n'est pas l'ordinateur ou le robot
14:41 qui va pouvoir l'exploiter, hein, Bano ?
14:43 - Professeur Spanon, il y a du nouveau aussi,
14:45 en termes d'imagerie, des machines IRM,
14:47 aujourd'hui, sont tellement intelligentes,
14:49 qu'elles peuvent aider le médecin à traiter
14:51 de façon bien plus précise, à quel point ? Expliquez-nous.
14:53 - Alors ça, c'est plutôt dans le domaine de la radiothérapie,
14:55 c'est-à-dire l'utilisation de rayons,
14:57 où maintenant, encore une fois, grâce à l'utilisation
14:59 de machines, l'IRM, l'imagerie
15:01 par résonance magnétique nucléaire,
15:03 va permettre de mieux contourer
15:05 donc la tumeur,
15:07 et d'épargner, je vous ai dit tout à l'heure,
15:09 plus efficace et moins d'effets indésirables.
15:11 Donc, d'épargner les organes autour,
15:13 et donc d'éviter également qu'il y ait des effets
15:15 secondaires, et
15:17 encore une fois, on cible de mieux en mieux.
15:19 - Et puis l'intelligence artificielle
15:21 va parfois au-delà du traitement de la maladie,
15:23 elle peut aider aussi au bien-être du patient
15:25 durant les soins, pour éviter par exemple
15:27 des anesthésies à répétition,
15:29 il y a maintenant des machines capables de traiter
15:31 et en même temps de projeter une musique
15:33 ou un dessin animé pour les enfants, c'est génial ça !
15:35 - Oui, c'est extraordinaire, même quand on fait un examen
15:37 de radiologie,
15:39 c'est vrai que c'est une grande
15:41 avancée, je ne dis pas qu'il faut s'en priver,
15:43 je dis qu'il faut être prudent et savoir
15:45 l'utiliser. - Ce n'est pas
15:47 l'intelligence artificielle qui connaît la playlist préférée du patient
15:49 en plus ? - Non, ni la mienne d'ailleurs !
15:51 - Est-ce que l'intelligence
15:53 artificielle pourra aussi aider à peut-être trouver,
15:55 on en parle beaucoup ces derniers temps, des vaccins
15:57 efficaces contre certains cancers ?
15:59 Il y a d'ailleurs je crois des pistes prometteuses avec
16:01 des vaccins à ARN messagers,
16:03 il a été question de tout ça à Lascaux
16:05 justement, au grand congrès américain de cancérologie,
16:07 notamment contre ce cancer
16:09 qu'on redoute tous évidemment, le cancer du pancréas,
16:11 on sait très bien qu'il est redoutable
16:13 celui-ci et que le pronostic est rarement très bon.
16:15 - Alors, je ne sais pas si c'est l'intelligence
16:17 artificielle, en tout cas,
16:19 cette nouvelle stratégie que vous parliez tout à l'heure,
16:21 est-ce qu'il y aura des
16:23 nouveaux traitements dans le futur ? Je pense que
16:25 l'ARN messager, on en a beaucoup parlé pendant
16:27 la période du Covid bien entendu,
16:29 mais il ne faut pas oublier que le concept de l'ARN messager
16:31 a également été utilisé avant
16:33 en cancérologie, c'est-à-dire qu'on injecte
16:35 de l'ARN qui va permettre
16:37 de produire des protéines qui,
16:39 in fine, justement, vont
16:41 encore une fois stimuler notre système immunitaire
16:43 et c'est notre système immunitaire,
16:45 principe même de la vaccination, qui va combattre
16:47 les cellules cancéreuses. - Et contre le cancer du pancréas,
16:49 il y a des tests sur un vaccin ARN messager
16:51 qui pourrait être... - Il y a des essais, pas que dans le cancer
16:53 du pancréas, mais des essais. Vous l'avez dit,
16:55 le cancer du pancréas reste encore un des cancers
16:57 effectivement de mauvais pronostics
16:59 et donc il nous faut véritablement
17:01 trouver aujourd'hui et encore mieux demain
17:03 la stratégie qui permettra de mieux contrôler cette maladie.
17:05 - Et en dehors des machines et des robots,
17:07 vous vouliez, je crois, aussi parler de l'importance
17:09 de l'activité physique durant les périodes
17:11 de traitement. C'est vraiment prouvé
17:13 que les patients cancéreux qui font du sport
17:15 ont moins d'effets secondaires dû aux traitements ?
17:17 - Oui. Alors tout à l'heure, vous me parliez sur les facteurs
17:19 de risque, il ne faut pas oublier que la sédentarité
17:21 et le manque d'activité physique et sportive
17:23 est un facteur de risque.
17:25 C'est pour ça qu'il faut faire du sport tant qu'on peut.
17:27 Et aujourd'hui, le sport ou l'activité
17:29 physique et sportive est recommandé dans la prise en charge
17:31 des patients, prise en charge globale,
17:33 car en effet, ça diminue les effets
17:35 indésirables des traitements et on a même
17:37 des études, puisque vous me demandiez
17:39 si on a des preuves scientifiques, oui.
17:41 Oui madame, il y a des études qui ont démontré
17:43 que ça pouvait même diminuer le risque de récidive,
17:45 mais ça pourrait augmenter la survie. - Mais on est d'accord,
17:47 parce qu'on imagine tous des patients justement
17:49 sous chénothérapie très affaiblis,
17:51 c'est du sport adapté qu'on leur propose,
17:53 ça leur fait déjà du bien. - Et aujourd'hui,
17:55 il existe en France des éducatrices
17:57 et des éducateurs sportifs
17:59 qui vont proposer des consultations,
18:01 accompagner les patients,
18:03 bien entendu il ne s'agit pas de faire un sport
18:05 effectivement violent ou excessif,
18:07 mais il va les accompagner, rien que
18:09 par exemple des positions, rien que par exemple
18:11 de la respiration, rien que par exemple des élongations,
18:13 rien que par exemple de la marche,
18:15 tout simplement, et c'est un cercle
18:17 vertueux, c'est-à-dire que plus vous en faites,
18:19 et plus vous aurez envie d'en faire, et mieux
18:21 vous allez vous sentir. - Et puis de continuer derrière,
18:23 on évite aussi les récidives, je crois,
18:25 en faisant plus de... - Absolument, le bien-être.
18:27 - C'est quelque chose de global aujourd'hui, la cancérologie.
18:29 Merci beaucoup professeur Spano
18:31 d'avoir répondu à nos questions aujourd'hui,
18:33 merci pour cet entretien plein d'espoir et
18:35 brillant, la cancérologie fait des progrès,
18:37 on a donné un aperçu je pense assez pratique, grâce à vous,
18:39 et surtout pour les patients, merci encore,
18:41 on va passer à la suite du programme.