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Qui coute le plus cher au budget de l'État : les pauvres ou les rentiers? La question peut sembler incongrue. Si par rentier on entend la composante de la population disposant d'importants revenus issus de leur patrimoine, il ne fait pas de doute dans un système fiscal fortement redistributif comme celui de la France, que ces derniers contribuent bien davantage et bénéficient de transferts bien moindres que les plus pauvres. [...]

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00:00 [Générique]
00:09 Qui coûte le plus cher au budget de l'État ? Les pauvres ou les rentiers ?
00:13 La question peut sembler incongrue.
00:15 Si par rentier on entend la composante de la population disposant d'importants revenus issus de leur patrimoine,
00:22 il ne fait pas de doute, dans un système fiscal fortement redistributif comme celui de la France,
00:27 que ces derniers contribuent bien davantage et bénéficient de transferts bien moindres que les plus pauvres.
00:33 Et même si l'on fait abstraction de la contribution inégale aux recettes de l'État de ces deux catégories,
00:39 pour ne se pencher que sur le volet des dépenses, il n'y a pas photo dans le projet de loi de finances 2023.
00:45 D'un côté, près de 5 milliards de dépenses fiscales pour soutenir l'épargne,
00:49 et de l'ordre de 10 milliards en appui de l'investissement immobilier et de la rénovation.
00:54 Et même si l'on tient compte de la réforme de l'IFI et de la flat tax sur les revenus du capital,
00:59 la somme est majorée de moins de 4 milliards.
01:02 Quant au coût de la recapitalisation des banques après 2008, ou de l'état garant du système financier, ils sont quasi nuls.
01:11 Les prêts à long terme ont été remboursés sans perte et les garanties n'ont pratiquement pas été activées.
01:18 De l'autre, plus de 32 milliards destinés aux principaux minima sociaux,
01:23 plus 11 milliards dédiés à la prime d'activité, soit plus de 43 milliards.
01:28 Et si l'on ajoute les prestations chômage, les aides au logement et d'autres petits dispositifs, la facture avoisine alors 135 milliards.
01:37 Le match est beaucoup plus ouvert lorsque l'on s'interroge sur la destination des fonds publics depuis la crise de 2008.
01:44 Depuis cette date, l'endettement public a fait un bond de 47 points de PIB
01:50 pour maintenir à flot l'économie réelle contre les ventes contraires d'une finance en faillite en 2008,
01:55 d'une crise sanitaire paralysante et d'une crise énergétique et géopolitique.
02:00 Ce faisant, l'État a évité la paupérisation du pays tout entier, diluant le coût de ces chocs sur plusieurs générations.
02:08 Mais cette interprétation est trop courte.
02:10 D'où vient ce zèle des gouvernements de tous bords à se convertir en keynésiens de l'extrême ?
02:16 Le font-ils d'abord pour protéger les revenus courants des individus et limiter la pauvreté d'une minorité,
02:23 ou pour protéger nos économies d'un effondrement patrimonial ?
02:28 Les gouvernements vivent en fait sous deux menaces de poids inégales.
02:31 Celui de la dégradation des revenus courants inhérents aux crises, avec des effets conjoncturels et sociaux circonscrits,
02:38 et celui d'un effondrement des prix d'actifs susceptibles d'emporter tout le système dans une déferlante financière incontrôlable,
02:46 risquant de ruiner grands et petits épargnants et de paralyser tout le circuit de financement de l'économie.
02:53 Ne ménageant pas leurs efforts, les gouvernements sont parvenus jusqu'ici à éviter cette grande culbute,
02:59 faisant mieux que maintenir en apesanteur les prix d'actifs.
03:03 Ce sont in fine les plus riches, ceux qui concentrent la richesse, qui sortent gagnants des trois séismes qui ont ébranlé nos économies.
03:11 D'un côté, le gouvernement a fait beaucoup en faveur du capital depuis 15 ans.
03:16 Baisse des cotisations employeurs, de l'IS, des impôts sur la production, flat tax sur les revenus du patrimoine, réforme de l'IFI,
03:25 avec pour priorité de protéger les revenus du capital et du patrimoine des assauts de la conjoncture.
03:32 Sur l'autre versant, celui de la pauvreté, il n'est pas en reste non plus, avec plusieurs mesures phares.
03:38 De la mise en place de la prime d'activité en 2016, maintes fois revalorisée,
03:43 aux boucliers et divers chèques anti-inflation, en passant par la massification du chômage partiel lors de la crise sanitaire.
03:51 Mais deux constats doivent être faits.
03:53 Un, lorsque l'on se centre sur les principaux minima dédiés à la lutte contre la pauvreté, l'augmentation de la charge doit être relativisée.
04:02 Idem d'ailleurs lorsque l'on agrège plus largement toutes les dépenses de l'État ciblées sur les plus pauvres.
04:07 Aides au logement, chômage, survie, exclusion sociale, etc.
04:10 Il n'y a pas de changement de régime palpable et le pic de 2020 ressemble à une embardée temporaire.
04:16 Deux, lorsque l'État cofinance les travailleurs pauvres ou qu'il recourt au chômage partiel,
04:22 il décharge les entreprises de coûts qui leur sont imputables et sanctuarise de fait leurs débouchés et leurs profits.
04:30 Mutualisant les pertes potentielles du système productif, le quoi qu'il en coûte est plus qu'ambivalent.
04:36 Derrière son masque social, il protège le capital et la rente financière.
04:41 Et derrière les 47 points de dette supplémentaire depuis 2007,
04:45 seuls 4,1 sont imputables au déficit des régimes sociaux stricto sensu.
04:50 Le reste relève des baisses d'impôts, notamment sur les entreprises,
04:54 et de l'empilement des dispositifs contracycliques financés à découvert.
04:59 Prenant à sa charge une part croissante du revenu des ménages, l'État a limité la casse sociale,
05:04 mais préservé aussi de la sorte les revenus du capital et la valeur des actifs et in fine les rentiers,
05:11 ces derniers étant exposés à des risques de pertes bien plus considérables que les plus pauvres.
05:16 In fine, depuis 15 ans, l'État dépense sans compter pour protéger les intérêts liés du travail et du capital des pauvres et des riches.
05:25 Dans un capitalisme financiarisé, où si les premiers de cordée décrochent,
05:30 ils embarquent dans leur chute, la société dans son ensemble.
05:35 [Musique]

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