• il y a 2 ans
Vous avez peut-être entendu parler du documentaire « Faut pas pousser ! » ? Nous avons rencontré la mère du projet, Nina Narre. À la suite d'une longue enquête sur l'accouchement à la maternité, la réalisatrice nous confie les limites de la médicalisation, de la péridurale, aux déclenchements, à l'accouchement physiologique, entrecoupé par le récit de sa propre expérience.

Retrouvez son documentaire, une enquête sur l’industrialisation de la naissance et une invitation au voyage de l’enfantement, ici :
https://www.ninanarre.com/

Crédits :
Léa Leyris : montage
Journaliste : Katrin Acou-Bouaziz

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Transcription
00:00 S'il y a 20% de déclenchement et 20% de césarienne,
00:03 c'est pas parce que les femmes peuvent pas faire sans la médicalisation,
00:06 c'est parce que la médicalisation induit des complications
00:09 qu'elle résout pour en induire d'autres, pour en résoudre d'autres.
00:12 C'est un cercle infernal.
00:13 Bonjour, je m'appelle Sylvie, alias Ninanar,
00:18 la réalisatrice du documentaire "Faut pas pousser".
00:20 J'ai assez peu partagé cette envie-là avec mon entourage.
00:24 J'avais quand même dit à mon père,
00:26 et je me souviens qu'un jour, quelques temps après
00:28 que je l'ai informé de cette envie, il m'avait dit
00:30 "J'espère que t'as renoncé à cette idée saugrenue d'accoucher à la maison."
00:34 J'ai dit que non, mais que de toute façon,
00:36 je ne demanderais pas l'avis de qui que ce soit.
00:38 On était en phase avec mon chéri.
00:40 Si je le sentais, c'était là que ça se passerait.
00:42 Par contre, bien sûr, on était inscrits dans une maternité.
00:45 Je n'ai jamais nié le fait qu'il pouvait éventuellement y avoir besoin
00:49 d'une prise en charge médicale pour un accouchement.
00:51 Ça m'a toujours semblé quelque chose de très naturel
00:54 et j'avais confiance, c'est une chance, confiance en mon corps
00:58 et confiance en mon bébé.
00:59 Je n'avais pas du tout peur que ça se passe mal.
01:01 Par contre, sur la dernière ligne droite,
01:04 j'ai eu peur que mon bébé se sente coincé.
01:07 Au moment où j'ai senti la tête s'engager,
01:08 je me suis dit "Bon sang, combien de temps il peut rester coincé là ?"
01:10 J'ai poussé très fort, vraiment très fort,
01:13 un réflexe d'éjection provoqué par cette adrénaline de dernière minute.
01:17 Je me suis déchiré le périnée, donc j'ai dû aller me faire recoudre.
01:20 Pour le deuxième, du coup, j'avais peur de déchirer à nouveau,
01:25 mais pas du tout peur pour mon bébé, à aucun moment, pour notre bébé.
01:28 Et pour le troisième, dont la naissance a commencé à 2h du matin,
01:31 donc la nuit avait été courte, et la fatigue aidant,
01:34 fait que j'ai eu peur d'avoir mal et je n'ai pas été déçue, bien sûr.
01:38 J'avais surtout peur de la douleur,
01:39 mais jamais eu peur que la situation m'échappe,
01:44 que les choses partent en cacahuète.
01:45 Je raconte tout ça dans le documentaire,
01:47 toutes ces petites choses qui font que c'est difficile
01:49 de se débrancher le cerveau, parce que c'est un veupieux.
01:52 Moi, je n'ai pas réussi à me débrancher le cerveau.
01:54 Le plus dur pour accoucher à la maison,
01:55 je crois que c'est surtout de trouver quelqu'un pour nous accompagner,
01:57 parce qu'après, sinon, il n'y a rien de particulier.
02:00 Il n'y a pas besoin...
02:01 Je vois passer des listes de matériel interminables.
02:05 A priori, il n'y a besoin de rien pour mettre un bébé au monde.
02:07 S'il n'y a pas de pathologie, c'est-à-dire dans 95 % des cas,
02:09 d'être en sécurité, d'être dans la chaleur,
02:13 dans l'intimité, d'être en confiance,
02:16 et c'est tout ce dont on a besoin.
02:18 Donc, je suis la maman de trois garçons et d'un film
02:21 qui s'intitule "Faut pas pousser",
02:22 et que je porte en moi depuis ma première grossesse,
02:24 c'est-à-dire en 2010,
02:26 l'envie de partager ce sentiment
02:29 à ancrer profondément en moi
02:30 qu'on n'avait besoin de rien pour mettre son bébé au monde
02:32 et que ce n'était pas une formalité,
02:34 mais que c'était un rite initiatique.
02:36 Enfin, moi, je n'ai jamais eu envie de passer à côté de ça.
02:39 Je ne voulais pas de péridurale, je ne voulais pas qu'on me parle,
02:42 je ne voulais pas qu'on me dise qu'en pousser,
02:43 je disais, j'ai tout ce qu'il faut en moi,
02:46 et si je ne laisse pas mon corps s'exprimer
02:48 et mon bébé faire ce qu'il sait faire,
02:50 je vais le regretter, en fait.
02:52 Ce n'est pas le même voyage, et on n'en retire pas la même chose.
02:54 Et pour pouvoir inviter les femmes à faire ce voyage-là,
02:58 il fallait avant tout désamorcer les peurs
03:00 et montrer que la prise en charge médicale,
03:01 ce n'est pas la panacée.
03:03 Donc, il y a un gros travail d'enquête
03:05 sur la prise en charge médicale, sur les protocoles hospitaliers,
03:08 notamment sur les déclenchements en veux-tu en voilà,
03:10 sur les effets secondaires de la péridurale,
03:12 qui est une très bonne chose.
03:13 Bien sûr, c'est une belle invention.
03:15 C'est merveilleux pour beaucoup de femmes,
03:17 et ça se passe très bien sous péridurale aussi.
03:19 Mais ce n'est pas neutre sur le travail,
03:21 le fait de l'apprendre très tôt, etc.
03:22 Donc, de montrer tout ça,
03:23 de montrer que s'il y a 20 % de déclenchements
03:26 et 20 % de césariennes,
03:28 ce n'est pas parce que les femmes ne peuvent pas faire
03:29 sans la médicalisation,
03:31 c'est parce que la médicalisation induit des complications
03:34 qu'elle résout pour en induire d'autres,
03:36 pour en résoudre d'autres.
03:37 C'est un cercle infernal.
03:38 Donc, ce documentaire, il est terminé depuis presque six mois.
03:41 Et donc, là, il y a des projections
03:43 qui s'organisent dans des maternités,
03:45 par des professionnels, des médecins,
03:47 pas seulement des sages-femmes.
03:48 J'avais envie aussi de désamorcer cette légende
03:51 qui dit que toutes les femmes mourraient en couche
03:52 et se vidaient de leur sang
03:54 avant le transfert de la naissance à l'hôpital.
03:55 Ce n'est pas du tout vrai.
03:56 La formation des sages-femmes est évidemment un élément clé.
03:59 Les sages-femmes ne sont pas du tout formées
04:00 à la physiologie, malheureusement.
04:02 Donc, elles ne savent pas, pour la plupart,
04:04 accompagner des femmes sans péridurale.
04:05 La position d'accouchement est une aberration
04:07 des cubitus dorsal.
04:08 Évidemment, quand on accouche par soi-même,
04:10 on est plutôt à quatre pattes ou debout,
04:11 mais certainement pas allongé sur le dos.
04:13 Ce qui m'a choqué le plus, c'est le protocole.
04:16 On voit bien que ce qui est fait en maternité,
04:18 c'est fait pour assurer le risque médico-légal,
04:20 l'organisation du service,
04:22 compenser le manque de personnel, le manque de moyens.
04:24 Et puis, dans certaines structures,
04:27 les actes sont facturés à l'acte,
04:29 donc plus on en fait, plus ça rapporte.
04:31 Je pense que le secret pour les parents,
04:33 c'est de s'informer un maximum
04:35 et de prendre conscience que ce n'est pas une formalité
04:37 et qu'il est important de préparer,
04:40 de réfléchir à la manière
04:41 dont on veut vivre la naissance de son enfant.
04:43 Tout comme on passe deux ans à préparer son mariage
04:45 on peut quand même passer un petit peu de temps
04:47 pour préparer la naissance de ses enfants.
04:49 Ça me paraît important.
04:50 ...

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