Le témoignage de Aurore, amazone, compte Insta, cancer du sein
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00:00 Mon buste aérodynamique, vous voyez, je ne mets jamais de prothèses dans la rue, jamais, je sors toujours comme ça.
00:05 Mon buste aérodynamique, comme je dis, je l'aime profondément.
00:09 Il me rappelle tous les jours que je suis en vie.
00:12 Bonjour, je m'appelle Aurore.
00:14 J'ai eu un cancer du sein en 2017.
00:17 Alors, j'ai découvert que j'avais un cancer du sein sous la douche,
00:24 en prenant la douche, en faisant l'autopalpation.
00:26 J'ai senti une boule sur mon sein gauche.
00:28 Et au départ, je pensais que c'était un kystor hormonal.
00:31 J'ai découvert mon cancer par autopalpation
00:33 parce que je n'avais pas l'âge de rentrer dans le dépistage par mammographie,
00:37 comme les femmes à partir de 50 ans.
00:39 Deux mois après, j'ai fait une mammographie.
00:41 Et l'échographie qui a suivi la mammographie,
00:44 le radiologue m'a annoncé sans ménagement et très violemment,
00:49 avec un air déshumanisé, que j'avais un cancer.
00:51 Ces mois exacts ont été "Vous avez un cancer, ça c'est opération de chimiothérapie".
00:56 Après l'annonce violente, je suis dans un état de choc.
00:59 Je suis complètement sidérée.
01:01 Je prends ma voiture et c'est pas moi qui conduis.
01:03 La voiture m'amène seule, je suis mon généraliste.
01:05 Dans ma tête, sur 8 km, il n'y a qu'une chose qui résonne,
01:09 c'est "Tu as un cancer et c'est de ta faute".
01:12 Parce qu'en plus, le radiologue m'avait dit,
01:14 en deuxième partie après l'annonce, il me demande depuis quand j'ai ça.
01:18 Et quand je lui dis "Depuis deux mois", il me répond
01:21 "Alors c'est bien fait pour vous".
01:23 Donc après, je consulte une semaine après mon oncologue chirurgienne.
01:28 On fait la biopsie qui donne un nom au cancer.
01:31 Carcinome canalère infiltrant, 100 % hormone dépendant.
01:35 On décide de la chirurgie, on décide d'une mastectomie gauche,
01:39 puisque c'était sur le sein gauche,
01:40 on m'opère et à partir de là,
01:43 hormone thérapie pour une durée de 5 ans.
01:45 Aujourd'hui, j'ai été obligée d'arrêter l'hormone thérapie avant l'heure
01:50 parce que celle-ci m'attaque la vue.
01:53 C'est pas chez tout le monde, c'est un des effets secondaires
01:55 qui arrive très rarement et qui est arrivé chez moi.
01:58 Mais moi, j'encouragerais plutôt les femmes à prendre l'hormone thérapie
02:02 parce que les effets secondaires, d'accord, il y en a beaucoup.
02:05 Oui, on est fatigué, on a des poussées de chaleur,
02:08 on a mal aux os, il peut y avoir X effets secondaires.
02:11 Mais par rapport à ce que ça nous protège,
02:14 ça vaut le coup de le prendre.
02:15 L'hormone thérapie, elle prévient quand même beaucoup de risques de récidive
02:20 et c'est un des traitements très importants aujourd'hui.
02:23 Comment avez-vous décidé de créer un compte Instagram ?
02:27 Il fallait que j'en fasse...
02:29 qu'il en ressorte un truc positif, voilà.
02:32 Donc j'ai décidé de créer le compte Instagram
02:34 pour briser le tabou sur les amazones,
02:36 parce qu'on parle beaucoup du cancer du sein.
02:39 On est en 2022, le cancer du sein, on en parle énormément,
02:42 les amazones, on n'en parle jamais.
02:44 Elles sont cachées, les femmes sont très mal dans leur corps
02:48 dès qu'elles ont une cicatrice
02:50 parce que la société aujourd'hui nous dit
02:53 que pour être une femme, il faut absolument avoir deux seins.
02:56 Et je ne suis pas du tout d'accord avec ça.
02:59 Après, je ne suis pas une anti-reconstruction.
03:01 Je comprends et je respecte tout à fait les femmes qui la font.
03:05 Moi, je n'en veux pas.
03:06 Et je crois qu'on a le droit aussi d'être une femme, d'être jolie
03:10 et de se sentir bien dans son corps quand on est un sein ou qu'on en est zéro.
03:14 On a subi quelque chose de grave.
03:17 Pourquoi on ne se montrait pas sans seins ?
03:20 Je veux dire, la féminité, ce n'est pas que des seins pour moi.
03:23 La féminité, c'est la douceur, la bienveillance,
03:27 la gentillesse, un sourire, un regard.
03:30 C'est une globalité, c'est une gestuelle, c'est un tout.
03:34 Mais ça ne peut pas être que des seins.
03:36 On dirait que la féminité, c'est des seins.
03:38 C'est hyper réducteur de ce qu'est une femme aujourd'hui.
03:47 Énormément de femmes, de toutes âges jeunes,
03:49 que ce soit des jeunes ou des moins jeunes,
03:51 parce que le cancer du sein, malheureusement, il touche toutes les femmes.
03:54 Et il y a même des femmes qui ne sont pas du tout touchées par le cancer du sein,
03:59 mais qui ont des complexes XY
04:03 et qui viennent me dire "merci",
04:05 parce que ce que tu as de toi et ce que tu montres,
04:08 finalement, nous, à côté, on n'a rien
04:10 et tu nous aides à avancer dans notre vie.
04:12 Bizarrement, je touche même des hommes
04:15 qui me disent, parce que des hommes sont touchés par le cancer du sein, 1%,
04:18 mais ce n'est pas ceux-là qui viennent me voir,
04:21 c'est des hommes qui me disent "grâce à toi, on a compris,
04:24 j'ai compris ce qu'a vécu ma mère, ce qu'a vécu ma grand-mère,
04:28 ou même ce que vit ma soeur, ma femme,
04:31 et tu m'aides à avancer dans cette vie
04:35 en tant qu'accompagnante d'une femme touchée par un cancer".
04:40 Je l'ai fait aussi, au-delà de vouloir briser l'état rouge,
04:44 je l'ai fait pour rassurer et pour mettre les femmes en confiance.
04:48 Parce que quand j'ai eu ma mastectomie,
04:50 quelques jours avant, j'ai cherché sur Internet "mastectomie"
04:54 et je ne voyais que des morceaux de cicatrices, comme ça.
04:57 Je ne voyais pas de visage, je ne voyais pas de corps.
05:01 Et je me suis dit que ce n'est pas possible,
05:04 on est des humains et il faut se montrer.
05:07 On n'a pas à avoir honte d'avoir eu un cancer du sein,
05:10 on n'a pas à avoir honte d'avoir eu une mastectomie.
05:13 On ne l'a pas choisie, on ne l'a pas faite exprès,
05:15 ça nous est tombé dessus,
05:16 en faisant quelque chose de bien pour aider.
05:19 Donc mon compte Instagram existe pour ça,
05:22 il existe pour que la société s'ouvre sur ça,
05:25 pour que les regards changent, que les lignes bougent,
05:30 pour sensibiliser au dépistage aussi avec l'autopalpation.
05:37 Il existe pour tellement de raisons, mon compte Instagram.
05:42 Comment est-ce que vous vous diriez à votre soeur?
05:46 Je lui dirais déjà de faire confiance à l'équipe médicale qui la soigne
05:50 et de se faire confiance en elle-même,
05:53 de faire confiance en son corps.
05:54 Une deuxième chose, je lui dirais qu'elle entre dans une chose qu'elle ne connaît pas,
06:00 donc de ne pas se projeter, de ne pas se dire
06:03 "Ah, je vais perdre mes cheveux, je vais avoir la chignou,
06:06 je vais être brûlée par la radiothérapie",
06:08 tout ça on ne sait pas.
06:10 Donc c'est une étape après l'autre,
06:12 c'est un jour après l'autre, on avance.
06:15 Aujourd'hui, c'est la biopsie, demain c'est la chirurgie,
06:19 après demain, on verra les traitements,
06:21 et petit à petit, on avance.
06:23 Ne pas avoir peur des effets secondaires du traitement,
06:27 quels que soient les traitements,
06:28 même si c'est dur,
06:30 et c'est difficile, et c'est parfois même très compliqué,
06:34 mais on finit toujours par se relever.
06:37 [musique]