Laurent Richier, invité de l'Heure des Pros sur CNEWS est revenu sur le harcèlement qu'il a subi à l'école.
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00:00 vous êtes devenu boucher. Vous
00:01 écrivez d'ailleurs, revenons à ma
00:02 jeunesse, "j'aurais tellement aimé
00:03 avoir un métier qui me passionne,
00:04 mais jamais je n'aurais pensé une
00:06 minute travailler comme boucher.
00:07 Mais il faut dire que très jeune,
00:08 je n'aimais pas beaucoup l'école
00:10 du fait des moqueries permanentes
00:11 que j'ai subies de la part des
00:13 jeunes qui m'entouraient".
00:15 Et c'est cet passage-là,
00:17 au-delà même du livre sur la
00:18 viande qui m'a intéressé, c'est
00:20 la difficulté dans la scolarité
00:22 lorsqu'on n'est peut-être pas le
00:23 plus doué pour les études,
00:25 ce qui n'a rien à voir évidemment
00:27 avec l'intelligence et qu'on subit
00:28 de plein fouet les moqueries
00:30 des autres. Et vous dites "c'est
00:31 trop formidable, j'aurais tellement
00:33 aimé avoir un métier qui me
00:34 passionne".
00:34 Oui, c'est vrai.
00:35 C'est vrai que j'aurais tellement...
00:36 C'est vrai que j'ai subi
00:38 quand j'étais gosse la
00:39 grossophobie.
00:40 D'ailleurs, quand j'en parle, j'ai
00:42 toujours ce traumatisme
00:43 qui est violent.
00:45 Je ne voulais même plus aller à
00:47 l'école parce que je n'en pouvais
00:47 plus.
00:48 L'éducation nationale a été
00:50 lamentable.
00:51 À l'époque, j'avais des profs
00:53 qui me faisaient aller au
00:55 tableau en disant "gros,
00:57 viens au tableau".
00:58 C'est allé jusque là.
00:59 Je ne pouvais pas avoir de copines.
01:04 Je ne pouvais pas avoir parce que
01:05 j'étais...
01:06 C'est un vrai racisme.
01:07 J'étais exclu.
01:10 J'étais...
01:11 Je puais.
01:12 Voilà, comme on me disait, le gros
01:14 il pue.
01:15 Et en fait, je ne pouvais
01:17 plus supporter d'aller à l'école.
01:19 Je ne pouvais plus sentir le goût
01:20 d'éclat de la classe.
01:21 Je ne pouvais plus regarder
01:22 mes pseudo copains parce que
01:25 pour avoir des copains, c'est
01:26 dur. C'est super dur.
01:28 Et ce qui se passe aujourd'hui dans
01:29 l'éducation nationale, c'est...
01:30 Ça se passait dans les années 80.
01:33 Malheureusement, dans les années 70
01:34 et j'ai eu une conseillère
01:36 d'orientation qui...
01:37 qui alors là était...
01:39 Mais d'une...
01:40 Mais désastreuse, qui a dit à mes
01:42 parents "de toute façon, il ne peut
01:44 faire qu'un métier manuel.
01:45 Il faut le diriger vers la
01:48 menuiserie, encore je ne sais pas,
01:49 ou la boucherie, la boulangerie".
01:51 Qui sont des beaux métiers.
01:52 Comment ?
01:53 Qui sont des beaux métiers.
01:54 Qui sont des beaux métiers, certes.
01:55 Encore faut-il avoir envie de le
01:57 faire.
01:58 Voilà.
01:58 Mais c'est un métier passion,
02:00 la menuiserie, forcément.
02:01 Mais par exemple, aujourd'hui, vous
02:03 auriez 15 ans.
02:04 Qu'est-ce que vous auriez aimé
02:05 faire ?
02:06 Franchement, j'aurais eu...
02:07 J'aurais 15 ans aujourd'hui.
02:08 Moi, j'aime l'être humain.
02:09 J'aime l'être humain. J'aime
02:11 parler aux gens. J'aime donner de
02:12 l'amour, de...
02:13 J'aime donner des étoiles et
02:15 surtout dans le monde où on vit
02:16 actuellement.
02:17 Ce serait parler.
02:18 Parler...
02:20 Comme vous, comme...
02:22 Comme Charlotte, comme...
02:23 Vous avez dit que vous auriez pu
02:24 faire un métier dans les médias.
02:26 Voilà. Mais le problème...
02:27 Idéalement, vous auriez aimé animer,
02:29 pourquoi pas, interroger des gens,
02:31 faire témoigner, en fait, ce
02:33 beau métier que nous aimons
02:35 tant avec Dominique et tant d'autres,
02:37 de témoigner de la réalité, de
02:39 rapporter.
02:39 Voilà. Et c'est vrai que j'ai
02:41 été 25 ans bouché, mais j'ai eu
02:43 des interruptions de carrière
02:44 parce que c'est un métier qui ne me
02:46 plaisait pas, parce que j'aurais
02:47 voulu faire autre chose.
02:48 Mais j'étais tellement dévalorisé
02:50 que je me suis dit...
02:51 Et aujourd'hui ?
02:53 Je vaux rien.
02:54 Je suis une famille ouvrière.
02:55 Ma mère n'avait pas...
02:56 Mes parents n'avaient pas le sous.
02:57 Mon père était en invalidité.
02:58 Ma mère faisait des ménages chez
03:00 des personnes riches.
03:01 Moi, ce que je voulais, c'était
03:02 leur offrir un château, comme tous
03:04 les gosses.
03:05 Je voulais avoir un bon métier.
03:06 Mais...
03:07 C'était...
03:09 J'étais trop dévalorisé.
03:10 Et aujourd'hui encore, ma vie est
03:12 un échec, un véritable échec.
03:14 Parce que je me dis...
03:15 Moi, j'aurais quand même pu faire
03:17 autre chose.
03:18 Et j'en veux à l'éducation
03:19 nationale.
03:19 Oui, mais vous avez...
03:20 Je veux dire, rien n'est fini.
03:21 ♪ ♪ ♪
03:24 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]