• l’année dernière
Ils sont tous les deux les héros de « Omar la Fraise », le premier film de Elias Belkeddar présenté en séance de minuit. Une histoire de voyous à Alger savoureuse et décapante. Rencontre.Pendant le tournage, Reda Kateb et Benoît Magimel ont appris à se connaître. Une belle découverte et on peut aisément parler d’amitié entre les deux hommes.Cette complicité évidente transperce l’écran. Dans le rôle de deux bandits à Alger, l’un est interdit de séjour en France sous peine de purger 20 ans de prison, l’autre ne le quitte pas et serait prêt à le suivre jusqu’au bout du monde, les deux acteurs rayonnent. Drôle, percutante, efficace, cette comédie va bien au-delà de simples numéros d’acteurs.Pour Reda Kateb qui a des origines algériennes – son père était le directeur du théâtre d’Alger – retourner là-bas l’a apaisé, nous a-t-il confié. Benoît Magimel a eu un coup de foudre pour ce pays et pour sa jeunesse qui l’a accueilli les bras ouverts : « Je me suis senti bien tout de suite ». Les deux hommes nous ont aussi parlé de leur première fois à Cannes. Pour Reda Kateb, il s’agissait d’accompagner l’équipe de « Un Prophète » de Jacques Audiard. Chaque fois qu’il met les pieds au sein du Théâtre Lumière, il ressent les mêmes sensations intenses : « L’émotion restera gravée pour toujours ».Pour Benoît Magimel, il a pris la mesure du festival, en 2001, en recevant son prix d’interprétation pour « La Pianiste » de Michael Haneke : « Un moment fantastique ». « Omar La Fraise » de Elias Bel ...

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Transcription
00:00 Voilà, c'est vraiment... Il y a une énergie ici qu'on ne trouve nulle part.
00:04 Pour moi, en tout cas, il y a un sacré duo de cinéma
00:14 que j'ai pu vivre avec Bono.
00:16 Et d'ailleurs, c'est un bonheur de le retrouver ici à Cannes,
00:18 faire ensemble la promo du film.
00:20 J'ai l'impression qu'on s'est laissés hier.
00:22 C'est basé sur la liberté, sur un plaisir de l'enfance,
00:27 de jouer, de s'amuser.
00:30 Et en même temps, d'être capable d'exprimer une violence forte
00:34 et sèche, et dure.
00:37 C'est des personnages qui s'expriment de cette manière-là.
00:39 Et les choses qu'ils font marrer peuvent être aussi liées
00:42 à une certaine violence qu'ils ne font pas marrer les autres.
00:45 Donc c'est un décalage aussi.
00:47 Voilà, je trouve ça intéressant.
00:48 Oui, c'est-à-dire que moi, j'attendais depuis longtemps
00:53 un projet qui me ferait tourner en Algérie,
00:55 avec tout le partage aussi qu'il y a avec l'équipe.
00:59 Le fait de ne pas être de passage soit dans ma famille,
01:02 soit en tant que touriste, mais de faire quelque chose avec les gens.
01:06 Finalement, d'y pratiquer mon métier,
01:08 c'était quelque chose que je désirais et que j'attendais.
01:11 Et donc, quand j'ai lu le scénario, je ne savais pas encore
01:14 tout de suite que c'était avec Benoît que j'allais jouer.
01:16 Je me suis dit, c'est celui-là, c'est ce film-là.
01:20 Et en effet, alors,
01:22 j'ai un côté un peu comme Omar, c'est-à-dire qu'Omar,
01:26 il ne veut pas retourner vers ses racines et même il s'en défend.
01:30 Et en tant qu'acteur d'origine algérienne,
01:33 on vous ramène sans cesse à cette chose-là.
01:35 On vous pousse à vous prononcer sur des sujets de la diversité,
01:41 sur des choses qu'on ne pose pas aux acteurs
01:43 qui n'ont pas d'origine d'immigrés.
01:46 Tu ne te sentais pas concerné,
01:47 c'est des questions qui ne te sont pas concernées sur l'instant.
01:49 Oui, en tout cas, je trouve ça dommage de se limiter à un moment.
01:53 Ça veut dire que finalement, on est quoi au lieu d'être
01:56 un acteur tout court, on est finalement le représentant d'une certaine minorité.
02:01 Donc à nouveau, c'est une nouvelle niche.
02:03 Moi, je trouve que la liberté est beaucoup plus intéressante.
02:06 Mais tout comme Omar, je m'en défendais un peu.
02:09 Et cette chose est venue à moi beaucoup à travers le tournage.
02:14 Et quand je suis rentré, j'ai senti que c'était un tournage très physique,
02:18 un grand dépassement, très électrique par moments, très drôle,
02:22 très agréable à d'autres et tout.
02:24 Et quand je suis rentré, je me suis senti un peu apaisé de l'intérieur.
02:27 J'étais déjà venu il y a 15 ans plus tôt pour présenter un film sur la guerre d'Algérie.
02:34 Et tout était beaucoup plus tendu.
02:38 Tu venais de faire le documentaire ?
02:40 Je venais de faire une voix sur un documentaire de Storal,
02:44 Benjamin Storal et de Georges Marc Benayoum,
02:47 sur toute l'histoire de l'Algérie politique depuis 2014.
02:51 On remonte, on raconte.
02:54 Donc déjà, il y a ça aussi.
02:56 Mais en même temps, la jeunesse, je crois plus qu'elle baigne là-dedans,
03:00 parce que c'est un pays extrêmement jeune.
03:02 Il y a un souffle de vie extrêmement fort.
03:05 L'Algérie, malgré ses tragédies, malgré tout ce que ce pays a pu vivre.
03:10 Et comme on dit dans le film,
03:11 si vous décidez, quand on est mal, on n'a aucune chance de pouvoir s'en sortir.
03:15 Voilà, si vous n'êtes pas bien né, voilà, c'est mort.
03:21 C'est difficile de grandir dans la société.
03:24 Il n'y a pas de middle class.
03:27 Donc, à la fois, on se laisse prendre par leur sourire,
03:32 leur force de vie, parce que malgré ça, ils ont une fierté.
03:36 Ils aiment leur pays et ils sourient.
03:38 Et parfois, on peut avoir de la gêne quand on voit certaines choses
03:44 quand on a tourné dans une cité comme celle qu'on a tourné.
03:47 C'est violent, c'est fort.
03:49 Et ils ont quand même un garde le sourire, quoi qu'il arrive.
03:52 Et puis, l'accueil n'est pas touristique.
03:54 Il n'y a pas de...
03:55 Les gens ne sourient pas pour vendre quelque chose derrière.
03:57 Oui, ça ne fonctionne pas comme...
04:00 C'est vraiment...
04:01 C'est bien parce que j'avais tellement d'amis d'origine algérienne en France
04:04 que ça permet de comprendre mieux aussi les choses.
04:07 Voilà, mais c'est un pays que j'aime.
04:10 Puis j'ai eu un accueil extraordinaire.
04:11 L'accueil était dingue.
04:13 J'étais accueilli vraiment, les bras ouverts.
04:15 Je me suis senti chez moi très, très vite.
04:18 Moi, c'est la toute première fois, en fait.
04:19 C'est irremplaçable, une première fois.
04:22 Donc, c'est la projection d'un prophète en 2009
04:27 et la...
04:30 découvrir le film dans cette salle,
04:33 voir tout d'un coup la salle.
04:35 Je trouve que jamais je banaliserai ça, quoi.
04:38 En fait, il y a quelque chose de...
04:40 Mais à chaque fois que je reviens, je repense à cette première fois.
04:43 Le fait aussi de l'avoir vécu avec des amis,
04:44 avec des gens pour qui c'était aussi le premier film,
04:48 c'est quelque chose qui restera grave et toujours.
04:51 Moi, c'était quand j'ai reçu le prix d'interprétation.
04:54 1982.
04:56 Ah, c'est ça, ouais, 80, ouais.
04:58 Pour la pianiste, ça a été un moment pareil.
05:03 C'est un moment aussi très fort, en fait,
05:05 parce que même si on essaie de s'en défaire,
05:07 même traverser le tapis rouge,
05:08 j'ai 300... Je voulais un LIS, 300 appareils photos
05:10 qui me sont faits,
05:11 mais je n'ai pas eu le temps de faire ça.
05:13 Et puis, 300 appareils photos qui m'ont mis le travail.
05:16 Voilà, c'est vraiment...
05:19 Il y a une énergie ici qu'on ne trouve nulle part.
05:22 Mais ce prix, ça a été fantastique.
05:24 [Musique]

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