Manifestations d'ultradroite interdites: "Le ministre a donné un ordre global à des situations qui, en droit, doivent s'apprécier au cas d'espèce" pour Me Carbon de Sèze

  • l’année dernière
Cinq actions d'ultradroite, dont quatre rassemblements prévus ce week-end, ont été interdites par la préfecture de police de Paris. Une décision qui suit les directives du gouvernement consécutives à la manifestation d'ultradroite du 9-mai à Paris qui avait provoqué une polémique.

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00:00 Vous avez entendu les déclarations du préfet de police Laurent Munez
00:02 cette semaine lorsqu'il a expliqué pourquoi il n'avait pas annulé
00:07 la manifestation du 9 mai.
00:08 Il disait "il n'y avait pas de troubles à l'ordre public caractérisés,
00:12 jusqu'à présent ces rassemblements se sont bien passés,
00:14 je n'avais pas de raison de le faire".
00:16 Est-ce qu'il est en train de faire aujourd'hui tout ce qu'il ne voulait pas faire ?
00:19 - Exactement, oui, et sur ordre de son ministre, évidemment.
00:22 C'est pour ça, lui il avait pris l'initiative pour le 9 mai,
00:26 il y a un ordre du ministre face aux mémoires que ça a suscité dans l'opinion publique,
00:31 et c'est précisément là que le bas blesse juridiquement,
00:34 c'est-à-dire que le ministre a donné un ordre global à des situations
00:38 qui en droit doivent s'apprécier au cas d'espèce.
00:41 - Parce qu'en l'occurrence, l'Action française,
00:43 qui est donc à l'origine de l'un des rassemblements,
00:45 a décidé de saisir la justice pour faire annuler cet arrêté.
00:51 - Par un référé Liberté, exactement le même mécanisme
00:55 qu'avaient utilisé les syndicalistes pour se faire autoriser, in fine,
00:57 à distribuer leurs tracts aux stades de France.
01:00 - Donc ça veut dire que potentiellement, dans les prochaines heures,
01:02 d'ici demain après-midi, l'Action française pourrait obtenir gain de cause ?
01:07 - Et le droit de manifester ?
01:10 Alors, sur quoi va se fonder le juge administratif, si vous voulez ?
01:14 D'abord, il y a quelque chose qui est très symptomatique,
01:17 c'est que, figurez-vous que la fête de Jeanne d'Arc est une fête nationale,
01:21 depuis 1920.
01:23 C'est une fête nationale, ça a été voté à l'unanimité au Sénat et à l'Assemblée nationale.
01:28 Donc dire que célébrer Jeanne d'Arc est un phénomène anti-républicain
01:34 va poser un problème quand le juge administratif va se pencher
01:37 sur ce qui est célébré dans ces manifestations-là.
01:40 La surprise, c'est pas que ça soit l'ultra-droite et l'extrême-droite,
01:44 c'est qu'il n'y ait que ces tendances-là qui viennent rendre un hommage à Jeanne d'Arc.
01:48 Ça peut être ça, ce que va dire le juge administratif.
01:51 La deuxième chose, c'est que chaque préfet doit justifier, au cas par cas,
01:55 en quoi la mesure d'interdiction du droit de manifester,
01:58 parce qu'on oublie le grand paradigme libéral,
02:00 c'est que la liberté, le principe et l'interdiction d'exception,
02:03 est oubliée de justifier en quoi sa mesure est nécessaire, adéquate et proportionnée.
02:10 Or, ça va renvoyer à quoi ?
02:12 À dire qu'il y a un risque de trouble à l'ordre public.
02:15 Mais de qui proviendrait ce trouble ?
02:18 De l'extrême-droite ou de l'ultra-droite, ça ne veut rien dire en droit.
02:21 - Et là, ce que fait valoir plutôt le préfet de police,
02:25 c'est qu'il y aurait un risque de trouble à l'ordre public
02:28 parce qu'il y aurait des contre-manifestations potentiellement organisées par l'ultra-gauche.
02:33 - Mais ça, ça ne veut rien dire.
02:34 Si vous voulez dire que parce que des gens vont causer un trouble à raison d'une manifestation,
02:40 ça ne veut rien dire en droit.
02:43 Parce qu'à ce moment-là, il faut interdire aux gens du gouvernement de se déplacer
02:46 parce qu'il y a un risque de casserolade.
02:47 Vous voyez ? Si on suit...
02:49 - C'est à ce titre-là que les spectacles de Dieudonné interdisent Emmanuel Valls.
02:51 - Si on suit la même logique, en droit, ça ne veut rien dire.
02:54 Et ça ne veut rien dire précisément parce que ça n'est pas proportionné ni adéquat.
02:58 Donc vous ne pouvez pas partir en droit, on ne parle pas de l'exception,
03:01 pour savoir si on autorise quelque chose, on parle du principe général.
03:05 Et le principe général, c'est la liberté de manifester.

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