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Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, le 5 mai 2023 sur franceinfo.

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Transcription
00:00 On part d'un diagnostic qui n'est évidemment pas favorable,
00:05 puisque vous savez que les lycées professionnels regroupent un tiers des lycéens,
00:09 plus de 600 000 d'entre eux,
00:11 et que sur ces lycéens, un tiers n'arrivera pas jusqu'au baccalauréat.
00:17 Il y a des difficultés pour entrer dans la vie active après, vous venez de le dire,
00:22 et puis la moitié de ceux qui vont dans le supérieur n'obtiennent pas de diplôme supérieur.
00:27 Donc il y a des chiffres qui ne sont évidemment pas bons.
00:30 Ça ne remet pas en cause le travail remarquable des professeurs,
00:33 mais il faut bien s'attaquer à cette question,
00:35 d'autant plus que les lycéens en question sont souvent issus de mondes défavorisés.
00:38 Mais donc vous ne fixez pas d'objectif chiffré à ce stade ?
00:41 Les objectifs, c'est évidemment…
00:42 Emmanuel Macron dit 100%, mais on se doute que c'est peut-être un petit peu…
00:45 C'est la finalité, et puis les choses vont se mettre en place.
00:48 Mais on ne peut pas se satisfaire de la situation actuelle.
00:51 Il faut absolument qu'à l'issue de son bac professionnel,
00:54 on puisse s'insérer sur le marché de l'emploi,
00:56 d'autant plus que nous avons besoin de centaines de milliers de jeunes
01:00 dans des secteurs qui sont des secteurs essentiels.
01:03 Donc on a des secteurs qui recherchent des jeunes,
01:05 et puis des jeunes sans emploi.
01:06 Ça n'est pas une situation satisfaisante.
01:08 Précisément, il y a des secteurs en revanche qui en recherchent peut-être moins.
01:11 Pour faciliter la professionnalisation, vous voulez supprimer un certain nombre de filières.
01:16 Vous pensez à quoi ?
01:18 On parle beaucoup de cette filière gestion administrative,
01:20 comptabilité, secrétariat, qui n'est pas forcément porteuse.
01:23 On parle de ça. Qu'est-ce qu'il y a d'autres comme filières ?
01:25 C'est vrai qu'il y a des filières qui ne correspondent plus
01:27 au marché du travail, au marché de l'emploi.
01:29 Les évolutions de l'économie sont celles que nous savons.
01:32 Et puis à l'inverse, on a des besoins criants dans un certain nombre de domaines.
01:36 Il faut donc fermer des filières, notamment des filières du tertiaire.
01:40 Vous en avez nommé une.
01:42 Il y a aussi beaucoup de filières du côté de la vente,
01:44 du côté de l'accueil, qui ne rencontrent plus l'emploi.
01:50 C'est combien de filières à peu près ?
01:51 Il y en a un certain nombre.
01:52 C'est toute une famille de filières, surtout dans le tertiaire.
01:56 Nous allons, par exemple, à la rentrée,
01:59 fermer 80 d'entre elles, ouvrir 150 autres filières,
02:05 dans les 2100 lycées professionnels, des filières, elles, qui sont porteuses.
02:10 Alors, on parle de quoi, justement, comme nouvelles filières ?
02:13 Dans le cadre de la réindustrialisation du pays,
02:16 il y a énormément de filières qui sont des filières industrielles,
02:19 des filières du côté du génie thermique, par exemple,
02:22 pour tout ce qui concerne la transition écologique,
02:25 des filières de chaudronnerie, des filières industrielles,
02:28 par exemple, en lien avec le nucléaire.
02:31 On a besoin de réindustrialiser le pays.
02:34 Donc, on a de très, très forts besoins de ce côté-là.
02:37 Figurez-vous que sur les 10 métiers les plus en tension
02:40 dans l'économie française aujourd'hui,
02:42 et bien sûr, ces 10 métiers, cela correspond à 10 formations professionnelles.
02:47 - Du tertiaire au métier de l'industrie, ce n'est pas vraiment les mêmes filières.
02:50 On imagine que ce n'est pas les mêmes savoirs enseignés,
02:52 donc pas les mêmes enseignants.
02:53 Que vont devenir les enseignants des filières que vous supprimez ?
02:55 Et comment vous allez en recruter pour les nouvelles filières ?
02:57 On sait que c'est un enjeu aussi.
02:58 - C'est vrai. D'autant plus que ces dernières années,
03:00 on a fermé à peu près un tiers de formations dans le tertiaire.
03:05 Et donc, la question se pose, qui est celle des professeurs
03:09 qui ne sont pas nécessairement compétents pour enseigner
03:12 dans des filières complètement différentes.
03:14 - Que vont-ils devenir ?
03:15 - Ils vont se diriger vers le professorat des écoles,
03:17 un certain nombre d'entre eux le choisissent,
03:19 ou également vers les collèges.
03:22 Il y a des transferts, c'est quelque chose que nous allons encourager.
03:25 Ils peuvent également, au sein des lycées professionnels,
03:28 animer un certain nombre de choses,
03:30 par exemple, les bureaux des entreprises
03:32 que nous allons créer dans chacun des lycées professionnels.
03:36 Il y a également des formations en demi-groupe.
03:39 Il y a des savoirs d'un certain nombre de ces enseignants
03:42 qui restent parfaitement utiles dans le cadre des lycées professionnels.
03:45 Donc, on a un travail à faire, bien entendu,
03:48 et ça, c'est très important.
03:49 Mais nous visons d'abord l'intérêt des élèves.
03:51 L'intérêt des élèves, c'est de ne pas être au chômage,
03:54 c'est d'avoir des perspectives professionnelles après le baccalauréat.
03:56 - Combien de personnes à recruter ?
03:57 Est-ce que vous savez, avec cette réforme, les nouvelles filières,
04:00 combien d'enseignants vous allez devoir recruter,
04:01 alors que c'est déjà dur d'en recruter ?
04:03 - Alors, nous allons, et nous avons des besoins de recrutement,
04:05 y compris d'ailleurs du côté de professeurs associés.
04:08 C'est quelque chose que nous souhaitons développer,
04:10 c'est-à-dire des professionnels dans tel ou tel secteur,
04:13 je vais parler du génie thermique, par exemple,
04:15 - Qui viennent du monde de l'entreprise.
04:16 - Qui viennent du monde de l'entreprise
04:17 et qui vont consacrer un après-midi par semaine, par exemple,
04:20 à enseigner dans le lycée professionnel voisin
04:24 avec un titre de professeur associé, avec un salaire correspondant,
04:28 de manière à former des jeunes
04:30 et puis à avoir des professionnels dans des filières
04:32 qui sont effectivement difficiles du point de vue du recrutement des professeurs.
04:35 - Mais vous n'avez pas de chiffres sur le contingent d'enseignants recrutés
04:37 pour ces 150 filières qui seront créées ?
04:39 - Alors, ça fait du monde et puis tout cela se fait en lien,
04:43 évidemment, avec les régions.
04:46 Ce qui est certain, c'est que le remodelage de la carte des formations,
04:50 de la carte nationale des formations, doit d'abord viser l'emploi
04:54 et puis l'insertion également pour celles et ceux qui le souhaitent dans le supérieur.
04:58 - Et alors à propos de l'adaptation et du changement,
05:00 on va dire, de corpus de formation,
05:03 il s'agit aussi de faire évoluer ce nombre de formations et leur type
05:07 en fonction du bassin d'emploi.
05:10 Spontanément, on a envie de se dire, en revanche,
05:12 dans une région qui fonctionne bien, comme peut-être Toulouse ou je ne sais quoi,
05:15 c'est peut-être plus simple que dans une région qui est désindustrialisée.
05:18 Est-ce que ce n'est pas inégal pour les régions où il y a moins d'industrie,
05:21 où c'est plus difficile de trouver du travail ?
05:24 - Il y a des bassins d'emploi qui sont à l'évidence plus favorables,
05:28 mais je parlais à l'instant des efforts de réindustrialisation
05:33 qui vont toucher et qui touchent déjà l'ensemble du pays,
05:38 de la réactivation de filières qui avait été délaissée
05:41 lorsque l'on pensait que la France avait un avenir en dehors de l'industrie.
05:46 Moi, je me suis frappé en discutant avec les élus,
05:49 notamment les présidents de régions, de voir à quel point ils investissent,
05:53 bien entendu du côté de la formation professionnelle.
05:57 Leur connaissance fine également des bassins d'emploi.
06:00 Il n'y a pas que l'industrie, il y a aussi les services à la personne,
06:03 qui se développent énormément.
06:05 On a aussi besoin de professionnels dans cette direction.
06:08 Tout cela doit se faire finement à l'échelle des bassins d'emploi,
06:11 de manière à avoir des lycées professionnels
06:14 qui répondent aux besoins de l'économie avec suffisamment de perspectives dans le temps.
06:19 Il ne s'agit pas d'année en année de changer en fonction de la demande de tel ou tel chef d'entreprise.
06:26 - Les lycées doivent répondre aux besoins de l'économie ?
06:28 - Bien sûr, ça c'est tout à fait essentiel.
06:30 Il faut que les lycées professionnels...
06:32 - Certains vont vous dire que les élèves ne sont pas là uniquement pour former des travailleurs, des salariés, des ouvriers.
06:38 On est là aussi quand même pour former des citoyens.
06:40 - C'est les deux à la fois. C'est à la fois l'entrée dans la citoyenneté,
06:43 ça c'est tout à fait essentiel, d'où l'importance des savoirs fondamentaux
06:47 que nous confortons par exemple avec des demi-groupes en classe de seconde,
06:52 de manière à avoir des élèves qui soient à niveau en français, en mathématiques, mais aussi...
06:57 - Vous allez diviser les classes ?
06:59 - On va créer des demi-groupes en effet pour les classes de seconde.
07:02 Des élèves qui soient à niveau dans ces disciplines, ça c'est tout à fait essentiel.
07:06 Mais nous avons aussi une mission, c'est que ces élèves trouvent de l'emploi après le baccalauréat
07:12 ou réussissent dans leurs études supérieures.
07:14 Vous savez, la citoyenneté c'est pas simplement une citoyenneté je dirais politique.
07:19 La citoyenneté, elle a aussi une dimension pratique, c'est le fait de trouver un travail,
07:22 c'est le fait de s'installer dans la vie, c'est cela qui donne sens à la citoyenneté.
07:26 - On va pas là-dessus, mais c'est vrai que certains disent que le niveau académique
07:29 dans les lycées professionnels est relativement faible,
07:31 d'autant que ce sont des élèves qui viennent parfois de milieux qui ne sont pas favorisés.
07:34 Et donc voilà, certains peuvent craindre qu'on favorise plutôt le travail que la citoyenneté.
07:39 - Nullement, on favorise et on développe les savoirs fondamentaux.
07:42 Moi j'y suis très attaché en tant que ministre de l'Éducation nationale,
07:45 je ne vais certainement pas reculer sur cette question,
07:48 et la ministre déléguée Carole Grandjean non plus.
07:51 Mais nous avons aussi cet impératif catégorique qui est de mieux insérer,
07:56 d'où le fait par exemple que l'on augmente la durée des stages en classe de terminale
08:01 pour celles et ceux qui entrent dans le marché du travail.

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