L'ancien Premier ministre, qui a un temps siégé dans deux conseils d'administration de géants russes, est auditionné par les députés sur ses liens avec Moscou. Après avoir hésité, François Fillon avait quitté avec "tristesse" ses fonctions, quelques jours après le début de la guerre en Ukraine.
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00:00 Je veux juste faire trois remarques avant de commencer à répondre à vos questions.
00:06 La première pour dire que j'ai siégé dans cette assemblée pendant 22 ans, que j'ai
00:14 siégé trois ans au Sénat et que j'ai été membre du gouvernement de la République
00:19 pendant 12 ans.
00:20 A aucun de ces moments, jamais pendant ces 36 années, je crois, de vie publique, on
00:29 a pu trouver une seule action de ma part qui soit influencée par une puissance étrangère.
00:36 J'ai toujours défendu l'intérêt national, en tout cas tel que je le conçois, et cette
00:43 attitude n'a pas changé.
00:45 La deuxième chose que je voudrais dire, c'est que j'ai des convictions qui n'ont pas variées,
00:51 notamment sur cette question du rapport entre la France et la Russie.
00:55 Je pourrais résumer ces convictions en disant qu'elles sont gaullistes, mais immédiatement
01:01 je vois les ricanements, non pas ici naturellement, mais à l'extérieur, arriver en disant que
01:07 tout ça c'est du passé et que le monde a changé.
01:11 C'est vrai que le monde a changé, que la situation est différente aujourd'hui de
01:14 celle que nous avons connue.
01:15 Mais il y a une chose qui n'a pas changé et qui au fond était la base de la vision
01:22 qui était celle du général de Gaulle en politique étrangère, c'est la géographie.
01:26 Nous sommes sur le même continent que la Russie et une immense partie de la Russie
01:33 est européenne.
01:34 On peut aimer, pas aimer, combattre, être en désaccord, et il y a bien des raisons
01:41 d'être en désaccord avec le régime russe, et pas seulement avec celui-là, mais avec
01:44 tous ceux que la Russie a connus depuis bien longtemps.
01:47 Ça n'efface pas cette constatation que la proximité de la Russie et de notre pays
01:56 et de l'Europe oblige à trouver un mode de relation avec la Russie qui permette d'assurer
02:05 la paix et la sécurité.
02:07 C'est d'ailleurs ces convictions qui m'ont conduit à m'intéresser assez tôt à la
02:14 Russie, puisque j'y ai effectué mon premier déplacement à la tête d'une délégation
02:20 parlementaire de la Commission de la Défense Nationale et des Forces Armées dont j'étais
02:24 le président en 1986 ou 87, je ne me souviens plus très bien, mais je pense que c'était
02:30 en 1986.
02:31 Et c'était une mission assez historique, sans exagération, puisque c'était la première
02:40 fois que la Commission de la Défense Nationale se rendait dans le pays qui était notre adversaire
02:43 principal.
02:44 J'y suis retourné d'ailleurs l'année suivante, en 1988, cette fois-ci en étant
02:51 dans l'opposition avec Jean-Pierre Chevènement, que vous avez auditionné il y a quelques
02:56 instants.
02:57 Jean-Pierre Chevènement a effectué une visite en Union soviétique, dans les Forces
03:03 Armées soviétiques, en 1988, et il avait souhaité que je l'accompagne pour démontrer
03:10 aux Russes qu'en matière de défense, il n'y avait pas de division à l'intérieur
03:17 de notre pays et que nous étions solidaires.
03:20 La troisième et dernière remarque que je veux faire, elle concerne mon expérience
03:26 des ingérences étrangères.
03:27 Est-ce que j'ai rencontré dans ma vie politique, et en particulier lorsque j'étais au gouvernement,
03:33 des ingérences étrangères ? Oui, j'en ai rencontré.
03:36 La plupart du temps, elles venaient d'un pays ami et allié qui s'appelle les Etats-Unis.
03:43 Je ne porte pas de jugement, je dis, votre commission travaille sur les ingérences étrangères,
03:50 je vous dis que, par exemple, j'ai été écouté avec le président Sarkozy pendant
03:55 cinq ans par la NSA.
03:57 On l'a su lorsque des documents, des services secrets américains ont fuité, et tout le
04:06 monde s'est fixé sur le fait que la NSA écoutait Mme Merkel, mais elle écoutait aussi l'ensemble
04:10 des membres du gouvernement français et sans doute des autres pays européens.