Robert Guégiguian : "les manifestations me réjouissent"

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Le réalisateur, producteur et scénariste marseillais est l'invité de Rue de la République cette semaine. Robert Guégiguian évoque la sortie de son prochain film tourné à Marseille "Que la fête soit belle" en lien avec le drame de la rue d'Aubagne.
Le réalisateur se livre également sur l'actualité sociale, l'état de la gauche, l'Arménie et le projet de cinémathèque à Marseille au micro de Didier Gesualdi et Léo Purguette de la Marseillaise. ...

Vidéo publiée le : 16/04/2023 à 13:00:00

Lien vers l'article de Maritima.info :
https://www.maritima.info/depeches/societe/marseille/88230/robert-guegiguian-les-manifestations-me-rejouissent-.html

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Transcription
00:00 Robert Guédiguian, le réalisateur, le producteur, le scénariste, nous fait l'amitié d'être dans Rue de la République ce dimanche. Bonjour Robert Guédiguian.
00:07 Bonjour.
00:07 J'en comprends une. Léo Purgette, le président et le directeur éditorial de La Marseillaise. Bonjour Léo.
00:11 Bonjour.
00:11 Pour recevoir évidemment cette personnalité marseillaise dont l'actualité cinématographique, artistique se mêle tout le temps avec l'actualité sociale.
00:19 Ça tombe bien, c'est très important en ce moment.
00:21 J'ai quand même envie de vous demander en tant que Marseillais, Robert Guédiguian, votre avis sur ce qui s'est passé avec ce drame de Thivoli assez brièvement.
00:28 Puis après on passera, j'imagine, à l'actualité sociale.
00:31 Très concrètement, évidemment c'est un accident semble-t-il.
00:37 Donc voilà, j'ai pas grand chose à dire.
00:39 À part que, bien entendu, ça rappelle forcément la rue d'Aubagne.
00:43 Qu'il reste un événement marquant à Marseille, même ailleurs.
00:48 Les effondrements des immeubles de la rue d'Aubagne, c'est quelque chose que les Parisiens connaissent par exemple.
00:52 Moi j'ai reçu beaucoup de SMS au moment de cet effondrement de Thivoli qui me disaient "ça me rappelle la rue d'Aubagne etc."
01:01 Et le film que j'ai fait, qui sortira en novembre, que j'ai fait autour, je dis bien autour, c'est pas un film sur les événements.
01:08 On a son nom déjà, Robert Guédiguian ?
01:09 Et la fête continue.
01:11 Avec un peu d'exclamation bien sûr, parce qu'il y a un peu d'ironie.
01:15 Donc vous avez immédiatement été projeté dans cette actualité, dans ce que vous avez vécu, qui est complètement différent, on est bien d'accord.
01:23 En fait, je pense que les effondrements de la rue d'Aubagne, les historiens le diront,
01:29 je crois que c'est ça qui a conditionné la réalisation du printemps marseillais et la victoire de Municipal après.
01:38 Je crois qu'on en parlera comme ça quand on étudiera ça avec le recul nécessaire dans les quelques années.
01:44 Donc c'est pour ça que je suis parti de cet événement là, mais le film est un petit peu du même type.
01:48 J'allais dire, la rue d'Aubagne et les effondrements conditionnent la vie du film en fait.
01:52 Le film tourne autour de cet événement là, mais c'est pas un film sur ces événements là.
01:57 C'est des personnages qui gravitent autour et qui essaient d'agir par tous les moyens dans le monde dans lequel on vit,
02:04 qui se posent de nombreux dilemmes et qui essaient d'agir sur le mode d'aller partout à l'international,
02:08 qui essaient d'agir par exemple sur l'Arménie, qui essaient d'agir sur l'immigration avec les soins méditerranéens.
02:15 Donc c'est que 6 ou 7 personnes d'âges différents, de milieux sociaux un peu différents,
02:23 qui ont évidemment des liens amoureux, familiaux, etc.
02:25 C'est un film, c'est pas une monographie.
02:30 Donc, et qui cherchent tous à... qui ne supportent pas en fait de ne pas agir.
02:36 Qui ne supportent pas d'être dépossédés de la possibilité d'intervenir dans le monde.
02:40 Ils s'en sentent dépossédés.
02:42 Donc la rue d'Aubagne leur donne l'occasion, surtout à travers la...
02:46 lorsqu'elle a été nommée cette place, puisque ce n'était pas une place.
02:49 Elle a été nommée place du 8 novembre, quand elle a été nommée par les habitants, les comités de quartier, etc.
02:56 C'était une carrefour, l'endroit où il y a le statut d'homère.
02:59 Et de surcroît, j'utilise ça comme une métaphore, c'est-à-dire c'est le statut d'homère.
03:02 Donc c'est comment faire de la politique aujourd'hui, mais au sens le plus strict du terme.
03:07 Comment interviendre dans la société aujourd'hui.
03:09 - David Lassiter, vous nous permettez.
03:11 - Alors vous parlez effectivement de personnages qui ne se résignent pas, qui ne sont pas dans la fatalité.
03:16 Il y a beaucoup, beaucoup d'hommes et de femmes dans les rues en ce moment,
03:19 qui ne se résignent pas face à la réforme des retraites.
03:22 On avait envie de vous entendre sur cette thématique-là.
03:25 Le scénario, on n'en connaît pas encore la fin.
03:27 Mais quelle est votre analyse sur cette situation sociale ?
03:30 - Je crois que je suis un peu...
03:34 Je me réjouis évidemment dès que je vois des gens dans la rue.
03:37 D'autant plus dès que je vois des gens dans la rue, je me réjouis,
03:39 puisque ça veut dire que justement, ils ont trouvé un moyen de faire de la politique,
03:43 puisqu'ils sont dans la rue.
03:45 Et puis voilà, pour moi une manifestation, c'est la fête.
03:47 C'est la fête révolutionnaire, une manifestation.
03:49 C'est la fête du changement, c'est la fête civique.
03:52 Donc j'aime les manifestations en elles-mêmes.
03:56 Donc évidemment, ça, ça me réjouit.
03:58 Mais je vais dire une chose un peu plus dépressive, je pourrais dire.
04:03 C'est-à-dire qu'en fait, je pense que les mobilisations n'ont pas été assez fortes.
04:06 Donc je crois qu'il y a quand même un fatalisme.
04:08 C'est-à-dire qu'on dit que, bien sûr, c'est des mobilisations fortes et nombreuses.
04:12 Mais, si je dis des chiffres au hasard, il n'y a pas eu 5 millions dans la rue.
04:19 Il y a eu 2 peut-être, pour la plus grande manifestation.
04:22 Ou autour de 2. Enfin, on ne va pas discuter des chiffres, surtout pas.
04:25 Mais il y aurait eu 5, 6, 7, 8. Voilà.
04:28 Ça, ça m'aurait fait plaisir.
04:30 Et je pense que s'il n'y a pas quand même ce monde de la manifestation,
04:34 ce n'est pas qu'une question d'inflation, de pouvoir d'achat,
04:38 de "on va perdre une demi-journée de salaire", c'est pas que ça.
04:42 Je crois qu'il y a aussi réellement une accumulation d'échecs depuis très très longtemps, en fait.
04:48 C'est-à-dire que, moi, la dernière fois que je me suis vraiment mobilisé,
04:52 c'était pour les retraites, justement, et les régimes spéciaux à la SNCF.
04:59 J'ai énormément milité sur la cagnotte, d'ailleurs.
05:02 On avait réuni quand même 1 million d'euros, plus d'un million d'euros sur la cagnotte,
05:06 pour soutenir les grévistes et tout. C'est un échec.
05:08 Ça a échoué. Donc, on perd toujours.
05:11 Est-ce que Robert Yélihan, paradoxalement, c'est pas une aubaine pour l'homme de gauche que vous êtes,
05:16 et pour la gauche d'une manière générale, ces gens dans la rue,
05:18 ces gens qui ne sont pas contents, qui semblent être majoritaires dans le pays,
05:21 alors qu'ils ne le sont plus politiquement depuis longtemps ?
05:24 Justement. Il y a eu un très beau titre de libération il y a deux jours.
05:30 La gauche est un boulevard, alors qu'elle est à la rue.
05:34 Voilà. C'est, je trouve, le titre magnifique.
05:36 Comment on fait, alors, justement, pour transformer ?
05:38 Je veux dire un truc, là, évidemment, c'est bon boulot de parler comme ça.
05:42 Je ne supporte pas tous les gens qui divisent. Mais je ne peux plus. Je n'y arrive plus.
05:46 Je ne supporte pas. Moi, je suis né avec le programme commun.
05:49 J'avais dit, j'avais, je suis né en 53, j'avais 17 ans, j'étais 10,
05:53 donc je me suis battu pour le programme commun, j'étais 12, etc.
05:56 Donc j'ai passé toute ma vie à me battre pour cette putain d'union de la gauche.
05:59 Voilà. Je dis exprès cette putain d'union de la gauche. Je ne peux plus.
06:02 Et je ne peux pas supporter, effectivement, cette vieillerie, je dirais, partisane,
06:08 et dans tous les partis, je dis bien dans tous les partis,
06:11 évidemment le parti communiste, mais qui fait 2,8%, qui est quand même quasiment inexistant.
06:16 Je continue à dire que je suis communiste par ailleurs, mais on peut être communiste dans notre parti communiste.
06:20 Ce que certains ont l'air d'oublier. On peut être même plus communiste à l'extérieur, me semble-t-il aujourd'hui.
06:25 Bon, ça c'est un autre débat, on en parlera si vous voulez.
06:27 On pourrait faire une émission entière dessus.
06:28 Oui, absolument. Mais, bon, j'ai beaucoup de...
06:31 Par exemple, j'admire Olivier Faure, qui se bat comme un chien à l'intérieur du Parti Socialiste
06:35 contre tous les vieux cinglés du Parti Socialiste,
06:38 qui continuent à penser que ce sont des révolutionnaires ou des jeunes de gauche.
06:43 Ça fait quoi, trop fou ? Hollande et Kasner avec un Badélis et je ne sais pas quoi,
06:47 ils sont... Pour moi, il y a une espèce de folie, quoi, d'emballement.
06:50 C'est une espèce d'irrationalité.
06:52 C'est-à-dire qu'aucun historien digne de ce nom, aucun intellectuel peut justifier ces pratiques-là.
06:59 Ce sont des pratiques partisanes de notre siècle, de notre monde.
07:03 Donc je ne supporte plus.
07:05 Il y a... J'étais ravi, évidemment, l'année dernière,
07:09 quand effectivement il y a eu spontanément...
07:12 Enfin, ce n'est pas spontanément, c'est parce que ça devait arriver, probablement,
07:15 parce que ça travaille en profondeur.
07:17 Donc quand il y a eu la nups, pour la nommer,
07:21 donc les jeunes de la gauche continuent à la travailler comme ça, pour aller à la ligne.
07:26 On est dans un moment de crise démocratique,
07:28 parce qu'en effet, le pays ne semble plus ressembler à sa représentation nationale.
07:34 Est-ce que vous craignez que ça débouche par le pire, par l'extrême droite, tout ça ?
07:41 Ce n'est pas vraiment... J'allais dire, je renverserais le truc, encore, moi.
07:45 C'est-à-dire, la question...
07:46 Moi, ce qui me fait le plus peur, c'est qu'il n'y ait pas de gauche.
07:50 Ce n'est pas qu'il y ait une droite.
07:52 Je m'en fous qu'il y ait une droite, en fait. Voilà.
07:54 Et la droite, ça a battu, si effectivement il y a une gauche, si le gauche est digne de ce nom.
07:57 Et c'est vrai que là, c'est très très clair, quand on se met en accord sur des éléments de programme,
08:01 très très simple, tout le monde est d'accord pour faire une réforme fiscale.
08:04 De quoi on parle ? De quoi parlent ?
08:06 D'ailleurs, les insoumis, les communistes, les écolos,
08:10 d'ailleurs même Besançonnot, qui est brillantissime par ailleurs,
08:14 souvent dans ses interventions pédagogiques, etc., plus jeunes, plus vifs, etc.
08:19 Bon, quel type, je trouve formidable.
08:21 Même si parfois je ne suis pas d'accord avec lui.
08:22 Mais peu importe, c'est des petits désaccords.
08:24 Alors qu'il y a des grands accords de fond, de principe.
08:27 Restons là-dessus, je ne peux plus supporter.
08:29 - Pourquoi les gens simples, Robert Guédiguian,
08:31 les gens qui sont issus du monde du travail,
08:33 adhèrent aux idées de Marine Le Pen, qui est en voie de respectabilisation aujourd'hui ?
08:37 Qu'est-ce qu'on peut leur dire à ces gens aujourd'hui ?
08:39 Parce qu'on a du mal à trouver des failles, justement.
08:41 On sait très bien que leur dire "vous êtes des fachos", ça ne marche pas, par exemple.
08:44 - Non, pas du tout.
08:45 - Qu'est-ce qu'on leur dit ?
08:46 - Ils ne sont pas fachos, d'ailleurs.
08:47 Ils ne sont pas fachos.
08:49 Ils sont tout simplement, je pense, obnubilés par l'idée d'une France fermée.
08:57 Je pense que le succès reste quand même l'attitude envers les étrangers, les immigrés, etc.
09:07 Et les gens ne sont pas non plus foireux.
09:10 Les gens, comme dit toujours Mélenchon, le peuple, etc.
09:14 n'a pas la vérité en lui non plus.
09:19 Ce ne sont pas les intellectuels qui disent la vérité,
09:21 ce ne sont pas les hommes politiques, ce ne sont pas le peuple, ce ne sont personne, en fait.
09:24 C'est l'ensemble de tout ce mouvement-là, c'est une société qui dit sa vérité,
09:28 qui en général l'a dit, ou du moins on la connaît, 50 ans plus tard,
09:31 quand tout le monde n'a plus fait le travail sur l'état de cette société à ce moment-là,
09:34 et encore que, 500 ans plus tard, on redécouvre des choses, puisqu'on peut interpréter à l'infini.
09:39 Donc, le peuple a tort.
09:41 Voilà, je dis ça, moi, je dis le peuple a tort.
09:43 Les gens considèrent qu'effectivement, si on réglait cette question de l'immigration,
09:48 ce serait tout bénéfique, ce serait très bénéfique pour l'état social en général,
09:55 économique et social de la France.
09:56 Voilà, c'est une erreur.
09:58 Donc il faut continuer à essayer de démontrer que c'est faux.
10:01 - Marseille en est la preuve, peut-être.
10:02 - Alors justement, revenons à Marseille, le Président de la République a annoncé
10:07 un plan Marseille en grand, qui devrait permettre de faire tomber des milliards
10:12 sur cette ville qui en a tant manqué.
10:14 À l'intérieur de ce plan, il y a un volet cinéma, et on voulait savoir un peu où ça en était,
10:19 puisque vous avez été consulté, je crois.
10:21 - Oui, oui, oui.
10:22 Non, c'est bien, il y a de très belles choses.
10:24 Il y a des choses, d'abord, il y a de la formation, à tout point de vue,
10:30 il n'y a pas que de la formation, il y a la formation de cinéma,
10:33 et j'allais dire, je ne sais pas comment dire, un paracinéma,
10:35 bon, par exemple, nous on travaille beaucoup sur la création d'une école,
10:38 moi je travaille beaucoup, à ce moment-là, sur la création d'une école numérique.
10:40 - D'accord.
10:41 - C'est une école numérique, qui s'appelle l'école Tumeau,
10:44 et qu'on pourrait travailler avec Zimmermann, avec la plateforme en fait,
10:48 qui existe déjà, et qui est aussi déjà bon.
10:50 Donc ça, d'ailleurs on attend des résultats de financement, là justement,
10:54 de Marseille en grand, pour pouvoir peut-être lancer les choses dès la rentrée.
10:59 Donc il y a beaucoup, la formation m'importe beaucoup, moi, je crois.
11:03 C'est-à-dire, ça rend l'idée de faire, de travailler dans ces secteurs-là,
11:11 ça la rend atteignable pour certains, voilà.
11:14 Alors qu'effectivement, si ce n'est pas près de chez eux, voilà.
11:17 - Mais elle prend encore aujourd'hui, avec les studios Martego,
11:20 avec les studios marseillais désormais, c'est une réalité, c'est un poids économique,
11:24 et donc ça vient renforcer, parce que jusqu'à présent c'était,
11:27 "Oh, c'est joli Marseille, on descend de Paris pour venir tourner quoi."
11:30 C'est fini tout ça ?
11:31 - Non, non, ça en termes de fabrication c'est sûr, ça compte, la fabrication compte beaucoup.
11:35 Mais c'est vrai que, moi l'idée qu'un gamin puisse se dire,
11:40 "Tiens, après tout je pourrais peut-être un jour faire un film."
11:43 Donc je peux peut-être aller à l'école, à l'école normale,
11:48 à une école numérique, de création numérique,
11:50 après aller faire une formation peut-être d'ingénieur du son ici,
11:53 donc c'est accessible, peut-être même je peux me raconter des histoires
11:57 qui deviennent universelles, voilà, pourquoi pas.
11:59 Ça, ça devient possible parce que c'est à proximité, c'est sur le pas de la porte.
12:04 Là il fallait aller réussir le concours de l'aphémisme, voilà,
12:08 donc ça devait être quelque chose de beaucoup plus élitaire, voilà.
12:12 La démocratisation du cinéma, de l'audiovisuel, du numérique, du jeu vidéo, etc.
12:17 Tout ce qui a à voir avec ça, c'est tout autour du cinéma aussi.
12:20 C'est évidemment une très belle chose.
12:22 - Il était question aussi d'une antenne de la Cinémathèque, est-ce que cela prend forme ?
12:26 - Ça a avancé un petit peu, oui, ça a avancé un petit peu.
12:28 Le centre national du cinéma est favorable, et donc abondera,
12:33 on est toujours sur le financement des locaux, etc.
12:36 La région est très intéressée, elle a des locaux du côté des docs
12:42 qui ne sont pas affectés à ce moment-là, donc je crois que ça va se faire.
12:47 Mais comme il va falloir bâtir, ou du moins aménager les locaux,
12:51 ça va prendre du temps, le financement n'est pas bouclé.
12:53 Le financement, bien sûr, qui est toujours plus facile à trouver,
12:57 un investissement qu'un fonctionnement.
12:59 Mais ça, c'est la règle absolue de tous les pays occidentaux, je crois.
13:03 Pour investir, on peut, mais après, il faut que les choses fonctionnent,
13:06 donc il faut un budget pérenne.
13:09 - Robert Guédillon, vous êtes un réalisateur prolifique,
13:11 on va avoir une rétrospective de vos œuvres, à priori, cet été, au Mucem.
13:15 Vous pouvez nous en dire un peu plus, peut-être ?
13:17 - Ça m'inquiète un peu.
13:18 - Oui, justement, vous êtes encore en train de tourner,
13:19 puis on est déjà dans une rétrospective.
13:21 - Le musée, ça m'inquiète un peu, aussi.
13:23 L'idée du musée m'inquiète un peu.
13:25 Mais non, il y a des musées du cinéma.
13:27 - Il est ouvert sur la mer, celui-là, il est beau.
13:29 - Il est magnifique, c'est très très beau.
13:31 Je suis ravi, surtout que d'ailleurs, on passe,
13:33 on va se voir demain, d'ailleurs, pour parler de tout ça,
13:36 avec les organisateurs au Mucem,
13:37 on passe et qu'on finira, d'ailleurs, par une projection
13:40 d'un des films plutôt festif, sur la mer, sur le toit du Mucem,
13:45 donc avec un toit là-dedans, la mer, ce qui est quand même...
13:48 - Donc est-ce qu'on va y retrouver, de temps en temps, cette rétrospective ?
13:50 - Tout, tout, tout, exhaustif.
13:51 Enfin, il n'y aura pas le dernier.
13:53 Ou peut-être, peut-être, on fera une avant-première du dernier,
13:55 je ne sais pas. Je ne sais pas encore, ce n'est pas décidé.
13:57 - Vous pouvez dire en ce moment, Robert Hédillon,
13:59 vous avez d'autres choses en tête, là où vous êtes ?
14:01 - Je devrais tourner un septembre octobre, oui.
14:04 - Quel projet, on peut savoir, juste dans les grandes lignes ?
14:06 - Oui, oui, c'est le nouveau film, il s'appelle "La Petite Voleuse".
14:08 Et en fait, je pars de l'idée que...
14:11 Il y a un personnage qui dit ça.
14:13 Il dit qu'aujourd'hui, on est tellement soumis à des tentations permanentes,
14:17 qu'il suffit de se balader dans la rue, de passer devant des vitrines,
14:20 ou de regarder la télévision, ou les écrans de l'ordinateur,
14:22 les réseaux sociaux, etc.
14:24 Et on est en permanence, on nous expose ce que nous ne rejamais.
14:29 Nous ne le rejamais.
14:31 Voilà, on nous expose du luxe, de la richesse, de la beauté,
14:35 du beau temps, d'ailleurs, du climat, du cil.
14:38 - On peut toujours plus en plus ça, donc là.
14:39 - Et que c'est des supers, quoi, des objets divers et variés,
14:41 des montres, des bijoux, des plats somptueux, des restaurants magnifiques.
14:45 Des voitures, des motos, tout ce qu'on peut imaginer est visible.
14:49 Avant, ce n'était pas visible.
14:51 Beaucoup de gens n'avaient jamais vu ces choses-là.
14:54 Aujourd'hui, le luxe est visible partout.
14:56 Et effectivement, c'est une espèce de torture, puisqu'on ne l'aura jamais.
15:00 Donc ça part d'une espèce d'hypothèse, comment ça ?
15:03 Et donc le film s'appelle "La Petite Voleuse".
15:05 Je vous laisse imaginer...
15:06 - Et ça déroulera à Marseille ?
15:07 - Oui.
15:08 Même si je dois dire, je me mords toujours de l'idée de ça,
15:12 mais je vais presque en retour à l'Estac, je crois.
15:14 Parce que j'ai tourné à Marseille plutôt au centre-ville, les derniers films.
15:18 "Oedoban", justement, le film d'avant, du côté du Vieux-Port,
15:21 derrière la mairie, tout ça.
15:22 Et là, peut-être on va refaire un petit peu comme "La neige du Kibanjaro".
15:26 Du côté vraiment de l'Estac, les cinq plages autour de l'église,
15:30 le côté le plus villageois de l'Estac, quoi.
15:32 Le plus pittoresque, le plus folklorique, je ne sais pas ce que dire.
15:35 - On le sait, Robert Gadidian, toute votre oeuvre est marquée par votre arménité,
15:39 par votre, je ne sais pas comment on dit, mais "marseillosité" peut-être également.
15:43 Vous avez encore des choses à explorer sur ces thèmes-là.
15:46 - Non, c'est à dire, le réel est inépuisable.
15:50 Donc on peut, toute sa vie, c'est vrai, de beaucoup de cinéastes,
15:55 de beaucoup d'auteurs, de beaucoup d'écrivains, etc.,
15:58 qui ont un gros surbordeau tourné autour des mêmes thèmes tout le temps.
16:03 Il y a des variations sur un thème, comment dire, musique.
16:06 - Vous étiez à Bababou il n'y a pas très longtemps, en même temps.
16:09 - J'ai fait quelques excursions, quelques sorties de route, on pourrait dire,
16:15 sorties de mon autoroute, pour aller soit à Sarajevo, soit à l'Arménie,
16:19 soit à Bamako, soit au Liban.
16:21 J'ai tourné pas mal de choses comme ça, une fois tous les 4-5 ans,
16:25 j'essaie de partir un peu loin pour voir comment est le monde d'ailleurs,
16:28 et je reviens ici.
16:30 Mais pour revenir en Régie par les pays traversés, bien sûr.
16:35 Donc je crois vraiment que c'est tout à fait inépuisable.
16:38 Sur l'Arménie, c'est vrai que j'aimerais y retourner une fois,
16:41 parce qu'y retourner un film, si je pouvais, je suis en train de réfléchir un peu à ça.
16:46 Parce qu'il est vraiment nécessaire de rendre l'Arménie visible, on pourrait dire.
16:50 - Alors justement, c'était une des questions que l'on souhaitait vous poser.
16:54 Le Haut-Karabakh est coupé du monde, dans un silence international assourdissant.
16:59 Est-ce que vous avez des informations,
17:02 est-ce que vous avez des éléments sur toutes ces personnalités qui, avec vous,
17:06 se sont mobilisées pour mettre en lumière cette cause,
17:09 et est-ce que vous allez vous y rendre ?
17:11 - En fait, oui, j'y suis allé déjà, il y a un mois en fait.
17:16 Je suis allé sur le front, pas au Karabakh,
17:23 mais je suis allé sur le front de l'Arménie,
17:24 puisque l'Azerbaïdjan a commencé à attaquer l'Arménie, non plus le Karabakh.
17:28 - Tout à fait.
17:29 - L'Arménie. De toute façon, leur volonté est claire,
17:31 c'est plus qu'elle est quasiment...
17:33 Mais pas quasiment, elle est affirmée.
17:35 La route du Karabakh est ouverte dans un sens,
17:39 dans le sens du départ, et pas dans le sens d'y entrer.
17:42 Donc d'y acheminer aussi des vivres, etc., des médicaments,
17:45 et tout ce qui est nécessaire à la vie d'un pays.
17:47 Ça s'appelle... c'est la définition d'un génocide, hein.
17:51 C'est-à-dire, si vous voulez, où vous partez, où vous mourrez.
17:55 C'est la définition d'un génocide. Voilà.
17:58 - Une question peut-être à...
17:59 - Et donc, je commence à dire des choses, du moins dans les réseaux sociaux,
18:03 quand je commence un peu à tweeter, à faire des choses comme ça,
18:05 je me dis que s'il y avait... je crois il y avait 120 000 personnes à peu près au Karabakh,
18:09 qui sont bloquées, qui sont sous le blocus,
18:11 et je commence à dire des choses du type, si c'était 120 000 chiens,
18:15 je crois que le monde entier serait ému, quoi.
18:17 Il y aurait une campagne dingue, en Occident,
18:20 pour sauver tous ces pauvres petits clébards.
18:23 Mais là, les 120 000 Arméniens, ils s'en foutent.
18:25 - On dit pas ça contre les chiens, on est bien d'accord.
18:27 - Non, j'aime bien les bêtes.
18:29 - La boucle, Robert Gédigan.
18:30 Et on est quasiment au bout de cette émission.
18:32 Vous demandez à ce que le groupe Manouchian, en tout cas,
18:34 à ce que Manouchian en rentre au Panthéon,
18:37 parce que vous dites, ça serait le synonyme que
18:39 les premiers résistants étaient des gens qui étaient étrangers,
18:41 et là, peut-être qu'on peut boucler la boucle,
18:43 ce qu'on se dit depuis le début, finalement.
18:45 - Bien sûr, bien sûr, justement, les premiers.
18:48 Alors, il y avait aussi les Français, les premiers résistants.
18:50 Je le dis parce que quand je dis "premier",
18:51 il y a toujours des gens qui se retournent pour dire
18:53 "C'était pas le premier, le premier, c'était à l'estac-gare,
18:56 et pas à l'estac-plage".
18:58 Voilà, bon, ça je m'en fous.
19:00 Mais c'est vrai que dans les premiers, en tout cas, résistants,
19:04 qui ont tout refusé, qui sont d'ailleurs,
19:06 qui ont commencé à commettre des attentats, terroristes,
19:09 terroristes donc, c'est vrai que c'était des étrangers.
19:12 Tout simplement parce qu'ils avaient énormément déjà vécu
19:15 le fascisme chez eux, dans tous les pays d'où ils provenaient,
19:18 ou le génocide pour le cas de Manouchian,
19:20 et qu'ils considéraient que la France était,
19:25 toujours, depuis toujours, c'était le pays des droits de l'homme.
19:29 C'était le pays de 1789, de la Révolution bourgeoise, etc.
19:32 ou de 1793, et ils pensaient ça.
19:36 Il y a des gens qui continuent à le penser dans le monde,
19:38 mais je crois de moins en moins.
19:39 Quand on voit par exemple comment le monde entier réagit
19:41 aux violences policières en France, on se dit que
19:43 pour le pays de la Révolution française,
19:45 c'est pas évident, quoi.
19:47 - Alors Manouchian, Panthéon, vous croyez que c'est pour bientôt ?
19:49 - Moi je crois que ça va se faire.
19:51 Je crois que ça va se faire, parce que Macron est suffisamment, d'ailleurs,
19:55 c'est pas retort, il a quelque chose avec ça de...
20:01 comme ses discours sur l'Algérie, j'allais dire.
20:05 C'est-à-dire, là, il peut être juste là-dessus.
20:09 Alors je sais pas, c'est pas que par perversion politique.
20:13 Donc voilà, les hommes ont des qualités, des défauts.
20:16 Macron, il doit avoir quelques qualités.
20:18 Donc je crois que là-dessus, de faire entrer un communiste étranger,
20:24 donc communiste étranger, ça fait beaucoup,
20:26 au Panthéon, je crois que ça ne le gêne pas.
20:29 Je crois qu'il reconnaît ça, il reconnaît ça dans l'histoire de France.
20:32 Bon, voilà. Du coup, je crois que c'est possible.
20:37 Et moi je trouve que ce qui est formidable, c'est que,
20:39 comme je dis souvent, Manouchian aiderait à nouveau l'Arménie,
20:43 s'il entraînait au Panthéon, parce que ça ferait parler de l'Arménie d'aujourd'hui aussi.
20:47 Robert Guédiguion, qui était notre invité dans "Rue de la République",
20:50 merci d'avoir été en notre compagnie.
20:52 Donc on suit la sortie très prochainement, à la fois de la prospective,
20:55 puis de votre film, qu'on attend tous avec impatience,
20:57 du côté de Léo Purgette dans cette nouvelle émission de "Rue de la République".
21:00 Merci d'avoir été en notre compagnie.
21:02 Merci à vous.

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