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Transcription
00:00 Les problèmes, c'est vraiment des problèmes systémiques
00:02 et puis qui sont vraiment très lourds à gérer, nous, pour professionnels.
00:06 C'est qu'on nous demande de faire le maximum,
00:08 d'être toujours bienveillante, de toujours regarder le sourire,
00:13 d'être là, présente, sauf qu'on nous donne des qualités de travail
00:16 qui sont inhumaines à ce jour.
00:17 - Alors, qu'est-ce qu'il y a eu comme scène
00:21 qui vous a semblé problématique en crèche ?
00:24 - Si on parle du, par exemple, pour le...
00:27 En fait, que les enfants deviennent, qu'ils soient monétisés.
00:31 Par exemple, un exemple tout bête, dans un groupe privé, on va se dire,
00:35 alors voilà, aujourd'hui, dans la section moyen, il y a 17 enfants.
00:38 On va commander que 15 repas comme ça,
00:40 vu qu'on prévoit un peu les absents.
00:42 Ce jour-là, les 17 sont là.
00:45 Donc, il y en a deux, on fait comment ?
00:46 Donc, il faut diviser la part de chacun pour que tout le monde puisse manger.
00:50 Que dans les groupes privés, ils n'aient pas forcément tous des lits
00:54 parce qu'on va trouver des solutions.
00:56 Donc, on va mettre des enfants dans des lits d'évacuation incendie
00:59 ou des choses comme ça.
01:00 Puis, on va...
01:01 Puis, voilà, enfin, j'ai souvent été seule avec 15 gamins.
01:06 Ouais, toute seule.
01:08 Et on me demande le maximum.
01:10 - Alors, il y a Julie aussi qui est là.
01:13 Vous êtes ancienne responsable d'une crèche privée.
01:16 Est-ce que vous avez assisté à des scènes surréalistes ?
01:19 Parce que c'est ce qu'on entend.
01:20 - Non, moi, je n'ai rien vu, en fait.
01:23 Moi, je n'ai découvert en août 2021 que deux de mes salariés
01:26 commettaient des actes de violence sur enfants.
01:28 J'avais une équipe de quatre personnes et en fait,
01:31 une des salariés a décidé de parler.
01:35 Ça faisait quelques mois qu'elle était menacée de licenciement.
01:39 On lui disait "mais si tu parles, on va voir Julie, on te fait licencier".
01:42 À un moment donné, pour elle, c'était trop dur.
01:45 Donc, elle est venue me voir.
01:46 Elle m'a montré des vidéos parce qu'en fait, elle s'amusait à se filmer,
01:51 à faire ses violences.
01:52 Donc, j'avais toutes les preuves vidéos.
01:55 - Elle faisait quoi aux enfants ?
01:57 - Alors, sur les vidéos, on les voit traiter les enfants de saleputes,
02:02 de connards, de couillons.
02:03 On voit une des salariés qui prend une enfant de huit mois en hauteur
02:10 et qui la laisse tomber, qui la rattrape au dernier moment.
02:12 Et elle s'amuse à filmer, en fait, la peur dans le visage de l'enfant.
02:16 Elles ont enfermé les enfants dans le noir, dans les toilettes adultes.
02:21 Elle s'amusait à lancer des couteaux et des fourchettes au plafond
02:25 pour les planter avec les enfants autour.
02:27 Il y en a une qui s'est retrouvée en soutien-gorge devant les enfants.
02:30 Et voilà, je pense qu'on n'a pas tout su et il vaut mieux pas qu'on sache tout.
02:34 - Les insultes sur les enfants, elle va se filmer en train d'insulter les enfants.
02:37 - Elle se filme en train d'insulter les enfants et elles en rigolent.
02:41 C'est ça, je crois, le plus dur, en fait.
02:43 On les entend rigoler.
02:44 "Ah, la salepute, regarde, elle arrive".
02:46 Voilà, c'est ce genre de situation.
02:49 - Il y a eu vraiment des actes de violence que vous avez pu voir ?
02:54 - Moi, je ne les ai pas vus parce qu'en fait...
02:56 - C'est-à-dire que même dans les vidéos ?
02:57 - Ah ben moi, j'ai vu toutes les vidéos.
02:59 - Et c'est quoi ? Il y avait quoi d'autre ?
03:00 - Il y avait tout ce que je viens de vous dire, en fait,
03:03 parce que la violence, elle peut être physique.
03:05 Elles ont avoué pendant leur garde à vue qu'elles ont secoué des enfants.
03:11 Mais elle est aussi verbale.
03:13 Enfin, rappeler un enfant de salepute, de couillon, c'est de la violence.
03:18 Voilà, c'est de la violence verbale.
03:19 - On a du mal à y croire.
03:21 - Mais oui, moi aussi, j'ai eu du mal à...
03:23 - Quand cette jeune dame est venue vous voir pour voir ce qui se passe,
03:28 au début, je suis sûr que vous vous êtes dit "ce n'est pas possible".
03:30 Elle vous a montré les vidéos ?
03:31 - Moi, quand elle m'a appelée en disant "j'ai des choses à vous montrer",
03:34 ok, si tu affirmes des choses, il faut que j'ai des preuves, en fait.
03:39 Tu ne peux pas accuser tes collègues comme ça sans preuve.
03:42 On a pris rendez-vous un jeudi à 11h.
03:45 J'ai tout le tracé par coeur.
03:48 Elle m'a apporté toutes les preuves et là, je ne pouvais que constater
03:52 ce qui se passait dans mes structures.
03:53 - Quand vous avez vu tout ça, ça a été quoi votre réaction ?
03:55 - Moi, mon monde s'effondre en fait, du nerf.
03:58 Là, on se dit "mais qu'est-ce qui m'arrive ?
04:00 Qu'est-ce qui se passe quand je ne suis pas là ?"
04:02 Parce que j'ai trois structures, je ne peux pas être sur les trois
04:05 structures en même temps de 7h30 à 18h30.
04:08 Donc, à un moment donné, il faut que je fasse confiance à mon personnel.
04:11 - Vous vous culpabilisez ?
04:12 - Mais je culpabilise encore.
04:14 - Bah oui, de toute façon, le traumatisme, il va être là.
04:16 - Avant qu'on parle.
04:17 - Parce qu'en fait, c'est de la manipulation.
04:19 Elle laissait la fenêtre ouverte pour entendre ma voiture arriver,
04:22 pour entendre la voiture des familles arriver et pour pouvoir
04:25 changer de comportement.
04:27 - Elles étaient combien ?
04:28 - Elles étaient deux.
04:29 Il y avait une meneuse, une auxiliaire de puriculture,
04:31 donc avec un diplôme et une auxiliaire de crèche qui avait un CAP Petite Enfance.
04:36 - Il y avait combien de personnes dans la crèche qui s'occupaient des enfants ?
04:39 - Elles étaient deux le matin, trois dans la journée, donc trois pour 10 enfants.
04:44 - D'accord.
04:44 - Nous, on était en sureffectif.
04:45 - C'est bien, bien sûr.
04:46 - Donc, il n'y avait pas de pression.
04:49 - Et donc, c'est la dernière qui vous a alerté.
04:50 - C'est la dernière qui m'a alertée.
04:51 - Elle a subi des pressions des deux autres qui lui ont dit,
04:53 "On va te faire licencier."
04:55 - C'est ça.
04:56 - D'accord.
04:57 Comment elle s'est procuré les vidéos ?
04:58 Elle se les envoyait entre elles ?
04:59 - Elle a un groupe, les réseaux sociaux.
05:01 Maintenant, on fait tout sur les réseaux sociaux.
05:04 - Elles avaient un groupe WhatsApp.
05:05 - C'est exactement ça.
05:06 - Elles s'envoyaient toutes les vidéos ensemble pour se marrer.
05:08 - C'est ça.
05:10 - Juste avant, parce que la question que tout le monde se pose,
05:12 c'est comment vous avez prévenu les parents ?
05:13 Et si vous les avez prévenus de tout ça, je pense que oui, vu votre...
05:16 - Il y a eu tout un processus, effectivement.
05:18 - On va en parler dans un instant.
05:18 Juste, est-ce que je ne vous sens pas du tout étonnée, Amandine,
05:21 parce que vous avez travaillé dans une autre crèche,
05:22 de ce que vous venez d'entendre ?
05:24 - J'ai travaillé pour plusieurs groupes privés.
05:25 Il y en a été quatre.
05:26 - D'accord.
05:27 - Quatre et un où ça...
05:28 Enfin, quatre où ça ne s'est pas bien passé
05:30 et un où ça s'est très bien passé.
05:31 - Alors, où ça ne s'est pas bien passé,
05:32 est-ce que vous reconnaissez ce que décrit Julie ?
05:35 - Alors non, personnellement, moi, je n'ai pas eu de collègues maltraitantes,
05:39 je n'ai pas eu des insultes, tout ça, moi, je ne l'ai pas eu.
05:43 Moi, j'ai eu plus vraiment le côté où, au final,
05:45 nos grands patrons ne nous donnaient pas juste les moyens nécessaires.
05:50 Pour... Enfin, c'est...
05:52 Par exemple, après le reportage qu'on a pu faire hier soir,
05:54 les gens nous ont dit "oui, mais on ne va pas mettre la maltraitance
05:57 sur le manque de personnel ou quoi que ce soit".
05:59 Mais moi, j'ai juste une question à poser.
06:01 Vraiment, comment voulez-vous qu'on traite bien des enfants ?
06:04 Moi, personnellement, je l'ai vécu.
06:06 Les 15 enfants, je les ai changés à la chaîne,
06:08 je les ai nourris à la chaîne, je les ai endormis.
06:10 Est-ce que même je peux prendre 15 enfants et les bercer
06:13 et leur chanter une douche ?
06:13 - On a vu hier aussi, dans ce reportage,
06:16 qu'il y a une journaliste qui s'est infiltrée dans la crèche,
06:19 elle n'a aucun diplôme, aucune expérience.
06:21 - Mais ça, ça arrive souvent.
06:21 - Parce que c'est la nouvelle législation.
06:23 - Mais c'était avant.
06:25 Moi, personnellement, en 2019, j'ai travaillé avec une personne
06:27 qui avait un CAP fleuriste.
06:28 - Ouais, ça, rien à voir.
06:30 - On a fait des beaux bouquets.
06:31 - C'est un avantage.
06:34 - Le papier crépon, elle le pliait 1000 personnes.
06:38 Mais ça, ça arrivait déjà avant, sauf qu'en fait, c'était caché.
06:41 Et les parents, ils ne vont pas forcément nous demander
06:44 quel diplôme on a.
06:45 Ils ne sont pas forcément conscients.
06:46 - Ils ont confiance aussi.
06:46 On peut comprendre que les parents qui se disent
06:48 quand on laisse notre enfant à la crèche...
06:50 - C'est la prenelle de leurs yeux.
06:52 Donc, il faut qu'ils aient confiance.
06:53 Nous, c'est les premiers en ligne.
06:56 Ils n'ont pas le choix parce qu'ils travaillent aussi.
06:58 - Ils n'ont pas le choix, mais ils ont le choix
07:00 entre l'assistante maternelle, la crèche.
07:01 On se dit la crèche, ben voilà, l'assistante maternelle,
07:04 elle est toute seule chez elle.
07:05 Il faut que je trouve la bonne.
07:06 Il faut qu'il y ait ce feeling.
07:08 La crèche, s'il y a une des personnes avec qui
07:10 je ne vais pas accrocher, bon, il y en a d'autres.
07:12 - Mais ça coûte moins cher.
07:14 - Julie, ce qui va intéresser et s'intéresse
07:16 nos téléspectateurs, c'est qu'on se demande tous,
07:18 vous voyez ces vidéos, qu'est-ce que vous faites après ?
07:19 Est-ce que vous voyez ces vidéos vraiment qui vous retournent ?
07:23 - Oui, complètement.
07:24 J'ai le rendez-vous à 11h.
07:25 A 13h, je leur donne leur lettre de mise à pied conservatoire.
07:29 Je leur dis, vous rentrez chez vous.
07:31 - Sans aucune explication ?
07:32 - Sans aucune explication.
07:34 Mais bizarrement, elles ne m'ont pas posé de question non plus.
07:35 - Elles ont compris ?
07:36 - Je ne sais pas si elles ont compris,
07:38 parce que même pendant le procès,
07:40 je ne sais pas si elles ont réalisé la situation, en fait.
07:42 - Et donc, vous leur dites, terminez pour vous.
07:44 - Terminez, vous rentrez chez vous.
07:46 J'appelle les services du département pour les prévenir
07:49 en disant, ben voilà, moi, il se passe ça.
07:51 Qu'est-ce qu'il faut que je fasse ?
07:52 Parce que je suis un peu perdue, je suis un peu toute seule.
07:55 L'après-midi, manque de bol, ils ne sont pas joignables.
07:57 - D'accord.
07:58 - Je rappelle le vendredi matin, j'arrive à avoir une secrétaire
08:01 qui me dit, pas de souci, j'envoie un mail,
08:03 on vous rappelle dans la journée.
08:04 Sauf que, ben moi, il faut que je gise quand même rapidement.
08:07 Je ne sais pas ce qu'il faut que je fasse.
08:08 J'appelle mon avocate, elle me dit, il faut aller faire un signalement.
08:11 Donc, je décide d'aller à la police nationale,
08:13 je vais faire mon signalement.
08:15 Toujours pas de nouvelles des services du département.
08:18 La PMI, ça reste Protection Maternelle et Infantile,
08:21 pourtant, c'est dans le nom, mais je n'ai aucun retour.
08:25 Le lundi, je tente de les rappeler, j'ai enfin quelqu'un.
08:29 Je lui explique les faits, mais je veux la voir, en fait, cette personne.
08:33 Donc, je ne lui explique pas tout.
08:34 Je lui demande vraiment qu'on se rende compte
08:35 pour que je lui explique la situation.
08:37 Elle me dit, j'ai des dossiers plus importants que ça,
08:40 on vous verra au mois d'octobre.
08:41 On est le 6 août.
08:44 Le 9 août, pardon.
08:45 - Oui, c'est pareil.
08:46 - À un moment donné, je ne sais pas ce qui est plus important que ça, en fait.
08:49 - Bien sûr.
08:50 - Avant de raccrocher, je lui dis,
08:51 je pense que vous ne mesurez pas la gravité des faits.
08:54 - La gravité des faits, oui.
08:55 Alors, la question aussi que tout le monde se pose, c'est...
08:58 - Les familles, comment on fait après ?
09:00 - Les 10 familles.
09:01 Comment vous faites avec les 10 familles pour leur dire ce qui s'est passé
09:05 et trouver les bons mots et ne pas que ça vous retombe dessus ?
09:08 Parce qu'à un moment, elles vont vous dire, vous êtes la responsable.
09:10 - Le lundi, donc, j'ai la PMI.
09:13 Le jeudi, je suis entendue par la brigade des mineurs pendant 5 heures.
09:17 - Là, pour l'instant, les parents, ils ne sont pas au courant.
09:18 - Pour l'instant, personne n'est au courant.
09:20 Et en plus, c'est les vacances d'été.
09:21 Donc, bon, ça me permet, moi, de gérer un peu les remplacements, de gérer tout ça.
09:25 - Super, tes vacances.
09:26 - Je n'ai pas eu de vacances.
09:28 Je fais que ça.
09:30 À la brigade des mineurs, ils m'ont dit,
09:31 maintenant, il va falloir nous communiquer les coordonnées de toutes les familles.
09:35 On va les appeler.
09:35 Je lui ai dit, non, moi, je vais les appeler et après, vous les appelez.
09:38 Moi, je ne voulais pas que les familles, en fait, aient un appel de la brigade des mineurs.
09:42 Enfin, déjà, on va leur annoncer que leurs enfants ont potentiellement subi des violences.
09:46 Si en plus, c'est la brigade des mineurs qui leur annonce ça.
09:48 Enfin, moi, je me devais, en fait, de les appeler.
09:52 Donc, j'ai appelé chaque famille.
09:53 - Qu'est-ce que vous dites ?
09:53 Alors, vous tombez sur la maman ou le papa.
09:56 - Chaque famille tombe des nues.
09:58 - Vous leur dites quoi ?
09:58 Parce que j'ai envie de savoir cette conversation.
10:01 Vous les appelez ?
10:02 - Moi, je les appelle.
10:03 Je leur dis potentiellement, moi, je n'ai pas forcément les noms des enfants
10:07 qui ont été touchés parce que je n'ai pas vu toutes les vidéos.
10:11 - Vous leur expliquez quoi ?
10:11 Vous leur dites, voilà.
10:12 - Je leur dis, voilà, votre enfant.
10:14 Alors, pour certains enfants où je savais ce qu'ils avaient subi,
10:17 voilà, votre enfant a subi tel sévice.
10:20 Est-ce que vous, vous avez vu un changement de comportement à la maison ?
10:24 Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous a alarmé ?
10:26 Est-ce que, voilà, est-ce qu'on aurait pu voir quelque chose ?
10:30 Parce qu'en fait, ce qui s'est passé, c'est qu'elles ont tellement bien manipulé,
10:33 qu'ils ont manipulé les familles, les équipes, les enfants,
10:37 parce qu'aucun enfant n'a eu un changement de comportement notable.
10:40 Il n'y a pas d'enfants qui se sont mis à hurler le matin pour venir à la crèche en disant,
10:43 non, non, je ne veux pas les voir, rien.
10:45 - Et qu'est-ce qui vous a dit ?
10:46 - Ça aurait pu nous alarmer.
10:46 - Vous avez dit quoi à les parents ?
10:48 - Au départ, les parents très, très empathiques m'ont dit, mais ce n'est pas de votre faute.
10:52 On ne pensait pas.
10:52 Alors, moi, je n'avais pas le droit de dire en plus quels étaient les membres de l'équipe.
10:56 Donc, j'ai eu des questions et les parents ont mené l'enquête.
11:00 Je n'avais pas le droit.
11:02 - Alors, au début, empathique et après ?
11:04 - Et après, quand ils sont passés à la brigade des mineurs,
11:07 parce que tous les parents ont été entendus,
11:10 on retourne sa veste et puis, du coup, on dépose plainte contre les deux salariés,
11:15 mais aussi contre toute l'équipe, contre la société et tout ça.
11:19 Après, je l'entends.
11:21 Moi, dans leur situation, j'aurais sûrement fait la même chose.
11:24 - Bien sûr.
11:25 - Mais voilà, il y a quand même des familles qui m'ont soutenue,
11:27 il y a des familles qui ont laissé leurs enfants
11:29 parce que les deux salariés, moi, j'avais enlevé le danger.
11:32 Donc, les deux salariés n'étaient plus là, j'avais reformé l'équipe.
11:35 Donc, ils ont gardé cette confiance.
11:38 D'autres sont partis, allé chercher d'autres enfants.
11:41 Après, aller faire de la pub quand vous êtes fiché crèche avec violence sur enfant,
11:47 ça devient compliqué.
11:48 - Alors, aujourd'hui, vous en êtes où, justement ?
11:50 - Eh bien, il y a eu le procès, donc il y a eu la garde à vue.
11:52 Il y en a une des deux qui a avoué les faits qu'à la 47e heure, quand même.
11:56 - D'accord, ah ouais.
11:58 - Sachant qu'il y a quand même les vidéos.
11:59 - Bien sûr, ouais.
12:01 - Il y a eu le procès, 8 heures de procès.
12:03 - Et alors, qu'est-ce qu'elles ont eues ?
12:05 - Pendant lesquelles, elles, elles n'ont donné aucun remord, aucun regret,
12:09 aucun trémolo dans la voie, rien du tout.
12:12 Elles ont eu un an de prison avec sursis et interdiction définitive
12:16 d'exercer auprès d'enfants.
12:17 - Ah, donc rien, quoi.
12:17 - Donc, moi, c'est ce que je voulais.
12:18 - Rien, rien, c'est pas...
12:20 - C'est rien, on est d'accord, mais moi, je voulais les couper d'un coup.
12:22 Ça veut dire qu'elles ne recommenceront pas déjà auprès d'autres enfants.
12:24 - Elles ne recommenceront pas, mais bon...
12:26 - Sachant qu'il y en a eu une des deux, celle qui était meneuse,
12:28 travaillait dans une crèche municipale.
12:30 Elle s'est vantée d'avoir fait des...
12:32 D'avoir commis des actes de violence dans cette crèche municipale.
12:36 La crèche l'a juste remerciée.
12:37 Elle a recommencé ailleurs.
12:39 J'aurais pu juste les licencier, c'était pas mon intérêt.
12:42 Moi, j'avais envie de les arrêter, de les stopper dans cette violence, en fait.
12:45 Moi, j'en ai perdu mon entreprise.
12:47 Il a fallu que je mette en liquidation.
12:48 - Donc là, c'est ça, vous vous en êtes où ?
12:49 Vous avez mis en liquidation, non ?
12:50 - Moi, je suis...
12:51 La procédure est en cours sur la mise en liquidation.
12:54 Le 1er février 2022, je me suis retrouvée avec un crédit de 33 000 euros
13:00 à payer tous les mois alors que je n'ai plus rien.
13:02 J'ai 900 euros d'allocation Pôle emploi.
13:05 Il a fallu que je retravaille pendant 6 mois.
13:07 J'ai fait tous les boulots que je pouvais.
13:10 Et là, voilà, j'ai mon crédit à payer et...
13:13 - Là, vous avez arrêté complètement votre activité ?
13:14 - Oui.
13:15 J'ai revendu mes structures à la barre.
13:18 Je voulais pas emmener tout le monde avec moi dans ma chute.
13:22 Donc, les familles ont continué à avoir un mode de garde
13:25 et mes 19 autres salariés ont continué à avoir leur emploi.
13:29 Je suis partie toute seule.
13:31 J'ai coulé toute seule.
13:31 - Donc, elles vous ont flinguée votre vie ?
13:33 - Elles m'ont flinguée ma vie et la vie de ma famille
13:36 et la vie des enfants et la vie des familles des enfants.
13:40 Et elles, elles ne se rendent compte de rien, en fait.
13:43 - Vous n'avez plus de nouvelles de ces 2 personnes ?
13:45 - Non, et puis, vaut mieux pas que j'en ai.
13:46 - Ouais, c'est...
13:48 - J'ai pas envie.
13:49 - Aujourd'hui, vous faites quoi ?
13:50 - Aujourd'hui, je suis en création d'entreprise
13:52 parce que, bah, maintenant, je veux former, en fait.
13:55 Je veux former les gens.
13:57 Alors, je suis pompier volontaire, donc je vais faire du SST.
13:59 Je vais faire de la formation incendie.
14:01 Et puis, peut-être former un jour dans les crèches, voilà,
14:04 par rapport à mon expérience, par rapport à tout ce que j'ai vécu.
14:07 Pourquoi pas, voilà, aider dans les écoles à parler de tout ça.
14:12 - Vous culpabilisez encore de tout ce qui s'est passé ?
14:14 - Je culpabilise et je culpabiliserai toujours de m'être fait manipuler
14:19 et de ne pas avoir vu tout ça, en fait.
14:21 - Pour vous, c'était des employés modèles ?
14:23 Vous aviez aucun problème ?
14:24 - Il n'y a pas d'employés modèles, mais je leur faisais confiance.
14:26 - Ouais, vraiment ? - Ouais.
14:28 - Vous disiez, quand les enfants sont avec elles, je n'ai pas de souci.
14:31 - Ben oui, je ne peux pas être partout.
14:33 Après, moi, ce que je veux dire aux familles, c'est voilà,
14:37 il y a ce rapport qui est sorti.
14:39 Oui, il y a des violences.
14:40 On en a déjà parlé aux EHPAD.
14:42 Ce n'est pas une généralité.
14:44 Il faut que ça se sache, mais ce n'est pas une généralité.
14:47 Il y a des très bonnes crèches.
14:48 Il y a des très bonnes professionnelles.
14:50 - Justement, Amandine. - Je pense qu'Amandine en est le cas.
14:53 - Vous avez des enfants ? - Oui.
14:55 - Vous en avez combien ? - Je n'en ai qu'une.
14:56 - Elle est en âge d'aller en crèche ? - Oui.
14:58 - Vous allez la mettre en crèche ? - Ça ne va pas ou quoi ?
15:00 - Non, mais c'est incroyable ce que vous dites.
15:02 - C'est incroyable. - Jamais de la vie, quoi.
15:04 - C'est incroyable. - C'est incroyable.
15:05 - J'ai dit que je ne mettais pas mes enfants.
15:06 - Non, en fait, mon conjoint a un métier où il part en déplacement.
15:09 - Non, mais au-delà de ça, ça veut dire que, pour vous,
15:12 comme vous m'avez dit, jamais de la vie ?
15:13 Pour vous, jamais de la vie ?
15:14 - Jamais de la vie à franchir les pieds d'une crèche.
15:16 - C'est chaud. - C'était le seul moyen pour que,
15:18 moi-même, je retourne au travail en crèche.
15:20 - Oui.
15:21 - Quand on a discuté avec mon conjoint de retourner au travail,
15:25 de mettre ma fille en crèche, je me suis mise par terre
15:29 et j'ai pleuré et j'ai dit "ce n'est pas possible".
15:31 Ma fille ne franchira pas, elle ne sera pas maltraitée,
15:34 ce n'est pas possible.
15:35 - Vous pensez vraiment que, si elle va en crèche,
15:37 elle a une chance sur deux d'être maltraitée ?
15:39 - Ce n'est pas une généralité. - Bien sûr, c'est ça.
15:41 - J'ai travaillé pour un groupe magique.
15:43 - Un groupe sur quatre. - Un groupe sur quatre, oui.
15:45 - Vous avez travaillé pour quatre crèches, il y en a trois,
15:47 vous avez travaillé pour cinq. - J'ai travaillé pour cinq crèches
15:49 différentes, cinq privées. Je n'ai jamais fait de municipales,
15:51 donc je ne partirais même pas sur ce sujet-là,
15:53 mais il y en a une où c'est la dernière que j'ai faite,
15:56 très bonne expérience, où les enfants étaient mis
15:59 vraiment sur l'avant, on avait du budget pour nous.
16:03 - Mais vous ne vous prendriez pas le risque ?
16:05 - Non. - Non ?
16:06 - Pas sur les gros de ce monde. - Ah ouais ?
16:08 - Pas sur les grosses crèches de ce monde, non.
16:10 - Ah sûr, donc votre enfant, jamais en crèche ?
16:12 - Jamais, c'est pour ça que j'ai arrêté de travailler
16:14 et que j'ai passé mon agrément d'assistance maternelle
16:16 pour pouvoir accueillir deux petites filles
16:19 qui font mon bonheur, parce que maintenant, en soi,
16:23 je peux faire mon métier correctement,
16:26 mais les deux filles que j'accueille,
16:28 ont chacune leur lit, je peux mettre le budget que je veux
16:31 pour faire les activités que je veux.
16:34 - Très fort. Merci en tout cas, vous deux,
16:36 d'avoir été avec nous. Merci. - De rien.
16:38 [Musique]

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