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Crise économique, drame écologique et santé mentale, Salome Saqué, autrice, déconstruit les préjugés sur la jeunesse : "La parole des jeunes ne vaut pas moins"

Son livre "Sois jeune et tais-toi", publié aux éditions Payot, est disponible en librairies.

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Transcription
00:00 Les jeunes sont fainéants, incultes, égocentrés, narcissiques.
00:03 J'ai 27 ans, j'ai enquêté sur le sujet et je vais vous montrer que c'est complètement faux.
00:06 On m'a plutôt souvent confondu avec la stagiaire alors que je dirigeais déjà le pôle économie de mon média.
00:12 J'allais avoir des invités qui arrivaient et qui disaient "excusez-moi, où est la journaliste ?" alors que c'était moi.
00:17 Il y avait vraiment une forme de disqualification quasi systématique de mon opinion parce que j'étais jeune
00:22 et donc qu'elle valait moins que l'opinion de personnes plus âgées.
00:25 C'est pas toutes les personnes âgées, heureusement il y en a qui m'ont donné la parole
00:28 et je les en remercie.
00:30 J'ai eu beaucoup de jeunes qui m'ont raconté qu'eux aussi dans leur famille,
00:33 quand ils essayaient de faire valoir une opinion ou un point de vue, on leur disait
00:36 "dans quelques années tu ne diras plus la même chose".
00:38 La parole des jeunes ne vaut pas moins et ne vaut pas plus que la parole des plus âgés.
00:43 L'une des principales accusations qu'on va retrouver, c'est que les jeunes ne veulent plus travailler,
00:47 les jeunes ne veulent pas se bouger.
00:48 En gros, ils méritent un petit peu aussi la situation dans laquelle ils se trouvent.
00:51 Ce que j'ai vraiment essayé de démontrer dans le livre, c'est que les jeunes font face à des paramètres socio-économiques
00:56 qui sont vraiment bien plus difficiles que ceux qu'on a pu voir dans ce qu'on appelle les 30 glorieuses.
01:02 Entre 1982 et 2020, le taux d'emploi précaire des jeunes est passé de 17% à 52%.
01:08 La moitié des personnes qui font la queue au resto du cœur sont les jeunes.
01:12 Et lors d'entretiens d'embauche, des choses que les jeunes entendent beaucoup,
01:14 c'est "ah mais t'as pas assez d'expérience professionnelle, on peut pas t'embaucher".
01:17 Mais si on ne nous donne pas la possibilité d'avoir une expérience professionnelle,
01:20 on peut pas en avoir.
01:21 Ensuite, et là c'est complètement inédit,
01:23 les jeunes doivent faire face à l'urgence écologique.
01:26 Et c'est pas seulement l'urgence écologique qui est terrifiante pour beaucoup de jeunes,
01:30 c'est le constat de l'inaction des plus âgés,
01:33 qui sont aux manettes de la société et qui ne font rien de significatif pour assurer notre futur.
01:39 Et derrière ce discours de critique des jeunes ou alors de délégation des responsabilités sur les jeunes,
01:44 se cache une forme de lâcheté à mes yeux,
01:46 une forme de facilité qui est de dire "non non mais c'est bon, c'est pas mon problème, je m'en occupe pas".
01:51 Mais en fait si, c'est totalement votre problème,
01:53 en tout cas c'est un problème que nous ne pourrons pas résoudre sans votre aide,
01:57 à vous, les personnes plus âgées.
01:58 Comme beaucoup d'autres jeunes, je souffre des coûts anxiétés,
02:00 c'est-à-dire que d'étudier toute la journée l'urgence écologique
02:03 et encore une fois surtout l'inaction, ça me terrifie.
02:07 Et à titre personnel, et j'impose pas ça comme pensée, c'est vraiment juste moi mon cas,
02:11 je n'ai pas envie, pour l'instant en tout cas, de mettre un enfant au monde dans ces conditions
02:15 parce que je pourrais pas le protéger.
02:16 Si demain je voyais qu'il y avait une véritable prise de conscience,
02:19 peut-être que je changerais d'avis.
02:20 Mais là, tant que ce tournant-là n'est pas pris,
02:22 je pense vraiment que je vais rester sur cette position malheureusement.
02:26 C'est quelque chose qui a été vraiment difficile à vivre
02:27 et qui me donne encore envie de pleurer quand j'en parle.
02:30 C'est de me dire que quelque chose d'aussi grave qu'une pandémie,
02:32 qui nous a tous mis à l'arrêt,
02:33 qui nous a montré à quel point nous allions trop vite,
02:36 à quel point nous étions dans une croissance effrénée,
02:38 à quel point les métiers essentiels n'étaient pas ceux que l'on valorisait,
02:41 à quel point il fallait changer de modèle économique,
02:44 de me dire que tout ça, ça n'a pas suffi à ce qu'on bifurque.
02:49 Ça, c'est quelque chose de terrifiant.
02:51 Et ce qui m'a d'autant plus fendu le cœur,
02:54 c'était de voir à quel point les jeunes ont été les grands oubliés de cette crise.
02:58 On a pu les laisser s'isoler, on a pu les laisser sombrer dans la dépression
03:02 et que ça n'a pas ému grand monde, en tout cas pas assez de monde,
03:04 pour qu'on ait des politiques publiques dignes de ce nom.
03:06 Moi, ce qui m'a frappée pendant que je recueillais les témoignages,
03:09 c'est à quel point certains jeunes avaient honte de leur état de santé mentale,
03:12 à quel point ils avaient honte d'être en dépression,
03:14 à quel point ils avaient honte d'être parfois en échec scolaire
03:17 ou de tout simplement ne pas y arriver.
03:18 Mais je pense qu'il faut que les jeunes, au contraire,
03:19 fassent entendre leur voix sur ce qu'ils vivent
03:21 et qu'ils comprennent qu'ils n'ont absolument aucune honte à avoir,
03:24 que c'est même parfaitement légitime de ne pas se sentir bien et serein dans ce contexte-là.
03:29 Aujourd'hui, je ne veux surtout pas alimenter une certaine rancœur
03:32 envers ces générations qui auraient tout eu.
03:34 C'est vraiment un appel à l'union des générations.
03:37 L'heure n'est vraiment pas à la recherche de coupables qu'il faudrait punir,
03:40 mais plutôt à la reconstruction d'un avenir sur une planète tout simplement habitable
03:44 pour les générations futures.
03:45 [BIP]

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