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Olivier Lalanne
Rédacteur en chef de Harper’s Bazaar France
Le magazine mythique lancé en 1867 à New York compte désormais 29 déclinaisons internationales

Son nom est mondialement célèbre, pourtant le public français connait peu ce prestigieux magazine américain. Il va le découvrir à partir de demain. "Harper's Bazaar" lance enfin sa version hexagonale, sous l'impulsion de Prisma Média (Vivendi), numéro un de la presse magazine. C'est le plus ancien titre de mode encore existant, il est né en 1867 à New York. Le 1er à avoir mis un homme en couverture, Steve McQueen. Le 1er à être sorti des studios pour faire des shootings photo en extérieur. C’était à la fin des années 30, le procédé Kodachrome permet alors de faire des clichés en couleur et la peau dorée des mannequins ressort encore mieux au soleil.
Harper's Bazaar a aussi révélé de grands couturiers : Christian Dior et Jeanne Lanvin pour ne citer qu'eux. De célèbres auteurs ont écrit pour le mensuel : Colette, Françoise Sagan, Simone de Beauvoir, André Malraux, Charles Dickens qui a publié une nouvelle dans le tout 1er numéro. Un jeune illustrateur y a également démarré sa carrière en dessinant des chaussures : un certain Andy Warhol.
Olivier Lalanne, le rédacteur en chef de Harper's Bazaar France, est l’invité médias de Célyne Baÿt-Darcourt

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Transcription
00:00 Bonjour Céline Bidarco, votre invité média est le rédacteur en chef d'un nouveau magazine
00:05 de vod' ou plutôt la première version française d'un titre mythique vieux d'un siècle et
00:10 demi.
00:11 Harper's Bazaar France arrive demain dans les kiosques.
00:13 Bonjour Olivier Lalanne, c'est un mensuel qui était décliné dans 28 pays mais pas
00:18 en France.
00:19 Comment se fait-il qu'il n'y avait pas d'édition dans un pays dont la capitale représente
00:22 la mode et le luxe ? Le groupe Marie Claire avait tenté il y a une dizaine d'années
00:25 mais il n'y était pas arrivé.
00:26 C'est un mystère auquel je n'ai pas la réponse.
00:30 Je sais qu'il y avait effectivement des numéros zéro qui avaient été élaborés mais c'est
00:33 vrai que ça n'a jamais abouti et c'est la première fois que ce titre mythique américain
00:38 est lancé en France.
00:39 L'anomalie est réparée.
00:40 Avant qu'on fasse appel à vous pour venir, que représentait ce magazine pour le journaliste
00:46 de mode que vous êtes ?
00:47 Une référence, c'est un magazine extraordinaire, encore une fois c'est vraiment un mythe de
00:51 la presse de mode.
00:52 Pourquoi on dit que c'est un mythe ?
00:54 Parce que d'abord l'ancienneté, il a été fondé en 1867 aux Etats-Unis.
00:59 C'est un magazine qui est assez précurseur dès le départ parce que la première éditrice
01:02 en chef était une suffragette très émancipée, intelligente.
01:05 Un peu précurseur ou ce, je ne sais pas comment.
01:08 Et puis après c'est un magazine qui a existé pour ses qualités esthétiques, créatives
01:14 avec de la mode évidemment mais des grands photographes, beaucoup d'artistes intervenants,
01:18 des grands écrivains, des journalistes.
01:19 Donc ce n'est pas un magazine qui s'est contenté d'être le témoin de l'histoire
01:22 de la mode.
01:23 Il a écrit aussi.
01:24 Et ça a fait l'objet d'une très belle exposition aux Art Déco.
01:29 C'est un grand magazine à ce titre.
01:31 Il n'y a pas que des photos de mode, il y a de la lecture, du contenu journalistique.
01:35 Vous voulez, je cite, "raconter le monde avec un accent français".
01:37 C'est-à-dire quel est le regard français sur le style et sur le monde ?
01:40 Déjà il y a une fascination universelle pour la mode française et aussi pour la parisienne,
01:49 la française, la façon dont elle s'habille, elle s'approprie la mode.
01:52 Ce n'est pas un peu cliché ça ?
01:53 Oui, mais c'est un cliché, mais ça a le mérite d'être valide.
01:55 Donc il y a une attente.
01:58 Je sais que je travaillais dans un magazine de mode au préalable, français, et 25% des
02:02 ventes se faisaient à l'étranger.
02:03 Vous parlez de Vogue ?
02:04 Voilà.
02:05 Et il y avait effectivement un intérêt de la part du lectorat international pour justement
02:09 la mode française, pour le regard d'un magazine français sur la mode, sur la culture, sur
02:14 l'art de vie.
02:15 Donc je pense qu'il a toutes ces raisons d'être.
02:17 Alors ce Harper's Bazaar France, il va reprendre des articles des versions étrangères ?
02:21 Absolument pas.
02:22 Il est produit à 100% par la rédaction française.
02:25 Y compris les photos ?
02:26 Y compris les photos.
02:27 D'un point de vue textuel, iconographique, tout est produit par nous.
02:29 Après voilà, si dans le Bazaar américain, par exemple, il y a un très bel entretien
02:33 de disons Barack Obama, je ne sais qui, qui me paraît pertinent pour le marché français,
02:37 je ne me priverais pas de l'adapter.
02:39 Ça a été le premier magazine de mode à mettre en couverture une femme en bikini ?
02:43 Alors je ne suis pas sûr de ça.
02:44 Ça a été dit, mais on est hindou, on cherche à le sourcer d'ailleurs.
02:47 Mais voilà, je ne suis pas sûr de ça.
02:49 Mais vous l'avez retrouvé cette couverture ? Elle existe ?
02:50 Non.
02:51 C'est un des premiers magazines qui a mis un bikini à l'intérieur du journal.
02:54 Une femme en bikini.
02:55 Mais je ne suis pas sûr que ce soit en couverture.
02:57 J'ai un doute, donc je ne préfère pas affirmer quelque chose.
02:59 J'imagine que vous aussi, vous souhaitez innover.
03:02 Comment comptez-vous le faire et vous inscrire dans cette ligne quand même des pionniers ?
03:05 C'est difficile d'innover aujourd'hui.
03:08 Oui, ce n'est pas mon ambition d'innover.
03:09 L'idée véritablement, c'est que quand on fait un magazine, il faut quand même être
03:12 les deux pieds très ancrés dans le réel.
03:14 Même si c'est un magazine de luxe, de mode, censé faire rêver.
03:17 On va quand même partir de cette base de la réalité pour essayer justement de l'interpréter,
03:21 de la transcender, de la ré-enchanter.
03:23 C'est un peu l'ambition de ce magazine.
03:26 Et de renaît aussi avec une notion de plaisir qui pour moi est capitale quand on parle de
03:29 presse.
03:30 C'est Mathias Goertler qui est le directeur de la rédaction.
03:33 Il occupe le même poste à Gala.
03:34 Est-ce que ça va être un mensuel un petit peu people puisque c'est sa spécialité ?
03:37 Non, pas du tout.
03:38 C'est vraiment au sein du groupe Prisma.
03:39 Harper's Bazaar est vraiment un ovni.
03:41 Ça n'a rien à voir avec d'autres titres qui appartiennent au portefeuille du groupe.
03:44 Et les hommes peuvent se retrouver dans ce Harper's Bazaar ou vous visez spécifiquement
03:48 les lectrices ?
03:49 Non, aujourd'hui ça n'a plus de sens.
03:50 Et puis il faut souligner un fait, c'est que les hommes ont toujours été très très
03:54 présents dans Harper's Bazaar.
03:55 Pour le coup, c'est le premier magazine qui a mis Steve McQueen.
04:00 Et donc à terme, j'ai l'intention effectivement non seulement de mettre des hommes dans le
04:04 journal, de les photographier et aussi j'espère de les fédérer en tant que lecteur.
04:08 Et à mettre aussi de grands auteurs puisque vous le disiez, ça c'est la tradition du
04:12 Harper's Bazaar.
04:13 Charles Dickens, Colette, Sagan, Malraux, vous allez aussi reprendre cette tradition ?
04:16 Absolument.
04:17 Et on a même lancé une rubrique qui sera dans chaque numéro qui s'appelle "Bazaar
04:19 Fiction" et toute l'idée de demander tous les mois à un écrivain, identifié, connu,
04:23 de nous faire une nouvelle originale autour du thème de la mode.
04:26 Donc c'est qui pour le premier numéro ? Emma Baker.
04:28 Donc vous le disiez, c'est Prisma Media qui lance ce mensuel.
04:31 Ça appartient à Vivendi, Vincent Bolloré qui est très critiqué pour son management,
04:35 ses méthodes interventionnistes.
04:36 Vous allez évidemment me dire Olivier Lalanne que vous avez une totale liberté éditoriale.
04:40 Je ne me trompe pas.
04:41 C'est vrai.
04:42 Mais alors y a-t-il, comme l'avait promis Claire Léos qui est la présidente de Prisma,
04:46 un code de bonne conduite au sein des magazines du groupe afin de conforter leur indépendance ?
04:49 Ça existe ou pas ?
04:50 Écoutez, je suis là depuis trois mois.
04:53 En tout cas ce que je peux vous dire c'est qu'en faisant ce magazine, j'ai eu les
04:55 mains complètement libres et que je n'ai pas été confronté à quoi que ce soit.
04:59 Ce que vous pouvez imaginer, ce que vous supposez.
05:02 Mais la réputation de ce groupe et de ce patron ne vous alerte pas ? Il n'y a pas
05:05 une lumière rouge ? Vigilance extrême ?
05:08 Non.
05:09 Encore une fois, je ne peux parler que de mon expérience à moi.
05:11 En faisant ce titre-là, c'est vrai que j'ai eu une liberté semblable à celle
05:14 que j'ai pu avoir dans d'autres groupes médias avant.
05:16 Qu'est-ce que le mouvement #MeToo a changé pour les titres féminins ? Est-ce qu'on
05:20 peut faire un magazine de mode comme avant ?
05:21 Certainement pas.
05:22 D'ailleurs c'est intéressant parce que dans le premier numéro, on a fait un papier
05:27 un peu décryptage sur est-ce que la mode peut encore provoquer.
05:29 Donc il est un peu question de ça aussi.
05:30 Non, on ne peut absolument pas faire les magazines comme avant.
05:33 Il y a des choses qui ne sont plus ni montrables ni…
05:36 Quoi par exemple ?
05:37 La femme objettisée, on pense aux grandes photos d'Edmund Newton, une femme à quatre
05:41 pattes avec une salle de cheval sur le dos.
05:43 Tout ça, ce n'est plus du tout envisageable aujourd'hui.
05:44 Les photos de Guy Bourdin avec des petites filles dans un lit.
05:46 Tout ça, c'est impossible.
05:48 Donc non, évidemment, un magazine encore une fois est ancré dans son époque.
05:53 Moi, je dis toujours que l'ambition de l'Art Force Bazaar, ce n'est pas forcément
05:55 de traiter ces sujets-là.
05:56 Ces sujets-là, pour moi, ils doivent être complètement digérés.
05:59 Ce n'est pas l'histoire du magazine, mais ça fait partie du vocabulaire de l'histoire.
06:02 L'histoire, c'est la créativité, c'est l'artistique.
06:05 Effectivement, tous ces paramètres associataux qui sont fondamentaux font partie du journal.
06:10 Mais ce n'est pas l'histoire.
06:11 Et y a-t-il encore besoin de magazines de mode à l'heure des influenceurs sur les
06:15 réseaux sociaux ?
06:16 Ah oui, plus que jamais.
06:17 Justement parce que les influenceurs montrent des choses sans… Ce ne sont pas des journalistes,
06:22 ce ne sont pas des stylistes, ce ne sont pas des photographes.
06:24 Ils ne délittéralisent pas.
06:26 Alors que le travail d'un journaliste, d'un photographe de mode, d'un styliste, c'est
06:29 littéraliser, d'avoir un point de vue.
06:30 Alors ils en ont un probablement, mais qui n'est pas, on va dire, professionnel.
06:35 Et je pense qu'à ce titre, un magazine aura toujours sa place.
06:37 Et plus que jamais aujourd'hui, on voit quand même que le marché du luxe et de la
06:40 mode se portent remarquablement bien.
06:42 Voilà, c'est un secteur qui ne connaît pas la crise et vous dites que c'est pareil
06:45 pour son lectorat.
06:46 C'est pour ça que vous vous lancez dans le papier.
06:47 Ce qui est très audacieux en ce moment avec la flambée du prix du papier et de l'électricité.
06:51 Absolument.
06:52 Après, Repense Bazar, encore une fois, à une place à part, ce n'est pas un magazine
06:54 serviciel lambda.
06:55 C'est vraiment un bel objet.
06:56 C'est un magazine qui se rapproche un peu du livre, tant dans son concept que dans sa
06:59 conception et dans son exécution.
07:01 Avec un papier haut de gamme.
07:02 Oui, 0,80 grammes.
07:03 Très beau papier.
07:04 Il y a la Fashion Week de Paris qui démarre lundi prochain.
07:08 C'est par hasard que vous lanciez quelques jours avant ?
07:11 Ce n'est pas un hasard.
07:12 Tout le monde sera là et je pense que ça va être le meilleur baptême pour la magazine.
07:14 Parce que la Fashion Week, ça fait vendre des magazines de mode ?
07:17 Ça donne de la visibilité.
07:19 Regardez, je suis là aujourd'hui.
07:20 Non mais oui, effectivement, je ne sais pas si ça fait vendre, mais en tout cas, ça
07:22 donne de la visibilité.
07:23 J'espère qu'à terme, ça fait vendre.
07:25 On souhaite bonne chance à toute votre équipe.
07:27 Merci d'être venu Olivier Lalanne.
07:29 Vous êtes le rédacteur en chef de Artpors, Bazar France dans le premier numéro.
07:33 Soir demain, vous étiez l'invité média de Céline Bidart-Court.

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