Journée nationale contre le sexisme : le phénomène ne recule pas en France

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Transcription
00:00 - Iseline Fourtyk-Durtard, bonjour. Vous êtes coprésidente du collectif Ensemble contre le sexisme.
00:05 D'abord, le chef de l'État consacre avec cette journée du 25 janvier une initiative dont vous, le collectif Ensemble, êtes à l'origine.
00:11 Il vous en rend d'ailleurs hommage.
00:13 - Tout à fait. Bonjour. Bonjour. Merci pour cette invitation.
00:17 Effectivement, on se réjouit de l'annonce présidentielle aujourd'hui qui consacre enfin une journée nationale contre le sexisme.
00:24 Ça fait des années qu'au sein du collectif Ensemble contre le sexisme, on se mobilise pour la création de cette journée,
00:30 considérant qu'on en a besoin. Et d'ailleurs, le dernier baromètre du HCE le prouve.
00:36 - On va l'évoquer, ce baromètre, mais en quoi une journée consacrée au sexisme peut faire avancer justement la cause de l'égalité entre les genres ?
00:45 - Vous voyez, ce soir, vous m'invitez sur votre plateau pour échanger avec vous sur le sujet.
00:49 On a eu énormément de sollicitations médiatiques. Ça permet de consacrer une mobilisation de l'ensemble de la société pour lutter contre le sexisme et avoir une journée dédiée.
00:58 C'est vraiment un outil de mise à l'agenda, finalement, qui est fantastique pour nous.
01:02 - Le sexisme perdure donc chez les jeunes, nous dit le rapport. Et ce, malgré le mouvement #MeToo, c'est une surprise pour vous ?
01:10 - C'est pas une surprise, c'est une déception.
01:14 Effectivement, le mouvement #MeToo nous a permis à nous, les femmes, de libérer notre parole, ou plutôt de libérer l'écoute.
01:20 Parce qu'en vérité, les femmes, ça fait longtemps qu'elles dénoncent les violences sexistes dont elles sont victimes.
01:25 Mais enfin, on les a entendues. Mais effectivement, c'est une déception parce qu'on attend de l'ensemble de la société de nous écouter et de prendre en compte ce que les femmes disent.
01:34 Ça vaut évidemment pour les pouvoirs publics, ça vaut aussi pour les hommes qui sont les auteurs des agissements et des violences sexistes. Et donc, effectivement, c'est une déception.
01:43 - 80% des femmes, selon un sondage réalisé par l'institut Via Voice, disent avoir l'impression d'avoir été moins bien traitées en raison de leur sexe, au cours de leur vie.
01:53 Par quel type d'attitude se manifeste ce sexisme au quotidien ?
01:58 - Ça va être des injonctions à la maternité parfaite pour les femmes, le yoga, la garde-enfant, ne jamais courir, tout gérer en même temps.
02:09 Ça va être les inégalités dans le partage des tâches domestiques, ça va être les injonctions comportementales, les assignations à des tâches stéréotypées,
02:19 les assignations aussi au domaine d'activité les moins rémunérateurs. Les services à la personne sont très largement assumés par les femmes.
02:26 C'est aussi là où les femmes touchent des salaires bien plus faibles. Et ça entretient la dépendance, ça entretient les violences.
02:35 Parce que quand on n'a pas les outils d'émancipation économique, quand on n'a pas les salaires qui vont avec ce qu'on apporte à la société,
02:41 eh bien forcément on est davantage soumise à des violences, à des situations de contraintes. Et donc tout ça, ce sont des manifestations du sexisme.
02:52 - Les mentalités n'ont donc pas évolué avec l'augmentation de la part des femmes, notamment en politique, la représentativité aussi dans les grandes entreprises ?
03:00 - Moi je pense que les mentalités, elles évoluent, honnêtement. Je suis d'accord que le rapport, le baromètre du HCE tire une sonnette d'alarme et c'est indispensable.
03:10 Il ne faut pas non plus voir le portrait, voir l'état des lieux de manière complètement négative. Mais en revanche, elles n'évoluent pas assez vite.
03:18 Et c'est en ça que je salue le travail du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes.
03:22 C'est que ça met un coup de projecteur sur le fait que les femmes parlent, qu'elles dénoncent le sexisme, mais que la réponse de la société est insuffisante.
03:30 - Si le sexisme perdure chez les jeunes, c'est donc qu'il y a également un problème d'éducation aujourd'hui ?
03:37 - Tout à fait. Tout à fait. D'ailleurs ça fait depuis le début des années 2000 que les séances d'éducation à la vie sexuelle et affective,
03:45 l'éducation à l'égalité dans les relations et dans l'intimité sont au programme et c'est encore largement inappliqué.
03:52 C'est pas la faute, je ne jette pas la pierre au professeur en disant cela, mais on manque de moyens concrets pour que cette éducation à la vie affective et sexuelle
04:02 soit effectivement déployée dans l'ensemble des niveaux d'enseignement et c'est un outil de prévention fantastique.
04:08 Parce que c'est en éduquant les jeunes filles à ce que ça veut dire être libre et ce que ça veut dire être à l'égal des hommes
04:15 qu'on leur permet également de se mobiliser contre les violences dont elles peuvent être victimes et surtout, on dit aux garçons "non, vous n'êtes pas les propriétaires des femmes".
04:22 - Oui, parce qu'il y a les inégalités dans les tâches, il y a les inégalités dans les rapports sociaux, mais il y a aussi, vous venez de le dire, ces phénomènes de violence.
04:28 14% de ces femmes, en tout cas de celles qui ont répondu encore une fois à cette enquête via Voice réalisée à l'occasion de ce rapport,
04:36 déclarent avoir subi déjà un acte sexuel imposé et plus largement, 37% d'entre elles, donc plus d'un tiers,
04:42 disent avoir vécu des situations non consenties dans les rapports sexuels. C'est une part qui semble aujourd'hui encore énorme dans la société.
04:52 - C'est énorme, mais c'est ce que disait par ailleurs chacune des vagues du mouvement #MeToo.
04:57 Et je voudrais qu'on dise la vérité des choses et les bons termes derrière cette question.
05:02 Un rapport sexuel non consenti, c'est un viol. Donc il s'agit aussi vraiment de le dire.
05:07 Évidemment, pour l'Institut de sondage, il fallait utiliser des formulations un peu plus neutralisées pour permettre la manifestation de la vérité.
05:14 Mais il faut dire les choses. Toutes les personnes qui ont répondu oui à cette question, elles ont déclaré avoir été victimes de viol ou de violence sexuelle.
05:21 - Y compris et souvent d'ailleurs dans le couple.
05:24 - Et souvent dans le couple, mais bien sûr, le couple est le premier lieu où les violences sexuelles et sexistes sont infligées aux femmes.
05:31 - Des situations qui donnent lieu à des formes, entre guillemets, pardonnez-moi le terme, il est sans doute mal choisi, d'auto-censure.
05:37 C'est-à-dire qu'on va adopter des comportements, des renoncements au quotidien pour éviter justement ce type de situation.
05:43 Neuf femmes sur dix interrogées, eh bien, disent renoncer parfois à des sorties ou des activités seules.
05:48 S'habiller aussi comme elles le souhaitent pour justement éviter des situations inconfortables.
05:54 - Oui, bien sûr. Alors moi, je pense que davantage que de l'auto-censure, c'est de l'auto-défense.
05:59 - Voilà, alors c'est pas les femmes qui se censurent, c'est la société qui censure les femmes.
06:03 Et elles sont obligées de construire des stratagèmes pour se défendre, pour éviter d'être exposées aux humiliations,
06:08 pour éviter d'être exposées aux violences, pour éviter d'être exposées aux agissements sexistes.
06:13 On parle tout le temps d'humour graveleux, mais ce sont des agressions. Ce sont des agressions. Il faut les reconnaître comme telles.
06:19 - Merci, Céline Fourtyk-Dutard, coprésidente du collectif Ensemble contre le sexisme,
06:25 à l'occasion de cette journée du 25 janvier, désormais décrétée journée nationale contre le sexisme et pour une société plus égalitaire.

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