L'affaire du Prado
... ou ce que la presse, toujours en mal de nouvelles à sensation, crut bon d'appeler telle. Rappelons-en brièvement le contexte. Jacques Soustelle, ancien représentant du gouvernement à Alger, venait d'être nommé ministre de l'Information. Il était alors fort mécontent de la ligne adoptée par le général de Gaulle. Il lui reprochait en particulier d'avoir dissout les « Comités de Salut public », qui défendaient l'Algérie française avec des moyens que l'Église avait plusieurs fois dénoncée. Dès lors, Soustelle cherchait en sous-main à opposer les chrétiens à l'œuvre gouvernementale en métropole, pour gêner de Gaulle dans sa politique algérienne. Du moins est-ce l'analyse que l'on fit dans les milieux proches du Vatican, quand une affaire d'importance mineure, survenue à Lyon, fut épinglée par la presse française, comme s'il se fût agi d'un cas où la sécurité nationale était mise en danger par des ecclésiastiques. D’ailleurs, au même moment, Bernard Boudouresque, prêtre de la Mission de France attaché au C.N.R.S., était arrêté en région parisienne pour avoir « hébergé des terroristes algériens ». En quoi le Prado, à Lyon, était-il impliqué dans « l'affaire » ?
Un prêtre du diocèse de Lyon, Albert Carteron, avait reçu du cardinal Gerlier, mission d'assurer une présence auprès des Algériens. Ce prêtre n'était pas du Prado bien qu'il y comptât, outre l'un de ses frères, de nombreux amis. Le 15 septembre 1958, il avait envoyé un Algérien à Louis Magnin, coresponsable avec Joseph Chaize de la formation des pradosiens au Noviciat « des Clochettes », à Saint-Fons. Cet Algérien, membre du F.L.N., avait demandé au Père Magnin de mettre à la disposition de son organisation d'aide sociale aux familles de détenus une chambre du Noviciat où l'on puisse éventuellement entreposer de l'argent. Les Pères du Noviciat avaient accepté de rendre ce service. Or, le 14 octobre, les responsables algériens de l'entraide sociale étaient arrêtés à Lyon ; et le lendemain les Pères Chaize et Magnin étaient déférés au Parquet pour un long interrogatoire. Le 18, Louis Magnin était inculpé d'« atteinte à l'intégrité du territoire ». Motif : apprenant l’arrestation des membres de l’organisation F.L.N., il avait détruit les listes que ceux-ci avaient laissées, avec de l’argent, dans la chambre qu’ils utilisaient au Noviciat de Saint-Fons.
Les faits s'arrêtaient là. Ce fut aussitôt une bourrasque dans l’opinion publique. Les cardinaux se trouvant justement à Rome à ce moment-là, réunis en conclave pour élire un successeur à Pie XII décédé le10 octobre, Mgr Ancel était temporairement responsable du diocèse de Lyon. Les cardinaux Gerlier et Liénart firent à Rome le 22 octobre une déclaration commune pour défendre leurs prêtres : le Prado et la Mission de France étaient de nouveau ensemble du côté de ceux qu'une société bien pensante cloue si facilement au pilori
... ou ce que la presse, toujours en mal de nouvelles à sensation, crut bon d'appeler telle. Rappelons-en brièvement le contexte. Jacques Soustelle, ancien représentant du gouvernement à Alger, venait d'être nommé ministre de l'Information. Il était alors fort mécontent de la ligne adoptée par le général de Gaulle. Il lui reprochait en particulier d'avoir dissout les « Comités de Salut public », qui défendaient l'Algérie française avec des moyens que l'Église avait plusieurs fois dénoncée. Dès lors, Soustelle cherchait en sous-main à opposer les chrétiens à l'œuvre gouvernementale en métropole, pour gêner de Gaulle dans sa politique algérienne. Du moins est-ce l'analyse que l'on fit dans les milieux proches du Vatican, quand une affaire d'importance mineure, survenue à Lyon, fut épinglée par la presse française, comme s'il se fût agi d'un cas où la sécurité nationale était mise en danger par des ecclésiastiques. D’ailleurs, au même moment, Bernard Boudouresque, prêtre de la Mission de France attaché au C.N.R.S., était arrêté en région parisienne pour avoir « hébergé des terroristes algériens ». En quoi le Prado, à Lyon, était-il impliqué dans « l'affaire » ?
Un prêtre du diocèse de Lyon, Albert Carteron, avait reçu du cardinal Gerlier, mission d'assurer une présence auprès des Algériens. Ce prêtre n'était pas du Prado bien qu'il y comptât, outre l'un de ses frères, de nombreux amis. Le 15 septembre 1958, il avait envoyé un Algérien à Louis Magnin, coresponsable avec Joseph Chaize de la formation des pradosiens au Noviciat « des Clochettes », à Saint-Fons. Cet Algérien, membre du F.L.N., avait demandé au Père Magnin de mettre à la disposition de son organisation d'aide sociale aux familles de détenus une chambre du Noviciat où l'on puisse éventuellement entreposer de l'argent. Les Pères du Noviciat avaient accepté de rendre ce service. Or, le 14 octobre, les responsables algériens de l'entraide sociale étaient arrêtés à Lyon ; et le lendemain les Pères Chaize et Magnin étaient déférés au Parquet pour un long interrogatoire. Le 18, Louis Magnin était inculpé d'« atteinte à l'intégrité du territoire ». Motif : apprenant l’arrestation des membres de l’organisation F.L.N., il avait détruit les listes que ceux-ci avaient laissées, avec de l’argent, dans la chambre qu’ils utilisaient au Noviciat de Saint-Fons.
Les faits s'arrêtaient là. Ce fut aussitôt une bourrasque dans l’opinion publique. Les cardinaux se trouvant justement à Rome à ce moment-là, réunis en conclave pour élire un successeur à Pie XII décédé le10 octobre, Mgr Ancel était temporairement responsable du diocèse de Lyon. Les cardinaux Gerlier et Liénart firent à Rome le 22 octobre une déclaration commune pour défendre leurs prêtres : le Prado et la Mission de France étaient de nouveau ensemble du côté de ceux qu'une société bien pensante cloue si facilement au pilori
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