• il y a 7 ans
Avis présenté par Mme Marie-Claire Martel au nom de la section de l'éducation, de la culture et de la communication présidée par Xavier Nau.

Rendre chacun.e acteur.rice de la culture et passer d’une « culture pour tous » à une « culture avec tous », telle est l’ambition de la démocratie culturelle. Elle ne remet pas en cause la démocratisation, mais au contraire nécessite son approfondissement. Là où cette dernière visait à rendre accessible à un large public une culture classique ou érudite, la démocratie culturelle se fixe pour objet de donner à tou.te.s un accès non seulement aux
œuvres artistiques – quelle que soit la culture dont elles sont issues – mais aussi à leur compréhension et à leur appropriation et à la capacité de les partager à son tour.

La démocratie culturelle élargit de fait le spectre des objets culturels pour reconnaitre comme légitimes et potentiellement universelles de multiples expressions culturelles qui demeuraient autrefois déconsidérées voire mises sous silence. Mais surtout, en défendant une conception moins restrictive, élitiste et hiérarchisée de la « culture », la démocratie culturelle en offre une définition plus ouverte.

Cette appréhension élargie de la notion de culture aboutit également à considérer comme relevant de la démocratie culturelle des leviers d’action qui restaient étrangers à la politique de démocratisation : au-delà de l’animation et de la médiation, on peut citer la pratique en amateur (qui englobent l’apprentissage et l’exécution d’une œuvre déjà existante, comme la création et la diffusion d’œuvres nouvelles), et pour finir la consultation, la participation et la co-construction des politiques culturelles.

L’élaboration de politiques davantage décentralisées, horizontales et collaboratives, regroupant des acteur.rice.s à la fois public.que.s, privé.e.s et issu.e.s de la société civile, serait ainsi la meilleure réponse apportée à une situation où il n’existe plus d’acteur.rice unique, dans les circonstances actuelles, à même de poursuivre et d’atteindre les objectifs convergents et interdépendants que partagent l’ensemble des parties prenantes.

C’est pourquoi une gouvernance légitime et efficace devrait d’une part réunir l’ensemble des parties prenantes concernées, et d’autre part conserver à la puissance publique le rôle de coordinatrice stratège des politiques culturelles co-construites.

Finalement, trois grands principes peuvent être retenus pour guider une politique de démocratie culturelle :
la réhabilitation de toutes les cultures et l’absence de supériorité d’une forme de culture sur les autres, ainsi que leur mise en cohabitation ;
la liberté de choix et d’appréciation des œuvres artistiques et formes culturelles : cette liberté nécessite que la démocratisation soit approfondie en luttant contre toutes les inégalités. Face à la diffusion d’une offre standardisée, la démocratie culturelle incite à l’affirmation des préférences et à la diversité des goûts, mais ne saurait se contenter d’être une politique de l’offre. Elle nécessite des acteur.rice.s public.que.s qu’ils répondent aux aspirations populaires en la matière, ces choix pouvant s’effectuer notamment à travers la pratique en amateur et la participation à l’élaboration des politiques publiques. Ces acteur.rice.s ont en même temps la responsabilité de défendre et promouvoir des esthétiques et des cultures minoritaires ou moins visibles
la réciprocité entre le développement de l’individualité et celui de la vie commune : la démocratie culturelle défend l’idée d’une société construite collectivement qui commence par la construction de soi, l’épanouissement de la personne à travers la pratique de loisirs ou d’activités culturelles, mais aussi la prise de conscience de sa singularité, résultat de la rencontre, du croisement, de multiples identités. En encourageant un esprit d’ouverture et de curiosité vers les objets culturels inconnus, sans segmenter, en promouvant une logique d’acculturation croisée pouvant déboucher sur une meilleure appréhension des œuvres ou sur un processus créatif enrichi, la démocratie culturelle pousse au décloisonnement des projets culturels et contribue de fait à une meilleure intégration des individus, au renforcement d’une identité culturelle partagée et à la revitalisation des liens sociaux.

http://www.lecese.fr/travaux-du-cese/saisines/vers-la-democratie-culturelle

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