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Journaliste bien connu de la presse alternative, de feu Minute à la revue Éléments, Nicolas Gauthier publie chez Les Deterna un ouvrage singulier : "Jean-Marie Le Pen comme vous ne l’avez jamais lu". Ce titre n’est pas une formule creuse. Nicolas Gauthier a côtoyé Jean-Marie Le Pen pendant de longues années, l’a longuement interviewé, observé, écouté. À travers ces échanges nourris et sans filtre, il dresse le portrait d’un homme complexe, bien loin de l’image caricaturale souvent véhiculée.

Selon lui, celui qu’il appelle "l’inconnu le plus célèbre de France", et aussi l’un des plus diffamés, n’a cessé de dire le contraire de ce qu’on lui a reproché. Pour le démontrer, Nicolas Gauthier publie de nombreuses réponses de Le Pen à des questions directes, parfois provocantes : Peut-on être en même temps bon musulman et bon Français ? Êtes-vous un homme de droite ? Surfez-vous sur les peurs des Français ou dénoncez-vous des périls réels ?

Ces extraits, bruts, pourraient bien bousculer les certitudes, et forcer le lecteur — ou le téléspectateur — à porter un regard différent sur une personnalité que l’on croyait connaître. Bref, un autre Jean-Marie Le Pen !

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Transcription
00:00JOURNALISTE DE LA PRESSE ALTERNATIVE DU DÉFUNT MINUTE À BOULEVARD VOLTAIRE
00:10EN PASSANT PAR LA REVUE ELEMENT, NICOLAS GAUTHIER A ÉTÉ AUSSI PENDANT DE NOMBREUSES ANNÉES UN DES SOCIÉTAIRES DE BISTROT LIBERTÉ EN MA COMPANIE.
00:17Bonjour Nicolas.
00:18Bonjour Monsieur.
00:19Merci et ravi de vous retrouver sur TVL.
00:21C'est un plaisir.
00:22Pour présenter un ouvrage que vous publiez aux éditions d'Eterna, Le Pen comme vous ne l'avez jamais lu.
00:28Préfacé d'ailleurs par l'ami Philippe Randa.
00:31Et ma première question elle est directe.
00:33Vous avez connu et côtoyé Jean-Marie Le Pen de très nombreuses années.
00:36On vous doit par exemple l'album Le Pen qui a marqué les esprits car il a été publié en septembre 2001,
00:41juste avant la campagne de 2002 où Jean-Marie Le Pen se qualifiera pour le deuxième tour.
00:46Vous racontez votre première rencontre avec Jean-Marie Le Pen.
00:50On est au printemps 1986 et ce que vous dites c'est que vous bredouillez devant lui.
00:55Vraiment ?
00:56Oui, parce que j'étais à l'époque, j'avais 22-23 ans, je travaillais dans la presse,
01:03mais surtout comme maquettiste, monteur, j'écrivais un tout petit peu.
01:07Il faut bien commencer par quelque chose.
01:09Et Jean-Marie Le Pen était venue dans les locaux de Minute et Patrick Buisson me dit
01:14« Tiens Nicolas, tu montes dans le taxi avec Le Pen, tu lèves la métaphone, tu lui poses trois questions. »
01:20Alors évidemment je ne vais pas lui dire non.
01:22Je prends le métaphone, je me rends compte qu'il n'y a pas de pile.
01:25Je ne sais pas quelles questions lui poser.
01:27Alors j'essaye de paraître moins de l'ego que je le suis,
01:31c'est-à-dire en lui posant des questions que j'estimais vraiment…
01:36Il y a une hauteur de vue dans mes questions.
01:38En fait, je fais une interview avec Raphaël Mesrahi,
01:40parce que je lui pose des questions que Le Pen ne comprend pas,
01:43mais moi-même je ne comprends pas très bien ce que je suis en train de dire.
01:46Et c'est là qu'on peut dire l'immense compassion du personnage.
01:49C'est qu'il m'a regardé comme mon pauvre garçon en manque de bras dans l'agriculture,
01:53changement de métier, quoi.
01:55– Et vous n'en changerez pas de métier.
01:57– Et je n'en ai pas changé.
01:58– Et vous n'en avez pas changé.
02:00– Oui, mais c'était une rencontre assez cocasse.
02:03Mais il est vrai que le métaphone tombe en vidéo, c'est le cauchemar des journalistes.
02:07Et ça arrive, malheureusement, n'a beau vérifier, il y a toujours quelque chose qui ne va pas.
02:12– Alors la thèse de l'ouvrage, en étant en 2025,
02:15elle est simple à travers de nombreux entretiens que vous avez réalisés avec Jean-Marie Le Pen.
02:20Vous faites découvrir, en fait, un autre Le Pen tel que vous ne l'avez jamais lu ailleurs.
02:25Et cet autre Le Pen, ce n'est pas celui que notre esprit a forgé ou façonné.
02:32– Oui, et ce n'est surtout pas celui que les médias ont façonné.
02:36Mais il y a eu des moments dans les grands médias, la grande presse,
02:41où Jean-Marie Le Pen était lui-même, je souviens de l'émission d'Henri Chapier,
02:45Le Divan, où il avait interviewé Le Pen avec beaucoup d'empathie.
02:49Il n'était pas là pour lui faire le traditionnel procès en sorcellerie.
02:53Et du coup, effectivement, on montre un autre Le Pen.
02:56Parce qu'effectivement, chaque fois qu'il arrivait dans les grands médias,
03:01bon, il sentait un petit peu d'hostilité.
03:03Les journalistes de la CNDO de Minute, qu'il interviewait,
03:06avaient parfois un peu de servilité.
03:08Et moi, il se trouve que j'ai eu l'occasion de l'interviewer un petit peu différemment,
03:12en essayant vraiment de lui faire dire ce qu'il pensait.
03:14Parce que le pire ennemi du journaliste, quand on interview un politique,
03:18c'est la langue de bois, quoi.
03:20Et ils sont là avec ce qu'on appelle maintenant, comme disent les cuistres,
03:22les éléments de langage.
03:24En fait, on a toujours... C'est des polycopiés, les réponses.
03:27Mais Le Pen avait une personnalité assez riche.
03:30Quand on arrive à la cerner, surtout à le mettre en confiance,
03:33et à le faire parler, là, effectivement, ça pouvait prendre beaucoup de temps.
03:37L'entretien de 10 minutes pouvait durer 2 heures.
03:41Est-ce que vous partagez le point de vue de Philippe Randa,
03:43qui évoque dans la préface de votre ouvrage,
03:45l'inconnu le plus célèbre de France était aussi le plus offensé des Français.
03:49Il n'a cessé de dire et répéter l'exact contraire des accusations portées à son encontre.
03:54Est-ce que c'est vraiment exact, cela ?
03:56Car souvent, il a quand même cherché aussi...
03:58Je pense que la diabolisation de Le Pen est en grande partie due aux médias.
04:04Mais il a aussi sa responsabilité à lui, parce qu'il a les défauts de ses qualités.
04:09C'est quelqu'un qui est honnête, qui est franc,
04:11et là où il devrait ou atténuer, lisser son discours,
04:15ou ne pas dire tout à fait ce qu'il pense, il n'y arrive pas.
04:18Parce que ce que me disait Janny Le Pen dans l'entretien, c'est qu'il ne sait pas mentir.
04:22Il a un visage très expressif.
04:24Quand il est en colère, ça se voit.
04:26Quand il est réjoui, ça se voit.
04:27Et quand il est en train d'essayer de nous faire prendre des vessies pour des lanternes, ça se voit aussi.
04:32Donc, du coup, il a toujours voulu la franchise.
04:35Alors, ça a ses côtés remarquables et sympathiques,
04:39mais parfois c'est un petit peu gênant pour la suite des événements.
04:42Au fil des entretiens, qui n'ont pas pris une ride, et ça il faut vraiment le noter,
04:46Jean-Marie Le Pen aborde avec vous de multiples sujets.
04:49Alors, exemple, on est en 2002, et vous lui posez une question qui reste totalement d'actualité.
04:56Pensez-vous qu'on puisse être en même temps bon musulman et bon français ?
05:00Et quelle est sa réponse à l'époque ?
05:02À l'époque, oui.
05:03Il dit qu'entre l'observation des cinq piliers de la foi musulmane,
05:07que sont la profession de foi, les cinq prières quotidiennes,
05:11le jeûne du ramadan, la charité du vendredi et le pèlerinage à la Mecque,
05:16une fois dans sa vie, si les moyens financiers le permettent,
05:19il n'y a rien d'incompatible avec la vie ensuite française.
05:22Et ce qui est assez logique, il dit ça, parce que quand les gens disent
05:26oui, Le Pen est raciste, ou même Le Pen est islamophobe,
05:29non, il ne faut pas oublier que c'est un soldat de l'Empire.
05:31Il sert dans le 1er Régiment, être enjoué de parachutistes.
05:34Donc, pour lui, il est musulman, mais il est soldat d'Afrique noire
05:38ou du continent asiatique.
05:40Pour lui, c'est le quotidien.
05:44Il m'a dit une fois, on ne peut pas être raciste dans ces conditions-là,
05:48parce que la seule couleur qui compte, c'est celle du béret.
05:51Et le sang qui coule quand il y a un mort ou un blessé.
05:54Donc, oui, il a une vision sur le sujet qui n'est pas intellectuelle,
05:58qui n'est pas philosophique, mais qui est aussi celle du bon sens.
06:01Moi, j'habite à la campagne, je cueille un nombre de musulmans,
06:04parce que les musulmans ne vivent pas que dans les cités.
06:07Et oui, il n'y a aucun problème.
06:09Il les rajoute quand même.
06:11Il dit, c'est ce que j'avais envie de dire à des dizaines de milliers de jeunes
06:15qui brandissaient des drapeaux algériens, on a vécu ça il y a quelques jours,
06:18et qui sifflaient notre hymne national, leur dire ce que les Américains résument
06:22avec le sens de la concision qui leur est propre,
06:24la love it, ou live it, ou en d'autres termes, aimez-la ou foutez le camp.
06:31Oui, c'est un peu abrupt, mais c'est plutôt frappé au coin du bon sens.
06:35En plus, je ne vois pas comment des gens peuvent dire en même temps,
06:39oui, la France est un enfer raciste, et se battre pour essayer de vivre en enfer.
06:43Si c'est un tel enfer, on le quitte, avant d'être masochiste ou totalement nigo.
06:48On est en 2002, il y a une actualité incroyable.
06:52On est en 2025, et ces propos-là...
06:55– Quand vous relisez Molière, le voix gentilhomme, les femmes savantes,
06:58c'est une actualité brûlante aussi.
07:01Et à partir du moment où je pense qu'on a une hauteur de vue dans le propos,
07:04oui, ça ne délie pas.
07:06– Non, parce qu'il y a eu toute une façon de procéder, de communication,
07:11on disait Le Pen avait raison, Le Pen a raison,
07:13on a toujours martelé ça pendant très longtemps,
07:16et finalement on s'aperçoit que, pour le moins, il n'avait pas tort.
07:20Oui, après, est-ce que c'était une bonne communication ?
07:23Parce que c'est toujours le côté un peu rame-neur.
07:27Bon, je sais bien que Jean-Marie Le Pen n'est pas né le jour de la Saint-Modeste,
07:30mais c'est aussi cette extraordinaire confiance en lui
07:33qui lui a permis de résister au torrent de boue,
07:36au bol, le bave de crapaud qu'il vient guérir tous les matins.
07:40Là aussi, il avait les défauts de sa qualité.
07:43Mais oui, il y a un côté, oui, j'avais raison,
07:46le problème, c'est pas parce qu'on a raison qu'on gagne les élections.
07:50– Parmi les réponses surprenantes, il y a la réponse à cette question,
07:54êtes-vous un homme de droite ?
07:55Ça c'est la question que vous voulez poser, et là il vous répond,
07:57je suis de droite parce que je ne suis pas de gauche,
07:59de là à savoir si je suis ou non un homme de droite, c'est une autre histoire.
08:03Et je me rappelle aussi qu'il se présentait comme,
08:06sur l'échec qu'il y a un centriste.
08:09C'est de la provocation, c'est de la bataille.
08:12– Il y a de la provocation, mais il y a un fond de rue.
08:15Je pense que c'est un réactionnaire,
08:18mais c'est pas parce qu'on est réactionnaire qu'on est forcément de droite.
08:21C'est un libertaire.
08:23Une fois il a dit, moi je suis un national libertaire,
08:25c'était assez juste parce qu'il aime profondément,
08:29personne ne peut lui rôturer ça, c'est un amour charnel de la France,
08:34et il a aussi son côté hanaïre,
08:37c'est quelqu'un qui déteste les dîners bourgeois en ville,
08:40même s'il peut être un petit peu fasciné par ce monde-là de temps à autre,
08:43mais il sait très bien qu'il n'a pas sa plate dans ce monde-là,
08:47et honnêtement, si on m'autorisait un gros mot sur le plateau,
08:51ça l'emmerde quand même.
08:53Je me rappelle d'un soir où je travaillais avec Samuel à l'étage,
08:57Samuel Maréchal, à Montretout,
08:59et puis je vais pour monter dîner chez Samuel Maréchal et Yann Maréchal,
09:06et Le Pen descend, il dit, ah tu vas où ?
09:09C'est une soirée nouille avec Samuel et Yann.
09:12Ah t'as de la chance, moi je vais aller m'emmerder dans un dîner bourgeois,
09:16tu veux pas échanger les places ? Ah j'ai un emploi, y'a de monde.
09:19Voilà, ça c'est effectivement le Le Pen côté couvre.
09:22– En 2006, vous dites, il déclare, je suis économiquement de droite,
09:26socialement de gauche, et on sait aussi que sur les questions économiques,
09:29Jean-Marie Le Pen a beaucoup évolué, c'est avant tout un pragmatique,
09:32on pourrait dire, qui pouvait évaluer et considérer que de toute façon,
09:36l'économie ne primait pas, et que c'était le politique qui primait
09:39sur l'économie et qui allait suivre.
09:41J'avais dit une fois, c'est dans les entretiens,
09:43ce qui fait la différence entre nous et les Américains,
09:46c'est eux, ils travaillent pour vivre, nous on vit pour travailler.
09:49Alors sa vision économique, elle était libérale,
09:53mais pas au sens malinien ou hayek du terme,
09:56c'était simplement le libéralisme du patron de PME,
10:00faut pas oublier que la Serbe c'est une société,
10:03une petite entreprise avec 5-6 salariés,
10:06qui l'a maintenue à bout de bras pendant plus de 25 ans.
10:09Oui donc, il n'avait pas fait d'études d'économie,
10:12mais c'était pas Bruno Le Maire,
10:14mais les comptes de la Serbe étaient mieux tenus que ceux de Bercy.
10:17– Est-ce qu'il n'y a quand même pas, au moment où vous l'interrogez,
10:20à travers les décennies finalement, puisque vous l'avez interrogé de 1986
10:23à 2006 dans l'ouvrage, et après bien évidemment,
10:27est-ce qu'on a toujours affaire au même Le Pen ?
10:30Parce que ça aussi, on a l'impression que c'est monolithique,
10:33c'est un monolithe, un ménire, mais c'est un Le Pen qui évolue.
10:36– Au physique oui, on pouvait dire le ménire,
10:38mais déjà il y a une chose, il envoie Jean-Marie Le Pen,
10:41mais comme je sais beaucoup de gens aussi, peut-être vous, moi également,
10:45c'est qu'on est toujours pétris de ses propres contradictions.
10:48On n'est jamais taillé d'un bloc.
10:50Et avec l'âge on peut évoluer, et surtout ce qui fait évoluer,
10:53c'est la situation qui évolue.
10:55Avec la chute du mur de Berlin, puis celle de l'URSS,
10:59il ne va pas continuer d'être anticommuniste comme avant.
11:02Parce que c'est quelque chose qu'on voit par exemple en politique,
11:05l'extrême-gauche qui court-ouvre après un nazisme qui est mort en 1945,
11:09mais il y a aussi des gens à la droite de la droite
11:12qui sont toujours pour changer le communisme.
11:14Une fois c'est chez les serbes en Aïs-Yougoslavie,
11:17une fois chez Poutine, une fois en Chine.
11:19Oui, c'est un côté hibernatus dans tout ça.
11:23Quand on est un homme politique responsable,
11:25on voit que les choses changent.
11:27L'Amérique de Trump n'est pas celle de Biden,
11:29même si au-delà des changements de pouvoirs,
11:32les intérêts fondamentaux de l'État profond de la nation,
11:36eux, ne bougent pas.
11:37C'est vrai de Poutine, d'autres serbes, avec la parenthèse bolchevique,
11:40il y a des fondamentaux qui jamais ne dévient.
11:43Mais oui, la mondialisation a bousculé beaucoup de choses.
11:48Internet, maintenant l'intelligence artificielle,
11:50on est obligé, quand on est politique, de sans cesse remettre le logiciel à jour.
11:53Donc ce n'est pas une girouette.
11:55– Ce n'est pas une girouette, mais moi j'en relève.
11:57– Il faut s'adapter.
11:58– Nicolas, moi, Gauthier, je note aussi quand même des contradictions plus qu'apparentes.
12:02Par exemple, sur l'Europe, Jean-Marie Le Pen critique l'Europe,
12:05il a voté contre le traité de Rome en 1957,
12:08c'est quand même quelque chose d'important.
12:10Et pourtant, lui, il se dit, dans l'ouvrage, dans vos interviews,
12:13il se dit européen, ce n'est pas une contradiction ça ?
12:15– Oui, mais c'est un européen civilisationnel.
12:18Il sent européen parce qu'il aime la musique de Verdi,
12:21parce qu'il aime le théâtre de Shakespeare,
12:25même s'ils mettent l'Angleterre en Europe.
12:27Il ne faut pas exagérer non plus.
12:29Oui, c'est une Europe culturelle, mais qui d'ailleurs la vraie Europe ?
12:33Parce que celle qu'on nous a vendue,
12:35elle a été fondée sur la communauté de l'acier et du charbon.
12:38La vraie Europe, c'est les Habsbourg, c'est les Capétiens,
12:41c'est Molière, c'est Tolstoy, c'est Verdi, c'est Bach.
12:47Dans ce sens-là, il est européen.
12:49Même le plus souverainiste du monde politique
12:54est européen de cette façon-là aussi.
12:56– Il y a une autre contradiction qui va marquer sa vie,
12:59c'est l'accusation de racisme,
13:02perpétuel procès en sorcellerie médiatique,
13:06et pourtant, vous le relevez aussi à travers ces entretiens,
13:09bien des faits viennent contrarier cette étiquette
13:11accrochée au dos du leader patriote.
13:13– Oui, mais parce que de toute façon,
13:15le système médiatique est ainsi fait,
13:18et l'honnêteté de mes confrères est en ce qu'elle est,
13:21à partir du moment où on vous dit qu'il y a un problème de migration en France,
13:24vous êtes raciste.
13:26Si ces problèmes de migration concernent des Européens blancs de peau,
13:32on est aussi raciste, mais dans ce cas-là,
13:35aujourd'hui, n'importe qui est raciste.
13:39On parle même de racisme anti-gros, on parle de racisme anti-musulman,
13:43mais musulman, ce n'est pas une race.
13:45On peut être breton et musulman, arabe et chrétien.
13:48Donc oui, tout ça n'est pas très sérieux.
13:50Et dans sa vie quotidienne,
13:52j'ai démontré mille fois qu'il ne l'était pas.
13:54– Vous avez démontré par exemple sur l'Irak,
13:56ça n'a pas été une surprise, y compris d'ailleurs pour ces militants.
13:59– Oui, parce que ce sont quand même les antiracistes
14:01qui promeuvent une ratonnade internationale.
14:04Or, au sein du Front National,
14:06il y avait certains cadres qui étaient favorables,
14:09parfois un peu ceux qui étaient d'ascendance pieds noirs.
14:14J'imagine qu'ils ont eu un espèce de phénomène de transfert,
14:17on a perdu contre le FLN, on va jouer le match retour
14:20contre le Baas irakien,
14:22comme on l'a fait contre l'OLP palestinienne.
14:25Oui, psychologiquement, ça peut se comprendre,
14:27mais politiquement, ce n'est pas très sérieux.
14:30– J'ai trouvé, page 102, une question
14:34qui résonne encore particulièrement en ce mois de mars 2025.
14:38On vous accuse de surfer sur les peurs des Français
14:41alors que vous dénoncez finalement que des périls.
14:44La société de la peur, c'est le terme que vous utilisez,
14:48n'est-elle pas incarnée par vos adversaires ?
14:52– Oui, la peur du lupénisme.
14:54Le monde politique et médiatique, et encore aujourd'hui,
14:58quand ce n'est plus le père, c'est la fille,
15:02bientôt ce sera Jordan, et en attendant le prochain,
15:07oui, on surfe sur la peur des gens qui attisent les peurs,
15:11mais c'est le côté totalement ubèsque de la chose.
15:14Les mêmes gens disent, le Front National, c'est le parti de la haine,
15:18donc on va les crier, ça a haine de la haine,
15:20mais la haine de la haine, ce n'est pas de l'amour.
15:22Je pense que c'est des gens qui pourraient peut-être partir à l'école, en fait.
15:25– Et cette société de la peur, c'est quoi ?
15:26– Prendre des cours de logique, au moins.
15:27– La société de la peur, on a l'impression que c'est aussi…
15:30– On est en plein dedans, c'est les radars sur la route,
15:33c'est s'infiltrer les légumes par jour.
15:35– C'est la guerre qui s'annonce.
15:36– C'est la guerre qui s'annonce,
15:37il ne faut pas voter pour les candidats toxiques,
15:39il ne faut pas écouter les blagues qui peuvent faire du mal,
15:42c'est la bienveillance inclusive,
15:44c'est comme ça qu'on se prépare des nations de samouraïs.
15:49– C'était une question que vous avez posée il y a 20 ans de cela.
15:51Vous avez fait répondre Jean-Marie Le Pen à un questionnaire de Proust,
15:54et là, vous ne manquez pas de rappeler,
15:55ce qui est vrai, que jamais Jean-Marie Le Pen n'y avait été soumis.
15:57– Oui, il était très content,
15:58il dit, pourquoi personne ne pense pas me le demander,
16:00j'ai dit plein de trucs, ben allons-y.
16:02– Et vous avez réparé l'oubli,
16:04et c'est évidemment un questionnaire que je vous invite à relire,
16:08ou à découvrir, très franc et direct,
16:10et à la question, comment j'aimerais mourir,
16:13la réponse est la suivante, dans mon lit, au milieu des miens.
16:16Je me suis dit, il a été exaucé.
16:18– Tout à fait.
16:19– Incroyable encore.
16:21– En passant, parce que là c'est aussi, c'est ainsi que Le Pen est grand,
16:24c'est avec une faculté de s'énerver, de piquer des colères terribles,
16:30à nul autre truc pareil,
16:32mais aussi une capacité de pardon qui est extraordinaire,
16:34parce qu'au sein même de la famille,
16:37il y a eu des fractures terribles,
16:42et Le Pen a toujours pardonné,
16:44et effectivement, il est mort dans son lit, en tout près des siens.
16:46Son seul regret, c'est qu'il aurait voulu être un grand artiste,
16:49s'il n'avait pas fait de politique, c'est peut-être le grand regret.
16:53– Vous avez côtoyé Jean-Marie Le Pen, quel est le vrai Jean-Marie Le Pen ?
16:57Est-ce que c'est un homme aimable, affable, colérique,
17:00incapable d'entendre la contradiction ?
17:03Est-ce que c'est tout cela en même temps ?
17:05– Tout cela en même temps, parce qu'il est colérique,
17:08mais c'était l'homme le plus affable, le plus courtois, le plus gentil.
17:13Il pouvait être injuste, peut-être son défaut,
17:18c'était une mauvaise foi à son nom,
17:21c'est que même quand il avait tort,
17:23non, il avait moins raison que d'habitude, mais il ne pouvait pas avoir tort,
17:26il pouvait parfois, comme c'était un grand gaffeur,
17:28se montrer blessant avec les gens,
17:30il avait du mal à présenter ses excuses,
17:32il faisait comprendre par une gestuelle qu'il demandait pardon,
17:36que tout cela était oublié, et c'est surtout quelqu'un de très drôle.
17:41– Très drôle, comment ça très drôle ?
17:43Est-ce que vos adversaires, les adversaires de Jean-Marie Le Pen,
17:45vont vous dire très drôle, vous vous rendez compte ?
17:47Le diable n'est pas drôle ?
17:49– À l'époque, entre passer un dîner en compagnie de Jean-Marie Le Pen
17:53et de je ne sais pas, Raphaël Glucksmann,
17:55si on veut passer une bonne soirée, il n'y a pas photo.
17:58– Je crois, je pense que c'est exact, Nicolas Gauthier,
18:01si vous avez une image à conserver du leader patriote,
18:04quelle serait-elle pour vous, l'image que vous voulez conserver,
18:07ou que vous avez conservée ?
18:09Votre esprit vous étire ses objects au Val-de-Grâce,
18:11et à ce moment-là, comme tout le monde, vous avez dû vous dire,
18:13quel était le moment, l'image que je conserve de lui ?
18:16– C'est l'homme qui n'a jamais plié.
18:19Quand il disait, je me mets à genoux qu'aux dents d'Hierge Marie,
18:22il fallait le croire.
18:24– Et il n'y a pas un moment dans cette décennie,
18:27où il y a eu un moment plus particulier, soit d'amitié,
18:31ou si ce n'est pas de l'amitié, de correspondance intellectuelle ?
18:37– Chaque fois qu'on faisait des entretiens, oui, on s'amusait beaucoup,
18:43on pensait souvent les mêmes choses,
18:45pas forcément toujours avec les mêmes mots,
18:47mais de toute façon, s'il n'y avait pas eu cette complicité,
18:49il ne m'aurait jamais accordé autant d'entretiens,
18:51et moi je n'en aurais pas fait autant.
18:54– Un homme intelligent.
18:55– Lui-même, et lui n'était pas masochiste, et moi non plus.
18:57– Un homme intelligent, brillant, tout le monde le sait,
19:00quelqu'un qui peut aussi être assez, comment dire,
19:04assez enclin à répondre aux questions de ceux qu'il a en face de lui,
19:11tout au moins à leur faire plaisir,
19:13est-ce qu'il n'y a pas, connaissant les tropismes de Nicolas Gauthier,
19:17la volonté de lui être agréable en lui répondant des questions
19:20tout un petit peu plus sympathiques ?
19:22Ou différentes ?
19:23– Oui, mais parce que comme c'était un professionnel de la politique
19:26et connaissait bien le monde journalistique,
19:28il savait que pour que le résultat soit bon, soit un bon entretien,
19:32il faut jouer le jeu.
19:34S'il voit qu'un journaliste est un zéro pointé en économie,
19:38il ne va pas l'entraîner là-dedans,
19:40parce qu'il sait que le papier sera moins bon.
19:42– Je dis ça parce qu'il y a un entretien qu'il a accordé à Flash,
19:44à cette époque-là, c'était un hebdomadaire.
19:47– Un quinzomadaire.
19:50– Un quinzomadaire.
19:52Bon, qui est dans la mouvance nationale,
19:54mais qui est plutôt tirant à gauche, on va dire, à manière assez simple.
19:58C'est la furia de l'époque,
20:00mais version un petit peu gaucharde et gauchisante.
20:03Et on se dit, quand il fait cette interview dans Flash,
20:06ça ne plaît pas parmi les militants,
20:08l'encadrement est stupéfait même.
20:10– Oui, mais…
20:12– Vous le savez ?
20:13– Oui, oui, tout à fait.
20:14– Vous vous en souvenez ?
20:15– Oui, tout à fait, je m'en souviens très bien.
20:18Oui, on a fait un coup.
20:20On voulait faire un grand entretien sur l'islam,
20:23la communauté musulmane en France.
20:25Jean-Marie Le Pen est un des plus qualifiés,
20:27parce que, de par son passé, son expérience,
20:30c'est pour lui que c'est un grand voyageur.
20:32Le monde musulman, il n'est pas du tout étranger,
20:35il sait très bien comment ça se passe tout ça.
20:37Et je savais que ça ferait de la mauvaise publicité,
20:42mais comme disait le manager des Stones,
20:44parlez-en bien, parlez-en mal,
20:46s'il compte c'est d'en parler, parce que les ventes suivent.
20:49– Dernière chose, vous publiez aussi,
20:52c'est un choix, vous avez fait un entretien
20:54avec l'épouse, pardon, avec la veuve de Jean-Marie Le Pen,
20:57Jeannie, alors une femme qu'on découvre attachante,
21:01on le savait quand même assez effacée.
21:03Et là, on découvre à nouveau aussi une femme de conviction,
21:08une femme d'éternité.
21:09– Oui, tout à fait.
21:10– On a toujours placé Mme Le Pen à côté de Jean-Marie Le Pen.
21:13On voit bien qu'elle partage les idées.
21:15– Oui, elle partage les idées.
21:17– Ça n'en laisse pas compter.
21:19– Oui, c'est un caractère.
21:21Mais en fait, l'idée d'introduire Jeannie Le Pen,
21:24c'est qu'on a fait l'album Le Pen,
21:26on a dit on va clore l'album par un grand entretien
21:29avec le principal intéressé,
21:31mais je pensais qu'elle serait bateau.
21:33On avait déjà fait d'autres entretiens,
21:35et je lui ai dit en fait,
21:37qui connaît mieux un homme que son épouse ?
21:42Elle dit tiens, on va demander à Jeannie Le Pen.
21:45Et Jean-Marie Le Pen était prévenu après,
21:48il dit voilà, on a fait un entretien avec Jeannie,
21:51et il l'a lue attentivement,
21:54et il était très touché.
21:56Je lui ai dit, elle me connaît bien.
21:58Je lui ai dit, c'est pour ça qu'on l'a interviewée, chère amie.
22:01Et elle dit, si vous voulez changer quelque chose ?
22:03Je lui ai dit, non, surtout pas, pour deux raisons,
22:05c'est qu'il n'y a rien à toucher,
22:06et si jamais elle voit que j'ai touffé son texte,
22:08je vais me faire engueuler à la maison,
22:11le farangueul pouvait aussi se montrer accommodant, voilà.
22:16– Le Pen accommodant, c'est-à-dire qu'il faut le lire.
22:19Le Pen, comme vous ne l'avez jamais lu,
22:21ses entretiens avec Nicolas Gauthier,
22:23moi je retiens surtout aussi beaucoup l'actualité,
22:26c'est-à-dire la capacité de lire des textes qui ont quarante ans,
22:29presque quarante ans,
22:30et de se dire que ce sont des réponses apportées à nos propos aujourd'hui,
22:34force est de constater qu'il n'avait pas toujours tort,
22:37s'il n'avait pas toujours raison.
22:39– Mais je vous propose aussi Nicolas,
22:42de faire la publicité pour un autre ouvrage
22:44qui est publié aux éditions Synthèse Nationale,
22:46dans lequel vous avez participé,
22:48beaucoup de témoignages sur ce Jean-Marie Le Pen,
22:50le menhir est éternel,
22:53c'est aux éditions Synthèse Nationale,
22:55c'est donc sur le site de Synthèse Nationale,
22:57et je salue le travail de l'ami Roland Ely.
23:00Voilà, merci beaucoup Nicolas Gauthier,
23:02merci de nous avoir fait rire Jean-Marie Le Pen.
23:03– Merci à lui bien sûr.
23:04Sous-titrage Société Radio-Canada

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