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Dans son premier roman, Versant Noir, l’autrice aborde la face cachée de l’Everest. Business juteux, conflits géopolitiques, désastre écologique et course à la performance.
#lisonlambert #roman #quaidupolar #polar #versantnoir

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00:00Bonjour à tous et à toutes et bonjour Lison Lambert, bienvenue dans cette discussion en
00:07direct sur les réseaux sociaux qui est organisée en collaboration entre Le Point et Quai du
00:12Polar.
00:13Et je me réjouis de discuter avec vous, Lison, pour la sortie, donc c'est mercredi, dans
00:19deux jours, de Versons Noires qui est votre premier polar et qui inaugure d'ailleurs
00:25une nouvelle collection chez Hugo Publishing qui s'appelle Impact et qui est dirigée
00:29par Clémentine Thiebault, qu'on aime beaucoup, une éditrice hors pair et une fine connaisseuse
00:35du genre policier, donc je me réjouis de l'avoir aux manettes de cette nouvelle collection
00:40et je me réjouis de discuter avec vous parce que j'ai adoré Versons Noires, c'est un
00:45roman qui nous embarque pour des aventures glaciales et tempétueuses jusque sur l'Everest,
00:52donc moi bien sûr je ne suis pas du tout une alpiniste dans l'âme et j'étais assez
00:57transportée et assez sidérée par ce qu'on découvre sur la montagne, sur l'Everest
01:03et sur tout ce qui se passe autour et tous les réseaux, les business, les connexions
01:07et la noirceur aussi qu'il y a dans cet exercice très particulier de l'alpinisme.
01:15Est-ce qu'on dit un petit mot peut-être sur cette collection, Lison Lambert, cette
01:21collection Impact et sur peut-être son ambition, sa couleur particulière, est-ce que vous
01:27avez envie d'en parler un tout petit peu pour lancer la discussion ?
01:30Alors oui, la collection Impact du coup c'est une nouvelle collection qui remplace un petit
01:38peu chez Hugo Strehler, nouvellement renommée Impact du coup et moi j'ai su le deuxième
01:45roman, le premier roman est sorti début janvier et en fait les maîtres mots on va
01:55dire c'est vraiment ce qui était recherché, c'était d'avoir des jeunes auteurs, autrices
02:03qui s'emparent de questions actuelles, sociétales, que ce soit l'écologie, business, en tout
02:15cas des mots qui résonnent aujourd'hui très fortement.
02:19Donc moi j'ai eu la chance d'être, pas d'ouvrir, mais d'être la première autrice
02:26française à apparaître dans cette collection et j'en suis ravie et c'est vraiment un
02:32beau cadeau.
02:33C'est vraiment très chouette et je trouve ça en plus particulièrement intéressant
02:37d'avoir des polars ou des thrillers qui n'ont plus pour but seul de nous faire frissonner,
02:43de nous faire peur et de nous tenir en haleine, mais aussi de venir alerter ou de venir peut-être
02:48révéler des questions sociétales, des questions politiques, des questions d'écologie, d'environnement,
02:55de sexisme, d'oppression, de rapports de classe, etc.
02:59Moi je trouve ça très intéressant d'avoir des livres qui à la fois nous tiennent en
03:03haleine complètement et là c'est le cas avec Versons noires, c'est-à-dire que du
03:06début à la fin de ce roman, on se demande vraiment ce qui va se passer et on se demande
03:11vraiment aussi pourquoi les choses se passent comme elles se passent et ça ouvre des pans
03:15à la fois d'aventures, on va en parler, de cette intrigue d'aventure et de questionnements
03:19beaucoup plus profonds sur la marge du monde en fait et je trouve ça génial qu'on puisse
03:24mêler l'art de faire des polars et de tenir le lecteur ou l'électrice en haleine et
03:28en même temps d'amener des vraies questions et des questions de fond.
03:31Alors lisons Lambert, ce roman, Versons noires, c'est l'histoire de plusieurs personnages
03:39qui se retrouvent, donc on est à Katmandou, c'est ça, on est en bas de l'Everest en fait,
03:45moi je connais très mal toutes ces régions-là, j'ai jamais mis les pieds mais enfin quand
03:48on arrive, on est dans un vieux coucou qui se pose sur une piste d'atterrissage, les
03:52Sherpas sont là, donc les Sherpas sont les gens qui accompagnent les voyageurs dans les
03:56ascensions de montagne et puis on a une aventurière qui est jeune, qui a la vingtaine, qui s'appelle
04:03Alex, qui est là avec son père, ce sont des alpinistes chevronnés qui sont français,
04:09j'ai appris d'ailleurs en lisant ce livre que la France était le seul pays du monde où on a
04:12une école, un diplôme d'alpinisme et de ski, il y a 45 personnes qui sont diplômées chaque année,
04:17ce qui paraît très peu par rapport au nombre d'appelés et de gens qui ont envie d'aller
04:22escalader ces montagnes qu'on pensait infranchissables ou inconquérables,
04:27inconquérissables, impossibles à conquérir on va dire, et donc ils arrivent là et c'est
04:35Annie Ruda qui est un Sherpa qui leur a proposé de monter et on se rend compte qu'ils arrivent
04:41dans un monde, dans un secteur complètement sinistré et que c'est un pays très pauvre qui
04:47est miné par la guerre, qui est miné par des séismes, qui est miné par la corruption et où
04:53en fait c'est une espèce de lutte pour survivre et pour garantir une espèce de solidité ou de
04:59renforcement économique à un pays qui va mal et donc il y a vraiment un business, il y a vraiment
05:04des enjeux, il y a vraiment des gens qui viennent d'arrière-plan très meurtris socialement, qui ont
05:09perdu des membres de leur famille dans la guerre, qui ont été malmenés, qui survivent comme ils
05:14peuvent et qui se trouvent une vocation de Sherpa et en fait la concurrence est rude. Et donc ils
05:18vont monter quand même une expédition avec d'autres membres de l'expédition, il y a deux
05:25jeunes femmes, il y a un colosse qui se veut descendant d'un alpiniste mythique, voilà tout
05:32le monde veut monter en haut de l'Everest, il y a différentes faces, vous allez nous expliquer, mais
05:38il y a différentes façons d'aborder l'Everest aussi, le sud, le nord, etc. Ça coûte pas le même
05:42prix mais ça coûte des tarifs qui sont vertigineux et ça se fait dans des conditions qui sont
05:48évidemment très dangereuses et en montant on va croiser des cadavres, on va croiser des cadavres
05:55qui sont même un peu des points de repère avec des baskets vertes, etc. On va trouver parfois
06:00des ossements d'alpinistes moins chanceux et c'est vraiment une aventure assez sidérante. Et en
06:05même temps, vous nous l'expliquez, je crois qu'il y a 15 tonnes de déjections humaines entre la base
06:101 et la base 2. En même temps, les gens laissent derrière eux à la fois des déchets, des
06:15bouteilles en plastique, des emballages, etc. Et en même temps, ils laissent des déjections et des
06:22choses complètement dégoûtantes. C'est assez hallucinant de voir qu'on est à la fois dans
06:27le sauvage et en même temps dans une espèce de décharge orchestrée par cet appétit de grimper
06:34sur cette montagne. Voilà pour mon pitch qui est peut-être un petit peu trop plein de mes émotions
06:43de lectrice. Mais en même temps, j'en ai ressenti plein en lisant et c'est ça aussi qui m'a frappé.
06:46C'est de découvrir cet Everest sous cet angle-là. Avant de parler de l'intrigue, j'ai envie de
06:52parler de l'idée de base. C'est-à-dire, lisons Lambert, qu'est-ce qui vous a donné envie à un
06:57moment donné ? Je ne sais pas si vous êtes alpiniste ou pas, si vous êtes grimpeuse. En tout
07:02cas, on est vraiment dedans. À mon avis, vous avez déjà pratiqué ce genre de sport. Mais qu'est-ce
07:07qui vous a donné envie d'aller chercher cette intrigue-là et de l'accomper dans cet endroit-là
07:11du monde ? Alors la montagne, c'est sûr que c'est un thème qui me tient à cœur. Je ne suis pas
07:19alpiniste. Mais depuis toute petite, je fais des randonnées. Je fais de la randonnée en haute
07:23montagne, principalement dans les Hautes-Alpes. Ça a toujours été un lieu pour moi et rassurant,
07:31et familier. Même si je ne suis pas née là-bas. Je viens d'Orléans, donc il n'y a pas vraiment de
07:35montagne. Mais en tout cas, ça a toujours été un rendez-vous pour moi, la montagne, tous les étés.
07:40Et donc, c'était dans tous les cas, mon premier moment, je voulais qu'il se passe à la montagne.
07:47Et l'Everest, en fait, c'était arrivé au moment où j'ai commencé à réfléchir à mon histoire en
07:532019. Et c'est vraiment l'année, à l'été 2019, en fait, la haute saison avril d'avant, c'était
08:01vraiment l'année hécatombe sur l'Everest. Il y a eu énormément de morts. Il y a eu une avalanche,
08:06il y a eu huit Sherpas, je crois, et pas mal de touristes, par ailleurs, morts dans les environs.
08:14C'est celle qui est dans le roman, là. C'est celle qui tue 20 personnes.
08:17C'est ça, oui. Celle-là, elle a existé. Il y en a d'autres, mais celle-là a été particulièrement
08:22meurtrière. Et du coup, moi, je vois tout ça et surtout, je vois ça au travers des réseaux sociaux,
08:28qui commencent à ce moment-là à en parler. On voit sur les vidéos, on voit vraiment ces
08:37embouteillages. Et voilà, je me suis dit, il y a un problème. Il y a forcément un problème quand
08:44on voit ces images-là. Pourquoi tout ce monde ? Pourquoi tous ces gens ? Et pourquoi autant
08:50d'enjeux sur cette montagne, qui est certes la plus haute du monde, mais ce n'est pas forcément
08:53la plus belle. En tout cas, ça dépend des avis. Et donc, je me suis dit, au lieu de faire une
08:59histoire qui va se passer dans les Hautes-Alpes, comme peut-être au début je projetais, je me
09:03suis dit, autant parler de la montagne symbole, en fait, qui peut parler à tout le monde et surtout
09:10traiter de ces problématiques qui ont lieu là-haut, qui ont lieu aussi en France, au Mont-Blanc,
09:15à plus petite échelle, mais qui sont quand même plus ou moins, qui vont tendre à ce rapport-là,
09:20sans la corruption dont je parle au Népal. Mais néanmoins, j'ai décidé vraiment de choisir l'Everest
09:30pour toutes ces raisons-là, en fait. Et comment vous expliquez, ça c'est un peu un grand mystère,
09:35je vais juste remettre la lumière, il y a une minuterie là où je suis. Voilà, ça vous verrez
09:41mieux, on se verra mieux. Comment vous expliquez cet appétit pour la montagne et en même temps
09:47cette pulsion qui est presque suicidaire ? Parce qu'il y a des passages très intéressants que
09:53j'ai notés, dans lesquels en fait vous essayez de décortiquer un peu ce qui se passe dans la
09:59tête de ces gens qui sont très nombreux et qui se donnent des moyens colossaux, en fait,
10:05qui cherchent des sponsors, qui préparent leur voyage pendant des années, qui se préparent
10:08physiquement, qui parfois ne sont pas prêts. Par exemple, il y a un des personnages qui part dans
10:13l'expédition, une jeune femme, et on voit bien qu'elle n'est pas prête. Et d'ailleurs, Alex le voit
10:18aussi et elle tire un peu la sonnette d'alarme, tout en ayant mauvaise conscience de le faire.
10:23Mais en même temps, elle dit, mais c'est un problème quand même de partir comme ça. Et en
10:26même temps, elle va y aller quand même. Les gens vont se battre, les gens vont se démener,
10:31alors que d'une part, ça pose un problème écologique d'empreintes carbone. Pour mille
10:38raisons, ce n'est pas extraordinaire de faire ça. Et en même temps, on risque de mourir. Même si
10:43il y a plein de monde et si on a l'impression que les expéditions se succèdent un peu les unes
10:47après les autres, on peut quand même y laisser sa peau et il y a tout un tas de gens qui vont
10:51mourir dans votre livre. Sans dire lesquels et sans dire forcément que ce sont ceux auxquels,
10:56si on est attaché à eux ou pas. Mais en tout cas, on voit bien que la mort est omniprésente dans
11:00cet endroit. Comment vous expliquez cette espèce de pulsion assez incroyable de grimpe, de cet
11:07endroit-là ? De cet endroit-là en particulier, il y a quand même une question d'ego. C'est
11:13quand même extrêmement égotique de vouloir grimper cette montagne-là. Il y en a plein tout
11:19autour qui sont toutes aussi belles. C'est encore plus compliqué à grimper. L'Everest n'est pas,
11:23techniquement en tout cas, et du côté népalais, parce qu'en effet, on peut grimper par les deux
11:28côtés, mais on y reviendra. Mais du côté népalais, techniquement, ce n'est pas très dur. Le plus
11:34dur là-haut, c'est vraiment le manque d'oxygène parce que plus de 8 millimètres. Et en fait,
11:41pour moi, c'est vraiment de l'ego. Et en même temps aussi, le déplacement de soi, se prouver
11:49à soi-même qu'on peut faire quelque chose. Et après, bien sûr, il y a autant de grimpeurs que
11:54de raisons de grimper l'Everest. Là pour le coup, c'est un peu cliché pour sa raison propre. Et du
12:05coup, pourquoi l'Everest ? Déjà, ceux qui y vont, c'est qu'ils ont les moyens. Pour moi, c'est de
12:16l'ego. Parce qu'il y a d'autres montagnes à grimper. Mais il y a le côté symbolique d'être
12:19au sommet du monde, moi au sommet du monde. Il y a quand même vouloir dépasser le sommet du monde.
12:25C'est intéressant d'avoir choisi un personnage, le personnage évidemment auquel on s'attache et qui
12:31est un peu le personnage pivot de ce texte, c'est Alex. C'est cette jeune femme de 25 ans qui décide
12:36de partir. Elle est avec son père, donc ce n'est pas une tête brûlée. Et on sent qu'elle lui dit
12:44à un moment donné, c'est le rêve de son enfance. Sa mère l'avait entraîné à un point qui était
12:49devenu complètement absurde d'ailleurs. Et son père avait un peu recadré les choses. Donc, elle a
12:56un rapport assez noble à la montagne et à l'alpinisme. Et en même temps, je dis que c'est
13:01intéressant que ce soit une jeune femme parce qu'en lisant, je me disais, il y a un petit côté
13:05masculinité toxique quand même dans cette volonté de conquérir le sommet dont vous venez de parler
13:11et de dire, le côté égo, je veux planter mon drapeau en haut de l'Everest, le plus haut sommet
13:17du monde. Et elle va en croiser plusieurs des personnages masculins. Et elle est vraiment
13:21confrontée à cette masculinité toxique qui revient à plusieurs moments dans le texte. Qu'est-ce que
13:25vous vouliez dire là-dessus justement ? Est-ce que pour vous, il y a d'un côté ce désir conquérant
13:30qui est très virilité mal placée ? Et de l'autre, est-ce qu'on peut penser qu'il y a quand même des
13:36gens qui font ça par noblesse d'âme et par prouesse sportive et quelque chose d'un peu
13:40philosophique, qui a une envie de voir les toits du monde ? Je pense que c'est les deux. Clairement,
13:47ça peut être pour les bonnes raisons. Il y a les bonnes et les mauvaises raisons. Mais même si au
13:52final, ça fait toujours trop de monde là-haut. Mais c'est vrai qu'Alex, oui, c'est son rêve,
13:58parce que c'est le poster qu'elle a dans sa chambre. C'est la montagne qui lui parle en fait,
14:02Alex, dans sa tête. Elle personnifie un peu cette montagne. Elle a été élevée avec cette image dans
14:08la tête. Il y a forcément un peu d'ego, mais elle sait se libérer de ce poids de la compétition.
14:20Elle n'est pas en compétition avec les autres. Elle est en compétition avec elle-même,
14:26mais elle sait se libérer aussi de ce poids, de pouvoir faire quelque chose toute seule,
14:35et avec son père, parce que son père est dans l'histoire en effet. Et pour elle, c'était
14:40important de lier. Pour elle, c'est une aventure familiale avant tout. Et surtout,
14:46c'est la beauté de la montagne, parce que l'Everest est beau aussi.
14:51Alors justement, je reviens sur ma question initiale de la jeunesse du texte et de la
14:56façon dont vous l'avez pensée, développée, écrite, etc. Vous, vous me disiez que vous n'avez
15:03pas fait de l'alpinisme sur des hauts sommets, etc. Pourtant, quand on est avec vos personnages,
15:08on a la sensation d'étouffement, la sensation de vertige, le mal des montagnes, la sensation du
15:17froid, des organes qui gèlent. Vous allez ensuite loin dans la description de ce que peut faire sur
15:23un corps la haute altitude, la très haute altitude. Et en même temps, géographiquement,
15:27vous êtes aussi dans quelque chose de très détaillé, c'est-à-dire qu'on voyage depuis
15:32l'aéroport jusqu'au sommet, la redescente, les différentes étapes, la ville, les bas-fonds.
15:38Enfin, on est vraiment géographiquement dans quelque chose de très élaboré, de très détaillé et de
15:44très crédible. Comment est-ce que vous avez travaillé cet aspect-là des choses ? Est-ce que
15:48vous y êtes allé ? Comment vous avez fait ça ? Est-ce que vous avez interviewé des gens qui
15:52connaissent ? Parce que c'est assez remarquable. Alors, j'ai interviewé des gens qui connaissent,
15:58ils sont allés. Ils n'ont pas grimpé l'Everest, mais en tout cas, ils sont allés et ont travaillé
16:02avec les Sherpas. Moi, je n'y suis pas allée personnellement. Ça coûte trop cher tout
16:09simplement. En fait, Google Maps m'a beaucoup aidée au niveau des paysages, des trajets.
16:19J'ai regardé énormément de documentaires. Je me suis documentée là-dessus aussi sur les
16:22descriptions. Ça, plutôt dans des récits d'ascension. Et puis, moi, je me souvenais
16:31justement, en rapport à Katmandou, à la ville, à la pollution dont fait l'objet Katmandou et
16:35vraiment qu'il y a une des villes les plus polluées du monde. Ça, c'est juste un cours
16:38de cinquième au collège dont je me suis rappelée et ça tombait bien parce que j'en ai eu besoin pour
16:42la suite. Donc, c'est beaucoup de documentation. Après, c'est les doigts qui écrivent tout seuls
16:53pour la montagne. Il y a quelque chose qui est là. C'est dingue. C'est dingue. Moi,
17:00je pensais que vous aviez parlé à des gens qui avaient été amputés des orteils ou je ne sais
17:05quoi parce que c'est assez dingue à quel point vous incarnez le ressenti physique de la montagne.
17:12Oui. Après, pour les conditions extrêmes, je n'ai jamais fait vraiment. J'ai failli mourir de
17:20froid. Je n'ai pas eu même d'enlure ou quoi que ce soit. Mais après, en effet, c'est dans les
17:25récits. C'est dans la description, en tout cas, de ces souffrances-là. C'est vraiment
17:35mon interprétation de ce que j'ai lu ou vu ou entendu. Et par contre, pour ce qui est de l'effort
17:42montagnard, on va dire, avec vraiment l'effort long, la montée, où on s'arrache un peu,
17:48entre guillemets, ça, pour le coup, j'ai utilisé mon ressenti pour l'avoir déjà fait, vécu.
17:57Alors, est-ce que vous pouvez nous parler un peu, justement, de ces chers pas qui sont,
18:02dès le début du roman, qui sont présents et qui sont clairement à l'affût et sur la brèche ? On
18:10sent que ce sont des gens qui ont... Chacun est très différent. Et en même temps, chacun porte
18:17quelque chose de lourd sur son dos et chacun est pris à la gorge. Et on voit qu'à travers... Nous,
18:22on a l'idée du cher pas qu'on peut avoir dans Le Sommet des Dieux, cette bande dessinée qui est
18:30magnifique. Ou d'autres, on a quelque chose d'un peu ancien. Et ça, c'est présent dans votre livre,
18:35la religion, les signes, les croyances, les traditions, le savoir aussi de la montagne,
18:42etc. Et en même temps, ils sont à leur suite, ils sont poursuivis par un contexte géopolitique
18:49ultra tendu et qui vraiment les met comme ça. Est-ce que vous pouvez nous parler d'eux et
18:54nous dire un peu quelle est la situation concrètement politique, sociale, dans laquelle
18:58ils évoluent ? Alors, pour le coup, les chers pas, souvent, en effet, ils sont issus de familles
19:06d'agriculteurs et ils deviennent porteurs. En fait, souvent, c'est quand même assez hiérarchisé. Il y
19:11a d'abord les coulis. Ils sont, comme je le raconte au début du roman, c'est vraiment... Souvent,
19:15ça peut être des enfants. Ça peut commencer assez jeune. Alors maintenant, c'est de réglementer au
19:21niveau de l'âge, mais il n'y a pas vraiment de façon de vérifier. Et donc, des porteurs qui
19:25effectuent le trek entre Loukla et le camp de base de l'Everest ou d'autres camps de base, en tout
19:31cas au Népal. Et donc, ça, c'est vraiment porteur, porteur. Et sinon, il y a les climbing chers pas.
19:37Donc, au niveau des chers pas, il y a quand même les chers pas qui sont vraiment le peuple chers pas
19:42avec le S majuscule, qui sont vraiment une ethnie là-bas et qui sont, en effet, sculptés pour la
19:51montagne, qui ont des poumons, qui ont des capacités respiratoires, pulmonaires, une force
19:55de la nature assez... Et il y a ceux qu'on appelle les chers pas sans S majuscule, qui ne sont pas
20:04forcément... Qui ne font pas forcément partie de l'ethnie chers pas, qui eux sont ceux qui vont
20:11grimper, qui vont accompagner les clients jusqu'au sommet ou pas, mais en tout cas qui vont acheminer
20:16tout le matériel et y compris faire du secours à la personne si nécessaire. Et souvent, oui,
20:23les chers pas, ils commencent en tant que coulis. Ensuite, ils deviennent chers pas. Ça dépend en
20:28fait de leur situation, de comment ça se passe. Tout le monde sait que c'est un métier extrêmement
20:34dangereux. Après, c'est quand même trois fois la paille locale, une expédition. Souvent,
20:41ils se limitent à deux expéditions par an, ce qui est en fait déjà énorme parce que la plupart des
20:45gens n'en font aucune. Et en fait, c'est vraiment l'attrait financier qui les pousse à faire ce
20:51métier-là. Il n'y a pas beaucoup de chers pas qui sont passionnés par la montagne et par... Voilà,
21:00eux, c'est se mettre au service d'eux. Et des fois, payer les pots cassés aussi. Et il y en a
21:12qui font ça un an dans leur vie. Il y en a qui font ça toute leur vie. Et aujourd'hui, ce qui est
21:18mieux, c'est qu'il y a quand même des chers pas. Maintenant que les réseaux sociaux existent aussi,
21:24en fait, on commence beaucoup plus à parler d'eux. Et eux prennent la parole aussi sur les réseaux,
21:29commencent à monter leurs propres agents d'expédition. Ça, ça fait un petit moment
21:35déjà. Et là, maintenant, ça commence à communiquer. Et du coup, c'est plus juste des savoirs... Ils ne
21:48sont plus là juste pour aider les gens. Ils mettent aussi en lumière leur métier et essaient
21:55de limiter un peu les expéditions qu'ils organisent, en tout cas. Est-ce que vous pouvez
22:03nous parler un petit peu aussi de l'impact guerre-conflit qu'il y a pu y avoir dans cette
22:11zone-là géographique sur la vie des gens et la façon dont, finalement, il y a eu aussi d'autres
22:18enjeux politiques qui se sont tissés dans cette région et qui ressurgissent aussi dans les choix,
22:26dans la vie, dans tout ce qui se passe à l'heure actuelle ? Alors ça, je l'ai vraiment lié dans
22:32la fiction. Mais pour le coup, je n'ai pas plus d'éléments que ça sur l'impact vraiment de la
22:40guerre civile népalaise à vraiment ce qui s'est passé sur ces populations, en tout cas celle de
22:46la vallée du Khumbu. Je n'ai pas vraiment trouvé de précision là-dessus. Mais par contre, j'ai
22:52juste voulu mêler ces deux histoires pour recontextualiser un petit peu ce qu'ont pu
22:56traverser éventuellement les habitants. Je ne sais pas si c'est ces habitants-là, mais en tout cas,
23:00c'était plus pour une remise en contexte géographique et politique que vraiment lier
23:06ça à l'histoire de l'Everest. Vous aviez envie d'aborder aussi cette part-là à laquelle nous,
23:12enfin moi, quand j'ai lu le livre, je me suis dit que c'est vrai qu'il y a ça. En fait,
23:16on n'y pense pas du tout dans notre imagerie. L'Everest, le Népal, l'Ascension, les Sherpas,
23:23etc. On est dans quelque chose, en tout cas pour ce qui me concerne, d'assez romantique. Et vous
23:28nous rappelez quand même qu'il y a une réalité cruelle aussi derrière la vie de ces habitants,
23:31dont nous, mais alors sous nos latitudes, on n'en a absolument rien à faire, quoi.
23:36Comme souvent, quand la guerre n'est pas à notre porte, on l'oublie assez rapidement. Mais là,
23:44ce qui m'intéressait, ça me parlait important de parler de cette guerre-là, parce qu'elle a fait
23:49déjà énormément de victimes surtout, mais c'était aussi une guerre du viol, en fait. L'arme principale
23:55des soldats, c'était le viol. Aujourd'hui, les femmes népalaises ne prennent toujours pas ou très
24:05très peu la parole par rapport à ça, parce qu'en fait, ça a peu évolué au niveau de la parole
24:11qui se libère à cause des castes et tout ça. C'était juste pour en parler, alors même si ce n'est
24:17pas le sujet du livre, c'était en tout cas glisser cette information-là, qu'en fait les femmes ont
24:23encore douillé via une guerre pas très loin. Oui, et c'est une information que vous intriquez
24:31dans le texte de manière subtile, notamment ce personnage qui va prendre la parole, c'est assez
24:38tardif. En même temps, c'était aussi une question que je voulais soulever avec vous, parce qu'à
24:43plusieurs reprises dans le texte, je l'ai dit tout à l'heure pour l'alpinisme, mais en fait,
24:46il y a cette question de masculinité toxique et finalement de femmes qui, que ce soit dans un
24:53contexte sportif, que ce soit parce qu'elles sont tout simplement là et qu'elles sont désarmées et
24:58vulnérables, on voit qu'il y a plein d'interstices, de brèches par lesquels la domination masculine
25:05va s'exprimer sur la vie de vos différents personnages féminins. Comment est-ce que vous
25:09avez construit ça et finalement, est-ce que ça ajoute une difficulté supplémentaire quand on
25:15écrit un thriller ou un polar, un roman noir, d'avoir ce message à faire passer là aussi et de
25:20dire, moi, en fait, je ne veux pas écrire juste gratuitement une histoire d'aventure, etc. Je veux
25:25qu'il y ait un message qui parle de la domination masculine et de la façon dont les femmes, chacune
25:30avec son histoire, avec sa vie, essayent de se débrouiller avec ce qui s'est présenté sur son
25:35chemin et qui est complètement injuste en fait. Comment vous avez travaillé cette matière-là ?
25:40Je l'ai pris dans ma vie. C'est une réalité que j'ai essayé de retranscrire et surtout,
25:51dans ce milieu-là, c'est assez facile parce qu'il y a quand même assez peu de femmes. Il y en a de
25:57plus en plus et il y en a des superbes alpinistes femmes. Mais c'est vrai qu'il y a toujours ce
26:02côté assez macho de l'alpiniste ou du grimpeur qui veut rendre service parce que, petite chose,
26:14équipière, petite chose. Donc, ça part toujours d'un bon sentiment. Mais au final, c'est de l'ordre
26:22du conseil. Ça faisait des personnages aussi. Moi, je m'intéresse beaucoup aux personnages.
26:31Et des fois, même si ça peut être un peu cliché, au moins, je me suis marrée à l'écrire. En tout
26:38cas, un des personnages, Mallory. Et au final, Alex arrive à le retourner parce qu'il se rend
26:46compte lui-même qu'il est ridicule tout en n'ayant pas du tout mauvais fond, mais mauvaise
26:54forme. Et ça, c'est dans nos vies de tous les jours. Donc, voilà, c'était inscrire ça dans le
27:02contexte de la montagne, de la randonnée, de l'ascension, de l'effort. Mais l'effort peut
27:06être aussi bien fourni par les femmes que par les hommes. Oui, ce fameux Mallory, c'est vrai
27:12qu'il est particulièrement drôle parce qu'il a ce côté ultra paternaliste. Il l'appelle ma petite,
27:18Alex, tout le temps. Et elle, elle riposte en l'appelant mon petit. J'ai trouvé que ça,
27:24c'était aussi des poches de respiration. Et c'est là que c'est intéressant aussi,
27:28votre travail d'autrice, parce que vous faites un roman qui a tous les sens du terme complètement
27:35écrasant et qui nous prive un peu d'oxygène, littéralement, parce qu'on est avec ces
27:40personnages. On se demande s'ils vont s'en sortir. On les voit parce qu'évidemment, ça tourne à la
27:44catastrophe. Tout ça, très vite dans la montagne, évidemment. Et en même temps, il y a ce personnage
27:51qui, petit à petit, est un peu décapsulé par Alex et qui finit par se rendre compte que tout
27:57ça est un petit peu dérisoire. Et finalement, la petite Alex, elle a du ressort. Et ces femmes-là,
28:05elles sont aussi solides. Et j'ai trouvé que c'était un tour de force d'écrire un texte qui,
28:12à la fois, nous prend à la gorge, qui nous angoisse et qui, en même temps, est plein de
28:17surprises. Déjà, plein de moments où on souffle. Il y a quand même une histoire d'amour aussi. Il y
28:24a même deux histoires d'amour. Bon, il y a des tragédies et des drames, mais il y a deux histoires
28:28d'amour qui sont belles et qui nous touchent. Comment est-ce que vous l'avez construit, ce roman
28:34savamment dosé ? Est-ce que vous aviez un plan ? Est-ce que vous saviez dans quelle direction vous
28:39vouliez amener vos personnages ? Est-ce que ces histoires d'amour étaient planifiées ? Ou est-ce
28:44que vous vous êtes laissé surprendre ? Moi, j'ai du mal à croire que ça puisse être un texte dans
28:49lequel on se lance sans avoir un plan bien écrit d'avance. Mais peut-être que vous allez me
28:55surprendre. Alors, bon, moi, il faut savoir que je suis nulle en plan. Tout ce qui est structure,
29:00c'est des maths, en fait. Et il y a vraiment des auteurs et des autrices très bons pour ça. Moi,
29:06j'ai beaucoup, beaucoup de mal à me tenir à un plan, sachant que tout change tout le temps,
29:10tout bouge tout le temps. Mais c'est vrai que ce roman, il y a au moins 18 versions. L'ayant
29:18commencé en 2019, c'était le premier. Du coup, j'ai pris tous les mauvais chemins possibles et
29:26inimaginables, toutes les fausses bonnes idées, j'ai tout fait. Ça a été très long. Et surtout,
29:33au début, il faisait trois fois ça. Il faisait 750 meetings, c'était dans le desque. Je lui
29:39envoyais pas le bout. Je ne voyais pas comment je pouvais m'en sortir. Et ça a été beaucoup de
29:43haut et de bas. Et en fait, j'ai décidé à un moment d'en revenir à l'essentiel, de vraiment
29:50faire table rase. Et ça, c'était il y a un an et demi, en fait. Et de me dire, bon, qu'est-ce que
29:55je veux raconter au final ? Les vraies, oui. Et puis, les histoires d'amour, non, elles sont
30:03arrivées. J'en avais déjà une, mais pas deux, forcément. Et pour moi, je ne suis pas très douée
30:12pour écrire les histoires d'amour, mais ça m'intéressait. Comme tout est amplifié, tout est
30:25de l'ordre de la survie. Pour moi, il n'y a que l'amour qui va très bien avec cet état
30:32de sidération, de transcendance. Et donc, l'histoire d'amour, elle est bien là-dedans. Après, j'ai
30:42appris sur le tas pour l'écrire, parce que j'en avais peu écrit avant. Et ce n'était pas forcément
30:49ma canne. Mais bon, voilà, j'ai fait ce que j'ai pu. Moi, j'ai adoré les histoires d'amour. Elles
30:55sont super. Et je trouve ça assez dingue, le fait d'être passé de trois fois ça à quelque chose
31:02de... Effectivement, on sent que c'est très dense, très ramassé et très tenu. Je trouve ça remarquable
31:08d'avoir, comment dire, condensé une idée large. Et effectivement, le texte est bien dans cette
31:14forme, peut-être plus ramassée. Je pense que ça dit la célérité de l'intrigue et en même temps,
31:20le côté très écrasant de tout ce qui se passe et de ce qu'on découvre aussi, de ce qu'on
31:25apprend sur la façon dont ça tourne là-haut, sur l'Everest et les informations sur l'écologie
31:31que vous nous donnez, sur la politique, sur la géopolitique, sur la cupidité, sur la, comment
31:37on s'appelle, la corruption. Enfin, c'est un roman qui est... C'est une très bonne décision. Je ne sais
31:43pas qui est votre éditrice, peut-être que ce serait Clémentine Thiebault, ça ne m'étonnerait pas,
31:47mais en tout cas, c'est une très bonne décision d'avoir choisi cette forme plus ramassée. On a
31:53une question de Tacha Génaro, qui est Natacha Levé, je crois bien, qu'on adore et qui est une
31:58formidable spécialiste du roman noir, qui nous demande, très impatiente de lire ce roman,
32:05et à juste titre, et je pense qu'elle aimera beaucoup, je me demandais si vous aviez choisi
32:10d'adopter le point de vue d'Alex ou si on avait plusieurs points de vue, et est-ce que c'est
32:14quelque chose qui s'est imposé d'emblée ? Ça, c'est une très bonne question. C'est une très,
32:18très bonne question parce qu'au début, en effet, tous les personnages avaient... Enfin,
32:22c'était vraiment omniscient. Et en fait, pour me recentrer, pour arriver à me mettre dans des
32:30rails, j'ai vraiment pris Alex comme personnage principal. Mais au début, ce n'était pas
32:34forcément le personnage principal, c'était vraiment tous les personnages étaient les
32:38personnages principaux. Et elle est devenue ce qu'elle est devenue vraiment dans les deux
32:46dernières versions, en fait, Alex. Voilà. Oui, et du coup, on a ses voix, on a d'un côté,
32:53s'est plongé dans sa tête à elle, et en même temps, on a aussi, vous avez conservé quand même,
32:57aussi ce côté point de vue qui surplombe aussi le texte. Donc ça, c'est intéressant d'avoir fait
33:05ce côté un petit peu hybride. Je trouve ça assez malin pour un texte comme celui-là. Je conseille,
33:13par parenthèse, de lire l'encyclopédie, le dictionnaire du roman noir français de
33:18Natacha Leveille au PUF. Je ne sais pas si vous l'avez lu, mais c'est absolument génial. Oui,
33:26moi, j'avais envie aussi de vous demander sur la... C'est compliqué avec un tel polar. On en
33:34parlait avant de commencer le live, mais de ne pas révéler trop de choses sur l'intrigue et sur les
33:39surprises qu'on a. Mais qu'est-ce que vous aviez envie peut-être de dire ou de dénoncer sur ce
33:46qui se passe et sur cet attrait qu'exerce l'Everest ? Qu'est-ce que vous aviez envie de dire à travers
33:53cette intrigue et à travers peut-être ces différents rebondissements, si vous arrivez
33:57à ne pas non plus les révéler, mais à nous parler de votre ambition politique, en fait,
34:04parce que c'est aussi un texte politique quand même. Je trouve qu'en résumé, il faut arrêter,
34:13il faut laisser de l'air à l'Everest. Donc, je pense qu'il faudrait prendre des décisions
34:17radicales et ne plus grimper cette montagne, au moins pendant les dix ans à venir. C'est
34:25un détail, mais j'ai lu il n'y a pas longtemps qu'en fait, même quand on arrive sur le camp de
34:29base, ça sent, ça pue quoi, ça sent la pisse tellement il y a du monde et c'est pas géré,
34:39les déchets en effet, la pollution et tout ça. Et donc, c'est une montagne qui a besoin de respirer.
34:43Et voilà, après forcément tout est en contradiction parce qu'arrêter ce business-là,
34:51le Népal en a énormément besoin. Il y a déjà des solutions qui sont en train d'être mises en
35:01place, une charte de propreté pour que les gens redescendent leurs déchets, tout ça. Il y a aussi
35:09l'augmentation du permis qui aura lieu là, qui va être du permis d'ascension. Il va avoir lieu
35:13le 1er septembre prochain. Il sera augmenté, mais de 4000 euros. Alors 4000 euros, quand on est
35:22prêt à payer 40 000 euros pour une expédition, je ne suis pas sûre que ça change vraiment la
35:26donne. Mais il y a des mesures qui sont mises en place comme ça. Et à contrario, il y a une route
35:33qui a commencé d'être construite en 2014, je crois, qui a été interrompue à cause du séisme,
35:44bien sûr, en 2015. Mais la route, ça y est, elle est quasiment terminée, qui rejoint Loukla à
35:49l'Everest. Donc, en fait, pour acheminer encore plus de gens, encore plus de matériel. Et même
35:56là-haut, en ce moment, il y a des manifestations de la part des habitants, de la part des locaux,
36:01pour stopper les trajets en hélico, qui sont 60 trajets par jour. C'est une nuisance, en fait,
36:08et même pour les habitants, là, pour le coup, qui se plaignent de ça. Donc, ils font des
36:12manifestations en ce moment. Donc là, ce que je voudrais dire, c'est qu'il y a tellement d'autres
36:20montagnes à grimper et il y a vraiment des sommets à préserver. Mais comme partout sur Terre,
36:26il y a des endroits, ce qu'on appelle les zones vierges, qui sont vraiment les zones blanches,
36:29qui sont vraiment vierges de toute trace humaine. En fait, il y en a de moins en moins et bientôt,
36:34il n'y en aura plus. Et ces zones-là, c'est important de les conserver. Et l'Everest devrait
36:40revenir, pendant un petit moment en tout cas, une zone blanche. Mais il y a un passage où
36:48votre personnage énonce clairement ça dans une discussion et dit qu'en fait, des zones blanches,
36:53il n'y en a presque plus, qu'on est allé mettre un tarapeau sur la Lune et que là,
36:56on est en train de lorgner sur Mars. Et en fait, le livre, l'un de ses grands intérêts,
37:01c'est aussi qu'on voit le côté désespérant de cette fin absolue de s'approprier tout un tas
37:10d'endroits et cette incapacité pour des questions de cupidité et aussi de besoins légitimes. Parce
37:16que vous le dites très justement, mais c'est vrai qu'ils ont besoin, c'est leur économie. Ça
37:21rapporte de l'argent. Et en même temps, on arrive à des trucs qui sont complètement délirants. Et
37:28en fait, le vrai crime, pour ne pas spoiler non plus le texte, mais le vrai crime, c'est aussi
37:34un écocide qui a lieu par excès de convoitises et de gestion d'argent et d'économie mondiale et
37:45d'incapacité de mettre un stop. Et on pense, ça n'a rien à voir en termes de géographie et de
37:50paysages, mais on pense à Venise, on pense à tous ces endroits dont on sait que les gens poussent
37:55un cri d'alarme en disant, mais en fait, notre endroit, notre lieu de vie est en train d'être
38:00pourri et détruit par surenchères touristiques. Et ça, c'est assez incroyable d'avoir réussi à
38:07le mettre dans un thriller, je trouve, de mettre de tels enjeux. Vous en avez parlé, mais moi,
38:16j'ai trouvé ça très intéressant aussi. On découvre que les différentes faces, les différentes
38:20versions de l'Everest ne sont pas soumises déjà aux mêmes pays, aux mêmes frontières et aux
38:26mêmes lois, ni aux mêmes argents. La face nord et la face sud, ce n'est pas la même façon,
38:32ce n'est pas la même gestion. Qu'est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu ? Parce que
38:35moi, j'ai trouvé ça très intéressant. Oui. Ça a coupé, pardon. Ah, vous avez
38:47entendu ma question ? J'ai l'impression que... Je peux parler de deux côtés, c'est ça ? De la
38:58face nord et de la face sud, parce que vous nous expliquez que ce n'est pas soumis aux mêmes règles
39:02et que ça ne se passe pas de la même façon, en fait, parce que ce n'est pas les mêmes pays.
39:05C'est ça. Il y a bien sûr le côté sud, le côté népalais. L'Everest est accessible par deux voies
39:16principales, on va dire. Le nord et le sud. Et au nord, c'est le côté tibétain, entretenu par le
39:24gouvernement chinois. Et là, en effet, le nombre de permis par an est limité. Ce qu'ils vont essayer
39:33de faire aussi au Népal, c'est dans les tuyaux, mais ce n'est toujours pas avéré. Mais aussi,
39:39côté tibétain, il est demandé une certaine expérience, en fait, d'avoir grimpé déjà des
39:478000. Pour information, il y en a 14 dans le monde, donc il y a de quoi faire en plus de l'Everest.
39:52Mais en effet, c'est beaucoup plus régulé, mais aussi parce que l'économie de la Chine ne
40:00repose pas que sur l'ascension de l'Everest. Et donc, là, c'est régulé, de ce côté-là.
40:07Encore et toujours, on est dans des injustices socio-économiques qui sont vraiment liées au
40:12contexte du pays, qui se donnent, s'il est plus ou moins vulnérable, à une espèce d'appétit du
40:21plus donnant et du plus offrant, au mépris de la santé des gens qui grimpent. Parce qu'il faut
40:27voir aussi, à un moment, laisser des gens aller se suicider dans des montagnes, ça paraît quand
40:34même un peu hallucinant. Le roman se termine notamment sur un discours scientifique assez
40:46pessimiste. Est-ce que vous arrivez à garder un peu de foi en l'avenir ? Est-ce que vous aviez
40:58envie de conclure là-dessus ? Parce que vous n'êtes pas optimiste non plus. Quel était le
41:02message que vous aviez envie de transmettre, après avoir fait toutes ces recherches traduites
41:07en un thriller palpitant ? Alors, non, je ne suis clairement pas optimiste. Ça, c'est sûr,
41:14en termes d'écologie, en tout cas, et d'environnement. Là, on voit très bien que les
41:20politiques ne font rien ou marchent arrière pour endiguer ce réchauffement climatique. Je suis
41:32assez pessimiste et, en fait, surtout triste quand même. Mais voilà, il faut qu'il y ait des jeunes
41:39qui arrivent, il faut que la parole soit entendue de ceux qui vont vivre un peu plus longtemps sur
41:46cette terre que les gens qui dirigent actuellement le gouvernement. Exactement. Au niveau littérature,
41:55alors je précise, parce que je ne l'ai pas dit en introduction, que votre livre fait partie des
41:59pépites de « Quai du Polar ». C'est un roman qui a été remarqué par l'équipe et par la
42:06programmation comme une nouvelle voie particulièrement intéressante. Au point,
42:11on l'a aussi beaucoup remarqué puisqu'il est dans la sélection pour notre prix du Polar européen,
42:18qui sera donc dévoilé à « Quai du Polar » et pour laquelle vous êtes en lice. Est-ce que vous
42:24êtes un peu boosté pour la suite ? Est-ce que vous avez commencé à déjà écrire un autre livre ? Est-ce
42:28que vous avez eu une idée ? Est-ce que vous allez repartir dans une destination lointaine ? Est-ce
42:33que vous pouvez nous en dire plus ou est-ce que vous n'en avez pas du tout envie ? Quelle est la
42:36suite des événements pour vous ? Alors je commence déjà à réfléchir au deuxième, pour ne pas rester
42:42les bras ballants en attendant de voir ce qu'il se passe. Le deuxième, j'ai à peu près l'histoire,
42:50je ne vais pas vous le raconter maintenant parce qu'elle n'est pas encore bien structurée et de
42:54toute façon elle ne le sera pas avant longtemps, mais ça va se passer. Ça va mélanger en tout cas
43:00les thèmes de white saviourisme, de mission humanitaire et d'Afrique. Le white saviourisme,
43:07qu'est-ce que c'est ? Vous ne m'avez pas entendu ? Alors c'est le... Oui, si c'est bon, en haut-part,
43:18oui. C'est le complexe du sauveur blanc. C'est souvent des gens, quand des gens non habilités
43:25par le fer, non diplômés ou juste touristes, veulent aller s'occuper des Africains, des
43:31orphelins au Togo, aller construire des puits pour bien souvent aider, bien sûr, et aussi se donner
43:40bonne conscience. Donc vous allez rester dans une veine engagée et vous avez bien raison parce que
43:47c'est captivant de lire des polars qui sont à la fois impossibles à lâcher et en même temps qui
43:53nous ouvrent aussi un peu les mirettes sur des choses qui entravent complètement des principes
44:01humains et la bonne marche du monde. Et voilà, l'ordre des choses telle qu'on aimerait qu'il soit
44:05et telle qu'il n'est pas. J'ai hâte de lire la suite, le prochain. En tout cas, on va déjà
44:13commencer par lire Versant Noir. Alors moi, j'ai les épreuves, donc ce n'est pas la couverture du
44:19livre, mais il sort mercredi, donc il sera en librairie mercredi. On peut vous voir à l'Humeur
44:24Vagabonde le 20 février à Paris. Donc moi, je pense que j'y serai avec grand plaisir. On vous verra
44:32hacker du polar pour des rencontres et notamment pour une rencontre, je crois, autour des fameuses
44:37pépites de la sélection. Et puis, moi, je me réjouis et je conseille fortement, je crois que
44:45les lecteurs et lectrices et les personnes qui sont là à nous écouter l'auront compris, je
44:49conseille fortement votre livre et je salue cette nouvelle collection, donc Impact chez Hugo. Je
44:56remercie l'équipe du Polar qui s'est occupée, comme toujours, avec grand talent d'orchestrer
45:05ce live et celle du Point aussi. Et je remercie toutes les personnes qui nous ont écoutées et
45:11notamment Tacha Génaro qui nous a posé une question qui était tout à fait pertinente. Et
45:17puis merci à vous, lisons, pépites de Polar. Et bonne et longue vie à Vers en Noir. Et à très
45:24bientôt pour Trinqué, à la sortie de ce super roman. Avec plaisir. Bonne soirée. Bonne soirée.

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