Le 1er mai, le coffre-fort, les contrats russes, Emmanuel Macron… Alexandre Benalla répond aux questions de Karim Rissouli.
Interview Brut réalisée le 12 novembre.
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00:00Si vous deviez raconter votre histoire à un Français qui ne sait pas qui vous êtes,
00:03qu'est-ce que vous diriez ? C'est qui Alexandre Benalla ?
00:05C'est compliqué ce genre de question.
00:13C'est un garçon qui a grandi en Normandie,
00:19beaucoup plus en zone rurale que dans une cité ou dans un quartier,
00:22comme j'ai pu entendre ici ou là, même si c'est une réalité de ma vie,
00:27issu d'une famille qui s'est séparée.
00:30Ma mère et son père se sont...
00:31Ma mère et mon père, pardon.
00:32Ma mère et son père, ça aurait été un peu plus compliqué.
00:36Ma mère et mon père se sont séparés quand j'avais deux ans
00:39et ma mère m'a élevé toute seule, moi, mon petit frère, ma petite sœur.
00:41Famille monoparentale, mère-prof.
00:44Beaucoup de rêves, sans doute parce qu'il y avait l'absence du père.
00:49Les séries télé, les films, la découverte.
00:52Ma mère m'en... J'ai eu une chance d'aller tout le temps en vacances,
00:55en colonie de vacances, de pratiquer plusieurs activités culturelles, sportives et tout.
00:59Ça a été vraiment une chance pour moi.
01:01Et après, des premiers rêves qui émergent vers l'âge de 12, 13, 14 ans,
01:05attirés par les choses policières, militaires,
01:11par quelque chose qui exprimait un peu peut-être une figure paternelle
01:15qui n'existait pas à ce moment-là.
01:18– Donc un goût de la sécurité, déjà.
01:20– Oui, pas que de la sécurité.
01:22Mais je sais que j'avais un rêve, c'était d'intégrer un lycée militaire.
01:25Je ne l'ai pas fait, je pense que je l'ai expliqué dans le livre de manière assez...
01:30J'ai expliqué très clairement pourquoi je n'ai pas pu aller au bout de ce rêve.
01:34– Parce que les notes n'étaient pas assez bonnes ?
01:36– Oui, en partie, mais aussi peut-être les problèmes d'attitude et de comportement.
01:40Plutôt du genre à faire le clown dans la classe qu'être très sérieux et avoir...
01:46Je crois que c'est mon grand regret aujourd'hui.
01:48C'est peut-être la seule chose que ma mère pourrait me reprocher aujourd'hui.
01:51C'est de ne jamais avoir amené les félicitations.
01:55Alors ça commençait avec des avertissements,
01:56mais c'est toujours sur le comportement, jamais sur les notes de travail.
01:59Et après, les encouragements.
02:02Les encouragements, ce n'est pas tout à fait les félicitations.
02:05Chaque trimestre, c'était un peu la tannée quand on recevait le bulletin.
02:09C'était toujours encouragements, mais peut-être faire un effort sur le comportement, etc.
02:14Bon, voilà, des rêves, un engagement très tôt.
02:18Je m'engage chez les scouts.
02:20Je suis chez les scouts unitaires de France, dans la troupe de C, patrouille du Léopard.
02:24Là, je découvre la nature, l'esprit d'équipe, l'uniforme, la débrouillardise et tout.
02:29Ça m'a parlé, c'est des trucs qui m'ont parlé tout de suite.
02:34Je fais beaucoup de sport, de la boxe notamment, un peu de darts martiaux.
02:38Le pench-axylate, je découvre ça dans un petit village qui s'appelle Bernay.
02:41Et je m'entraîne avec des gendarmes qui appartenaient au PSIG,
02:44donc les pelotons de surveillance d'intervention de la gendarmerie.
02:46Et il y en a un qui me dit, mais ça t'intéresserait, on te prend des réservistes.
02:50Je m'intéressais, je me disais, qu'est-ce que c'est ça, des réservistes ?
02:52Dans ma tête, c'était des mecs qui faisaient le ménage de la caserne,
02:55qui lavaient les voitures.
02:56En fait, pas du tout.
02:57Et donc, je m'inscris, je suis reçu.
03:00Je fais une formation qui dure une quinzaine de jours.
03:02Et je suis en major de promotion de cette formation.
03:04J'étais le plus jeune à l'époque.
03:05Et on porte un vrai uniforme.
03:07On fait des vraies missions de gendarmerie au service des gens.
03:09Et ça m'a plu tout de suite.
03:11C'était pas l'argent, c'était pas le fait...
03:12C'était vraiment porter une tenue et être au service des gens.
03:15Et donc, plutôt, un engagement...
03:18C'est quoi, un engagement républicain ?
03:20C'est ça, l'idée, au départ ?
03:21Je pense qu'à cet âge-là, on n'a pas l'idée de ce que c'est l'engagement de la République, etc.
03:25Je pense que même aujourd'hui, chacun a sa définition de la République.
03:29D'être républicain, c'est assez abstrait, au final.
03:31Donc, vraiment, c'est plutôt être engagé, c'est rendre service aux gens, vraiment.
03:34Être serviable, les aider quand ils sont dans la difficulté.
03:37C'est l'action.
03:39C'est une vision, peut-être, étant jeune, assez manichéenne, des choses.
03:42Il y a les gentils, il y a les méchants.
03:44Moi, je fais partie des gentils.
03:45Et on va essayer d'aller attraper les méchants.
03:47Il y a un côté défense, un peu, des gens qui sont dans la difficulté.
03:52Vraiment, ça, je l'ai chevillé au cœur depuis jeune, très très jeune.
03:55Et du coup, quand son nom et son image deviennent accolés plutôt aux méchants qu'aux gentils ?
04:00C'est le paradoxe, c'est tout le paradoxe de cette histoire.
04:04C'est là où je ne l'ai pas accepté, pour tout vous dire.
04:06C'est peut-être le truc qui m'a le plus, aujourd'hui, chagriné.
04:11C'est que l'image qui a été donnée de moi, c'est l'inverse.
04:14Je pense être auprès des gens.
04:15Chacun me définira comme il me ressent, comme il me connaît,
04:19comme il a vécu des choses avec moi.
04:21Moi, je sais que je ne suis pas comme on m'a décrit.
04:23Je ne suis ni une racaille, ni un délinquant.
04:25Et au contraire, j'ai toujours été de l'autre côté, du bon côté.
04:28Et c'est dommage.
04:30Ce qui s'est passé, c'est dommage.
04:32Parce qu'en effet, ça n'a pas anéanti.
04:34Mais c'est souvent comme ça, d'ailleurs.
04:36Vous savez, quand vous voyez des gens,
04:39et vous en faites une idée assez précise à travers les médias,
04:42généralement, en privé, ils sont l'inverse de ce que vous pensez.
04:44Et ça, c'est quelque chose que j'ai constaté
04:46des dix dernières années de vie professionnelle.
04:48Il y a des gens qui ont une superbe image, vous les voyez,
04:50quand vous les rencontrez en vrai,
04:52c'est souvent des sacrés cons.
04:53Et d'autres qui ont des images de cons.
04:55Et en fait, c'est des gens très sympas et très gentils.
04:57Donc il y a toujours un déficit d'image.
04:58Et on le voit aujourd'hui.
04:59Par exemple, je prends l'image du Président de la République française.
05:02On est en permanence en train de dire le Président des riches,
05:05il est loin de tout, il est arrogant, etc.
05:07C'est tout le contraire.
05:08Le Président Macron, c'est tout le contraire.
05:10C'est un mec qui est attentionné,
05:11qui fait attention aux petits gens.
05:12Moi, je l'ai vu au palais, je l'ai vu se marcher dans la rue,
05:15qui est attentif aux situations des gens,
05:17qui les suit, là où il y a des politiques pour qui j'ai travaillé,
05:20sans les citer, mais aux partis socialistes,
05:22quand ils n'ont rien à foutre des gens.
05:24Si c'est la réalité, ils sont là pour leurs petites personnes.
05:26Et lui, ce n'est pas le cas.
05:27Et malgré ça, vous avez une image qui est donnée dans les médias
05:29d'un mec arrogant.
05:33Moi, je l'accepte à mon petit niveau.
05:34Mais je me rends compte que souvent,
05:36l'image publique qui est donnée,
05:37c'est souvent l'inverse de ce qu'on est réellement personnellement.
05:39Dans l'image publique, et là, quand je vous parle,
05:41vous êtes Alexandre Benalla.
05:43Ce n'est pas votre nom de baptême.
05:45Vous vous appelez Marouane Benalla.
05:47Oui, ça m'a fait couler beaucoup d'encre, ça aussi.
05:51Quand je suis né, mon nom de naissance,
05:54mon prénom et mon nom de naissance, c'était Marouane Benalla.
05:57Quand ma mère s'est séparée de mon père
05:58pour brouiller un peu les pistes,
05:59parce qu'il y avait une divergence entre les deux,
06:01ils sont tous les deux venus faire leurs études ici en France.
06:04Du Maroc.
06:05Du Maroc, exactement.
06:06Mon père a fait son doctorat en chimie
06:08et lui, il voulait repartir vivre au Maroc.
06:10Et ma mère, elle, tout ce qui a passé,
06:11ça a eu une maîtrise, un DEA, je crois que ça s'appelait comme ça.
06:15Ça s'appelait comme ça, en tout cas, à l'époque.
06:17Elle a préféré rester en France.
06:19Elle avait trouvé du travail dans l'éducation nationale.
06:21Elle est devenue prof de maths, etc.
06:23Et donc, il y avait une petite tension,
06:25une concurrence entre les deux
06:27pour qui ramène le petit ou qui garde le petit.
06:30Et donc, elle a changé mon prénom
06:32pour des raisons très simples, administratives,
06:35pour brouiller un peu les pistes.
06:37Elle m'a mis Alexandre,
06:38qui veut dire guerrier protecteur en grec.
06:41Je crois beaucoup à la signification des prénoms.
06:44C'est-à-dire guerrier protecteur,
06:45et je trouve que c'est un prénom qui aide plutôt que…
06:48Non, ça aide.
06:50C'est peut-être ça, en fait, la sécurité.
06:52Guerrier protecteur,
06:53mais la sécurité, elle va vous mener à l'Élysée
06:56ou à côté de l'Élysée déjà à l'âge de 14 ans.
06:58C'est l'âge de troisième.
07:00– Vous n'avez même aucun réseau.
07:02Vous êtes anti-normand.
07:03Vous le disiez même de la campagne, des hommes orales.
07:05Et vous vous retrouvez en stage à côté de l'Élysée.
07:07– À l'Élysée même ? Dans l'Élysée ?
07:09Oui, en fait, c'est un peu dingue, mais…
07:14J'ai employé une formule qui est peut-être un peu maladroite
07:16de borderline.
07:17En fait, ce n'est pas tant être borderline
07:19au sens auquel on peut l'entendre
07:21de gens qui sont dans des comportements
07:24qui peuvent être prédélectuels, etc.
07:27Ce n'est pas du tout ça mon sujet.
07:28Moi, j'ai toujours été sans limites.
07:31Pour moi, il n'y a pas de limites.
07:33J'aime bien l'expression « the sky is the limit ».
07:35Et quand j'ai 14 ans, je me dis,
07:37mes potes font leur stage au salon de coiffure
07:40à l'Aigle ou Intermarché,
07:42dans un cabinet de docteur et tout.
07:44Moi, je rêvais, je voulais faire mon stage au RAID à l'époque.
07:47– Le RAID ?
07:48– Oui, l'unité d'intervention d'élite de la police nationale.
07:51Je me dis, je vais leur écrire un courrier.
07:53Je rédigeais un courrier chez moi.
07:55Je trouve l'adresse du ministère de l'Intérieur
07:58et j'envoie le courrier.
08:00Et le hasard fait que je reçois une réponse
08:02du cabinet à l'époque du ministère de l'Intérieur,
08:04qui était Nicolas Sarkozy,
08:06et qui répond, « Bravo pour votre belle lettre, etc.
08:10Mais vous comprenez que le RAID, ça serait un peu compliqué.
08:12Par contre, on peut vous faire faire un stage au SPHP,
08:15le service de protection des hautes personnalités. »
08:18J'y croyais moyen.
08:19Ma mère reçoit un coup de téléphone,
08:21je crois trois ou quatre jours après le courrier,
08:23pour nous envoyer des éléments complémentaires.
08:25Et je me suis retrouvé à faire une semaine de stage.
08:28127 coups du Faubourg Saint-Honoré, à l'époque.
08:31Et là, le matin, on m'a fait découvrir l'armurerie.
08:33L'après-midi, j'étais à l'UMM,
08:35c'est l'unité des moyens mobiles.
08:37J'ai découvert des voitures blindées,
08:38c'est dans les anciens locaux de la DST.
08:40C'est vous passer de regarder ça à la télé,
08:42de regarder Charles Villeneuve et le droit de savoir,
08:44à la réalité avec des vrais policiers,
08:46dans un service en plus qui n'est pas un service lambda.
08:49Et j'avais des paillettes plein les yeux.
08:51C'est dur, quoi.
08:52Quand je racontais à ma mère au téléphone le soir
08:54ce que j'avais vu la première journée,
08:55je ne suis pas sûr qu'elle croyait exactement.
08:58Elle s'est dit de peut-être partir un peu loin.
09:00Le lendemain, j'étais à Matignon,
09:02Dominique de Villepin, Premier ministre,
09:03je monte dans sa bagnole blindée,
09:05je déjeune avec les mecs du GSPM
09:07et de la commissaire de police à l'époque
09:09qui dirigeait sa sécurité.
09:10Et le mercredi, je me retrouve au Conseil des ministres,
09:13avec le grand ballet des voitures, etc.
09:15Et j'ai cette fameuse photo qui est sortie dans la presse
09:17où je suis pris par le numéro 2 ou le numéro 3
09:20à l'époque du GSPR qui me prend en photo
09:22avec l'Elysée derrière moi.
09:24Et je crois qu'à ce moment-là,
09:25je me dis que c'est vraiment ça que je veux faire.
09:26Ça a l'air top comme métier.
09:27Et je veux faire ça.
09:28Et il y a toujours eu cette petite musique
09:30qui a trotté jusqu'à y arriver, pour de vrai.
09:33Il y a une musique à 14 ans,
09:34« Je reviendrai un jour à l'Elysée ».
09:36Oui.
09:37Oui.
09:38Ça peut paraître dingue, mais oui.
09:40Alors avant de revenir,
09:41il y aura 11 ans qui vont se passer.
09:44Vous allez poursuivre votre passion de la sécurité,
09:47votre parcours dans la sécurité et la politique.
09:49Est-ce qu'à l'époque, il y a un homme politique
09:51ou une femme politique qui vous fascine ?
09:55Non, je suis fasciné par la politique.
09:57J'adore regarder les débats politiques.
09:59J'adore lire « Le canard enchaîné » depuis tout jeune,
10:01regarder toutes les émissions,
10:03les clashs,
10:05dès qu'il y avait YouTube, etc.
10:06C'était un truc qui me passionnait.
10:07Je trouve ça assez incroyable.
10:10Mais les deux personnes que j'ai rencontrées
10:12qui m'ont vraiment impressionné,
10:15au sens charismatique,
10:16c'est-à-dire avec une aura,
10:17vous regardez vos chaussures
10:18quand ils sont en face de vous.
10:20Une fois, il y avait une convention sur la justice
10:22à la salle Victor Hugo, à l'Assemblée nationale,
10:24au moins trois,
10:25et toute la hiérarchie socialiste qui était là.
10:28Morois n'était pas décédé à l'époque.
10:30C'est quelque chose.
10:31Et chaque fois qu'il y avait un orateur qui passait,
10:34il y avait une espèce de brouhaha,
10:37que ce soit Fabius, je ne sais pas, et compagnie.
10:40Et à un moment, il y a eu un silence,
10:41et moi qui étais debout,
10:42parce que j'accompagnais la première secrétaire,
10:44je me suis retrouvé assis en train d'écouter un mec.
10:47Et à me rendre compte,
10:48cinq minutes après être assis
10:49et en train d'écouter le mec,
10:50que je n'avais rien à faire là,
10:51je devais être en train de faire mon travail,
10:53et il n'y avait plus de bruit dans la salle.
10:54C'était Robert Badinter.
10:56Donc lui, il m'a impressionné, vraiment.
10:58Et après, je me suis intéressé,
10:59j'avais vu son coup de colère au Veldiv,
11:01impressionnant,
11:02son discours sur la peine de mort, etc.
11:03Donc lui, il m'a impressionné.
11:04Et peut-être le père de Martine Aubry aussi,
11:06que j'ai eu l'occasion de rencontrer une fois,
11:08Jacques Delors,
11:09avec ce regard dont,
11:11parfois certains vous disent,
11:12Mitterrand était un peu comme ça,
11:13c'est quand il vous regarde,
11:14vous avez l'impression qu'il vous transperce,
11:16et qu'il vous a cerné.
11:17Donc vous avez tendance à baisser les yeux,
11:19pour garder une part de vie privée,
11:25parce que vous avez l'impression
11:26que la personne en face de vous
11:27vous a complètement cerné.
11:28Bon, c'est ces deux personnes-là
11:29qui m'ont impressionné.
11:30– Puis il y en a une troisième,
11:31c'est Emmanuel Macron.
11:32– Oui.
11:33– Vos toutes premières rencontres avec lui,
11:34vous la racontez dans votre livre,
11:36et vous écrivez qu'il se passe,
11:37je vous cite un truc immédiat,
11:39vous dites un contact total.
11:41C'est quoi, un contact total ?
11:43– Un contact total,
11:44c'est quand le mec vous serre la main,
11:46il vous regarde du fond de ses yeux bleus,
11:48avec les pupilles épingles,
11:53et vous vous comprenez,
11:54en face de vous,
11:55j'ai envie de dire chez nous,
11:57mais c'est pas chez plein de gens,
11:59on dit un bonhomme.
12:00Le mec, il a une poignée de mains franches,
12:02c'est rare en politique.
12:03Déjà c'est rare que les hommes politiques,
12:05à ce niveau-là, vous serrent la main,
12:07j'en parle d'expérience,
12:09qu'il vous la serre vraiment,
12:12c'est encore plus compliqué,
12:13mais qu'il vous la serre vraiment,
12:15en vous regardant dans les yeux,
12:16et en vous montrant que vous êtes aussi important que lui,
12:18et que vous allez être très important
12:20dans le dispositif qu'il est en train de mettre en place,
12:22en l'espace de 5 secondes,
12:23je suis pas sûr qu'il y ait beaucoup de gens
12:24qui soient capables de faire ça.
12:25Donc c'est du charisme,
12:26c'est parce qu'il a une vraie énergie,
12:28il a une aura,
12:29et voilà, vous vous dites,
12:30il y a des gens comme ça,
12:31vous avez envie de les suivre.
12:33Voilà, c'est comme ça,
12:35c'est la nature,
12:36il y a des gens qui sont des leaders naturels,
12:37et vous avez envie de les suivre.
12:38Alors en plus,
12:40c'est ça,
12:41j'essaye de le décrire avec mes mots,
12:42alors je sais que ça peut être repris
12:43de manière un peu décalée,
12:45par rapport à toutes les rumeurs qu'il y a eu
12:47sur Emmanuel Macron,
12:49et sur moi, etc.,
12:51qu'il a dû démentir,
12:52qui sont juste dégueulasses,
12:54mais je n'arrivais pas à décrire
12:56cette scène autrement
12:58que comme je l'ai dit.
12:59C'est-à-dire en l'écrivant,
13:00vous vous êtes dit,
13:01pour peut-être alimenter les rumeurs ?
13:02Ouais,
13:03bon après c'est comme ça,
13:04de toute façon,
13:05il faut dire les choses,
13:06il ne faut pas se cacher.
13:07Vous allez le suivre ?
13:08Vous allez le suivre,
13:09il va gagner la présidentielle,
13:10et vous arrivez vous aussi à l'Élysée.
13:11Ouais.
13:12On a beaucoup parlé de vous
13:14depuis 17 mois,
13:15c'était quoi votre boulot,
13:16Alexandre Benalla,
13:17à l'Élysée ?
13:18Alors je n'étais ni le vigile,
13:20même si j'ai beaucoup de respect
13:21pour les vigiles,
13:22parce que j'ai pratiqué ce métier,
13:23ni l'agent de sécurité,
13:24ni son garde du corps,
13:25ni quoi que ce soit,
13:26je l'ai dit plusieurs fois,
13:27malheureusement,
13:28j'ai entendu sur un plateau,
13:29je crois,
13:30il y a des gens très très forts,
13:31il y a trois jours,
13:32qui commentaient le livre
13:33sans l'avoir lu,
13:34en disant oui,
13:35mais bon,
13:37c'était assez condescendant,
13:38mais c'était marrant à voir,
13:39parce que ces gens-là,
13:40ils arrivent à commenter du rien,
13:41c'est assez intéressant
13:42d'un point de vue humain,
13:43de regarder ça.
13:44Non, j'étais,
13:45pour revenir,
13:46ce que je faisais concrètement,
13:47mon appellation,
13:48c'était chargé de mission,
13:49chargé de mission,
13:50de laquelle,
13:51de quoi,
13:52comment,
13:53et ma fonction,
13:54c'était adjoint au chef de cabinet,
13:55donc il faut bien comprendre
13:56la chefferie de cabinet,
13:57à l'Élysée,
13:58c'est le cœur du réacteur,
13:59il n'y a rien qui se passe,
14:00il n'y a aucun déplacement
14:01du Président de la République,
14:02soit privé,
14:03public,
14:04le Président de la République
14:05ne fait rien
14:06sans que ça passe
14:07par la chefferie de cabinet,
14:08c'est des aspects logistiques,
14:09c'est des aspects agenda,
14:10c'est des aspects sécurité.
14:11Vous avez resté
14:1214 mois à l'Élysée,
14:13beaucoup de missions,
14:14et la dernière mission,
14:15votre toute dernière mission,
14:16vous ne le savez pas encore
14:17à l'époque,
14:18c'est l'accueil des Bleus
14:19et de la Coupe du monde de foot
14:20après la victoire en Russie.
14:21On a beaucoup parlé
14:22de ce moment-là,
14:23c'est un moment
14:24qui est très important
14:25pour nous,
14:26c'est un moment
14:27qui est très important
14:28pour nous,
14:29c'est un moment
14:30qui est très important
14:31pour la vie de la nation.
14:32On a beaucoup parlé
14:33de ce moment là,
14:34c'est la fameuse
14:35Descente des Bleus
14:36sur les Champs-Élysées.
14:37Et vous racontez que dès
14:38le moment où l'avion
14:39se pose sur le tarmac à Roissy…
14:40C'est le bazar.
14:41C'est le bazar…
14:42Pourquoi ?
14:43Parce que je pense
14:44qu'il y a très peu
14:45d'événements de ce type.
14:46Je pense qu'à ce moment-là
14:47tout le monde perd ses moyens
14:48et c'est assez drôle.
14:49Les seules personnes,
14:50très sincèrement,
14:51les seules personnes
14:52que j'ai vues garder
14:53leur calme absolu
14:54c'est les policiers du RAIDS
14:55jusqu'à l'Elysée d'ailleurs, c'est les seuls qui étaient dans leur couloir parce qu'ils ont
15:01l'habitude. Mais moi j'ai vu des gradés, soit des gendarmes, des douaniers, etc. qui n'étaient
15:06plus du tout à leur poste, qui étaient au milieu du tarmac. Mais c'est aussi ce qui fait le charme
15:11de ce type d'événement, c'est une espèce de grand bordel. Et à un moment, il faut un peu hausser
15:15la voix, un peu remettre les gens à leur place. Alors ils ne le prennent pas toujours bien parce
15:18qu'ils ont envie de leur amener la photo, de montrer à leurs enfants qu'ils ont fait le selfie.
15:22Bon, ce n'est pas catastrophique s'il y a un peu d'écart, mais il ne faut pas non plus que ça
15:26devienne complètement l'anarchie. Parce que sinon, c'est hyper compliqué à gérer. Mais en vrai,
15:31c'était l'anarchie. C'est l'anarchie et puis après, il y a la descente des Champs-Elysées qui
15:36va se faire extrêmement rapidement. Est-ce que c'est de votre faute ou pas ? Non, ce n'est pas
15:40de ma faute. Non, la réalité des choses, c'est quoi ? Parce que vous êtes dans le bus. Oui,
15:43je suis dans le bus. Je veux juste revenir sur un truc parce qu'il y a eu beaucoup de bêtises
15:45qui ont été racontées là-dessus. La première hypothèse, celle qui a tenu jusqu'au dernier
15:49moment, c'était de ne pas descendre les Champs-Elysées. Il n'y avait pas de descente de
15:53prévue. Il y avait une volonté, de la part d'un certain nombre de personnes, d'aller juste à
15:58l'hôtel Crayon et d'exposer la Coupe du Monde par le balcon et de la montrer aux gens. Au dernier
16:04moment, la préfecture de police a fait ses études en disant que c'était très dangereux, voire
16:10peut-être même qu'il pourrait y avoir des conséquences graves si on rassemblait autant
16:14de personnes sur le secteur de la Concorde de manière statique avec une équipe qui sort à ce
16:22moment-là parce que tout le monde n'a pas accès, on ne voit pas les balcons, etc. Donc, on a insisté.
16:26Et c'est l'Elysée qui a insisté. Il faut quand même remettre les choses. C'est l'Elysée qui a
16:30insisté en collaboration avec la Fédération française de football pour que cette descente
16:34puisse se faire. Et pour qu'elle puisse se faire dans les meilleures conditions, parce qu'il faut
16:37quand même rappeler qu'en 1998, ils ont mis 4h30, les gens ont arraché les portes, il y a eu des
16:42morts. C'était très compliqué la descente de Deschamps-Elysée en 1998. Il y a eu une dame qui a
16:48renversé deux personnes, je ne veux pas dire de bêtises, mais il y a eu des morts ce jour-là,
16:51dans les bousculades, etc. Beaucoup de blessés. Et l'équipe de France de football, en l'occurrence
16:57Didier Deschamps notamment, qui était à l'époque l'équipe de France, capitaine de l'équipe de
17:04France, j'ai quelques souvenirs, a gardé un mauvais souvenir de cette descente-là. Et il nous l'a
17:09fait savoir. Et donc le travail qui était le nôtre à ce moment-là, en collaboration avec la
17:14préfecture de police, c'était de trouver la meilleure solution pour qu'on puisse quand même
17:17faire profiter aux gens de l'équipe de France, tout en garantissant des conditions de sécurité
17:22qui aujourd'hui malheureusement nous sont imposées mais qui n'existaient pas en 1998. L'idée qui a
17:28été véhiculée de dire qu'il fallait qu'il soit là avant les chaînes de 20h, pour que le président
17:33soit visible aux 20h, etc. C'est une connerie absolue. D'ailleurs on est arrivé en face du
17:37Bristol, on a attendu 15 minutes parce que personne n'était prêt à parler de l'Elysée. Donc moi j'avais
17:41aucune consigne, j'ai jamais été en contact avec le président de la République par téléphone ou avec
17:46qui que ce soit. La seule personne que j'avais en contact c'était Patrick Straudat, qui me disait
17:50justement, le directeur de cabinet du président, qui me demandait à chaque fois notre position. Et
17:55quand on est arrivé, il m'a dit vous êtes trop en avance, etc. Donc il y a eu une part
18:00d'improvisation qui fait qu'il y a eu cette histoire de raconter un peu, on a fait du mieux
18:04qu'on a pu. L'essentiel c'est qu'on a gagné la coupe du monde, c'est quand même ça le sujet.
18:08Vous êtes au coeur de tous les événements pendant 14 mois, au coeur du pouvoir. Est-ce
18:13qu'on est grisé à un moment donné ? Franchement, je ne sais même pas si on se rend compte de la
18:21chance qu'on a au début et après vous êtes dans le match. Donc vous vous levez à 6h30,
18:27enfin les gens ne le voient pas, vous vous levez à 6h30 le matin, vous rentrez à une heure et demie
18:31chez vous, vous dormez 3-4 heures et c'est comme ça tous les jours. Alors c'est super bien, c'est
18:35top, on s'éclate, on fait des choses passionnantes, on est au coeur de l'événement. Mais grisé,
18:41ça voudrait dire quoi ? Ça veut dire qu'on en profite ? Moi, je n'ai jamais eu le temps de
18:46profiter de quoi que ce soit. Ou qu'on ne se rend plus compte de ce qu'on fait ? Ça, ça arrive,
18:52mais ça devient problématique professionnellement. Mais personnellement, être grisé, à quel point ?
18:57C'est-à-dire un peu le côté, il a pris la grosse tête, etc. Mais dans quel but ? Parce qu'en fait,
19:04vous vous servez beaucoup, mais vous vous servez très peu à l'édifice. Vous vous servez
19:07énormément, vous êtes au service de la personne qui vous a choisi, qui vous a mis au poste où
19:11vous êtes. Vous êtes au service des gens avec qui vous travaillez au quotidien. Mais pour vous
19:15servir, je ne vois pas de quelle manière en fait. Je n'ai pas eu d'avantage, contrairement à ce que
19:19j'entends. 15 jours sur un plateau T, il y a encore cette idée, il y avait une voiture. Bah oui,
19:23s'il y avait des trottinettes, je me serais déplacé en trottinette électrique avec marqué
19:26présidence dessus. Pour aller à Avignon, pour préparer un déplacement, c'est le plus long. Ils
19:31ne font pas des batteries encore suffisamment long. Il y a un gyrophare. Bah oui, parce qu'on est dans
19:34des cortèges. Donc si on ne veut pas écraser des gens ou avoir des accidents, quand on est dans le
19:37cortège du président de la République, il faut un gyrophare pour signaler. Ah oui, mais il y a eu
19:41un appartement, vous vous rendez compte ? Un appartement, bah oui, à un moment, quand vous vous dormez
19:47trois heures et que vous vous tapez 20 minutes de route pour entrer chez vous, alors qu'il y a un
19:50appartement libre que personne ne veut occuper, vous envisagez peut-être de le prendre. Donc grisé,
19:55non. Très sincèrement, je pense que c'est un faux procès qui m'a été fait là-dessus. Vraiment.
20:00Aujourd'hui, vous n'y êtes plus. Est-ce que vous vous parlez encore avec Emmanuel Macron ?
20:05Non. Depuis la fin de l'année dernière. J'ai dû envoyer des messages. Je n'ai jamais dit qu'il
20:13m'avait répondu. Mais non, je ne parle plus avec lui. Pourquoi ? Je pense qu'il a autre chose à
20:18faire et moi aussi. Il est président de la République. Donc non, il n'y a pas d'intérêt.
20:25Et vous voyez tout de suite la problématique que ça peut susciter. Parce qu'on dirait que je suis
20:29devenu... Au moment même où l'affaire sort, on fait de moi un espèce de truc radioactif qui va
20:36peut-être contaminer... Enfin, on est chez les fous. On est chez les dingues. Vous avez deux,
20:39trois journalistes mal intentionnés, notamment, qui ont sorti des trucs qui peuvent paraître
20:45assez incroyables, qui font que derrière, en effet, si vous continuez à parler, ça veut dire qu'il y a
20:50une forme de protection et machin. Je n'ai jamais été protégé par personne et je n'échange plus
20:54avec lui depuis la fin de l'année dernière. Mais ça veut dire qu'à un moment donné,
20:57vous vous interdisez d'échanger avec lui ? Bien sûr. Pour ne pas le mettre en danger ? Oui.
21:02Et lui, le dernier mot qu'il vous a dit ? Quoi ? Secret ? Est-ce que... Là, c'est de la politique.
21:16Est-ce que vous le trouvez bon ? Est-ce que vous qui le connaissez bien, est-ce que vous le trouvez
21:23bon, en ce moment, le président de la République ? Est-ce qu'il ressemble à ce que vous avez connu ?
21:25Ou est-ce qu'il a changé ? Est-ce qu'il fait des erreurs ? Comment vous le trouvez ? Je pense
21:30qu'il y a l'usure du pouvoir. Avec ce qu'il a traversé, je pense qu'il est très bon. Je pense
21:37qu'il est très bon et il est très seul. Plus seul qu'avant ? Oui. Parce que vous n'êtes plus là ? Non,
21:44non, non, loin de là. Mais il y a eu une équipe avec qui il a gagné une campagne, avec qui il a
21:49été à l'époque ministre de l'économie. Cette équipe, elle s'est un peu éclatée. Chacun a pris
21:55son envol. Et au final, de toute façon, dans tous les cas, je pense que c'est inhérent à la fonction
22:00du président de la République. Quand vous êtes président de la République, vous n'avez plus tel
22:05ou tel collaborateur préféré ou tel ami. Vous êtes seul. Les décisions qu'il prend, c'est lui seul
22:11qui en assume les conséquences. Et parfois, vous êtes seul contre ceux qui sont à côté de vous.
22:16C'est peut-être là où ça devient plus compliqué encore. Et parfois, vous êtes seul et vous prenez
22:21une décision parce que vous avez une vision à long terme et ceux qui sont à côté de vous
22:26ne veulent pas que vous la preniez. Donc, ils vous mettent des bâtons dans les roues tout en vous
22:28disant « Ah, c'est super la décision que vous avez prise, Monsieur le Président », etc. Et derrière,
22:32quand on sort, on lui met des bâtons dans les roues. Donc, c'est extrêmement difficile, la fonction
22:37du président de la République. Et aujourd'hui, je pense que c'est un très bon président de la
22:39République et que c'est une chance de l'avoir. Est-ce qu'il y a des erreurs ? Je ne suis personne
22:44pour dire s'il fait des erreurs ou pas. Je pense qu'en tout cas, il a traversé des crises compliquées,
22:49une crise sociale très difficile. Je pense qu'il s'en sort très bien.
22:54– Vous le dites, il y a eu des fantasmes, des rumeurs beaucoup sur la nature de vos relations
23:00avec le président de la République. C'était quoi, en fait, très concrètement ? Votre relation,
23:07c'était quoi ? Une relation d'amitié, de complicité ?
23:08– Non. Une relation de travail, professionnelle.
23:12– Pas plus proche que les autres.
23:14– Une relation de confiance ? Une capacité ? Si j'étais là, j'apportais quelque chose de différent
23:21des autres. C'est-à-dire que je n'ai pas fait les grandes écoles, je n'ai pas non plus pas fait
23:25d'études, comme je l'ai entendu récemment, mais ma force, le truc que j'essayais de lui apporter
23:32au maximum, c'était peut-être une intelligence pratique, essayer de comprendre les situations,
23:37de les démerder, de savoir ce que lui, il attendait à un moment donné, à un instant T,
23:41et réussir à faire que ça se passe comme lui souhaite que ça se passe.
23:44Parfois avec mon caractère aussi. Donc c'était une capacité qu'il avait de déléguer sans être
23:49obligé de donner détail par détail ce qu'il fallait faire.
23:51Ça s'appelle une relation professionnelle de confiance ? Ça arrête là.
23:56C'était ni mon ami, je ne l'ai jamais tutoyé.
23:58C'était agréable de travailler pour lui et c'était une fierté pour moi de le faire.
24:05– Et s'il y a eu beaucoup de fantasmes et de rumeurs, d'après vous, qui est-ce qui les a nourris ?
24:09– Les gens qui sont jaloux de lui, prioritairement.
24:13Les gens qui ont entretenu ces rumeurs déjà pendant la campagne présidentielle,
24:16dont on sait qui elles sont. – Moi je ne sais pas.
24:19– Moi je le sais, c'est triste pour eux d'ailleurs.
24:21Je leur dis, si ils regardent cette interview, c'est triste pour eux d'avoir que ça,
24:25d'aller dans des dîners en ville en racontant des conneries.
24:27Surtout parfois au niveau où ils sont, ça dit beaucoup sur la noirceur de leur âme.
24:34Et c'est dommage pour eux, avant tout.
24:35– Mais ce sont, pour comprendre, parce que moi je ne comprends pas,
24:38ce sont des gens de l'Élysée, du gouvernement ?
24:40– Non, non, non, non, ce sont des gens qui évoluent dans les sphères du pouvoir.
24:43Dans les sphères du pouvoir, de ceux que j'ai appelés costume gris,
24:46des inspecteurs généraux des finances, des anciens inspecteurs généraux des finances,
24:50des conseillers de tel ou tel patron du CAC 40, etc.,
24:53qui n'ont pas choisi le bon camp, ou à un moment où on décidait qu'ils n'aimaient pas le mec,
24:58ou que s'il n'était pas avec eux, forcément c'était pas bon.
25:01Donc après on invente tout et n'importe quoi pour essayer de nuire.
25:04– Ça c'est important, c'est qui les costumes gris ?
25:06Ou les hommes en gris, comme vous les appelez dans votre livre ?
25:09– C'est tous ceux que, malheureusement, dans les derniers épisodes des Gilets jaunes,
25:16se sont attaqués à une personne, c'était Emmanuel Macron.
25:19Mais en fait, peut-être que la cause de leur problème, ce n'est pas Emmanuel Macron.
25:22C'est les gens qui sont derrière, qu'on ne voit pas,
25:24qui sont aujourd'hui ce qui a été théorisé aux États-Unis comme le Deep State,
25:28une forme d'État profond.
25:30C'est les gens qui passent un diplôme à 22-23 ans, un concours à 23-24.
25:35Et après, pendant 40 ans, c'est eux qui tiennent les rênes de l'administration,
25:40donc du pouvoir en France.
25:41En France, c'est l'administration qui a le pouvoir, la politique ne fait que passer.
25:46C'est des gens qui ont des idées très arrêtées, qui ont un plan de carrière,
25:50qui se connaissent tous entre eux.
25:54Alors ça fait très complotiste quand on en parle comme ça,
25:56ça peut être difficile à comprendre.
25:58Quand on le voit de l'intérieur, ce n'est pas une organisation secrète,
26:01avec des gens qui se réunissent autour de bougies, autour d'une table, dans des caves,
26:05quelque part, ce n'est pas ça le sujet.
26:06C'est des gens qui ont une forme de pouvoir,
26:09mais malheureusement, qui n'ont pas la légitimité démocratique, pour moi, de l'exercer.
26:12Et quand le politique leur demande de faire quelque chose,
26:15si ça ne leur convient pas, ils mettent un sacré plaisir
26:19à faire en sorte de freiner, au maximum, en se disant de toute façon,
26:24on est au bout de deux ans, dans trois ans,
26:26il y a l'élection, il va faire autre chose.
26:28Et pendant ce temps-là, ils ne nous emmerdent pas avec ça.
26:31– Et vous, vous vous définissez un peu comme un intrus, qui n'a pas les codes.
26:35– Non, qui les a, mais qui s'en a franchi.
26:37Peut-être que c'est là où, quand vous parliez de griser,
26:39ça peut peut-être prendre tout son sens à ce moment-là.
26:41Je ne suis pas là pour eux, je ne suis pas là pour...
26:45Ce que je dis à un moment, c'est qu'eux,
26:46ils peuvent servir n'importe quel président de la République.
26:48Moi, je suis venu pour servir Emmanuel Macron, président de la République,
26:51dans les règles qui sont fixées, etc.
26:54Il n'y a pas de sujet là-dessus.
26:55Mais pourquoi on devrait m'imposer pendant une tenue vestimentaire,
26:58une façon de parler, une manière de se comporter, etc. ?
27:01Ils ont été dans des écoles, ils ont leur parcours de vie qui est de leur.
27:04Moi, je suis là parce que, justement, je pense, en tout cas,
27:08très modestement, que je suis là parce que je suis différent d'eux.
27:10Donc, j'apporte une complémentarité.
27:13Donc, je ne vais pas me changer, je ne vais pas changer mes habitudes,
27:15je ne vais pas changer qui je suis pour faire plaisir à certains,
27:18que je dérange, parce que, pour aller récupérer...
27:23Je ne sais pas quel exemple vous donnez, mais c'est un peu aller où ton oreille.
27:26Ils font ça et moi, je leur fais aller là et ça les emmerde.
27:30Parce qu'on leur a appris à dire qu'il faut trouver la solution compliquée.
27:33On essaie de trouver des solutions simples,
27:35parfois en disant les choses simplement et parfois, de vous vexer des gens.
27:38Ils ont le même mode de réponse.
27:39C'est qu'ils ne vous répondent jamais tout de suite, directement.
27:41Ils vous font un sourire.
27:42Ils appellent ça la duplicité, d'ailleurs.
27:43Ils l'ont théorisé.
27:44Et après, le moment où vous êtes dans la situation inverse, on vous plante.
27:51Vous parlez de code vestimentaire.
27:53Vous dites, ils me reprochent d'être en jean et en basket.
27:55Oui, c'est vrai.
27:56Vraiment ?
27:57Non, c'est vrai, ça a été reproché.
28:00Après, une fois, je me suis mis vraiment en costume.
28:02Ça a été remarqué, c'est drôle, c'est de l'ordre du comique.
28:07Est-ce que vous diriez qu'il y a une sorte de racisme ?
28:12Social.
28:13À l'Élysée ?
28:14Social, pas qu'à l'Élysée, je pense que c'est partout, social.
28:18Le racisme au sens religieux, ethnique, etc., moi, j'y crois absolument pas.
28:24Très sincèrement, j'y crois absolument pas.
28:26Je considère ne l'avoir jamais subi.
28:28Je considère que dès lors qu'on se sent différent,
28:32on se met dans une position d'infériorité.
28:33Il faut aller vers l'autre.
28:34Quand vous avez quelqu'un qui vous dit, j'aime pas les Arabes,
28:36il faut aller parler avec lui, on se dit, on discute ensemble, tous les deux.
28:40Il ne faut pas non plus, soi-même, se mettre dans la même position
28:42que la personne en face de vous.
28:43C'est-à-dire, lui, c'est un raciste, donc je ne parle pas avec lui.
28:44Et lui, comme il est raciste, il ne parle pas avec vous, ce que vous êtes d'origine.
28:47Donc, ce racisme-là, je n'y crois pas.
28:48Le racisme de caste, etc., il est très présent.
28:52Vous avez des gens qui ont l'habitude de fonctionner entre eux,
28:54qui se connaissent, qui n'ont pas forcément envie que les choses changent.
29:00Je pense notamment à la réforme sur la sécurité qu'on a conduite
29:03avec le général Lavergne et le général Biofarina.
29:06Ça a emmerdé pas mal de gens au ministère de l'Intérieur.
29:08Parce que, pour qu'est-ce qu'ils nous font chier ?
29:10Ça fonctionne bien.
29:11Alors non, ça ne fonctionnait pas bien.
29:12– C'était mettre ensemble deux services.
29:13– C'est ça.
29:14– Qui, aujourd'hui, sont deux services indépendants.
29:16– Exactement, et mettre la sécurité du Président sous le joug de la présidence de la République.
29:19Ce qui paraît absolument logique.
29:21Un, parce que déjà, la Cour des comptes le recommande depuis trois ou quatre années,
29:25d'une manière successive.
29:27Elle disait qu'il faut que l'Élysée assume son budget sécurité
29:30et arrête de le déléguer à d'autres ministères.
29:32Donc, c'était quand même une recommandation écrite noir sur blanc
29:34de la part de la Cour des comptes.
29:35Et ça posait des problèmes de fonctionnement.
29:37C'est-à-dire que, quelle légitimité le ministre de l'Intérieur a ?
29:42A savoir ce qu'il se passe à l'Élysée,
29:43à choisir les gens qui travaillent à l'Élysée,
29:46à donner des moyens, alors que la présidence de la République…
29:48Sinon, pour la cuisine, on peut aller manger aussi chez Fabrice Cuvier.
29:52C'était quelque chose qui partait du bon sens
29:54et sur un constat que ça ne fonctionnait pas.
29:57– Mais pour bien comprendre, vous pilotiez une réforme de la sécurité à l'Élysée,
30:02qui, du coup, allait enlever du pouvoir, peut-être aux gendarmes, peut-être aux policiers ?
30:05– Non, surtout aux préfets du ministère de l'Intérieur.
30:08– Et vous pensez qu'on vous l'a fait payer, ça ?
30:10– Ouais, clairement.
30:12– De quelle manière ?
30:15– C'est simple, quand vous êtes le 1er mai dans une salle de commandement,
30:19que vous voyez en direct le retour d'images et la diffusion,
30:23notamment sur les réseaux sociaux, de manière instantanée,
30:26de ce qui s'est passé le 1er mai et que vous savez à qui vous avez affaire.
30:29Quand vous êtes connecté un peu avec tel ou tel journaliste,
30:32d'aller essayer de vendre cette histoire,
30:34parce qu'en plus vous êtes copain avec un des mecs qui est chef d'un service,
30:38notamment, qui est un peu impacté par la réforme et tout,
30:41c'est facile à faire.
30:46– Vous vous dites, le 1er mai,
30:49on voit les images de vous avec les manifestants
30:52et quelqu'un, un haut-gradé de la police, dit « on le tient ».
30:55Vous êtes sûr de ça ? – Certain.
30:57Je ne suis pas le seul à l'avoir entendu.
31:01– Vous l'avez entendu, vous ? – Ouais.
31:04– « On le tient », ça voulait dire ?
31:06– Je crois que ça lui a échappé, il était tellement content.
31:09Voilà, c'est comme ça que je vais parvenir là-dessus.
31:13– Il se passe quoi ? Parce qu'après, quand on voit les images,
31:16quand on lit la presse, on lit Alexandre Benalla
31:19à molester des manifestants, à frapper des manifestants.
31:21Vous appelez ça comment, vous ?
31:22– J'ai appréhendé des gens qui agressaient des policiers.
31:27Des gens qui agressaient des policiers, pas verbalement,
31:29qui agressaient des policiers en leur jetant des bouteilles
31:33comme celle-ci en verre sur la tête.
31:35J'ai fait ce qu'on appelle, moi j'appelle ça mon devoir de citoyen,
31:40dans un cadre légal très précis qui s'appelle l'article 73
31:43du code de procédure pénale, j'invite tout le monde
31:45à aller regarder ce que c'est.
31:46Il dit très clairement « n'importe quel citoyen peut appréhender
31:50l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant
31:53et le remettre à l'officier de police judiciaire le plus proche ».
31:55– Mais à ce moment-là, vous y pensez à l'article ?
31:56– Je le connais par cœur, j'ai fait 200 jours de réserve en gendarmerie.
31:59J'ai déjà appréhendé, il m'est arrivé d'appréhender des gens
32:02en étant civil qui commettaient une agression, ça m'est arrivé.
32:05Donc je veux dire, l'article 73, moi j'ai été formé à ça en 2009,
32:08j'ai interpellé, je ne peux pas vous dire exactement
32:10combien de personnes dans le cadre de mes fonctions
32:12de réserviste de la gendarmerie, simplement beaucoup de gens,
32:14et notamment beaucoup de journalistes, au tout début de cette affaire,
32:17sont très mal informés sur la loi et ne la connaissent pas, simplement.
32:21Et on a essayé de faire croire, quand j'ai écouté les premières histoires,
32:24c'était en gros, je me suis levé le 1er mai, j'ai pris ma bagnole,
32:28un casque, j'ai demandé un brassard à quelqu'un
32:30et je suis parti faire un peu ma loi,
32:32c'est pas ça, c'est pas du tout la réalité de ce qui s'est passé.
32:35– Est-ce que, en y repensant, vous ne vous dites pas à ce moment-là,
32:39j'oublie peut-être trop vite que je suis membre du cabinet
32:42du Président de la République ?
32:43– Mais parce que pour moi, ça ne confère aucun avantage.
32:46Donc, s'il n'y a pas d'avantage, ça ne peut pas non plus jouer en avant,
32:50ça ne donne aucun statut particulier, c'est une question d'image.
32:54Et ça, je le comprends, que plus tard, et bien plus tard, récemment,
32:57qu'en fait, il y a un enjeu d'image derrière,
32:59de par le fait que vous servez le Président de la République,
33:02vous ne pouvez pas faire ça.
33:03Mais c'est écrit nulle part.
33:05Je ne suis pas un diplomate avec une immunité particulière,
33:07je ne suis pas protégé particulièrement.
33:09Donc, moi, à ce moment-là, je suis un simple citoyen
33:11qui reçoit des trucs sur la tête en même temps que je vois
33:13des policiers se faire agresser et qui réagit en allant chercher
33:16des gens qui sont dangereux.
33:18Et on a inversé les rôles.
33:19Parce qu'on a présenté ces gens-là, au début,
33:21comme un gentil couple de mangeurs de crêpes.
33:24Après, c'était des gentils manifestants.
33:26Dans quelle manifestation ?
33:27On ne sait pas, parce que le cortège n'est jamais parti.
33:30Il faut quand même le rappeler.
33:31Le cortège du 1er mai est resté à Bastille le 1er mai 2018.
33:35Donc, Bastille contre Escarpes, c'est à peu près deux kilomètres.
33:38Enfin, il faut juste que les gens se rappellent ça.
33:40Les gens qui étaient soi-disant des opposants politiques,
33:43donc si je comprends bien, dans la bouche de beaucoup de journalistes
33:45qu'ils ont présentés comme des opposants politiques.
33:47Opposants politiques, ça veut dire quoi ?
33:49Ça aurait été des slogans anti-gouvernement, anti-Macron.
33:53Tout le monde déteste la police.
33:55« All cops are bastards ».
33:57Moi, je ne vois pas d'opposants politiques.
33:58Je vois juste des gens qui veulent s'en prendre aux forces de l'ordre,
34:01qui veulent agresser d'autres personnes,
34:03qui se foutent complètement qu'en phase 2,
34:05ils ont aussi des pères de famille
34:07et qu'ils sont là pour bordéliser une situation.
34:08Ils n'ont jamais déclaré de manif.
34:10Ils n'avaient aucun slogan revendicatif particulier.
34:12Ils sont venus ce jour-là.
34:14Certains avaient des lunettes de piscine.
34:16Il n'y a pas de centre aquatique place de la contre-Escarpes.
34:19Certains avaient des casquettes coquées.
34:21Il n'y avait pas non plus de match de baseball.
34:23Il y avait des masques de chantier.
34:25Je ne suis pas sûr qu'ils étaient tous intérimaires.
34:27Ils venaient dans un but précis, c'était de casser du flic.
34:32Et ça, on ne l'a pas assez dit.
34:34– Est-ce que vous referriez la même chose si c'était aujourd'hui,
34:36avec le recul ?
34:37– Si je dis oui, je vais paraître provoquant.
34:40Mais ce jour-là, je l'ai fait.
34:42Je pense que si ça se repassait, vous voyez ce que je veux dire ?
34:46Sans tenir compte de tout ce qui s'est passé médiatiquement,
34:48je réagirais de la même manière, sans doute.
34:51– Après ce qu'il se passe place de la contre-Escarpes,
34:53vous revenez à l'Élysée.
34:55Il se passe quoi à ce moment-là ?
34:57Vous appelez qui ?
34:58Vous prévenez le président de la République ?
35:00– Je fais un message en disant, voilà, il s'est passé ça.
35:03Il y a une vidéo qui est sur les réseaux sociaux.
35:05La scène peut paraître assez violente, mais j'ai réagi, tac, tac.
35:09Voilà, je précise, je rends compte à ma hiérarchie de manière assez loyale.
35:14Il y a une décision qui est prise dans les jours qui suivent
35:16de suspension de 15 jours.
35:20Elle est appliquée, je rentre et je reprends le courant de mes activités,
35:24peut-être de manière un peu moins visible.
35:26– Mais ce qui est intéressant, c'est que vous êtes suspendu,
35:29mais vous dites à un membre du cabinet d'Emmanuel Macron,
35:32vous me suspendez là où vous faites une connerie.
35:35Soit vous me virez, soit vous me décorez.
35:37– Oui, pourquoi ?
35:38Parce que je considère que ce que j'ai fait ce jour-là,
35:40ce n'était pas de l'ordre de répréhensible.
35:44Ça ne recevait aucune qualification pénale.
35:46Quand vous allez défendre ou aider des policiers à appréhender des gens,
35:49sinon on a changé complètement, on a inversé la pyramide des valeurs.
35:55C'est-à-dire qu'aujourd'hui, c'est les victimes,
35:57ceux qui ont été présentés comme tels dans le premier article qui est sorti,
36:01en plus c'était bien vendu, des gentils couples qui mangent des crêpes,
36:04qui se font charger par les méchants policiers,
36:06parce que maintenant les policiers sont tous devenus des méchants,
36:08ils font tous des violences policières.
36:10Les policiers, je pense qu'ils rentrent pour être…
36:12c'est de la connerie.
36:13Il y a un discours aujourd'hui qui est dangereux d'ailleurs,
36:15parce qu'il essaie de montrer quelque chose
36:18où il y aurait une oppression policière et une volonté des flics à chaque fois d'être violents.
36:22Ce n'est pas la réalité des choses.
36:23Les policiers, ils sont là pour maintenir l'ordre public,
36:26ce qui garantit notre liberté à tous.
36:28Donc ça veut dire qu'ils sont là et qu'ils réagissent à une action.
36:33Ils ne sont pas dans l'action spontanée de violence,
36:35ils réagissent de manière proportionnée.
36:38Et donc ce jour-là, moi je suis à leur côté, je suis avec les gentils.
36:45Quand vous êtes avec les policiers, je suis avec les gentils.
36:47Et les méchants, c'est ceux qui jettent des bouteilles sur les forces de l'ordre.
36:52Et ça, ça a complètement été inversé.
36:54Donc quand je me retrouve face à ce qu'on sait là,
36:55je me dis, attendez, vous ne prenez pas la dimension de ce qui s'est passé ce jour-là.
36:59Un, j'étais dans un cadre légal précis.
37:01Alors, ce qui pose problème aujourd'hui,
37:04c'est une vidéo montrée sous un certain angle et qui est limitée à cette vidéo.
37:10Avant de montrer la vidéo où ils sont en train de balancer des projectiles
37:14ou celle où il résiste à son interpellation pendant plus de deux minutes
37:17avec 14 CRS autour de lui,
37:18ça, ça a mis deux mois et demi avant de sortir dans les médias.
37:22Et d'être montré. Et très rapidement.
37:24Comparé à pendant deux mois, plusieurs semaines en tout cas,
37:28en boucle, sur les chaînes d'information en continu,
37:30on voit, on est en train un peu de m'agiter avec un mec qui en fait lui-même est agité.
37:33C'est-à-dire que vous essayez de maîtriser quelqu'un,
37:35vous ne faites pas de la violence gratuite avec un gentil gars qui était là en train de manifester.
37:39Vous êtes venu le télé... Ah, je n'ai tabassé personne.
37:43Je n'ai tabassé personne. J'ai essayé de maîtriser un mec qui était dangereux,
37:46qui a agressé les portes de l'ordre,
37:48qui les a agressés en leur jetant des bouteilles dessus,
37:50qui les a agressés en ne se laissant pas interpeller.
37:53Donc voilà, qui est connu, qui a été condamné aujourd'hui, il faut quand même le rappeler.
37:58C'est pareil, ça, ça a été un entrefilé.
38:00Parce qu'entre l'histoire qu'on vous a servie au début et celle qui arrive à la fin,
38:04ce n'est plus tout à fait le même monde.
38:06Donc, quand je suis conscient de ça dès le début, instinctivement, je dis...
38:10Soit en gros, vous me donnez une médaille,
38:11parce que ce qui s'est passé, c'est d'avoir appréhendé un mec qui était un délinquant.
38:17Pour le coup, il est condamné, donc je peux le dire, c'est un délinquant.
38:20Soit vous me virez.
38:21Mais le coup de chaque jour qui passe, c'est un jour de gagné.
38:24Je pense que tout le monde s'est rendu compte de ce qu'on avait gagné à la fin.
38:27Comment et quand est-ce que vous allez comprendre que l'affaire va exploser médiatiquement ?
38:32Vous le comprenez, le 18 juillet ?
38:35Non, bien avant.
38:38C'est bizarre, mais instinctivement,
38:40j'ai un appartement qui est mis à ma disposition début juillet,
38:42et je n'emménage pas, alors que tous les cartons sont prêts.
38:45Il y a un compte à rebours dans la tête.
38:47Et en effet, chaque jour qui passe, c'est un jour de gagné.
38:51Mais vous savez, à un moment, vous allez devoir sortir.
38:54Je pense que tout le monde en est conscient.
38:56Mais on essaie de dire peut-être, avec un peu de chance, ça ne sortira pas.
39:01Parce qu'on comprend tout de suite la manière dont les images,
39:05encore une fois, peuvent être interprétées, la force des images.
39:08Toute cette histoire, ça réside dans la force des images qui sont diffusées.
39:12Et le 18 juillet, vous recevez un coup de téléphone ?
39:15Non.
39:17Vous pouvez nous raconter, il est quelle heure, vous êtes où ?
39:18Je ne sais plus exactement, mais j'ai reçu un coup de téléphone,
39:21où « Bonjour, vous êtes M. Benalla ? »
39:23« Oui, c'est Mme Chemin, Le Monde. »
39:26« La Contrescarpe, ça vous dit quelque chose ? »
39:29J'ai dit « Madame, si vous le souhaitez, vous pouvez appeler le service de presse de l'Élysée.
39:32J'applique les consignes habituelles.
39:33On ne répond pas aux journalistes, on ne parle pas avec eux.
39:35Et je la dérive vers le service de presse.
39:37J'avertis tout de suite les conseillers concernés.
39:42Après, vous n'avez plus la main.
39:43Vous regardez.
39:45Vous observez.
39:47Vous dites que c'est une folle journée ?
39:49Il se passe quoi ?
39:50Quand vous montez dans la voiture et que vous entendez sur France Info votre nom en boucle,
39:54que vous voyez votre tête à la télé, en non-stop,
39:57ça vous dirait qu'il ne se passe plus rien dans le monde.
40:01On est chez les dingues.
40:03On est chez les dingues.
40:04Ça vous dit si le mec est mort à la fin ?
40:07S'il y a des effusions de sang ?
40:09S'il a le nez cassé ?
40:10Mais il n'y a rien de tout ça.
40:13Il n'y a rien de tout ça.
40:13Il y a une chorégraphie Place de la Contrescarpe
40:15entre un mec qui vient de faire des bêtises
40:17et un autre qui essaie de l'appréhender parce qu'il vient de faire ses bêtises.
40:19Mais il n'a pas de nez cassé.
40:22Il n'est pas mort à la fin.
40:24Il va bien.
40:25D'ailleurs, il ne va pas déposer plainte.
40:26Ils ne se présenteront pas non plus dans un hôpital.
40:28Il fera ça deux mois plus tard quand l'affaire sort opportunément.
40:33En disant j'ai pris des coups de matraque.
40:35Parce que je n'avais pas ce jour-là jamais eu de matraque.
40:39Donc, c'est une folle journée parce que vous vous dites
40:42les mecs sont devenus dingues.
40:44Et vous avez le premier article qui sort deux heures après
40:47et que cinq minutes après est repris
40:48parcours d'un impulsif où il raconte absolument n'importe quoi.
40:52En fait, c'est aussi peut-être ce qui m'a trouvé un peu dilettante à ce moment-là.
40:58Parce qu'on raconte l'histoire d'un mec, ce n'est pas vous.
41:00Vous voyez la télé et vous avez des spécialistes
41:03qui viennent et qui vous décrivent votre vie professionnelle,
41:07le parcours, un peu alambiqué, bizarre, qu'est-ce qu'ils font là.
41:12Et on vous découvre une bagnole dans un sous-sol.
41:14Il y a deux gyrophares dans la même.
41:16Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
41:18Ils touchent 10 000 euros et vous vous emménagez dans un 300 mètres carrés.
41:23C'est ça qui est dingue en fait.
41:25C'est dingue, vous regardez ça avec le sourire.
41:27Parce que vous vous dites les mecs sont fous.
41:29Demain, ils vont aller se coucher ce soir.
41:31Et vous savez, demain, on n'en parle plus.
41:32Ah non, le lendemain, ça continue.
41:34Et la semaine d'après encore.
41:36Et vous vous en retapez parce que derrière,
41:38il y a les politiques qui récupèrent le truc opportunément.
41:41Et on se retrouve avec une commission d'enquête,
41:43excusez-moi du peu, une commission d'enquête sénatoriale
41:46pour encore une fois une histoire d'un mec
41:49qui a jeté ça sur la tête des policiers,
41:53qui n'a pas été blessé,
41:55qui n'est pas mort, tout va bien pour lui,
41:59qui a été condamné par la justice.
42:01Et vous vous retrouvez devant 50 sénateurs
42:03où ils auditionnent la planète, chez les fous.
42:07La journée folle, elle va s'enchaîner.
42:09Et il y a ce moment où on vous remet un CD aussi.
42:11C'est ce jour-là.
42:12Un CD des…
42:13Je ne veux pas dire de bêtises, c'est ce jour-là ou le lendemain.
42:15Un CD des images.
42:17On vous dit, Alexandre,
42:19on a un CD avec des images qui montrent la violence des manifestants.
42:23Et ce CD, on vous le remet ?
42:25Oui, il m'est remis.
42:25Vous nous racontez la suite parce que c'est la nuit après.
42:27Oui, écoute, on me remet ce CD dans un bar à chicha,
42:31on dit les mots, qui est à proximité de l'Elysée.
42:34Et le lendemain matin, je retourne à l'Elysée,
42:36je le donne aux personnes qui ont besoin de ce CD
42:38pour regarder, pour voir ce qu'ils peuvent en faire.
42:40Parce qu'on est dans une situation où on nous montre des images
42:44sur la base d'un article écrit dans un grand journal,
42:47donc qui a une crédibilité.
42:50Et on nous présente
42:52une histoire qui n'est pas celle que moi j'ai vécue ce jour-là.
42:56Donc on se dit, attendez, il faut quand même expliquer aux gens
42:59que les personnes en face, ce n'est pas des gentils,
43:02ils ne mangeaient pas des crêpes, ils agressaient les gens.
43:04Ils agressaient des policiers en plus.
43:06Donc tous les moyens qui peuvent nous aider à prouver ça,
43:10ils sont les bienvenus à ce moment-là.
43:11On n'est pas dans une histoire de savoir d'où viennent...
43:13D'ailleurs, je ne vous demande même pas d'où viennent les images.
43:15Pour moi, ça vient de Twitter ou des réseaux sociaux
43:18qui sont surveillés par une cellule à la PP
43:20qui s'appelle la cellule synapse.
43:21Donc je prends le CD, je le remets à la personne concernée
43:25le lendemain matin à l'Élysée et fin d'hiver, je l'ensume.
43:27– Donc tu mets les liens, tu fais le coucher spécial de Mélanie.
43:29– Oui, je mets les liens, je l'ai dit depuis.
43:31– Après, c'est l'engrenage.
43:33Vous mariez, vous, normalement.
43:35– Oui.
43:36– Le 21 juillet, vous allez vous retrouver en garde à vue à ce moment-là.
43:39– Oui.
43:40– Est-ce que vous comprenez immédiatement que votre vie, elle a basculé ?
43:43Que la chute a commencé ou vous ne le comprenez pas encore ?
43:46– Vous comprenez quand vous voyez la rapidité avec laquelle
43:49les décisions sont prises.
43:51Celles d'ouvrir une enquête, d'être placé en garde à vue,
43:54de faire des perquisitions,
43:59vous comprenez tout de suite que l'ascenseur est redescendu.
44:04Vous êtes au moins un, vous descendez après au moins deux,
44:07après on vous dit qu'il n'y a plus d'ascenseur,
44:08il faut prendre l'escalier de secours et vous vous retrouvez au plus bas de niveau.
44:11Donc avec des menottes, dans une cellule placée en garde à vue.
44:17La première 24 heures, on dit bon, c'est bon, je me suis expliqué.
44:20Qu'est-ce que j'ai fait ? J'étais à côté des policiers,
44:23j'ai appréhendé un mec qui les a agressés, qu'est-ce qu'on me reproche concrètement ?
44:26Dans le cadre d'une loi qui existe.
44:28Oui mais ce n'est pas ça le sujet.
44:31Le sujet c'est l'importance que les médias accordent à ce moment-là à cette affaire.
44:34Ils font que c'est une affaire.
44:36Parce qu'ils ont décidé que ce n'était pas bien ce qui avait été fait.
44:40C'est ça le sujet.
44:41Par méconnaissance, par volonté de taderne de Président de la République,
44:44par mélange de plein de choses et on tire une ficelle là,
44:48il y a un autre truc qui sort là-bas, donc il faut continuer.
44:50Et on se dit, putain mais c'est bizarre, ce mec-là, tout ce qu'il a.
44:54Plus on cherche, moins on trouve.
44:57Moins on trouve, plus on se dit, c'est bizarre, il faut continuer à chercher.
44:59C'est un truc sans fin.
45:01Et ce truc sans fin, il y a une affaire Benalla,
45:03mais il y a des sous-dossiers aujourd'hui dans l'affaire Benalla.
45:07Il y a, je crois, 6 dossiers ou sous-dossiers dans lesquels vous êtes soupçonné ou mis en cause.
45:12Les violences du 1er mai, puis il y a eu l'affaire des passeports diplomatiques,
45:17du coffre-fort, les contrats russes.
45:20Bon, il y a 6 sous-dossiers.
45:22Aujourd'hui, est-ce que…
45:24– Il faut quand même juste expliquer comment ça fonctionne.
45:26– Allez-y.
45:28– Je suis journaliste.
45:30Une source qui vient me voir en me disant,
45:32tiens Benalla, on a entendu qu'il avait volé une voiture bleue il y a deux ans.
45:38Ah bon, machin, personne n'a écrit ça encore.
45:41J'écris mon article d'une source,
45:44secret des sources, je ne peux pas vous dire qui,
45:45Alexandre Benalla a volé une voiture bleue il y a deux ans.
45:48C'est repris par un deuxième journal, par un troisième journal
45:50qui va essayer de chercher où il a volé la voiture bleue,
45:52c'était quoi comme marque la voiture bleue.
45:54Vous vous retrouvez avec 10 articles de presse,
45:56des gens sur des plateaux de télé,
45:58mais alors que fait le procureur de la République ?
46:00On voit bien que M. Benalla est protégé.
46:02Oui, il a volé une voiture bleue quand même.
46:04Enfin voilà, vous avez vu les articles dans la presse.
46:06Le procureur, sur la base des articles de presse,
46:08il ouvre une enquête préliminaire, il fait des diligences.
46:11Et finalement, on se rend compte quoi ?
46:13Il ne sait pas conduire de bagnole.
46:15En plus, il préfère les bagnoles rouges.
46:18Il n'a pas besoin d'en voler, il en a déjà une.
46:21Donc voilà, c'est comme ça que ça marche, concrètement.
46:23Le système, il fonctionne comme ça.
46:25Mais vous avez l'air serein.
46:25Est-ce que vous dites aujourd'hui, je serai blanchi ?
46:29Je ne sais pas, c'est la justice qui dira.
46:30Surtout que c'est des affaires.
46:31Ah non, mais il y a des affaires dans lesquelles je suis sûr d'être blanchi.
46:34Les histoires de contrats russes,
46:36qui ne sont pas des contrats russes,
46:37avec un Ouzbek, un Azeri, etc.
46:39Ces trucs sont chez les dingues complets.
46:41D'ailleurs, il faut juste préciser que Mediapart n'a jamais mis
46:44une qualification judiciaire là-dessus.
46:45Ils sont sur l'histoire de morale.
46:47On leur prouvera d'ailleurs qu'en plus, la morale, elle était comme ça.
46:51C'était un rail.
46:52J'ai toujours été un rail quand j'étais à l'Élysée.
46:54Je n'ai jamais gagné d'argent à droite, à gauche.
46:56Je n'ai jamais pris de...
46:57Voilà, donc...
46:58Juste les contrats russes,
46:59je pense qu'il y a beaucoup de gens qui ne savent pas ce que c'est.
47:01Oui, mais tant mieux.
47:02Parce que franchement, ça ne vaut pas le coup de...
47:04On parle d'une histoire...
47:08Je vous connais avant, l'Élysée.
47:11Ce n'est pas parce que j'arrive à l'Élysée qu'on arrête de se parler.
47:13Je vais rester sur mes exemples de bagnole.
47:16Et vous me dites, Alex, que tu es libre vendredi, on va prendre un verre.
47:20Donc là, je sors de l'Élysée, je ne suis pas tout le temps à l'Élysée.
47:22Je sors de l'Élysée.
47:23On va prendre un verre dans un bar à proximité de l'Élysée.
47:26Et on discute, les enfants, ça va.
47:28Et la femme, ça va. Et le boulot, etc.
47:29Très bien.
47:31Et là, vous me dites...
47:34Moi, j'ai une bagnole à vendre, Alex.
47:36Une bagnole bleue.
47:38Je connais quelqu'un qui veut l'acheter.
47:41J'appelle un copain qui me dit, putain, je cherchais à acheter une voiture bleue.
47:44Tu ne connais pas ?
47:45Je vous mets en contact.
47:47Et vous débrouillez après.
47:48Vous lui vendez votre voiture.
47:50Il vous signe des papiers, il vous fait un virement, un chèque, peu importe.
47:53Est-ce que ça a un impact sur ce qui se passe à l'Élysée ?
47:57Est-ce que ça a un rapport ?
47:59Zéro.
48:00Alors là, c'est le plus impressionnant parce que vous avez un mec d'origine ouzbèque.
48:04C'est de la sécurité.
48:06Et il y a toute cette histoire aussi aux États-Unis avec Trump, les financements russes.
48:10Est-ce qu'il n'y avait pas un espion ?
48:11Enfin, on commence à affabuler et à partir dans des trucs.
48:14Et c'est sans fin.
48:15C'est l'ouverture d'une porte, puis une deuxième, puis une troisième, puis une quatrième.
48:19Et à la fin, même eux ne savent plus ce qu'ils racontent.
48:21C'est-à-dire qu'ils font 12 articles pour le dernier article dire,
48:24mais M. Bénard n'a jamais négocié commercialement le contrat.
48:27Comment vous négociez un contrat si ce n'est pas commercialement ?
48:31Mais est-ce que vous, aujourd'hui, vous vous dites,
48:32vous qui défendez encore le président de la République,
48:36j'aurais pas dû les mettre en relation parce que j'étais à l'église ?
48:38Bien sûr.
48:39Bien sûr.
48:40Non, mais après, à un moment, avec le recul,
48:43vous dites, la manière dont les choses sont perçues,
48:45mais c'est sur la même histoire que pour le 1er mai.
48:47C'est-à-dire, comme vous êtes collaborateur, vous ne pouvez pas appréhender les méchants.
48:50Vous n'êtes plus un citoyen normal.
48:51Alors, vous n'avez pas plus de droits, ni moins d'ailleurs.
48:55Mais par contre, sur les histoires d'images, il faut faire très attention.
48:57Ça, c'est la connerie, c'est ma connerie.
49:01Je ne reviens pas sur tous les sous-dossiers.
49:03Il y en a un dont vous parlez à plusieurs reprises dans votre livre,
49:06c'est le fameux coffre-fort.
49:08Ouais.
49:10C'est quand même l'escroquerie du siècle.
49:12Ça vous fait rire, ça, le coffre-fort ?
49:13Oui, ça me fait marrer parce que...
49:15Le jour où l'affaire se déclenche,
49:19ma femme est avec mon fils qui a un mois et demi à la maison,
49:22et il y a des journalistes, il y a 10 journalistes en couloir en train de sonner.
49:26Elle m'appelle un peu paniquée, elle me dit qu'en bas, il y a des camions de BFM,
49:30enfin, on dirait qu'il vient d'y avoir un triple homicide,
49:33on est chiés, dingue.
49:36Et donc, je lui dis, écoute, on va bouger.
49:37Enfin, je vais me démerder pour te faire bouger de l'appart, très bien.
49:41Donc, je fais bouger ma femme, mon fils,
49:44et ils partent avec deux grosses valises.
49:47Est-ce que quelqu'un a déjà écrit un article sur ces deux grosses valises ?
49:52Parce que ces deux grosses valises,
49:53elles sont deux fois plus grosses que le coffre.
49:57Elles peuvent contenir théoriquement deux fois plus de choses que le coffre.
50:00Vous avez vu un article, vous, sur les valises ?
50:02Personne n'en a parlé.
50:04Par contre, le coffre-fort dans lequel il y a des armes, ce qui est obligatoire,
50:07c'est-à-dire que quand vous détenez des armes, vous avez l'obligation légale de détenir un coffre,
50:11comme il y a coffre-fort, le coffre-fort a disparu.
50:14Mais les deux valises, elles ont disparu, ma femme a disparu, mon fils a disparu,
50:17il n'y a pas d'enquête ouverte là-dessus, parce qu'il n'y a pas d'article écrit là-dessus.
50:22Donc, quand vous avez un journaliste qui décide à un moment que c'est un sujet,
50:25vous avez un deuxième qui reprend, un troisième...
50:27Alors, en plus, quand c'est sur des chaînes d'information en continu,
50:29qu'on a une forme de...
50:30Et on voit que ça monte, l'audience, elle monte, là,
50:32quand on commence à parler du coffre-fort et tout.
50:34Donc, c'est intéressant, commercialement, pour La Bouchaine,
50:36il faut parler du coffre-fort, c'est le sujet qu'il faut.
50:38Il est où le coffre-fort ? Et pourquoi il y avait un coffre-fort ?
50:40Et pourquoi il a disparu ?
50:42Il a disparu le soir avant l'apercution, c'est faux.
50:45Il a disparu bien avant que je sache qu'il y avait une enquête préliminaire
50:49et que jamais j'aurais imaginé qu'il y allait y avoir une perquisition chez moi
50:53pour cette histoire du 1er mai.
50:55Qu'est-ce qu'on va chercher chez vous ?
50:57Mais c'est pas grave.
50:58– Mais il disparaît parce que vous dites à votre femme...
51:01– Tu prends les deux valises avec les affaires pour toi,
51:03les affaires pour le petit,
51:05et le coffre, il y a les armes à l'intérieur,
51:07tu t'occupes pas de ça.
51:09Elle part avec mon fils, deux valises.
51:11J'ai des copains qui viennent et qui récupèrent le coffre.
51:14– Pourquoi ? Parce que vous avez peur de quoi ?
51:15– Parce qu'il y a mon adresse, il y a mon appartement
51:18qui défile pendant toute une après-midi sur BFM TV
51:21avec un mec qui est en train de dire
51:23« oui, nous sommes Île Saint-Germain, ici les Moulineaux, etc. »
51:27Je veux dire, pour moi, c'est peut-être mon ADN, sécurité, etc.
51:32J'ai des armes, ma responsabilité, c'est de les mettre à l'abri
51:35et de faire en sorte qu'en plus,
51:36je sais que je vais pas y retourner de sitôt dans cet appartement,
51:39ni ma femme,
51:40donc à un moment je prends les choses les plus sensibles, voilà.
51:43Et ces trois armes-là, trois pistolets plus un fusil à pompe,
51:48elles seront remises au greffe du tribunal de grande instance
51:52à la demande des juges d'instruction
51:54quasi immédiatement au moment où elle me le demande.
51:57Donc vous avez un coffre vide.
51:59Tout le monde a dit qu'il était vide.
52:01Mais il y a une enquête, voilà.
52:03Et quand les journalistes m'appellent aujourd'hui en disant
52:05« oui, mais sur le coffre, même si c'est pas très précis, etc. »,
52:08je leur fais une réponse.
52:11Je vous répondrai sur le coffre quand vous m'aurez dit
52:13quelles preuves ont été dissimulées.
52:18Ou quand vous aurez écrit un article aussi sur les deux grosses valises
52:20avec lesquelles ma femme est partie.
52:22Parce que là, pour le coup, c'est peut-être quelque chose de...
52:25Moi, je me méfierais des deux grosses valises comme ça, il faudrait...
52:27– Est-ce que tout ça, ça vous a fait changer politiquement ?
52:30Vous êtes où aujourd'hui politiquement sur les chiquiers ?
52:33– Macronisme original.
52:37À gauche du cœur, droite des valeurs.
52:40Voilà.
52:41La droite sent le racisme et la gauche sent le laxisme.
52:45Il faut prendre le meilleur de tous et essayer d'avancer.
52:49– Est-ce qu'il vous inquiète le climat politique en France en ce moment ?
52:55Ça fait deux mois qu'on parle d'islamophobie, de foulard, de musulmans.
53:05– Il est pas serein.
53:08On ne peut pas dire qu'il va bien, le pays.
53:11On ne peut pas dire que les gens sont pleinement accomplis,
53:16qu'on vit tous ensemble dans le bonheur et le meilleur des mondes.
53:21Non.
53:22Il y a eu en 2005 une crise incroyable dans les banlieues.
53:25Je pense qu'on a connu le 2005 de la ruralité, avec les gilets jaunes,
53:31où on a vu qu'il y avait des gens qui sont les grands oubliés des politiques,
53:35des hommes politiques de toutes les 30-40 dernières années,
53:39qui sont à la marge, qui n'arrivent pas à boucler leur fin de mois,
53:43qui n'arrivent pas à habiller leurs enfants parfois,
53:46qui ne partent pas en vacances, c'est sûr,
53:48qui, pour 5 ou 10 euros sur une année, c'est quelque chose qui compte pour eux.
53:54Et après, on part sur un autre débat qui est celui de l'immigration,
53:58on a déjà vu ce que ça avait donné il y a quelques années.
54:01C'est un faux sujet, c'est une fausse polémique.
54:04Je pense que malheureusement, la force des choses fait que
54:07le libéralisme anglo-saxon arrive sur la France,
54:11que ce soit dans notre manière de regarder les divertissements à la télévision,
54:16de regarder Netflix, d'écouter de la musique rap, funk ou rock,
54:21de mettre des baguilles ou des casquettes.
54:24Tout ça, ce n'est pas la culture française.
54:27C'est une culture anglo-saxonne.
54:31La pratique de la religion, je crois qu'elle est en train de se libéraliser.
54:35Il y a une perte de repères de la part d'une certaine frange de la population.
54:39Là où il y a 10 ans, ils n'avaient pas besoin de mettre des signes ostentatoires,
54:43aujourd'hui, comme on leur fait comprendre,
54:45ou en tout cas, eux comprennent qu'ils ne sont pas français à part entière,
54:48ils essayent d'appartenir à un groupe.
54:51On voit plus de foulard, on voit plus de barbe.
54:54Est-ce que concrètement, ça change quelque chose ?
54:59Il y a quelque chose qui m'a beaucoup touché,
55:01au moment où il y a eu le débat pour le mariage homosexuel,
55:06c'est le discours de Christiane Taubira à l'Assemblée Nationale.
55:09Où il y avait les députés UMP ou LR,
55:14je ne sais plus comment ça s'appelait déjà à l'époque,
55:17qui étaient en train de hurler dans le Parlement
55:20comme s'il y avait passé une catastrophe.
55:22Elle a eu des mots assez incroyables, où elle leur a dit
55:25qu'est-ce que l'amour d'un couple homosexuel enlève à un couple hétérosexuel ?
55:30Je me pose la même question.
55:32Qu'est-ce qu'aujourd'hui, une dame qui porte le voile,
55:34ça enlève à celle qui n'en porte pas ?
55:36C'est des faux sujets, c'est des faux débats.
55:38On perd notre temps là-dedans, et on divise, on creuse de trous.
55:43Je pense qu'il faut passer à autre chose, il y a des sujets vraiment importants.
55:45Mais c'est un faux débat qui a été mis sur la table par le gouvernement,
55:49par le Président de la République.
55:51Je ne suis pas sûr, je pense qu'il a été mal compris.
55:54Je pense qu'il a une idée assez précise des choses, mais il a été mal compris.
56:01S'il savait ou s'il avait pu à un moment sentir que ça allait bousculer comme ça,
56:06il y a des mots qu'il n'aurait pas employés à certains moments, je pense.
56:09Saint-Denis, c'est du sérieux ou pas ?
56:12On saura dans les prochaines semaines.
56:14Mais c'est sérieux, en tout cas la démarche qui est la mienne pour l'instant,
56:17d'aller rencontrer des gens, de structurer une équipe,
56:21d'y comprendre les problématiques et d'essayer peut-être d'y apporter des solutions.
56:25C'est sérieux.
56:26Que vous n'arrêtez pas de tweeter, quand je serai maire de Saint-Denis, je ferai ça.
56:32Donc on se dit, c'est du sérieux.
56:33On revient sur la provoque, mais c'est du sérieux.
56:36Il n'y a pas de sentiment de revanche ?
56:37Non.
56:38Du tout, avec ce livre, avec ce retour ?
56:39Il y a une revanche depuis le début sur la vie, dans le parcours.
56:44Quand vous avez grandi sans votre père, avec une maman qui n'est pas d'ici,
56:49dans une zone où il n'y a pas beaucoup de gens qui vous ressemblent.
56:53Soit vous vous résignez et vous dites, bon, il y a du racisme, je ne vais pas y arriver,
56:57en plus je viens de la campagne.
56:58Vous cochez toutes les difficultés.
57:00Vous n'avez pas de papa, pas de grand-frère, vous habitez en Normandie,
57:03vous êtes d'origine étrangère.
57:05Jamais fonctionnez comme ça.
57:07Mais il y a une revanche intérieure, sans doute, qui fait que vous avancez.
57:11Vous avez envie d'y arriver.
57:13Où ?
57:14Je ne sais pas exactement.
57:15Mais après, vous commencez à rêver et ça prend forme.
57:18Et un jour, ça marche.
57:21– Est-ce qu'il y a des gens qui ont des choses à craindre de vous aujourd'hui ?
57:23– Non.
57:24– J'ai vu un message sur Twitter,
57:25vous vous adressez au patron des députés en marche à l'Assemblée.
57:28– Oui.
57:29– Gilles Legendre, il vous écrivait,
57:30quand vous serez irréprochable, vous pourrez me donner des leçons.
57:33On se comprend, j'en suis sûr.
57:34Avec un émoji chute, comme ça.
57:36– Oui, mais quand le mec va sur un plateau,
57:38non, c'était une radio,
57:40et qu'il commence à vous parler avec des mots insultants.
57:45Alors, je ne connais pas ce mec-là.
57:47Je sais juste qu'il n'est pas irréprochable.
57:50Donc moi, je serai à sa place.
57:52Je n'irai pas chercher des gens que je ne connais pas.
57:55En leur remettant un truc sur le dos, je pense que j'ai assez ramassé.
57:58Donc il suffirait de se taire quand on lui pose une question sur moi,
58:01et ça irait très bien.
58:03Mais il n'a rien à craindre de moi, comme personne.