Les aides sociales rendent-elles vraiment les gens paresseux ?
3 idées reçues sur la lutte contre la pauvreté, démontées par la Prix Nobel d'économie Esther Duflo.
3 idées reçues sur la lutte contre la pauvreté, démontées par la Prix Nobel d'économie Esther Duflo.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00On met un peu de longtemps dans des milieux sociaux,
00:02les gens sont quand même pauvres.
00:03Raciste, Anna, n'a pas sa place.
00:06La meilleure manière d'aider les gens,
00:08ce n'est pas de leur verser une prestation sociale,
00:09c'est de les remettre sur le chemin du travail.
00:21C'est le genre d'idée qui persiste parce qu'elle nous paraît intuitive.
00:25Oui, si on donne aux gens de quoi manger plus,
00:27ils vont avoir moins envie de travailler.
00:29Ce qui est intéressant, c'est que si on se pose la question sur soi-même,
00:32en général, on ne donne pas la même réponse.
00:34On se dit non, moi, si je recevais des aides,
00:36ça ne me rendrait pas paresseux, mais les autres, oui.
00:38Dans toutes les expériences qui ont pu avoir lieu
00:40où on donne aux gens des aides sociales plus généreuses,
00:43que ce soit dans les pays pauvres ou dans les pays riches,
00:45on ne voit jamais un effet de découragement du travail.
00:48Le fait même de recevoir des aides,
00:50ça redonne un peu de confiance et d'énergie aux gens
00:54et du coup, ça leur redonne la capacité de se remettre
00:58dans une dynamique plus positive de recherche d'emploi, etc.
01:01La plupart des gens, ils veulent jouer un rôle positif dans la société,
01:04travailler, être intégré, etc.
01:06C'est quelque chose qui est beaucoup plus important
01:08que de se reposer toute la journée.
01:15En général, on s'exagère très largement
01:17la partie du budget qui va dans les aides sociales directement.
01:20C'est un petit peu le mythe que les impôts, c'est du gaspillage.
01:25Alors qu'en fait, il ne faut pas penser aux impôts comme du gaspillage,
01:28il faut penser aux impôts comme une redistribution
01:30des plus fortunés vers les moins fortunés.
01:33Ce serait du gaspillage que si les impôts étaient tellement importants
01:37que ça découragerait les gens riches de travailler
01:39et que donc d'avoir des impôts élevés
01:42ne réussissait pas à vraiment remplir les coffres de l'État suffisamment.
01:45Mais ça, il se trouve aussi que ce n'est pas vrai.
01:47De la même façon que les personnes pauvres
01:49ne sont pas découragées de travailler à cause des aides sociales,
01:52la vérité, c'est que les personnes riches ne sont pas découragées de travailler
01:55quand les impôts sont plus importants.
01:56Donc, il ne faut pas penser en termes de ruines de l'État,
01:58il faut penser à comment on va organiser la redistribution
02:01entre les plus fortunés et les moins fortunés
02:03pour s'assurer qu'on vit dans une société qui est solidaire.
02:12Il n'y a pas de loi économique qui dit
02:15qu'il faut qu'il y ait des inégalités dans le monde
02:17pour que le monde avance.
02:20Il n'y a pas de nécessité économique aux inégalités.
02:23D'ailleurs, on le voit dans les pays du monde
02:25qu'il y a des situations très différentes.
02:27Si vous comparez le Danemark aux États-Unis,
02:30c'est le jour et la nuit.
02:32Aux États-Unis, il y a des inégalités énormes,
02:34à la fois de revenus, mais aussi de niveau de vie,
02:38même de ventes du coronavirus.
02:40Alors qu'au Danemark, beaucoup moins d'inégalités.
02:44Et ça ne vient pas par hasard,
02:46ça vient parce qu'il y a eu un désir,
02:50une volonté politique de les contrôler.
02:53Là où on peut avoir une espèce de fatalité,
02:55c'est quand les revenus et la richesse
02:56commencent à s'envoler.
02:57Ça donne accès à plus de choses qui permettent
03:00de faire envoler encore plus les revenus et la richesse.
03:02Et c'est ça qu'il faut que la politique,
03:06que nos politiques, nos décisions,
03:08la politique au sens noble, si j'ose dire,
03:10nos décisions collectives empêchent.