• il y a 8 heures
L'Europe, ou plus exactement les 27 pays de l'Union européenne, est en profond décalage, décrochage même, par rapport aux États-Unis. Également envers la Chine. En témoigne la comparaison entre le produit national brut cumulé - c'est-à-dire la totalité des richesses - de l'Union européenne et celui des États-Unis par rapport à la richesse mondiale : 17% chez nous et 26% pour les Américains, alors que nous représentions 30% en 2000. Un véritable décrochage mis en lumière par le rapport Draghi : the future of european competitiveness de septembre 2024 qui pointe nos grandes faiblesses économiques, notamment la chute de la compétitivité par rapport aux Etats-Unis et à la Chine. En ce qui concerne plus précisément la France, à ce tableau morose s'ajoutent des considérations spécifiques liées à une fébrilité budgétaire et à l'explosion de la dette et des déficits. L'accession-retour de Donald Trump à la Maison Blanche nourrit une inquiétude supplémentaire en aiguisant les égoïsmes nationaux du commerce mondial à travers les nouvelles taxes douanières.

Émile Malet reçoit :
- Anne Lauvergeon, ancienne présidente d'AREVA, présidente du Fonds d'investissement ALP
- Louis Gallois, co-président de la Fabrique de l'industrie, ancien président d'Airbus, de la SNCF, Aérospatial
- Christian de Boissieu, professeur des Universités, Académie des technologies
- Claude Raynal, sénateur de Haute-Garonne, président de la Commission des finances, Sénat

L'actualité dévoile chaque jour un monde qui s'agite, se déchire, s'attire, se confronte... Loin de l'enchevêtrement de ces images en continu, Emile Malet invite à regarder l'actualité autrement... avec le concours d´esprits éclectiques, sans ornières idéologiques pour mieux appréhender ces idées qui gouvernent le monde.

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Transcription
00:00Générique
00:02...
00:24Bienvenue dans ces idées qui gouvernent le monde.
00:27Europe, Etats-Unis, pourquoi nous décrochons ?
00:31L'Europe, ou plus exactement les 27 pays de l'Union européenne,
00:36est en profond décalage, en décrochage même,
00:39par rapport aux Etats-Unis,
00:41décalage qui s'observe également avec la Chine.
00:45En témoigne la comparaison
00:47entre le produit national brut cumulé,
00:49pour simplifier la totalité des richesses de l'Union européenne,
00:54et celui des Etats-Unis.
00:56Si on compare les deux,
00:5817 % chez nous,
01:00ce que nous représentons comme richesse mondiale,
01:0426 % pour les Américains,
01:06alors que nous représentions 30 % en 2000.
01:11Un véritable décrochage,
01:13mis en lumière par le rapport Draghi,
01:15fameux rapport
01:17The Future of European Competitiveness,
01:19pardonnez-moi cet accent très anglais,
01:23de septembre 2024,
01:25qui pointe nos grandes faiblesses économiques,
01:28notamment la chute de la compétitivité,
01:31nos économistes nous diront ce que ça veut dire,
01:34par rapport aux Etats-Unis et à la Chine,
01:38et même à l'intérieur de l'Europe.
01:41En ce qui concerne plus précisément la France,
01:43à ce tableau morose s'ajoutent des considérations spécifiques
01:48liées à une fébrilité budgétaire
01:51et à l'explosion de la dette et des déficits.
01:54L'accession au retour de Donald Trump à la Maison-Blanche
01:59nourrit une inquiétude supplémentaire
02:01en aiguisant les égoïsmes nationaux du commerce mondial
02:06à travers les nouvelles taxes douanières,
02:09sans parler de la négociation Russie-Etats-Unis
02:14sur l'Ukraine,
02:15avec les interférences économiques qui vont avec,
02:19mais également, comme nous le verrons,
02:21des interférences en matière de sécurité et de défense.
02:26Avec mes intervenants, mes invités,
02:30nous allons parler de tout ça.
02:32Anne Lauvergeon,
02:34vous êtes ancienne présidente d'Areva,
02:37cette grande société du nucléaire,
02:41mais qui s'appelle aujourd'hui Orano,
02:43et vous présidez un fonds d'investissement
02:47qui s'appelle ALP.
02:49Louis Gallois,
02:50vous êtes coprésident de la fabrique de l'industrie,
02:53mais que n'avez-vous pas présidé ?
02:56Vous avez présidé Airbus, la SNCF, Aérospatiale.
03:01J'arrête cette liste à l'après-verre.
03:03Vous êtes un homme, l'industriel français typique.
03:07Christian Deboisieux, vous êtes professeur des universités
03:10et vous êtes maintenant à l'Académie des technologies.
03:14Claude Reyna, je finis par vous, le politique.
03:17Vous êtes sénateur du Parti socialiste de Haute-Garonne
03:22et vous présidez la Commission des finances du Sénat.
03:26Avant de commencer notre conversation,
03:29je vais vous soumettre, si vous voulez bien,
03:32un extrait d'Antoine Vermorel Marques,
03:35qui est un député LR.
03:38C'était à l'Assemblée nationale, le 22 janvier 2025.
03:42-"Monsieur le ministre, il aura fallu à peine 24 heures
03:45à Donald Trump pour diviser l'Europe.
03:48D'un côté, nous avons le président américain
03:50qui montre les muscles et promet de taxer les produits européens.
03:54Et de l'autre, notre commissaire européen,
03:57monsieur Stéphane Séjourné,
03:58qui commence déjà à brader notre industrie de défense.
04:01Au lieu d'assumer le rapport de force,
04:04il ouvre un jeu dangereux.
04:05Il propose à demi-mot d'acheter des armes américaines
04:08contre un libre-échange débridé.
04:10Non, monsieur le ministre, notre souveraineté n'est pas à vendre.
04:15Notre indépendance n'est pas à brader.
04:17Nos emplois ne sont pas à bazarder.
04:19Que dit la Commission européenne aux salariés de la défense française ?
04:23Que dit-elle aux équipes de KNDS à Rouen,
04:26qui font la fierté de nos armées ?
04:28On connaissait l'Europe naïve,
04:30nous nous dirigeons vers une Europe soumise,
04:32soumise à l'influence américaine,
04:34soumise à la protection états-unienne,
04:37soumise désormais au bon vouloir de l'oncle Donald."
04:41On va commencer par le politique, Claude Reynald.
04:44Comment vous réagissez à cette déclaration du député ?
04:50Ce qu'on peut dire, déjà, c'est qu'il y a un fait.
04:53C'est que depuis, déjà, l'administration Biden et l'IRE,
04:58il y a déjà eu une action extrêmement forte des Etats-Unis
05:02pour relocaliser aux Etats-Unis un ensemble d'industries
05:06et faire des appels du pied,
05:08au détriment de l'industrie européenne, notamment.
05:10Je précise, l'IRE, c'est l'Induction Reduction Act.
05:15Et vous pouvez... Inflation.
05:17Et c'était pour booster, en quelque sorte,
05:20les industries, l'industrie américaine...
05:25A travers l'industrie verte,
05:27mais ça a eu un effet tout à fait significatif.
05:30C'est une précision pour nos téléspectateurs.
05:33Est-ce que vous pouvez continuer ?
05:35Ça a déjà été le cas sous Biden et, effectivement, avec Trump,
05:39on a une amplification avec aussi, il faut le dire,
05:42un langage imagé
05:44et un rapport à la puissance extrêmement fort chez Trump
05:50qui oblige l'Europe, tout simplement,
05:52à maintenant mettre en oeuvre un certain nombre de décisions.
05:55Et dans quelque chose d'un peu original par rapport au passé,
05:59c'est de le faire vite.
06:00C'est-à-dire qu'on n'a plus, sans doute,
06:02le temps de trop tergiverser
06:04par rapport à la façon dont Trump pose le sujet.
06:08Vous avez un commentaire à faire sur notre député ?
06:10Bon, alors, écoutez, on va démarrer notre émission.
06:14Le décrochage économique entre l'Union européenne
06:18et les Etats-Unis est abyssal.
06:22Comment expliquer qu'il se soit aggravé
06:26aussi massivement en l'espace de moins de deux décennies ?
06:31Je crois à Christian de Boisieu, l'économiste éminent que vous êtes.
06:36Est-ce que vous avez été surpris, comme ça,
06:38les chiffres sont tombés, là ?
06:40Je veux dire, le rapport Draghi de septembre...
06:43On va en parler, mais c'est le sujet.
06:45Parce que le rapport Draghi, qu'est-ce qu'il nous dit ?
06:48Il nous dit, effectivement, il documente le décrochage,
06:52mais il nous dit, si on fait rien, nous,
06:54si l'Europe ne se bouge pas, nous allons dans le mur.
06:57Il parle même du scénario d'agonie de l'Europe.
07:00C'est pas moi qui l'ai utilisé, ce terme.
07:02C'est le rapport Draghi de septembre.
07:04Donc l'Europe se bouge.
07:05Alors, je reviens sur le diagnostic lui-même.
07:08Votre question, c'est d'où vient ce décalage ?
07:11Il n'y a pas une cause.
07:13Le rapport Draghi dit qu'il y a plusieurs causes.
07:16On y reviendra, mais je vais dire...
07:18Si je résume mon interprétation,
07:21premièrement, par rapport aux Etats-Unis,
07:24l'Europe a été trop faible
07:26et pas assez ambitieuse
07:28en matière d'innovation et d'investissement.
07:33Derrière tout ça,
07:35il y a la question aussi des talents,
07:38la formation, l'éducation.
07:40C'est pas par hasard qu'un certain nombre de noms,
07:43de mes ou de nos bons étudiants, vont...
07:47Vous me dites pas si vous avez été surpris par ce...
07:50J'ai pas été surpris,
07:52car c'est pas la première fois qu'on en parle, ce décalage.
07:55Simplement, il est documenté, le rapport Draghi.
07:58On va en parler, vous allez voir.
08:00Il insiste sur les raisons.
08:03Il y a des raisons, et je vais pas être trop long.
08:05Par exemple, j'ai pas été surpris de ce que dit le rapport Draghi
08:09sur le fait que l'Europe souffre
08:11d'une politique européenne de la concurrence
08:14qui n'est pas adaptée.
08:15Pendant que les autres se consentent,
08:18que vous avez des méga-firmes américaines,
08:21japonaises, chinoises,
08:23Bruxelles a pas mal freiné
08:26de concentration, de projets de fusion-acquisition.
08:30On parlait des naïvetés européennes,
08:32ça fait partie des naïvetés.
08:34Voilà un exemple.
08:35Il y a d'autres...
08:36On va laisser d'autres exemples.
08:38Voilà, sur le financement, je termine.
08:40Vous me demandez si j'ai été surpris.
08:43Ce qui est dit dans le rapport Draghi
08:45sur le fait que l'Europe souffre du fait
08:47que nos marchés financiers ne sont pas suffisamment intégrés
08:50et qu'il faut mettre en oeuvre l'union des marchés de capitaux,
08:53ça m'a pas surpris de dire ça.
08:55Le rapport Draghi, je le trouve très intéressant.
08:59Si on ne réagit pas très vite et si on n'agit pas très vite,
09:02agir, on va se retrouver...
09:04Alors, il dit que c'est la fin de nos libertés
09:07ou bien c'est la fin de nos modes de vie
09:10ou bien c'est une lente agonie.
09:12Donc, c'est vraiment extrêmement...
09:15C'était fait, d'ailleurs, destiné à faire réagir
09:18la Commission et le Conseil européen
09:20qui l'ont commandé.
09:21Je vais prendre des exemples très clairs, très précis.
09:25La première raison qu'il donne, c'est l'énergie.
09:28L'énergie, aujourd'hui, l'électricité en Europe
09:31se paye deux à trois fois plus cher qu'aux Etats-Unis.
09:34Le gaz se paye en Europe
09:36quatre à cinq fois plus cher qu'aux Etats-Unis.
09:38Et ça, on pourra y revenir, il y a deux raisons.
09:41La première raison, c'est que les Etats-Unis,
09:44depuis 2009, c'est-à-dire pas depuis très longtemps,
09:47sous des présidences aussi bien démocrates que républicaines,
09:51ont fait le choix.
09:52En 2009, ils étaient importateurs nets de gaz et d'électricité.
09:56Ils sont devenus exportateurs nets en 2024.
09:59Ils sont devenus le premier producteur de pétrole au monde.
10:03Si vous prenez le Texas, le Texas tout seul,
10:05c'est le cinquième Etat pétrolier au monde.
10:08Ils sont devenus le premier exportateur de gaz,
10:10alors du gaz de schiste, à 78 %.
10:13La Pennsylvanie produit plus que le Qatar.
10:18Donc, ça a été vraiment des politiques continues,
10:22volontaristes.
10:23Pendant ce temps-là, qu'est-ce qu'on faisait en Europe ?
10:26D'abord, on ostracisait des tas d'énergies.
10:28Les fossiles, il ne fallait plus faire de fossiles,
10:31peut-être à terme,
10:32mais peut-être qu'il fallait faire un peu de géopolitique
10:35pour s'assurer, effectivement, des fossiles pas chers.
10:37On a interdit le pétrole et le gaz de schiste.
10:40Au passage, on en achète maintenant aux Etats-Unis très cher.
10:44On a voué le nucléaire aux gémonies.
10:47Et donc, il fallait faire du changement,
10:50de la lutte contre le changement climatique,
10:52uniquement avec de l'éolien et du solaire,
10:55c'est-à-dire des énergies intermittentes,
10:57et sans se soucier aucunement
11:00de l'industrialisation des moyens correspondants.
11:03100 % du nucléaire...
11:05Anne, vous avez très bien expliqué la question énergétique.
11:09Laissez-moi voir avec Louis Gallois.
11:11Alors, vous, Louis Gallois, l'industrie, c'est votre domaine.
11:15Vous avez quasiment présidé tous les secteurs.
11:19Comment vous expliquez que les Etats-Unis, en 2000,
11:22avaient, en produits nationals bruts,
11:25le même pourcentage que celui de l'Europe ?
11:29Comment vous expliquez cette résilience américaine ?
11:33Parce que... Mais en donnant...
11:35Il y a un enchaînement très facile à comprendre.
11:38Défaut d'innovation en Europe,
11:40ça veut dire moins de productivité,
11:43parce que nous n'avons pas mis en oeuvre...
11:45Qu'est-ce que la productivité ?
11:47La productivité, c'est la capacité à produire par personne
11:53et il faut que cette... Par heure travaillée.
11:57Et il est clair qu'il faut faire progresser
12:01ce pourcentage de production
12:05par personne et par heure travaillée.
12:08Par heure travaillée ?
12:09Parce qu'ils ont plus de puces dans leur cerveau, les Américains ?
12:13Les Américains ont mis en oeuvre les innovations.
12:16Nous ne l'avons pas fait.
12:17Nous sommes en retard sur l'innovation.
12:19Nous sommes en retard sur la productivité.
12:22C'est-à-dire que nous produisons moins que par heure travaillée.
12:26Cela a une conséquence,
12:28c'est que la croissance européenne
12:30est structurellement inférieure à la croissance américaine,
12:33d'autant plus que le nombre d'heures travaillées en Europe
12:36n'augmente plus alors qu'ils continuent à progresser aux Etats-Unis.
12:39Vous avez un enchaînement qui, depuis l'innovation jusqu'à la croissance,
12:43est un enchaînement absolument mortifère pour nous.
12:46Et Draghi le décrit de manière absolument implacable, j'allais dire.
12:51Et c'est ce cercle vicieux qu'il faut rompre.
12:56Mais ça veut dire qu'il faudra partir de l'innovation.
13:00Alors, puisqu'on parle beaucoup de rapport Draghi,
13:03pour nos téléspectateurs, rappelons que Mario Draghi
13:07fut un éphémère président du Conseil italien,
13:12que madame Ursula von der Leyen,
13:15qui est donc à la tête de la Commission européenne,
13:18lui a confié ce fameux rapport,
13:21avec trois éléments clés,
13:24moins de compétitivité, la dépendance à l'énergie,
13:27comme vous l'avez dit, Anne,
13:29et le ratage de la révolution numérique.
13:33Est-ce que vous considérez que, pour l'Europe,
13:38si on ne va pas dans le sens tridirectionnel du rapport Draghi,
13:44ça devient un challenge existentiel pour l'Union européenne ?
13:47C'est-à-dire qu'on va devenir un pays,
13:52un continent déclassé ?
13:53Il est clair qu'on est dans une situation aujourd'hui,
13:57effectivement, où, entre les Etats-Unis et la Chine,
14:01on devient un continent, finalement, à qui on vend.
14:05A qui on vend des produits, des services,
14:08à qui on vend de l'énergie,
14:12à qui on vend tout, mais qui ne produit plus.
14:14Et ça, c'est quelque chose, sur le temps long,
14:17qui est juste épouvantable.
14:19Mario Draghi, qui est quand même le sauveur,
14:21au-delà d'avoir été le président du Conseil,
14:24c'est Super Mario, c'est lui qui a sauvé l'euro
14:27dans la crise 2009-2010.
14:30C'est quelqu'un qui a mis en place un certain nombre de mécanismes
14:34qui nous ont énormément aidés.
14:35Il a fallu forcer l'Allemagne.
14:37Il est très crédible.
14:38Il a proposé un énorme fonds sur l'innovation,
14:41qui a tout de suite été récusé
14:45par l'Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark,
14:49pour des raisons...
14:50Il ne faut pas dépenser d'argent en plus.
14:52Et récusé par les pays d'Europe centrale et orientale
14:56sur le thème... Ah, ben non !
14:58Si on dépense plus d'argent sur l'innovation,
15:00ça risque d'être au dépens des aides qui nous sont faites.
15:04Donc, on voit que la première réaction
15:06au rapport de Mario Draghi, ça a été quand même de l'enterrer.
15:10Alors, j'espère que, vu la situation dans laquelle on vit,
15:14et vu les agissements de Trump,
15:16on va peut-être ressortir le rapport Mario Draghi
15:19et voir ce qu'on pourrait en faire.
15:21Je vais vous donner la parole tout de suite,
15:23mais je voudrais juste une précision, monsieur Reynald.
15:27Une simple précision.
15:29On a eu un sommet sur l'intelligence artificielle.
15:33Monsieur Emmanuel Macron, président de la République,
15:37a parlé d'injecter
15:38100 et quelques milliards d'euros.
15:42Vu la situation budgétaire que nous connaissons,
15:46est-ce que c'est réaliste ou fantasmatique ?
15:49Sur ce point précis. Où les trouver ?
15:52Non, mais j'en sais rien.
15:53Ah, ben si, c'est important,
15:55parce que les Français ont besoin de savoir.
15:57Il y a 50 milliards qui viennent d'Abu Dhabi, là-dedans.
16:01Déjà, pour la construction d'un campus.
16:0350 milliards des Émirats arabes unis.
16:06Oui, oui.
16:07Je me méfie toujours des annonces.
16:10Moi, ce qui m'intéresse, c'est le faire, quoi.
16:13Mais est-ce qu'on a la capacité de le faire ?
16:16Je ne sais pas.
16:17Vous présidez la commission des finances.
16:19Oui, des finances.
16:21Au Sénat.
16:22Certes, mais ça ne nous permet pas
16:24d'avoir des traductions immédiates de la pensée présidentielle
16:28ni même de la faisabilité directe.
16:30Est-ce que c'est une bonne idée d'injecter plus d'argent ?
16:34Dans l'innovation, on ne peut être que d'accord.
16:37Est-ce qu'ensuite, ces 109 milliards
16:39sont documentés correctement ?
16:41Je suis dans l'incapacité de vous le dire à l'instant.
16:44Une partie de la réponse vient d'être donnée,
16:46mais il faut regarder bien plus largement que ça.
16:49Moi, ce que je crois important, c'est qu'effectivement,
16:52vous savez, en Europe, c'est quand même un peu bizarre.
16:55Je me souviens d'une époque, il y a quelques dizaines d'années,
16:59où on vous parlait de l'entreprise sans usine.
17:03Je ne sais pas si vous vous souvenez.
17:05Il y a eu des collègues...
17:07L'anglaise.
17:08Une des îles.
17:09Voilà, on était là-dedans.
17:11On disait...
17:12-"Vous allez faire plaisir à Louis Gallois."
17:15-"La France se construira à travers la société de service,
17:18mais l'industrie, tout ça, c'est plus le sujet."
17:22Il y avait tout un discours qui a pesé dans le discours français,
17:26notamment, européen, mais très français, quand même, là-dessus,
17:30et qui n'a pas été un bon message envoyé,
17:32c'est le moins qu'on puisse dire.
17:34Je pense que, sur...
17:37J'ai écouté Mario Draghi.
17:38Je l'ai écouté dans la conférence article 13 des traités,
17:42où on se réunit entre parlementaires
17:44des commissions des finances,
17:46et on a écouté de nouveau Draghi.
17:48Mario Draghi, plus il y va, plus il devient dur.
17:51C'est-à-dire que c'est plus, comment dire,
17:55voilà, de bon ton,
17:57par un ancien président de la BCE.
18:00Bon, voilà. Là, on était plus affirmatif
18:02sur les sujets.
18:04Est-ce qu'on veut, oui ou non, un marché de capitaux ?
18:07Oui, non. Si oui, on le fait tout de suite,
18:09et on s'en occupe.
18:10Est-ce qu'on veut avoir une harmonisation
18:13pour que les entreprises, finalement, européennes,
18:16puissent travailler dans tous les pays européens,
18:19et se coordonner entre elles avec des normes de même nature ?
18:22Oui, non.
18:23Est-ce qu'on veut mettre...
18:25Est-ce qu'on accepte un peu plus de dettes ?
18:28Ça, c'était pour les Hollandais, les Allemands.
18:31Oui, non. Et si c'est non à tout,
18:33eh bien, ça ne marchera pas.
18:35C'était simple, le discours était simple.
18:37Christian de Boiseux, oui.
18:40Pour revenir sur ce que disait Louis Galouin,
18:43il y a les écarts de croissance dans le temps,
18:47et puis, à un moment donné,
18:48le fait que la croissance américaine est à 3 % aujourd'hui
18:52et la croissance européenne est à 1 %.
18:55Et c'est pas un miracle, ça résulte.
18:57Ça résulte des différences d'innovation,
19:00de productivité, d'investissement.
19:02Parce que l'innovation, elle tombe pas du ciel.
19:05Elle arrive dans le système par des investissements.
19:08Deuxième remarque,
19:09par rapport à la mise en oeuvre du rapport Draghi,
19:12je pense, comme mes camarades autour de cette table,
19:15si je puis dire,
19:16qu'au fond, le risque, c'est qu'il soit enterré,
19:19et il faut surtout pas qu'il soit enterré.
19:21Le problème, c'est de savoir si on peut avancer à 27.
19:24Je vais partir...
19:25Vous savez, pardon, je précise pour nos téléspectateurs,
19:28ce rapport si important,
19:30je n'ai pas trouvé sa traduction en français.
19:32Ah, si ? Moi, je... Peut-être pas.
19:34Sur Internet, ce qui est quand même gênant.
19:37Tout le monde ne parle pas anglais.
19:39Mais c'est quand même important.
19:41J'étais en train d'aborder un sujet
19:43qui paraît plus important, la question de savoir
19:46si on avance à 27 ou à moins que 27.
19:49Je veux dire, quand je participe à des conférences
19:52et qu'on me dit, nous allons vers une Europe
19:54à géométrie variable, je dis, on y va pas, on y est déjà.
19:57Nous sommes déjà dans une Europe à plusieurs vitesses.
20:01Et je pense que, compte tenu des règles d'unanimité
20:04sur un certain nombre de sujets
20:05qui bloquent les décisions à 27,
20:08il faut... Sans ça, on va dans le mur.
20:10Il faut accepter d'avancer avec les pays européens
20:16qui le veulent et qui le peuvent.
20:18Alors, ça va peut-être dépendre des sujets abordés,
20:21mais si on exige comme condition d'avancer tous ensemble,
20:24on va dans le mur.
20:26Troisièmement, sur les questions de financement.
20:29J'ai évoqué l'union des marchés de capitaux.
20:33Le plan sur l'union des marchés de capitaux,
20:35il date de 2015.
20:37Nous sommes en 2025.
20:39Depuis 10 ans, il s'est pratiquement rien passé là-dessus.
20:42Alors, certes, 2015, c'est un an avant le vote du Brexit.
20:45Qu'est-ce que ça veut dire ?
20:47Que nos marchés financiers en Europe sont fragmentés.
20:50Il y a Francfort, Euronext et d'autres marchés.
20:53Qu'on n'a pas la taille,
20:54que nos marchés financiers sont beaucoup moins développés,
20:57liquides, compétitifs que les marchés financiers américains
21:01et que ça pose un problème de financement
21:03des grandes entreprises et des PME.
21:06Je termine sur les questions de financement
21:08et le poids qu'il faut accorder à des contraintes de financement.
21:11Il me semble que les événements actuels,
21:14qui sont assez dramatiques, l'Ukraine,
21:16et ce qui se passe autour de l'Ukraine dans le monde,
21:19et les relations entre les Etats-Unis, l'Europe,
21:22la Russie...
21:23Je pense que nous sommes dans un contexte où...
21:26Je n'aurais pas dit ça il y a quelques années,
21:28mais il faut être réaliste.
21:30Vous devenez pessimiste avec l'âge ?
21:32Non, je deviens réaliste.
21:33Je pense qu'il faut accepter de mettre un peu entre parenthèses
21:37pour quelques temps les règles mascrichiennes
21:40sur les finances publiques.
21:42Le débat, d'ailleurs...
21:43Vous ne voulez pas qu'on limite le déficit à 3 % ?
21:46Je fais partie des gens qui considèrent
21:48que les dépenses de défense,
21:50qu'il faut augmenter...
21:51On doit les retirer ?
21:53On ne doit pas les compter dans le calcul des ratios
21:56au titre de l'application du pacte de Stabilité.
21:58Ca va venir.
22:00Ca a mis du temps,
22:01parce que ça fait un certain temps qu'on le dit.
22:03Ca fait longtemps qu'on en parle.
22:05On va avoir énormément de choses à financer.
22:07Financer la transition écologique, énergétique,
22:10la défense, l'éducation, la santé...
22:12Je répète, je pense qu'il faut accepter,
22:15compte tenu de la difficulté des temps
22:17et de l'urgence du moment,
22:18de mettre entre parenthèses
22:20un certain nombre de règles européennes.
22:22Pour éviter que l'Europe crève.
22:24Thierry Breton, l'ancien commissaire européen,
22:27n'arrête pas de dire, et il est complimenté partout,
22:30qu'on a financé notre consommation sur la dette
22:33et que, par conséquent, il faut arrêter cette chose-là.
22:36Ce n'est pas une analyse.
22:37Ce qui est proposé, ce n'est pas une analyse du passé.
22:40On peut la faire et on peut trouver les mêmes critiques à faire.
22:44Non. La question, c'est l'avenir.
22:46Quand on donne les bons chiffres des Etats-Unis,
22:48on oublie de donner les mauvais.
22:50Parmi les mauvais chiffres, la dette est un problème.
22:53Au point de vue...
22:55Ils ont le dollar, monsieur Reynald.
22:57Ils impriment du dollar comme ils veulent.
22:59On peut toujours le dire,
23:01mais il n'en demeure pas moins vrai,
23:03qu'on se retrouve face à un pays qui fait marcher la plage aux milliers.
23:07Donc, l'Europe, en face d'une telle puissance
23:10qui se met en route avec de tels moyens,
23:12est-ce qu'elle doit rester sur...
23:14Est-ce qu'elle doit rester à 3, 3,5, 3,1 ?
23:16De quoi on parle ?
23:18On parle de devoir franchir une marche,
23:20parce que sinon, demain, on sera encore plus faibles qu'aujourd'hui.
23:24Il y a une chose que je voudrais préciser avec vous,
23:27quitte à être politiquement incorrecte.
23:30Mais comme vous connaissez bien l'outil industriel,
23:35j'aimerais que vous nous donniez votre avis sur deux points.
23:38Le président Emmanuel Macron a fait savoir,
23:41dès l'élection à son premier mandat,
23:45que la réindustrialisation était une priorité.
23:48Or, quand il est arrivé au pouvoir,
23:51je crois que nous étions à 8, 9 % d'industrie sur le PNB,
23:57ou un peu plus, et que ça n'a pas bougé.
24:00Comment expliquer cette chose-là ?
24:02Et la deuxième chose,
24:04j'aimerais bien que vous nous expliquiez cette chose-là,
24:07c'est que si on prend l'aéronautique,
24:10si on prend les grands secteurs, aujourd'hui,
24:13qui comptent dans l'industrie,
24:15qui produisent de la croissance et de la richesse,
24:18les Etats-Unis ont l'avantage d'une homogénéité.
24:22Tandis qu'en Europe,
24:24vous avez non seulement une diversité,
24:27donc pas de politique industrielle commune,
24:30et en plus, les Etats s'autorisent à acheter à l'extérieur.
24:35Alors, quand est-ce qu'on va réindustrialiser la France
24:39et quand est-ce qu'on va obliger l'Europe
24:42à avoir une politique industrielle homogène et cohérente,
24:46tout en respectant, naturellement, l'ouverture ?
24:48Il ne faut pas rêver.
24:50Il n'y aura pas de politique industrielle globale.
24:54L'Europe n'est pas désindustrialisée.
24:57L'Europe est beaucoup plus industrialisée que les Etats-Unis.
25:01Le problème, c'est que la France est désindustrialisée.
25:05C'est notre problème franco-français,
25:07donc ça n'intéresse pas l'Italie,
25:09qui consacre 18 % de son PIB,
25:12son produit intérieur brut, à l'industrie.
25:15Ça n'intéresse pas l'Allemagne, qui est à 20 %.
25:17Je ne dis pas qu'il n'y ait pas des choses à faire
25:20de politique industrielle ensemble,
25:22mais il ne faut pas penser que cette alerte,
25:24qui est celle de la France,
25:26de la désindustrialisation française,
25:28est partagée par nos voisins.
25:29Elle ne l'est pas.
25:31Il va falloir travailler.
25:32Pourquoi on n'y arrive pas ?
25:33Je voudrais revenir sur ce qui a été dit.
25:37Il y a un point qu'on n'a pas évoqué.
25:40L'effort de recherche de l'Europe,
25:42c'est 2,1 % de son PIB.
25:45L'effort de recherche des Etats-Unis, c'est 3,5 %,
25:48avec un produit intérieur brut supérieur au nôtre.
25:51L'effort de recherche de la Corée,
25:53pays de 50 millions d'habitants, c'est 4,5 %.
25:57Nous, en France, nous sommes à 2,2 depuis 25 ans.
26:02Il ne faut pas s'étonner.
26:03Il manque 20 milliards par an dans le budget de l'Etat,
26:06et des entreprises...
26:08On a déjà des problèmes budgétaires.
26:10Il faut savoir ce qu'on veut faire,
26:12quelles priorités on se donne.
26:14Moi, je pense qu'il y a eu un discours
26:17sur la réindustrialisation auquel j'ai participé.
26:20Il y a eu quelques résultats.
26:22On a arrêté la désindustrialisation.
26:24L'attractivité du territoire français a été accrue.
26:29Mais on n'a pas engagé véritablement
26:31la réindustrialisation.
26:33Et on n'a pas engagé l'amont de la réindustrialisation,
26:37qui est la recherche.
26:38On ne fera rien sans la recherche.
26:40Donc, je pense qu'il faut qu'on aille aussi vite que possible,
26:44de 2,2 à 3, 3,5 %,
26:47de notre produit intérieur brut dans la recherche.
26:49C'est ça, je dirais, la base.
26:52Alors, quant au financement,
26:55Christian de Boissieu nous parle, à juste titre,
26:58de l'union des marchés financiers.
27:01Le problème de l'Europe,
27:02c'est qu'elle a financé son industrie jusqu'à maintenant
27:05par les banques, pas par le marché financier.
27:07Les banques sont soumises à des réglementations telles
27:10qu'elles ne peuvent plus financer ces banques.
27:13Mais nous n'avons pas, en échange, un marché financier très large.
27:16Et si nous faisons l'union des marchés financiers,
27:19pourquoi pas ?
27:20Mais il va falloir alimenter ce marché financier
27:23en capitaux à risque,
27:24c'est-à-dire de gens qui acceptent de prendre des risques.
27:27Vous pensez à l'épargne des particuliers ?
27:30Aujourd'hui, ils ont du mal à avoir un taux d'intérêt
27:34supérieur à 2 %.
27:36Nous avons une épargne supérieure à celle des Etats-Unis,
27:39ce qui nous permet de financer partiellement les Etats-Unis.
27:42Nous avons 300 milliards d'euros qui, chaque année,
27:45partent de l'épargne française vers les Etats-Unis.
27:47Et je pense que cette épargne est massive.
27:50En France, elle est placée en l'immobilier
27:52et dans l'assurance-vie.
27:54C'est d'ailleurs...
27:55Les petits épargnants veulent quand même avoir un retour
27:58sur leur épargne.
27:59Il va falloir inventer quelque chose.
28:02Je pense qu'il faut conduire plus de capitaux
28:06vers les investissements à risque
28:09et le rôle des Etats, peut-être, justement,
28:12de modérer ce risque,
28:14de faire en sorte qu'il se situe dans une fourchette acceptable.
28:18Mais il est absolument essentiel,
28:20si on fait l'immobilier dans le marché financier,
28:22qu'en plus, ce marché financier grossisse
28:25et en capitaux, qu'il soit capable de s'investir dans le risque.
28:28Parce que nous avons un handicap majeur dans les Etats-Unis.
28:32Il y a un chiffre qui est particulièrement significatif
28:36pour le financement des start-up,
28:38ce qu'on appelle le venture capital, le capital à risque.
28:41Les Etats-Unis, 55 % de part mondiale.
28:45Chine, 40 % de part mondiale.
28:47La part de l'Europe, c'est 5 %.
28:49Nous sommes complètement hors des clous.
28:52Tant qu'on n'aura pas remis ça d'équerre
28:56avec une part acceptable,
28:58il ne faut pas penser que nous allons regagner
29:01la bataille industrielle et la bataille technologique,
29:04qui est derrière.
29:05Il n'y a pas de bataille industrielle sans bataille technologique.
29:09Je suis d'accord en rajoutant l'énergie,
29:12parce que nous ne sommes pas compétitifs aujourd'hui
29:15sur le plan industriel, du fait aussi des prix de l'énergie.
29:19Je rajouterais plusieurs choses sur, effectivement,
29:22l'innovation et sur la capacité de financer cette innovation.
29:27L'Europe s'est payée de mots.
29:29On annonce des chiffres, on adore annoncer des grands plans,
29:32des chiffres avec des dizaines de milliards.
29:35Ca a été fait par la commission précédente,
29:37celle d'Ursula von der Leyen,
29:39ça a été repris par celle d'Ursula von der Leyen.
29:42C'est fait par la BEI, la Banque européenne d'investissement,
29:45qui, grosso modo, a de l'argent à taux zéro
29:48et qui la prête à des start-up.
29:50Moi, j'ai fait l'expérience dans plusieurs entreprises,
29:54à des taux de genre 8 %,
29:55et dans des conditions où, par exemple,
29:58même les avocats qu'ils utilisent,
30:00et je vous assure qu'ils n'utilisent pas des petits cabinets,
30:03mais des cabinets anglo-saxons bien chers,
30:05doivent être payés par la cible.
30:07Donc, on sait, on se paye de mots,
30:11et en même temps, à chaque fois,
30:13on retient l'argent de ces plans de toutes les façons possibles.
30:17C'est là où c'est un peu désespérant.
30:19Je voudrais réagir à ce que tu disais, Christian,
30:21sur l'Europe à géométrie variable.
30:24Moi, j'y crois tout à fait.
30:26Je pense que c'est la solution.
30:28Mais...
30:29Pardonnez-moi, juste pour noter les spectateurs,
30:32géométrie variable, ça veut dire des accords bilatéraux,
30:35trilatéraux ?
30:36Non, ça veut dire qu'on avance
30:39par des petits sous-groupes qui sont d'accord pour aller de l'avant.
30:43Alors, traditionnellement, le moteur du système,
30:46c'était un moteur franco-allemand.
30:48Le problème, c'est qu'il faut constater
30:50que, soit côté français, soit côté allemand,
30:53ça ne fonctionne plus.
30:55En tout cas, ça ne fonctionne pas ensemble.
30:57Donc, l'Europe, qui a pris l'habitude,
30:59même si ça maugrait en général
31:01et si les autres pays étaient souvent rageurs
31:04de voir ces Français et ces Allemands prendre des initiatives,
31:07finissait par suivre.
31:08Là, qui va prendre l'initiative
31:11dans le système politique où nous sommes aujourd'hui ?
31:15Il faudrait, à la limite,
31:17moi, je pense que Donald Trump, il faut encore qu'il fasse...
31:20On va en parler, vous allez voir.
31:22Il faut encore des provocations supplémentaires
31:25pour susciter quelque part une forme de mouvement,
31:28parce que sinon, on n'y arrivera pas.
31:30Là, on est dans un système qui est politiquement bloqué.
31:33Il faut appeler un chat un chat.
31:35Et puis, avec une commission européenne
31:37qui a été reproduite, à ma grande surprise,
31:40qui est à côté de la plaque.
31:42Adlo Verjon, sur la question européenne,
31:44tout le monde, ou presque,
31:47dénonce la bureaucratie, les régulations.
31:51Est-ce que vous pensez que Bruxelles,
31:53à travers ses institutions,
31:56a désavantagé la France
31:58par rapport à d'autres pays comme l'Allemagne ?
32:01Elle a d'abord désavantagé tous les pays européens.
32:04C'est-à-dire que vous prenez, par exemple,
32:06vous en parliez tout à l'heure,
32:08de l'Inflation Reduction Act.
32:12Vous présentez... Il faut que ce soit un projet décarbonant.
32:16Ça va dans le bon sens.
32:17Vous présentez votre...
32:20Votre... Votre compte.
32:23Et on fait la ristourne qui va.
32:25On ne discute de rien, on ne demande pas de dossier,
32:28rien du tout.
32:30Vous êtes en Europe.
32:32Vous voulez bénéficier des aides existantes.
32:3518 mois d'instruction.
32:38Vous passez par des fourches
32:40d'une complexité extraordinaire
32:43pour des résultats parfaitement aléatoires.
32:45Donc, je pense que le thème de la simplification...
32:48Je suis présidente de la commission
32:50Simplification et réformes de l'Etat au MEDEF.
32:52Donc, je suis assez...
32:54D'ailleurs, c'est un poste qui vous désespère
32:57parce que plus vous voyez
33:01comment on a construit en France et en Europe
33:03des édifices d'une complexité avec l'obsession
33:07de traquer celui qui, potentiellement,
33:10ou l'entreprise qui, potentiellement,
33:12pourrait faire quelque chose de pas bien.
33:14Donc, à force de ça,
33:16on finit par faire des monuments de papier,
33:19des monuments bureaucratiques qui sont...
33:21Et puis, surtout, on perd du temps,
33:23le temps qui est clé, la capacité de réaction.
33:26Et puis, cette société de la défiance
33:27où on se défie de tout le monde, c'est pas possible.
33:30Oui, Christiane Boisieu.
33:32Je voulais venir, justement, Louis,
33:34sur la question de l'innovation qui me paraît centrale.
33:37En 2000, l'Europe avait défini
33:40ce qu'on appelait l'agenda de Lisbonne,
33:42qui était centré sur des objectifs, justement,
33:45de rapport entre la recherche et le développement
33:48et le PIB, pays par pays,
33:50avec des objectifs relativement ambitieux.
33:52Pour des raisons de court terme,
33:55c'est un problème d'arbitrage court terme, long terme,
33:59l'agenda de Lisbonne n'a pas été respecté.
34:01Aujourd'hui, il faut relancer quelque chose comme ça,
34:03mais, comme disait Anne, il faut le faire.
34:06Il suffit pas de parler.
34:07Bon, donc, il faut qu'on mette le paquet
34:10sur tout ce qui est recherche,
34:11et derrière, je reviens,
34:13et pas uniquement parce que je suis prof de fac,
34:15je pense que derrière l'innovation,
34:17il y a la question de la formation et de l'éducation,
34:20qu'on peut pas séparer.
34:21La France a des très bons chercheurs
34:23en recherche fondamentale.
34:25On a des problèmes de passage à la recherche appliquée,
34:28parce qu'ils vont souvent à l'extérieur
34:29pour faire de la recherche appliquée.
34:31Je me souviens des débats de la commission Juppé-Rocard
34:34sur le grand emprunt,
34:36vous vous souvenez, sur les investissements d'avenir.
34:39On avait auditionné les patrons
34:40des pôles de compétitivité.
34:42Il y avait déjà eu, auparavant, la commission Attali.
34:45Je faisais partie.
34:46A l'époque, on était dans les commissions.
34:48Maintenant, je suis plus à la mode,
34:50mais j'étais à l'époque.
34:52Donc on a des bons cerveaux.
34:53Donc, ce...
34:54Pour faire des rapports.
34:56Ce point est extrêmement important, à mon avis,
34:59innovation, éducation.
35:00Bon, sur les problèmes industriels,
35:03je pense quand même qu'il faut développer
35:06de la coopération, Louis Lady, européenne,
35:08sur certains sujets.
35:09On ne va pas faire des batteries électriques
35:12pays par pays.
35:13Le franco-allemand a démarré sur les batteries.
35:16C'est dit dans le rapport Draghi.
35:17-"On ne fait pas l'usine en Allemagne."
35:20Je suis d'accord.
35:21Mais le problème de l'Europe, c'est qu'on n'a pas l'effet taille.
35:24On n'a pas l'effet taille.
35:26On n'a pas l'effet taille.
35:27On n'a pas l'effet taille,
35:29mais pourtant, on a la même population
35:31que les Etats-Unis.
35:32On n'a pas l'effet taille,
35:34donc on ne peut pas bénéficier sur les aspects industriels
35:37de ce qu'on appelle les effets d'échelle,
35:39les économies d'échelle.
35:41Ca pèse sur notre compétitivité.
35:43Je termine sur les problèmes monétaires et taux de change.
35:46Je salue ce qu'a fait Draghi quand il était
35:49à la tête de la BCE,
35:50parce qu'il a été extrêmement pragmatique
35:52au moment de la crise,
35:54de la dette dans la zone euro, Grèce, etc.
35:56Et il a sauvé l'euro.
35:58Il a dit... Vous vous souvenez de la formule
36:00whatever it takes ?
36:02Quoi qu'il en coûte, quoi qu'il en coûte,
36:04je serai là, moi, Banque centrale européenne,
36:07pour faire ce qu'il faut pour éviter les crises,
36:09la sortie de la Grèce de l'euro à l'époque, etc.
36:12Donc, le débat, le débat, le débat monétaire
36:16n'est pas indifférent.
36:18Le fait que les Etats-Unis s'appuient sur le dollar,
36:20qui reste la monnaie de réserve par excellence,
36:23l'euro étant très, très loin...
36:25Vous allez voir, on va y revenir.
36:27Mais avant, avant de parler...
36:29Juste un mot, mais on va passer aux Etats-Unis.
36:32Juste un mot.
36:33Quand on parle de géométrie variable
36:36et des pays qui peuvent se rassembler,
36:38il ne faut pas oublier la Grande-Bretagne.
36:40C'est extrêmement important.
36:42Ils ne sont plus dans l'Union européenne.
36:44Mais en matière d'innovation,
36:46en matière de marché financier,
36:48de profondeur du marché financier,
36:51ils apportent beaucoup.
36:52Et en matière de défense, je n'en parle pas.
36:55On va écouter un extrait
36:57d'Aurélien Saint-Aul,
37:00qui est député LFI des Hauts-de-Seine.
37:03C'était à l'Assemblée nationale, le 23 janvier 2025.
37:07-"Monsieur le Premier ministre,
37:09Donald Trump n'a certainement pas inventé
37:11l'impérialisme américain.
37:13Il le radicalise.
37:14Tirons-en les conséquences.
37:16L'invasion de l'Irak, la vente d'Alstom,
37:18l'affaire des sous-marins à l'Australie,
37:20les livraisons d'armes à Israël en train de commettre un génocide.
37:24Voilà autant d'épisodes qui auraient dû vous éveiller.
37:27De même, il fallait être hypocrite ou naïf
37:29pour croire que les multinationales
37:32Mais désormais, la chose est entendue.
37:34Le président des Etats-Unis et ses milliardaires affidés
37:37s'en prennent aux alliés des Etats-Unis.
37:39Panama, Canada, Groenland, ils les menacent d'annexion.
37:42Ils ne s'embarrassent plus de persuader.
37:44Ils privilégient la coercition pour redessiner les cartes.
37:47Ils ne veulent pas de partenaires, mais des vassaux.
37:50Make America Great Again ne se conçoit
37:52que dans la soumission et la prédation des ressources.
37:55Pas une tête ne doit dépasser au moment où se prépare
37:58une grande confrontation avec la Chine.
38:00Nous ne sommes pas de ces patriotes en peau de lapin
38:03qui baient d'admiration devant leurs maîtres
38:05pourvu qu'ils les imaginent occidentaux.
38:07Nous voulons une France insoumise et je crois que, dans le fond,
38:11vous pouvez être d'accord avec nous.
38:13Vous êtes gascons et revendiqués, Henri IV.
38:15Nous pensons que la France n'est vraiment conforme à elle-même
38:18que lorsqu'elle choisit la grandeur
38:20et qu'elle va empanacher d'indépendance et de franchise.
38:23Alors, nous venons d'écouter les propositions traditionnelles
38:28de l'LFI.
38:30C'est pas tellement traditionnel.
38:32Mais sur les Etats-Unis,
38:35ces critiques portent.
38:38Alors, ce que je voudrais,
38:40c'est que nous ramenions ces critiques
38:43à l'actualité immédiate,
38:46à savoir l'augmentation des tarifs douaniers
38:50et l'obligation qui est faite à l'Europe
38:53de consacrer des budgets défense
38:56beaucoup plus importants que les 2 %,
38:59qui veut amorcer la pompe là-dessus ?
39:02Christian Deboisy.
39:04Cours, je peux essayer d'être court.
39:06Je veux dire, ma question est
39:10qui peut contenir ou arrêter Trump ?
39:13Et la thèse que je...
39:14Parlons des conséquences des mesures prises par Trump
39:18sur la France.
39:19J'arrive à la question.
39:20Vous parliez des tarifs douaniers.
39:22Ca a des conséquences pour eux et pour nous.
39:24Ce qui peut arrêter Trump sur cette montée du protectionnisme,
39:29qui n'est quand même pas une bonne nouvelle pour nous,
39:32mais également, je pense, pour les Américains.
39:35Ca va se retourner contre eux.
39:36Ce qui peut l'arrêter, c'est l'inflation aux Etats-Unis
39:40et c'est le consommateur américain.
39:43Bon. Je pense aussi, deuxième remarque,
39:45par rapport à tout ce qu'on a dit sur les faiblesses économiques,
39:49qu'elles ont des conséquences géopolitiques
39:52évidentes que nous voyons.
39:53L'Europe est une sorte de spectateur
39:56qui regarde la balle de ping-pong
39:58qui passe au-dessus du filet.
39:59Le filet, il y a d'un côté les Etats-Unis et la Chine.
40:02Il y a également les rapports Nord-Sud.
40:05La montée de ce qu'on appelle le Sud global,
40:07la montée des pays émergents,
40:09est une question qui me paraît fondamentale.
40:12Je passe une partie de ma vie en Afrique,
40:14donc je vis ça sur le terrain.
40:16La montée des BRICS, la montée du Sud global,
40:18quelle est la réponse de l'Europe aujourd'hui
40:21par rapport à cet axe Nord-Sud ?
40:23L'Europe est absente des débats Est-Ouest
40:25et elle est inexistante dans les débats Nord-Sud.
40:28Voilà ce qui me rabat.
40:29Mais il y a une imbrication étroite
40:32entre notre défaillance économique
40:35et notre absence de poids géopolitique.
40:37Oui, Louis Gallois.
40:38Votre question, c'est qu'est-ce qu'on peut faire face à Trump ?
40:42Et face aux mesures qu'il a décrétées.
40:44C'est ça qui est important.
40:46Parce qu'en général, il fait ce qu'il dit, si on peut dire.
40:49Il y a des mesures de rétorsion
40:51que nous allons prendre vis-à-vis des tarifs d'années
40:55qu'il va mettre en place.
40:56Il va falloir que nous en mettions en place.
40:59Mais ça, c'est du court terme.
41:00Je pense que ce que nous dit Trump,
41:02c'est aller chercher vos alliés ailleurs.
41:05Et je pense... Moi, j'étais contre le Mercosur.
41:08Je change d'avis.
41:09Je pense que maintenant...
41:11Vous pouvez dire en deux mots...
41:12L'accord de libre-échange avec les pays d'Amérique latine.
41:16J'étais contre parce que j'étais solidaire
41:18de nos agriculteurs qui vont souffrir.
41:21Et je pense qu'il faut tenir compte de cela
41:24et probablement les soutenir pour cela.
41:28Mais maintenant, il faut aller chercher des alliés.
41:31Et je pense que le Mercosur,
41:32c'est aller chercher des alliés en Amérique latine.
41:35Ce que vient de dire Christian de Boissieu
41:37me conduit à penser qu'il faut aller chercher nos alliés en Afrique,
41:41alors que nous sommes en train de nous retirer.
41:44Il y a des pays d'Afrique avec lesquels on peut travailler.
41:47Il va falloir aller chercher des alliés en Asie.
41:50Ce qui est massif, essentiel pour nous, c'est l'Inde.
41:53Je pense que si...
41:55La meilleure...
41:56On est en voie là-dessus.
41:57Oui, il y a des choses qui se font.
41:59Mais il faut peut-être aller plus vite, plus loin.
42:02Comme le disait Lovergeon,
42:04tout notre problème, c'est un problème d'exécution
42:06et de rapidité de l'exécution.
42:08C'est décisif.
42:09L'Europe et la France, on est hors des clous pour ça.
42:13On est d'une lenteur épouvantable.
42:15Et je pense qu'il faut revenir là-dessus,
42:17y compris pour ce type d'alliances.
42:19Trump va vite, il va falloir aller vite.
42:22Et je pense qu'on peut trouver, en Asie, en Afrique,
42:25en Amérique du Sud, des gens qui ne peuvent pas accepter...
42:29Dans le monde arabe,
42:30où il y a des capitaux importants.
42:32...avec lesquels on doit pouvoir travailler.
42:35Je reviens en Europe.
42:36Il ne faut surtout pas oublier les Anglais.
42:38Oui.
42:39Je pense qu'on est dans une révolution géopolitique considérable.
42:43Et Trump sert d'agitateur
42:47sur une tempête qui, de toute façon, a lieu, même sans Trump.
42:51Bon, quand on regarde les pays du G7,
42:55aujourd'hui, ils représentent un produit national brut cumulé
42:59inférieur à ceux des BRICS.
43:02Vous avez 13 pays, selon l'Afrique du Sud,
43:04qui sont en train de taper à la porte.
43:07La Russie, qui était entièrement tournée vers l'Europe
43:11sur la vente d'hydrocarbures, de gaz, etc.,
43:14s'est retournée sur la Chine.
43:16Et sur l'Inde.
43:18Donc, on est, de toute façon, l'Afrique...
43:21Et nous, Français, on est bien placés pour le savoir.
43:24Là aussi, on a pris des décisions
43:26qui ne sont pas vraiment pour des rapprochements.
43:29Je pense que Trump rajoute
43:32un degré d'imprévisibilité colossal.
43:36C'est-à-dire qu'il annonce 40 mesures par jour.
43:40Il y en a qui auront lieu, il y en a qui n'auront pas lieu.
43:44C'est un espèce de confusion générale.
43:46C'est très fort, d'ailleurs, parce qu'on ne sait plus à quoi répondre.
43:50Je pense que, d'une certaine façon,
43:52il a dédouané la Chine sur Taïwan.
43:54Quand il dit qu'il va s'occuper de Panama, de Groenland, etc.,
43:57c'est une façon chinoise de dire,
43:59allez-y, Taïwan, c'est demain matin, comme vous voulez.
44:01Je trouve ça terrifiant, d'une certaine façon.
44:04Et nous, Européens,
44:06on est dans une situation, effectivement, de torpeur,
44:09d'obsession de quelques sujets qui sont plus sociétaux,
44:14changements climatiques,
44:16mais qui ne sont pas comment on existe sur le plan géopolitique.
44:19Alors, est-ce que tout ça va nous secouer un peu
44:21de telle façon qu'on se réveille
44:23et qu'on commence à faire des choses intelligentes,
44:25à plusieurs, ou de manière plus globale ?
44:29Moi, je suis une optimiste indéterrée.
44:31Mais, très franchement, la plus grande chance...
44:35Alors, c'est qu'il ne se passe pas grand-chose en Europe, hélas.
44:37Quand j'entends qu'une semaine après l'arrivée de Donald Trump,
44:41Ursula von der Leyen, qui l'a dit en conférence de presse,
44:44l'a appelée pour lui dire
44:46qu'elle aimerait bien prendre du gaz de schiste liquéfié,
44:49en plus américain,
44:51qui, je le rappelle, est vendu quand même 4 à 5 fois plus cher
44:54que ce qu'il est utilisé.
44:55Alors, liquéfaction, les transports, n'est-ce que pas tout, quand même ?
44:59Alors, Trump, combien de temps va durer Trump ?
45:01Au maximum, il va durer 4 ans, point 1.
45:04Point 2, je pense que sa politique, effectivement,
45:06va créer énormément d'inflation.
45:08Mettre des droits de douane, c'est de l'inflation aux Etats-Unis.
45:11Sa politique anti-migrants,
45:14mettre le cordon de soldats
45:17pour empêcher les Mexicains et les Latinos d'arriver,
45:21là aussi, il y a plein de petits boulots
45:22qui ne seront plus faits aux Etats-Unis.
45:24C'est quand même un gros problème économique américain.
45:27Moi, je pense comme toi,
45:28je ne suis pas du tout en faveur de l'accord Mercosur,
45:30mais je pense que l'Amérique latine est un vrai sujet pour nous.
45:34Parce que, quelque part, les Américains,
45:37Trump ne le voit que comme des gens à reléguer,
45:40alors que je pense que c'est des gens avec lesquels il faut dealer.
45:43Monsieur Reynaud, je voudrais vous poser une question
45:47qui m'interroge et qui interroge beaucoup de Français.
45:50On a tendance à dire que l'économie française,
45:54qu'il s'agisse de l'électricité avec sa source nucléaire,
45:58qu'il s'agisse des technologies, y compris des carbonés,
46:02qu'il s'agisse de l'industrie de défense,
46:04où nous avons de magnifiques fleurons.
46:08En gros, nous avons tout pour réussir en qualité,
46:12mais pas en quantité.
46:14Or, je vous entends, il y a une stagnation.
46:19Il n'y a pas une industrialisation qui reprend, etc.
46:23Est-ce que vous pensez
46:25que notre situation financière, économique et budgétaire
46:31est un frein à ce que nous avancions ?
46:35Vous connaissez bien ce monde-là.
46:38Est-ce que...
46:39Ca se répond pas en oui ou non.
46:41Justement, vous avez le temps de répondre.
46:44Est-ce qu'il vaut mieux avoir des budgets équilibrés
46:47et pas de difficultés financières pour l'Etat ?
46:50La réponse est oui.
46:51C'est clair.
46:53Est-ce qu'on vous respecte pas mieux
46:56quand vous avez les poches pleines que quand vous êtes...
46:59Bon, écoutez, oui, tout ça est vrai.
47:02C'est vrai au plan européen,
47:04où la parole de la France peine à être entendue.
47:08C'est clair que pour un certain nombre de pays,
47:12la France avait une tradition un peu donneuse de leçons.
47:15Faut pas le nier dans les discussions économiques,
47:19dans les discussions financières.
47:21En Europe, on avait tendance toujours
47:24à avoir des personnalités qui prenaient le lead sur ces sujets.
47:28C'est compliqué de le faire
47:29quand on a la situation dégradée que l'on a.
47:32Mais je crois qu'il faut pas s'arrêter à ce point.
47:35Le sujet dont on parle,
47:36c'est pas le sujet des finances publiques nationales,
47:39qui doit être réglé, trouver sa solution.
47:42Très bien, on est arrivé quand même à faire un déficit public
47:46en un an de 50 milliards supplémentaires.
47:48Il faudra quand même qu'on m'explique.
47:51J'ai des explications, c'est pas le sujet d'aujourd'hui,
47:54mais c'est quand même extraordinaire
47:56ce qui s'est passé en 2024.
47:59Vous diriez qu'il faut continuer en 2025 ?
48:01Sur cette voie ?
48:03Certainement pas. Non, ça, je... Non.
48:05Non, mais je vous pose la question.
48:07Il y a un travail de redressement des finances publiques
48:10qui est en cours. Il faut l'encourager
48:13et faire en sorte de sortir de cette situation.
48:16Ca, c'est une chose.
48:18Mais ça n'enlève rien à la problématique dont nous parlons,
48:21qui est autre chose.
48:22Si on attend qu'on ait redressé les comptes,
48:25que les ai ramenés, je sais pas quoi, à 3,1,
48:27qui est, en dehors de toute règle européenne,
48:30simplement un secteur, une zone
48:32dans laquelle on n'aggrave plus trop la dette,
48:35bon, eh bien, écoutez, si on attend ça pour démarrer,
48:38je veux dire, Trump aura fini son mandat
48:41et on n'aura toujours rien fait.
48:43Donc, parlons prospective, parlons...
48:47Moi, je trouve intéressant,
48:48d'ailleurs, qu'on ne parle plus d'un marché des capitaux,
48:51qui est une formulation très techno,
48:53c'est mieux l'épargne-investissement,
48:55ça parle plus aux gens, c'est quelque chose d'utile.
48:58C'est quoi, le marché des capitaux,
49:00au fond, l'épargne-investissement, c'est quoi ?
49:03C'est l'idée qu'on a, dans certains pays européens,
49:06des masses financières qui ne sont pas utilisées
49:08et des besoins de masse financière pour l'industrialisation
49:11qui sont nécessaires dans d'autres pays européens.
49:14Et donc, c'est arriver à avoir une meilleure utilisation
49:18des fonds globaux européens.
49:19Il faut arriver à trouver la solution.
49:21Il faut arriver également à ce qu'on ait,
49:24effectivement, plus d'épargnes qui se mettent à risque,
49:27entre guillemets, avec des garanties d'Etat,
49:30avec des solutions pour permettre et faciliter cela,
49:33pour une partie, mais on ne peut pas rester
49:35au taux que nous avons aujourd'hui de 5 %
49:38de l'épargne à risque mondial.
49:40Ca, ça nous tuera. Ca, c'est clair.
49:43Mais comment on peut inciter les épargnants ?
49:45Oui, mais c'est important.
49:47Je vous dis, avec un système de garantie pro parti.
49:52Bien sûr, pas sur la totalité.
49:53C'est-à-dire que l'Etat garantirait ?
49:56Que l'Europe, l'Etat... Il faut voir.
49:58On a commencé à créer un produit européen d'épargne
50:04qui ne marche pas très bien, qui n'a pas bien démarré,
50:07parce que ceux qui sont chargés de le vendre
50:09ne trouvent pas, sans doute, leur marge.
50:12C'est toujours aussi un souci.
50:14Il faut quand même que ce soit fait.
50:16Mais, en tout cas, ce sujet-là,
50:18il est tout à fait nécessaire, non plus d'en parler depuis 10 ans,
50:23mais de le faire dans l'année.
50:24On se donne un an. Dans un an, on le règle.
50:27Avec qui ? Avec ceux qui sont d'accord pour le partager.
50:30Et on démarre comme ça.
50:32Comme d'habitude en Europe, si on regarde l'histoire,
50:34s'il y en a quelques-uns qui démarrent, après, ça vient.
50:37Ca rentre.
50:39Donc, faisons comme ça.
50:41Prenons un peu le trou par les cornes sur certains de nos sujets.
50:44Dont celui-là.
50:45On est un peu optimistes,
50:47puisqu'on arrive à la fin de cette émission.
50:49On a vu qu'en 2008-2009,
50:53Mario Draghi avait sauvé un petit peu...
50:56-"Super Mario".
50:57-...avait sauvé l'Europe
50:59en permettant ces investissements,
51:02cette mutualisation.
51:04Est-ce que vous pensez que l'urgence,
51:06aujourd'hui, pour les pays européens,
51:09plutôt que d'aller se précipiter à la Maison-Blanche,
51:14est-ce que ce serait pas beaucoup plus utile
51:18que les pays européens,
51:19et notamment ceux qui ont une grande influence,
51:23imposent, face injonction à l'Europe,
51:28de remédier à ça en revenant sur l'action de Draghi
51:32et en l'adaptant aux difficultés d'aujourd'hui ?
51:35Il faut peut-être le dire,
51:37mais en tout cas, pas avec ces mots-là.
51:39-"Terrain-injonction",
51:40ça me paraît pas tout à fait le bon vocabulaire.
51:44Mais oui.
51:45Je pense que le problème et la solution sont chez nous.
51:49C'est pas à Washington qu'on trouvera la solution
51:52à nos problèmes.
51:53Il faut que les Européens se bougent.
51:55Peut-être pas à 27, mais il y a un accord entre nous
51:58pour dire qu'on avance avec ceux qui le veulent et qui le peuvent.
52:02Un mot, parce qu'il nous reste peu de temps.
52:04-"Arrêtez de se payer de discours et de grands programmes
52:08et de grands programmes et faire,
52:10et d'autre part, simplifier."
52:12Simplifier.
52:13On a une capacité, je dirais,
52:15tant au niveau français qu'au niveau européen,
52:18d'inventer des mécanismes qui ne fonctionnent pas
52:21parce qu'ils sont beaucoup trop complexes
52:24pour les acteurs économiques, pour tous les acteurs en général.
52:27Donc, simplifions.
52:29Merci. Un mot, Louis Gallois,
52:30parce qu'il reste peu de temps.
52:32Pour moi, un mot, c'est d'abord la recherche, j'y reviens.
52:36Deuxièmement, être capable de mobiliser de l'épargne
52:41sur le risque, c'est absolument essentiel,
52:43et c'est un problème de toute l'Europe.
52:46Et troisièmement, aller chercher des alliances
52:49dans le reste du monde, et pas uniquement aux Etats-Unis.
52:53Vous êtes d'accord avec ça, Claude Reynal ?
52:55Sur la table ronde, on n'avait pas trop de différences d'appréciation.
52:59Bien. Alors, écoutez, on arrive à la fin de cette émission.
53:03Juste quelques mots de bibliographie.
53:06Alors, on a beaucoup cité ce rapport de Mario Draghi.
53:10On le trouve sur Internet, sous son appellation anglaise,
53:14The Future of European Competitiveness.
53:17Je regrettais au début de l'émission
53:20qu'il ne soit pas en français, vous voyez,
53:22mais bon, espérons qu'il soit traduit très rapidement.
53:25Alors, il y a de nombreux livres sur cette crise économique,
53:29notamment celui de Nicolas Baverez,
53:32sursaut aux éditions de l'Observatoire.
53:35Et je voudrais citer Christian de Boissieu.
53:37Vous avez publié, avec Dominique Chenot,
53:40Réussir la transition énergétique et écologique,
53:43édition MA et SK.
53:45Un mot pour terminer, puisque le temps est imparti.
53:48A votre avis, on peut concilier
53:52l'économie, l'écologie,
53:54la compétitivité, la productivité ?
53:57Est-ce que tout cela peut aller ensemble ?
54:00Il n'y a pas à choisir entre fromage et dessert, les deux.
54:04C'est votre avis aussi, Louis Gallois ?
54:07On n'a pas le choix, il faut faire les deux.
54:09Donc, il faut faire les deux, écoutez.
54:12Je pense que l'Europe s'est fourvoyée
54:15de manière idéologique sur la transition énergétique
54:18qu'il faut faire, la transition écologique qu'il faut faire,
54:21mais avec une vision trop idéologique.
54:24Il faut sortir de ces idéologies,
54:26qui sont des véritables incapacités
54:28à voir le monde tel qu'il est.
54:30On a trouvé quelques sujets qui nous différencient.
54:33Voilà, écoutez, vous savez,
54:35Nietzsche disait que la vérité vient des contradictions.
54:39Donc, un débat trop consensuel n'est pas forcément
54:42un débat qui fait avancer.
54:44Merci, madame, merci, messieurs,
54:47d'avoir éclairé un peu cette situation difficile
54:51à laquelle nous sommes confrontés.
54:53Je voudrais remercier l'équipe de LCP
54:56et je voudrais vous dire à bientôt.
55:00Merci.

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