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00:00Et je salue mes camarades de la première heure, bonsoir Jean-Claude Dacier, bonsoir Sébastien Ligné, bonsoir Catherine, et bonsoir à vous Bernard-Henri Lévy.
00:14Merci d'être avec nous, vous êtes de retour du Donbass sur le front ukrainien où vous avez assisté au combat et au Goomba, on va en parler bien sûr également avec les drones, ça c'est nouveau pour les Ukrainiens.
00:26Une première question, quel est votre ressenti quand vous avez passé plusieurs jours avec ces combattants qui sont au front, qui voudraient que la guerre se termine mais qui ont bien en tête que la guerre ne peut pas se terminer n'importe comment ?
00:41D'abord, en effet, ils veulent que la guerre se termine, ça c'est incontestable et lorsque le président Zelensky dit que nul au monde ne souhaite plus la paix que les Ukrainiens, c'est vrai.
00:53Ils ont payé cette guerre si cher, la vie est si terrible, ces villes bombardées, il n'y a pas une ville...
01:02Vous savez, ça fait trois ans que je me rends en Ukraine régulièrement, je suis frappé à chacune de mes visites par l'augmentation du nombre des mutilés dans les rues, dans les villages, etc.
01:15Donc ça c'est une chose, mais à côté de ça, en effet, pas la paix à n'importe quel prix, pas la paix couchée, pas la paix en acceptant la loi de Moscou.
01:29Donc moi je suis frappé comme chaque fois par la bravoure de ces femmes et de ces hommes, par leur extraordinaire courage.
01:37Ces gens qu'on prenait pour un peuple mineur, un peuple de corrompus, on disait ça il y a 10 ou 15 ans, ils ont fait la preuve d'une endurance, d'une force d'âme et d'un courage extraordinaire qui, moi en tout cas, force mon respect.
01:56Vous avez rencontré des combattants, des combattantes, une combattante de 22 ans, commandante dans l'unité de drones, c'est nouveau, je le disais, c'est un nouveau combat pour les Ukrainiens et malgré le retrait du renseignement américain tout récent, on continue le combat ?
02:12Oui, alors le retrait du renseignement américain c'est le vrai problème parce que l'arrêt des livraisons d'armes, les Ukrainiens peuvent s'y faire en tout cas pendant quelques mois parce qu'ils en produisent.
02:24Je pense qu'aujourd'hui, il n'y a pas de chiffre officiel parce que c'est un peu du secret défense, mais entre le tiers et la moitié des armes utilisées sont produites en Ukraine, mais le renseignement c'est terrible.
02:35Ce qu'a annoncé le président Trump aujourd'hui, ça veut dire en gros, si la CIA est informée ou les services sont informés d'une frappe imminente sur Kramatorsk ou Dnipro-Petrovsk, ils ne préviennent pas les Ukrainiens.
02:49Alors qu'ils le faisaient auparavant ?
02:52C'était quasiment en temps réel.
02:54En temps réel et les Ukrainiens avaient, moi j'ai vécu ça cent fois, quelques minutes pour aller dans les abris et pour épargner leurs civils et pour en tout cas mettre à l'abri leurs enfants.
03:06Donc ça change beaucoup de choses.
03:07Ça change tout. Un allié qui vous dit, à partir de maintenant, on saura, parce que les satellites sont toujours là, les informations sont toujours disponibles, mais on ne vous le dira pas, ça s'apparente à de la non-assistance à villes en danger.
03:24Voilà, donc ça, si c'était vraiment mis en oeuvre, ce serait assez dur.
03:30Parce que pour l'instant c'est encore flottant, comme les droits de douane qui aujourd'hui on a appris finalement que pour le Mexique et le Canada c'était pas tout de suite.
03:37Le Starlink d'Elon Musk c'est aussi incertain.
03:41Donc ça c'est les systèmes de communication ?
03:43Oui, qui ont été l'un des nerfs de la guerre. Moi j'étais autour de Pokrovsk dans le Donbass, les unités combattantes communiquent grâce à Starlink.
03:57Et ça continuait là ?
03:59Bien sûr que ça continuait.
04:03Et d'ailleurs, ce qui m'a frappé, j'avais tendance à penser, puisque j'ai assisté en direct avec des soldats ukrainiens, à la fameuse humiliation de Zelensky par train.
04:14On va en parler.
04:16Et je me suis dit, bon, Poutine a un succès diplomatique, il va peut-être mettre une pause au combat.
04:24Or c'est l'inverse. Je crois qu'il n'y a pas eu depuis plusieurs semaines autant de drones et d'obus lancés sur Pokrovsk que là, pendant ces derniers jours, lorsque j'y étais.
04:37Justement, la question centrale c'est connaître et comprendre la capacité de résilience des Ukrainiens.
04:44Quand vous entendez Donald Trump qui nous explique que l'Ukraine ne peut pas tenir sans l'aide américaine,
04:48quand les renseignements britanniques s'inquiètent de la capacité à tenir des Ukrainiens,
04:52vous qui avez été sur le terrain, est-ce que vous pensez que les Ukrainiens, sans l'aide américaine, peuvent encore tenir 5, 6 mois, un an, si ce n'est plus ?
05:01Un an sûrement pas.
05:03Quelques mois, je suppose qu'avec les stocks d'armes et de munitions qu'ils ont déjà, et avec ce qu'ils fabriquent, il me semble que quelques mois, ils peuvent tenir.
05:16Durablement non. Ou alors il faudrait un effort de guerre colossal de la part de leurs autres alliés, c'est-à-dire de la part des Européens et des Canadiens.
05:25Est-ce que nous sommes prêts à le fournir ? Je n'en sais rien.
05:27Mais c'est vrai que là... Aujourd'hui c'est bien simple, il y a en gros, je crois, un tiers des armements qui viennent des Etats-Unis,
05:35un tiers qui viennent de l'Europe et un tiers qui sont fabriqués par l'Ukraine.
05:39Et il y a une chose, on en parlait avec Pierre de Villeneuve à l'instant, qui est fournie par les Américains, c'est le système d'intelligence qui contrôle à peu près le ciel.
05:50Ça c'est les Américains.
05:51Bernard-Henri Lévy est notre invité jusqu'à 20h, restez bien avec nous sur Europe 1, il nous parle de l'Ukraine puisqu'il en revient tout juste.
05:58A tout de suite sur Europe 1.
06:0019h21, Pierre de Villeneuve.
06:03Toujours avec Catherine Ney, Jean-Claude Dassier, Sébastien Lignier et Bernard-Henri Lévy qui nous fait l'amabilité de rester jusqu'à 20h pour nous parler de son voyage en Ukraine.
06:13Ce n'est même pas un voyage, c'est un constat, c'est un reportage.
06:16D'ailleurs il est dans Paris Match de cette semaine avec Catherine Ney.
06:20Vous avez une question à Bernard-Henri Lévy sur l'efficacité des drones notamment.
06:24Parce que tout le monde, là on sent quand même l'empressement des Russes à arrêter la guerre aussi, de leur côté.
06:30Parce qu'ils ont eu un problème de recrutement.
06:34Est-ce que les drones ukrainiens ont causé beaucoup de dommages aux Russes ?
06:42Oui, parce que les Ukrainiens dans ce domaine là sont des champions, sont des as.
06:47Et ça je l'ai, c'est vrai qu'il y a un saut qualitatif là depuis quelques mois, la guerre a changé de figure, de visage.
06:53C'est de moins en moins une guerre de tranchées, de plus en plus une guerre de drones.
06:56Mais les Ukrainiens se préparent à ça depuis des années.
06:59Moi ça fait trois ans que je suis de près ce conflit,
07:03et je vois bien comment des jeunes garçons ou des jeunes femmes un peu géniaux dans la high-tech etc.
07:12fabriquent des modèles de drones tout à fait exceptionnels depuis le début de la guerre.
07:17Et là ça entre en application.
07:19Là à Pokrovsk, dans la zone de Pokrovsk où je me trouvais,
07:22il y a une photo en effet d'en match de la salle, une sorte de bunker enterré où se trouve une armée.
07:28C'est impressionnant cette photo.
07:30C'est un poste de contrôle.
07:32Il y a quelque chose d'horrible aussi, c'est-à-dire que cette manière de tuer sur ordonnance,
07:40c'est-à-dire de tuer un homme quel qu'il soit d'un clic de souris sur un ordinateur,
07:46il y a quelque chose d'effrayant, qui donne le vertige.
07:49Ce n'est pas un jeu vidéo.
07:51Et ce qui m'a frappé d'ailleurs, c'est que ces jeunes garçons et ces jeunes filles,
07:55puisque la commandante de cette unité de drones est une jeune femme,
07:58qui s'appelle Oksana, qui est un des personnages de mon reportage,
08:02et dont d'ailleurs je précise pour vos éditeurs et pour vous que j'ai appris avant-hier,
08:07je l'ai vu il y a cinq jours, et avant-hier elle a été à l'endroit même où elle m'a reçu assez grièvement blessée,
08:13Oksana, donc ces jeunes gens, 22 ans, poétesse, dans le civil, avant de s'engager elle était poète,
08:23son fiancé qu'elle devait épouser qui vient d'être tué au combat était poète aussi,
08:29enfin c'est une histoire bouleversante que je raconte dans le journal,
08:33mais ce que je veux vous dire c'est que tous ces jeunes gens derrière leurs écrans,
08:38ils ont des états d'âme, ils savent que cette guerre qu'ils font est horrible,
08:42ils savent que cette guerre, comme toutes les guerres, il y a quelque chose de profondément immoral,
08:48mais en même temps ils se battent parce qu'ils défendent leur peau, ils défendent leur famille,
08:53ils défendent leur terre et ils défendent des valeurs, c'est ça qui est bouleversant,
08:58ce n'est pas des chiens de guerre, je vous dis cette jeune femme,
09:01c'est une écrivaine, c'est une jeune femme douce, enfin c'est une âme douce,
09:09elle est derrière ses écrans, a commandé son équipe de jeunes gens à appuyer sur la souris
09:16pour détruire une position russe à 1, 2, 3, 5 kilomètres.
09:22Alors on disait avant la pause quels moyens si les américains ne subviennent plus,
09:26effectivement les moyens européens, ça a été en question aujourd'hui longuement au sommet européen
09:31auquel a participé Volodymyr Zelensky et se pose la question des fameux avoir gelé russe,
09:38comme pense l'ancien premier ministre Gabriel Attal.
09:40J'étais moi-même chef du gouvernement et j'ai défendu la position qui est défendue aujourd'hui.
09:45Je considère que depuis la donne a changé et qu'un certain nombre des arguments
09:49qui étaient mobilisés à l'époque ont moins de sens aujourd'hui.
09:53Et pour ce qui est de l'argument juridique, on saisit maintenant les intérêts de ces avoirs
09:57et on les utilise pour soutenir les ukrainiens.
09:59Et donc vous avez énormément de juristes qui se sont exprimés dans des tribunes,
10:03dans des médias, qui actent le fait que nous pouvons aussi saisir les avoirs.
10:08On parle de plus de 200 milliards d'euros.
10:10Et avant de faire payer les français, les européens, faisons payer le Kremlin pour le soutien à l'Ukraine.
10:16J'entends les doutes juridiques, les débats de juristes qui existent.
10:19Mais à un moment quand vous avez un incendie, vous ne débattez pas de la législation sur l'extincteur.
10:23Vous l'utilisez. Et en l'occurrence, on en est là.
10:26Quel est votre avis là-dessus Bernard Olivier ? Est-ce qu'il faut l'utiliser ?
10:28Il a totalement raison. Et d'ailleurs, ça faisait partie des choses très choquantes dans l'altercation,
10:34dans la violence faite à Zelensky par Trump.
10:37C'est que Trump parlait de faire payer les ukrainiens, mais pas un instant il n'a parlé de faire payer les russes.
10:43C'est-à-dire les responsables de cette guerre.
10:45Là vous parlez de la fameuse scène dans le bureau Oval vendredi dernier.
10:47Oui, la scène dans le bureau Oval, où il demande à Zelensky des excuses,
10:50où il lui dit qu'il n'a pas de carte et où il le somme de signer l'accord sur les minerais.
10:57Qui est un accord de mafieux, qui est un accord de voyous.
11:02Mais ce qui est très frappant dans la démarche américaine,
11:05et frappant et choquant, c'est cette idée que pour les dégâts occasionnés par cette guerre,
11:12l'Ukraine doit payer, mais pas la Russie.
11:15C'est le monde à l'envers.
11:16Et il appartient, je crois, aux européens.
11:18C'est là où Gabriel Attal a raison de remettre les choses à l'endroit.
11:22En tout cas moralement.
11:24Vous parlez des Russes.
11:25Vladimir Poutine a fait une sortie aujourd'hui après la locution d'Emmanuel Macron hier,
11:30qui demandait à la patrie de se préparer.
11:33Et il a fait une allusion, le président russe, à la campagne de Napoléon en Russie.
11:39Écoutez Vladimir Poutine.
11:41Depuis l'époque de Napoléon, depuis l'invasion de la Russie par Napoléon,
11:45certains sont encore impatients.
11:49Il y a encore des gens qui veulent revenir à l'époque de Napoléon,
11:52oubliant comment cela s'est terminé.
11:56Il y a une seconde, j'avais envie de vous demander si ça vous étonnait.
11:58Mais non, ça ne vous étonne pas, ce genre de sortie ?
12:00C'est surtout tellement absurde.
12:03Pour l'instant, il n'y a pas d'invasion de la Russie.
12:05Il y a une invasion de l'Ukraine.
12:07Il y a une menace d'invasion des pays baltes.
12:12Il y a une menace d'invasion de la Moldavie ou de la Géorgie.
12:15Mais qu'est-ce que vous dites à ceux qui disent,
12:17et encore ce matin et ce soir d'ailleurs,
12:21chez Laurence Ferrari, l'ancien ministre de la Défense,
12:23qui disait qu'il n'y a aucunement cette volonté
12:27d'aller envahir des pays d'Europe, les pays baltes, etc.
12:31Ils devraient écouter plus attentivement ce que dit Poutine,
12:38ce qu'il a dit avant l'invasion de l'Ukraine,
12:40ce que disent ses proches,
12:42ce que dit Alexandre Douguin, par exemple.
12:46Voilà ce que disait quelques semaines avant l'invasion.
12:49En décembre 2018 ou 19 décembre 2021,
12:53il y a eu un ultimatum très clair,
12:55adressé à tous les pays européens,
12:57Union Européenne et Angleterre,
13:00qui était une menace nucléaire,
13:02retrouvée, c'était le 18 ou le 19 décembre,
13:04au cas où l'Ukraine entrerait dans l'OTAN
13:09ou au cas où nous ne cesserions pas d'envisager l'entrée de l'Ukraine dans l'OTAN.
13:13Donc la menace a été proférée.
13:16A l'époque, vous allez retrouver,
13:18c'est peut-être le vice-premier ministre,
13:20c'est le président de la Douma,
13:22deux ultimatums très clairs,
13:24ultimatums nucléaires,
13:26alors c'est à l'étant qu'ils ne les ont pas,
13:28pour envahir un pays européen,
13:30certainement pas.
13:31Mais les armes nucléaires, ils les ont.
13:33Honnêtement, je ne vois pas qui peut le nier.
13:35Donc la menace a été proférée.
13:37Le jeu avec le feu, il est quotidien,
13:40sans même parler des propagandistes déchaînés de la télévision russe.
13:44Donc voilà, je crois que ne pas prendre cette menace au sérieux,
13:48pour un Européen, pour un Français, pour un patriote,
13:51ce serait irresponsable.
13:52Irresponsable.
13:53Oui, et puis quand on utilise 40% de son budget pour se réarmer,
13:57c'est bien pour s'en servir à un moment.
13:59On est en économie de guerre.
14:01Justement, monsieur Bernard-Henri Lévy,
14:03qu'est-ce que doivent faire,
14:05je ne dis pas qu'est-ce que peuvent faire,
14:07mais qu'est-ce que doivent faire les Européens
14:09face à une situation qui a brutalement évolué,
14:11les Américains, à priori, ne prêteront plus,
14:14dans les mois qui viennent, d'armes,
14:16ou d'éléments de satellite pour le renseignement.
14:19Qu'est-ce que doivent faire les Européens ?
14:21On aide ou on n'aide pas ?
14:23Ils doivent faire dans l'urgence ce qu'ils auraient dû faire
14:26depuis 3 ans avec l'Ukraine,
14:28et ce qu'ils auraient dû faire depuis 10 ou 15 ans avec eux-mêmes.
14:31Parce que le retrait américain, ce n'est pas nouveau.
14:33Il est annoncé depuis Barack Obama.
14:36C'est ce grand glissement des Etats-Unis.
14:39D'ailleurs, ils sont en train de partir de la grande base de Gèche en Pologne.
14:42Bien sûr.
14:43Ces images se datent d'aujourd'hui.
14:45Oui, mais c'est là où j'ai pris l'avion hier,
14:48pour Varsovie, puis pour Paris,
14:51donc j'ai vu cela, j'ai vu le début de ça.
14:53Donc, le détournement de l'Europe,
14:58et regarder vers le Pacifique,
15:00ça, ça date de Barack Obama.
15:02Moi, ça fait 10 ans que je le dis, 15 ans.
15:04Personne ne voulait le voir.
15:06On avait l'impression que...
15:07C'est toujours le problème, si vous voulez,
15:09des experts, des diplomates,
15:11c'est qu'ils croient que les choses sont éternelles.
15:13Qu'est-ce qu'on fait alors ?
15:15Je ne dis pas toute l'Europe.
15:17Elle ne sera probablement pas unie ce soir à Bruxelles.
15:19Mais quelques pays européens qui ont une armée,
15:21qui ont des moyens,
15:23qu'est-ce qu'ils doivent faire selon vous ?
15:25Coordonner leurs moyens,
15:27coordonner leurs états-majors.
15:28Il y a aujourd'hui déjà...
15:29Il va y avoir une réunion des états-majors,
15:31des 27.
15:32Mais il y a déjà un état-major de l'Union Européenne
15:34qui siège à Bruxelles, qui existe,
15:36qui a des pouvoirs très formels,
15:37mais qui existe depuis...
15:38J'allais vous dire, c'est plutôt un comité théodule
15:40qu'une réunion des états-majors.
15:41Oui, il y a un comité stratégique,
15:43un état-major,
15:45une force de réaction rapide,
15:46tout ça existe déjà depuis 10 ou 15 ans.
15:48Mais évidemment, c'est rien, c'est squelettique.
15:50Il faut donner cher à tout ça.
15:52Et il faut le faire très vite.
15:54Au risque de faire la guerre à la Russie ?
15:56Bien sûr que non, pas au risque de faire la guerre,
15:58au risque d'être capable de répondre
16:00à une Russie qui nous ferait la guerre.
16:02A une Russie qui ferait la guerre à un de nos alliés.
16:04A une Russie qui mettrait en péril le transfert d'Europe.
16:06Sivis...
16:07Écoutez...
16:08Sivis patsen para bellum.
16:09Si tu veux la paix, prépare la guerre.
16:11Face à un discours belliciste d'un voisin déterminé,
16:15qu'est-ce qu'on fait ?
16:16Ou bien on se couche,
16:17ou bien on se prépare à relever le défi
16:20en espérant que le fait de s'y préparer
16:22fait que la chose n'arrivera pas.
16:24Vous qui savez presque tout,
16:26est-ce que vous croyez à la réalité des liens étroits
16:29entre Trump et Poutine ?
16:32Je ne sais pas.
16:34Je sais que...
16:36Parce que ça, ça a été vraiment documenté.
16:38Y compris dans le rapport Mueller d'ailleurs.
16:40Le fameux rapport qui a abouti
16:42à l'idée qu'on ne pouvait pas impeacher Trump.
16:44Mais il est bourré d'informations.
16:46Ça je vous recommande de le lire.
16:47Dans le rapport Mueller
16:49qui a été fait après des mois et des mois d'investigation,
16:52il y a des éléments extraordinairement troublants
16:54sur les liens entre Trump et
16:57les oligarques russes,
16:59les banques russes,
17:00le pouvoir russe.
17:01On fait à juste titre un procès
17:05à Marine Le Pen depuis des années
17:07parce qu'elle a reçu de l'argent.
17:09Trump, c'est sa puissance X.
17:13Donc bien sûr que ces liens existent.
17:15Est-ce que ces liens étaient scélérats ?
17:18Est-ce qu'ils étaient encadrés par la loi ?
17:20Je n'en sais rien.
17:21Mais les liens sont évidemment là.
17:2219h42 sur Europe 1.
17:25Europe 1 soir.
17:2619h21, Pierre De Villeneuve.
17:28Toujours avec Bernard-Henri Lévy
17:30pour évoquer la situation en Ukraine
17:32puisqu'il en revient.
17:33On parlait de cet échange musclé
17:35entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky.
17:38C'était dans le bureau Oval
17:39et c'était vendredi dernier.
17:42Pendant une guerre,
17:43tout le monde a des problèmes.
17:45Même vous.
17:46Vous avez de bons océans.
17:47Vous ne le sentez pas maintenant,
17:49mais vous le sentirez dans le futur.
17:51Dieu préserve.
17:52Non, non, non.
17:53Dieu préserve.
17:54Vous ne savez pas.
17:55Ne nous dites pas comment on se sentira.
17:57On essaie de résoudre un problème
17:59parce que vous n'êtes pas en mesure de dicter cela.
18:02Vous n'êtes pas en mesure de dicter
18:04comment on se sentira.
18:05On se sentira très bien.
18:07On se sentira très bien et très fort.
18:10Vous n'êtes pas en ce moment
18:12dans une très bonne position.
18:13Vous vous êtes autorisés
18:15à être dans cette mauvaise position.
18:19Vous n'êtes pas dans une bonne position.
18:20Vous n'avez pas les cartes en main maintenant.
18:25Avec nous, vous aurez les cartes,
18:27mais maintenant vous ne les avez pas.
18:28Vous jouez les cartes.
18:29Vous pariez.
18:30Vous pariez sur des millions de vies de personnes.
18:32Vous pariez sur une troisième guerre mondiale.
18:38Une situation inédite dans l'histoire contemporaine
18:40que vous, Bernard-Henri Lévy, vous avez vue
18:42sur les écrans de télévision
18:44dans ce CPCO,
18:46dans ce poste de contrôle
18:48avec les Ukrainiens.
18:49On imagine totalement effaré.
18:51Et je rajoute à ça,
18:52puisque vous allez nous en parler,
18:53vous étiez avec Zelensky le jour d'avant
18:55et il hésitait à y aller.
18:56Oui, j'étais avec lui
18:58la veille de son départ.
19:01Et en effet, il sentait que...
19:05Qu'il y avait un piège ?
19:06Non, pas qu'il y avait un piège,
19:08mais il sentait que...
19:12cette antipathie, probablement de la part de Trump,
19:14qu'il avait déjà rencontrée à Paris
19:16au moment de la réouverture de Notre-Dame
19:18avec le président Macron.
19:20Et je le connais un tout petit peu, Zelensky,
19:22donc je sais ça.
19:24Il sentait bien qu'il n'était pas
19:26en terrain amical.
19:28C'est la raison pour laquelle je le raconte
19:30en effet dans Match.
19:32Il se tâte, il ne sait pas s'il va prendre l'avion ou pas.
19:34Est-ce que je dirais...
19:35Qu'est-ce qu'il décide d'y aller ?
19:37Ce qu'il décide d'y aller, c'est qu'il est...
19:39c'est qu'il veut la paix, tout simplement.
19:41C'est que le peuple ukrainien n'en peut plus.
19:44Ses dizaines de milliers de morts,
19:46ses amputés, ses mutilés,
19:48ses suppliciés, ses villes dans le noir,
19:50il n'en peut plus.
19:51Donc c'est vrai qu'il est prêt à tout tenter.
19:53Est-ce qu'il est signé d'une certaine manière ?
19:54Non, il n'est pas signé, il est combattant.
19:56Enfin, s'il dit je vais signer sur les minerais,
19:58puis finalement il dit je vais coopérer...
20:00Une des phrases les plus ignobles de ce qu'on vient d'entendre,
20:02c'était vous n'avez pas les cartes,
20:04de la part de Trump, vous n'avez pas les cartes en main.
20:06Et Zelensky a eu une réponse magnifique,
20:09il dit moi je ne joue pas aux cartes.
20:11Vous jouez peut-être aux cartes, vous,
20:13président Trump, mais moi je ne joue pas aux cartes.
20:15Dans le flux des mots, on ne l'entend pas bien.
20:17On ne l'entend pas bien, mais c'est ça qu'il dit.
20:19C'est comme quand Biden lui avait dit je vous propose un taxi,
20:22et qu'il dit j'ai besoin de fusils.
20:24Il a cette capacité...
20:26Mais quand vous êtes avec les Ukrainiens,
20:28et ils voient ça, qu'est-ce qu'il se passe ?
20:30Ils sont effondrés. Ils sont stupéfaits.
20:32Et il y a qui alors ? Dans l'état-major ?
20:34Pas l'état-major, non, non, c'est des hommes simples.
20:36Enfin, c'est pas des gradés,
20:38c'est des soldats normaux
20:42qui étaient au front deux heures plus tôt,
20:44qui seront quelques heures plus tard.
20:46Et là ils vous disent quoi ?
20:48Mais d'abord ils disent rien.
20:49Il y a un silence de mort.
20:51Il y a des larmes qui montent aux yeux.
20:53Ils se sentent abandonnés comme jamais.
20:56Ils sont là, dans cet endroit, sous les bombes,
20:58sous les missiles, sous les drones,
21:00dans un bouquet.
21:02Ils ont leur principal allié qui reçoit leur président,
21:04dont ils sont fiers, leur président.
21:06Et ils voient cette séquence,
21:08ils n'y croient pas.
21:10Ils sont effondrés.
21:12Et puis ils sont fiers aussi
21:14de la réaction de leur président.
21:17Le fait que le président,
21:19le fait que ce petit grand homme,
21:21ou ce grand homme de petite taille,
21:24tienne le choc face à ces deux mollos politiques,
21:28face à ces deux hommes
21:30qui se conduisent comme des mafieux.
21:34Je pense que dans sa carrière de promoteur immobilier dans le Queens,
21:37Trump devait parler comme ça.
21:39Mais là il parle à un chef d'état
21:41d'un pays en guerre,
21:43qui est un martyr,
21:45qui défend nos valeurs,
21:47qui croit peut-être davantage
21:49que beaucoup d'Américains,
21:51au credo américain,
21:53les grands américains,
21:55et les hommes avec qui je suis à cet instant-là,
21:57au début de ce reportage,
21:59ils y croient.
22:01C'est des Américains, des Européens, des Occidentaux,
22:03ils défendent l'Occident.
22:05Ils ne sont pas dans les délires
22:07poutiniens, machins, slaves, etc.
22:09Ils défendent les valeurs occidentales.
22:11C'est ça l'avis de Sébastien Jullien.
22:13Face au promoteur immobilier Donald Trump,
22:15face aux provocations de Vladimir Poutine,
22:17est-ce que vous pensez
22:19qu'Emmanuel Macron hier soir a eu raison
22:21de remettre une pièce dans la machine
22:23et de céder un petit peu à l'escalade
22:25verbale en provoquant
22:27Vladimir Poutine ? Est-ce qu'il faut montrer
22:29les muscles, finalement, face à Donald Trump
22:31et Vladimir Poutine ? Ou est-ce qu'il faut
22:33accepter que l'Europe serve
22:35de partenaire de négociation
22:37et qu'ils disent on va réussir à mettre tout le monde autour de la table
22:39pour faire qu'en sorte que les négociations se fassent
22:41aussi avec nous et non pas en Arabie Saoudite
22:43à 5000 kilomètres,
22:45ce qui est, excusez-moi,
22:47un petit peu dramatique pour l'Europe.
22:49Oui, ben voilà, mais moi, comme Européen et comme Français,
22:51comme Européen et comme Français,
22:53j'ai pas envie
22:55que mon pays serve
22:57de, je sais pas ce que vous voulez,
22:59de point de passage ou de paillasson
23:01à des dictateurs
23:03dopés à la testostérone.
23:05J'ai pas envie de ça.
23:07Il faut les mettre autour de la table
23:09ensemble.
23:11Il faut les mettre autour de la table ensemble
23:13et pour l'instant, pour reprendre notre expression,
23:15il faut montrer les muscles. Enfin, quand vous êtes provoqués,
23:17imaginez tout de même
23:19ce que l'on entend depuis 3 ans
23:21de la part de Poutine.
23:23Regardez ce qu'on entend
23:25tous les soirs à la télévision russe sur la France,
23:27sur votre pays, sur notre pays,
23:29la manière dont nous sommes quotidiennement
23:31offensés par la propagande russe.
23:33Il y a un moment quand même,
23:35c'est pas d'aujourd'hui, c'est pas d'hier soir,
23:37il y a un moment où, en effet,
23:39il faut montrer ses muscles
23:41du moins qu'on est
23:43encore quelqu'un, qu'on a une âme,
23:45qu'on a...
23:47La question la plus difficile,
23:49comment on fait pour bâtir un accord
23:51qui pourrait être un accord de paix,
23:53parlons simplement peut-être d'une trêve
23:55de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois,
23:57mais sur quoi vous le faites ?
23:59Comment vous le fabriquez, votre accord de paix ?
24:01Vous, Bernard-Henri Lévy, qui connaissez
24:03assez bien les problèmes
24:05et les questions qui se posent là-bas.
24:07Comment on fait ? Qu'est-ce qu'abandonne la Russie ?
24:09Qu'est-ce qu'on fait d'agression ?
24:11Non mais d'abord,
24:13comment on fait un accord de paix ?
24:15On commence par nommer les choses par leur nom,
24:17c'est-à-dire l'agresseur est l'agresseur et l'agressé est l'agressé,
24:19première chose. On ne commence pas par dire
24:21à Zenaski que vous êtes responsable de la guerre,
24:23ça c'est la première question. Deuxième question,
24:25si on fait un compromis,
24:27on demande des concessions
24:29à tout le monde.
24:31Pour l'instant,
24:33on en demande
24:35qu'aux Ukrainiens.
24:37On en demande qu'aux Ukrainiens.
24:39Dans le plan de paix
24:41proposé par les Américains,
24:43je n'ai pas entendu une demande
24:45de concession adressée aux Russes.
24:47Qu'est-ce qu'elle pourrait être cette concession ? De rendre la Crimée ?
24:49Oui,
24:51se retirer sur les frontières.
24:53S'ils se considèrent
24:55comme vainqueurs de la guerre, je ne sais pas si
24:57selon vous ils le sont ou non d'ailleurs.
24:59Cette guerre, je l'ai couverte
25:01depuis trois ans. J'ai réalisé trois films,
25:03j'ai réalisé sept ou huit reportages
25:05pour Paris Match.
25:07Je crois que je connais un peu,
25:09autant qu'il est possible, ce front.
25:11Les Ukrainiens n'ont pas perdu la guerre.
25:13Pour reprendre le vocabulaire
25:15de Trump,
25:17les Ukrainiens sont des winners,
25:19ce n'est pas des losers.
25:21J'étais à Barmouth,
25:23aller-retour pendant des mois,
25:25la fameuse ville de Barmouth où il y a eu des combats terribles.
25:27Les Russes
25:29n'avançaient pas.
25:31Là aujourd'hui...
25:33Est-ce qu'ils avancent encore les Russes aujourd'hui ?
25:35À Pokrovsk, ils reculent.
25:37À Torezk où j'étais également, ils reculent
25:39un peu.
25:41Le front ne bouge pas de kilomètre.
25:43En tout cas, les Russes ne sont pas en train de gagner cette guerre.
25:45Et cette guerre,
25:47on ne sait pas encore si elle va s'arrêter.
25:49On a l'impression que le monde entier a décidé
25:51qu'elle s'arrêterait là maintenant, dans les semaines qui viennent.
25:53Mais en réalité, on ne sait pas du tout.
25:55Merci Bernard-Henri Lévy.
25:57D'abord, le monde entier,
25:59je ne sais pas. Pas les Ukrainiens,
26:01pas comme ça, pas tout de suite, pas n'importe comment.
26:03Et pas les
26:05femmes et les hommes libres du monde.
26:07Ils n'ont pas envie que cette guerre
26:09s'arrête aux conditions imposées
26:11par Poutine
26:13et par les dictatures poutiniennes.
26:15Merci de votre présence Bernard-Henri Lévy
26:17au lendemain de votre retour
26:19de cette région
26:21du monde, toujours en guerre.
26:23On le pleure tous,
26:25malheureusement.

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