Les chroniqueurs du Cercle débattent autour d'un film sortant en salles ou en diffusion sur CANAL+
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00:00Un Parfait Inconnu de James Mangold raconte l'arrivée d'un jeune homme de 19 ans dans le West Village de New York au début des années 1960.
00:10Il débarque de son Minnesota natal, il s'appelle Robert Zimmerman, il va devenir une légende sous le nom de Bob Dylan.
00:18Et il offre à Timothée Chalamet un rôle de rêve. Frédéric, vous étiez jaloux.
00:24En fait, je vois que vous avez envie que je vous parle de Timothée Chalamet, mais je vais vous parler d'abord du film.
00:28Vous avez des posters dans votre chambre.
00:30J'y allais un petit peu à reculons. Je vous avoue, je ne comprenais pas le freluquet qui allait s'attaquer à Dylan.
00:37D'une certaine façon, ça me paraissait compliqué. Et je me suis rendu compte que c'était un drôle de film.
00:40C'est un drôle de film parce que c'est un film qui raconte sur quatre ans, on va dire, la légende dylanienne.
00:46Purement l'orthodoxie, je dirais, dylanienne, c'est-à-dire ce jeune inconnu qui arrive de sa campagne, qui est fan de folk,
00:52qui se trouve, on va dire, auprès de ses idoles, des pères de substitution, qui vont l'introduire dans le milieu du folk et il va devenir l'élu.
01:00C'est-à-dire, il va être celui qui va répandre la folk musique sur la terre entière, comme pop star,
01:04jusqu'au moment où il va rompre, évidemment, avec cette orthodoxie de la folk, de cet homme à la guitare sur une scène,
01:11pour devenir, pour à ce moment-là, oser un syncrétisme avec le rock, la modernité, l'électricité.
01:17Quatre ans qui vont être racontés.
01:18Et donc, d'un côté, vous avez un film qui fait la géographie de façon extrêmement respectueuse,
01:23d'un homme qui rompt avec l'orthodoxie et qui le fait dans une forme qui est la forme la plus classique du cinéma hollywoodien.
01:29Donc ça fait un film un petit peu étonnant et étrange.
01:31Et dans ce jeu-là du classicisme, Timothée Chalamet est extrêmement fort, extrêmement beau, je le trouve.
01:37Pourquoi ? Parce qu'il rend spectaculaire, je dirais, son underplaying.
01:40C'est-à-dire que tout fait sens.
01:42Or, c'est Dylan ! Et Dylan, c'est quelqu'un qu'on décrypte.
01:44C'est quelqu'un qui est toujours un mystère, on cherche tout le temps à essayer de le comprendre.
01:47Et vous allez regarder dans cet extrait.
01:49Alors, vous voyez, là, en fait, on ne le regarde pas.
01:53Mais évidemment, la seule personne qu'on regarde, c'est Dylan.
01:56C'est Timothée Chalamet avec ses lunettes noires, son attitude,
02:00sa façon d'être à la fois présent et un peu absent au milieu de cette cour alors qu'on est en train de le solliciter.
02:09Et même quand il dit quelque chose, on ne sait pas exactement quelle est l'ironie de ce qu'il est en train de porter.
02:15Alors qu'il chante « When the ship comes in »,
02:19son mentor Pete Seeger, joué par Edward Norton, le rejoint au banjo.
02:26Et regardez bien encore Chalamet.
02:28Vous allez voir, on est encore obsédé par comprendre exactement ce qu'il est en train de faire.
02:33D'abord, évidemment, on essaie de comprendre les paroles, de savoir ce qui se trame derrière ce texte.
02:45Et ce drôle de sourire, la tête baissée.
02:48Qu'est-ce qu'il pense exactement de cet homme qui l'accompagne et qui lui a permis, évidemment, de fleurir ?
02:54Et il faut dire que c'est Timothée Chalamet qui chante, quand même, et tout le monde n'est pas capable...
02:59Je crois qu'on va vous en parler.
03:01...de le faire.
03:02Alors, ce jeune garçon qui débarque avec sa guitare sur le dos, comme ça, à New York,
03:07il fait plein de rencontres artistiques et aussi amoureuse,
03:10et notamment avec John Bez qui est joué par Monica Barbaro qu'on avait vu dans Top Gun Maverick.
03:16Est-ce que ça vous a plu, cette rencontre ?
03:18Ça m'a beaucoup plu et la bonne nouvelle, en fait, c'est qu'on va les entendre vraiment chanter ensemble
03:23parce que dans ce film, il y a énormément de passages musicaux, ça paraît évident quand je le dis,
03:27mais contrairement à d'autres biopics qui ont complètement délaissé la partie musicale
03:31pour se concentrer vraiment sur les frasques de l'artiste ou alors sur ses problèmes avec la drogue, l'alcool, etc.
03:36Donc ici, l'histoire, elle est vraiment portée par la BO et l'histoire est racontée aussi par les morceaux.
03:41On le voit quand justement, John Bez et Bob Dylan sont en train de chanter
03:45« He ain't me, baby », qui ont dit long, justement, sur cette histoire.
03:49Donc tout ça est très plaisant à regarder parce que, comme tu disais Frédéric,
03:52le niveau de chant est très bon et franchement, il faut le dire,
03:55parce que ce n'est pas toujours le cas dans Walk the Line, par exemple.
03:58Le niveau de chant de Joaquin Phoenix, je trouve, était un petit peu en tout.
04:02Bon, on ne s'improvise pas bariton comme ça.
04:04Et donc, on voit ce niveau de chant dans la scène du coup de fond entre les deux.
04:08Et aussi, ça donne lieu, donc cette histoire d'amour entre John Bez et Bob Dylan,
04:11à une autre scène dans un appartement new-yorkais.
04:13Ils ont passé la nuit ensemble.
04:15Il vient de lui envoyer une vacherie à la figure en lui disant que ses textes sont lièvres.
04:20Et là, dans cet appartement, John Bez, heureusement, elle ne lui en veut pas.
04:26Elle lui demande de chanter et là, Timothée Chalamet, en caleçon, sur un lit défait,
04:31va s'avancer dans un ray de lumière.
04:33D'ailleurs, je trouve que le travail sur la lumière est très réussi dans ce film.
04:36Et il va interpréter ce qui va devenir son tube, Lowing in the Wind.
04:40Et là, on va voir que les cinq années de préparation vocale ont vraiment porté leurs fruits.
04:45Et là, on reconnaît tout.
05:02On reconnaît la voix un peu nasillarde de Bob Dylan, le côté un petit peu éraillé dans sa voix.
05:09Et pendant qu'il joue, en contre-chant, il va y avoir un zoom sur le visage de John Bez qui le regarde.
05:16Et ce qui est un procédé qui est beaucoup utilisé dans le film,
05:18où on découvre en fait ce Bob Dylan en train de jouer au travers du regard de ceux qui le regardent.
05:23Et ils sont émerveillés et on les comprend parce que c'est de très très bons niveaux.
05:26Donc je ne sais pas si ce film va plaire aux puristes, mais en tout cas il va plaire aux mélomanes, ça c'est sûr.
05:30Et aux midinettes, parce que personnellement, moi j'aurais pu vivre dans le film.
05:33Alors est-ce que ça a réveillé votre côté midinette, cher Théo ?
05:35Midinette, non je ne sais pas, je pense que j'attendais quand même un petit peu le film.
05:39Les biopics, c'est un peu particulier.
05:41J'ai l'impression que c'est une espèce de truc toujours très déceptif, mais éternellement reconduit.
05:45Une espèce de promesse comme ça qui revient.
05:47On est toujours un peu déçus par le dernier qu'on a vu, mais on croit encore au suivant, bizarrement.
05:51Donc on a quand même envie de voir ça, particulièrement parce que...
05:54La curiosité un peu balcède, avec de la mauvaise foi.
05:56Oui c'est ça, on a envie de voir un peu l'intimité de nos idoles, tout simplement.
05:59Et Dylan, forcément, a un statut très particulier là-dedans.
06:02Parce que Dylan, c'est une figure qui résiste à la biographie, plus que tout autre.
06:05Donc il y a eu des tentatives très indirectes, notamment par Todd Haynes dans « I'm not there ».
06:09On est obligé toujours de le prendre comme ça, pour le fantôme qu'il est.
06:13Et là, faire un biopic vraiment frontal, où on va être complètement avec lui, où il va être joué par une star, etc.
06:18C'est presque un crime de lèse-majesté, vu la part comme ça, très spectrale de Dylan.
06:23Et ce qui est intéressant dans le film, c'est qu'en fait Dylan n'est toujours pas là.
06:26En fait, j'ai l'impression qu'il y a Mangold, qui est un réalisateur assez affûté, qui a déjà fait du biopic, etc.
06:33Il a eu l'intelligence de se dire « Bon, je fais un biopic, mais en fait c'est encore un film sur le symbole, sur le mythe d'Dylan.
06:38C'est un dieu qui descend sur Terre. »
06:40Ça donne des choses très belles, comme la scène d'introduction, notamment.
06:43Est-ce que c'était votre dieu, Philippe, aussi ? Est-ce que vous avez vu le dieu Dylan ?
06:47C'était pas forcément mon dieu, mais ça peut le devenir avec le film, parce que je suis assez d'accord avec...
06:51Vous parlez de « I'm not there », de Todd Haynes.
06:54« I'm not there », de Todd Haynes, c'est un film évidemment passionnant, mais c'est plus passionnant sur la théorie que sur le concret.
07:01C'est-à-dire que « I'm not there » s'adresse vraiment aux spécialistes de Dylan.
07:05C'est-à-dire que chaque interprète...
07:07Je rappelle que l'idée était de le faire jouer par des personnes, des acteurs différents, dont Kate Blanchett.
07:12Donc ça allait très loin dans l'interprétation, et chaque interprète représentait une facette de Dylan.
07:19Et si on ne connaissait pas très bien le répertoire et la vie de Dylan, on était paumés, il faut le dire.
07:24Ce film aussi est accueillant.
07:26C'est moelleux, même, on peut le dire.
07:28Vous pouvez y aller si vous ne connaissez pas Dylan.
07:30Eh bien, on va vous l'expliquer.
07:32Ce que vous raconte Fred, là, sur cette histoire de passer à l'électrique, cette problématique est remarquablement marquée.
07:39Et on parlait du chef-op, Fédon Papamikaël, ça fait sept films qu'il fait avec Mangold.
07:46Donc il y a une très grande complicité, et c'est très très important.
07:49Parce que le jeu de regard construit le film.
07:51C'est un film qui prend le temps.
07:53C'est un film qui nous raconte des relations humaines.
07:55Il nous raconte, même si, je veux dire, vous mettez dans une chambre John Bez et Bob Dylan, on est...
08:00Le film a été adoubé par Bob Dylan.
08:02Oui, mais je veux dire, là, c'est vraiment le vecteur des lieux.
08:05Il a l'habitude d'arrober signe, mais là, c'est tout bon.
08:07Mais pourtant, je veux dire, ça existe, et sa relation avec cette autre fille, qui est jouée par Elle Fanning,
08:12c'est très très passionnant aussi, la suicide.
08:15Ça, ça travaille ça.
08:17Et les chansons, elles ne sont pas dans l'ordre.
08:19Elles ne sont pas dans l'ordre.
08:20Ils les utilisent, comme dans les comédies musicales, pour leur contenu.
08:23Les chansons, il faut avancer le récit.
08:24Ça, c'est très différent de la plupart des biopics.
08:27Marie, il y avait Alex qui parlait de Walk the Line.
08:29Il avait un peu ouvert la voie des biopics musicaux il y a 20 ans avec ce film.
08:32Et je crois que vous l'aviez adoré.
08:33Vous avez retrouvé le plaisir que vous aviez avec Walk the Line.
08:37Non, moi, j'aimais beaucoup Walk the Line.
08:40Je pense parce que cette histoire entre Johnny Cash et June Carter,
08:44qui était vraiment le cœur battant du film,
08:46et qui tenait, et puis le personnage était décrit dans ses démons, etc.
08:51J'avais un peu plus à m'accrocher, je pense.
08:54Et en même temps, je l'ai vu il y a un moment déjà, celui-ci,
08:59et il travaille pas mal.
09:00C'est-à-dire, sur le moment, je l'ai trouvé un peu longuet, je vais être franche.
09:03Et moi, tout l'espèce de suspense, on va vous raconter un changement d'époque,
09:07une fracture dans l'histoire de la musique,
09:10ce moment où il va brancher sa guitare au festival de Newport.
09:13Et moi, j'avoue que sur le moment, je suis pas une Dylan orthodoxe,
09:17je suis orthodoxe de rien.
09:18Et donc, j'avoue que je m'en fiche un peu.
09:20Mais me reviennent des belles scènes,
09:22et notamment la suite de la scène que tu as trouvée.
09:24Contrairement à toi, ça ne m'intéresse pas du tout de savoir
09:26s'il chante pour de vrai, s'il chante bien, s'il a pris 50 cours de guitare.
09:29Je m'en fiche.
09:30Moi, je veux voir des scènes de cinéma.
09:32Et la scène qui suit, où tout à coup, les deux,
09:35leur visage tout proche, en train de chanter ensemble,
09:38et là, enfin, on voit un peu de grain de peau,
09:40on voit un peu d'humanité, on voit un peu de défaut.
09:42Là, je me suis dit, voilà.
09:43Et donc, j'ai des très belles scènes dans le film
09:45qui, sur la longueur, se laissent regarder gentiment.
09:49Mais ce n'est pas une révélation.
09:51Mais il a le courage de ne pas faire de flashback,
09:54de ne pas raconter son enfance.
09:55Vous n'auriez pas aimé que ça continue après l'électrique ?
09:58Arrêtez !
10:00Moi, ce n'est pas la préparation qui m'intéresse.
10:02En fait, c'est juste que j'ai eu du mal à entrer dans Walk the Line
10:04parce que j'aime tellement Johnny Cash,
10:06et je ne l'entendais pas,
10:07parce que j'attendais justement d'entendre ses graves,
10:09et c'est ça qui m'aurait peut-être transportée.
10:10Mais c'est vrai que la préparation en soi ne m'intéresse pas.
10:12Et non, moi, j'étais très contente que ça s'arrête
10:14justement au moment où il passe à l'électrique,
10:16parce que, justement, moi, c'est le fait de centrer le film
10:19sur une vraie problématique musicale
10:21qui était justement ce festival.
10:23J'ai trouvé ça très intelligent.
10:24Et puis, j'ai aimé qu'on soit vraiment plongé
10:26dans les années 60, de foisonnement musical,
10:28les années des Beatles, des Kings.
10:29Et puis ensuite, ce sont les transformations.
10:30Et les transformations, d'une certaine façon,
10:32le film de Todd Haynes va nous les raconter.
10:33Donc ce film-là...
10:34On va poser notre guitare, le concert est terminé.
10:36Ça met beaucoup de films pour raconter
10:37qu'on ne comprend rien à Bob Dylan,
10:38et ça, c'est chouette.
10:39Oui, mais on passe un très bon moment avec lui, merde !
10:41On pose la guitare, le concert est fini,
10:43on prend notre raquette.