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Deux mois et demi après la disparition brutale de sa muse Michel Blanc, c’est au tour de Bertrand Blier de s’éteindre ce mardi 21 janvier, à l’âge de 85 ans. Avec son tempo lyrique et sa profondeur existentielle sans pareil, il avait réussi à faire de ses dialogues une véritable partition, où les mots claquaient, flirtaient et parfois dansaient dans un chaos savamment orchestré. Bertrand Blier n’était pas seulement un réalisateur ; alchimiste des âmes, il mettait à nu les travers humains tout en les sublimant. L’époque a radicalement changé, mais « Les Valseuses (1974) », « Calmos » (1976) ou « Préparez vos mouchoirs » (1978) ont marqué un tournant dans le cinéma hexagonal. Comme le prouve notre montage de cinq de ses scènes les plus cultes.

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Transcription
00:00Ta gueule !
00:03Ta gueule...
00:08J'en ai plein le cul de ressembler à une serpillère.
00:11Moi, je te trouve très belle.
00:13Ta gueule ! Tu me fais chier à tout le temps de me trouver belle.
00:16On dirait que plus je pue, plus tu m'aimes.
00:17Plus c'est la merde, plus tu deviens romantique.
00:21Je parie qu'en ce moment, t'as qu'une idée en tête, c'est m'inviter à danser.
00:25C'est vrai ? J'aimerais bien.
00:28Pauvre malade.
00:31Mais qu'est-ce que t'as dans les yeux ?
00:33On est en train de se noyer et tu t'en aperçois même pas.
00:37On est en train de crever, la bouche ouverte.
00:41Et lui, à quoi il pense, danser ?
00:43Imbécile.
00:45Et tu crois quand même pas que je vais danser avec un mec comme toi ?
00:47T'es nul, inexistant.
00:48Tout ce que tu sais faire, c'est me dévorer du regard avec tes yeux de coquère.
00:52Tiens, vous signalez qu'il est 3h du matin et que je m'enlève à 5h pour aller au hall.
00:54Alors vous allez arrêter votre zinzin, sinon je vais chercher les flics.
00:57Toi, tu vas taire ta gueule et écouter Mozart avec nous.
00:59Concerto pour clarinette.
01:01Oui, mais moi, j'en ai rien à branler de la musique.
01:02Moi, ce que j'aime, c'est le silence.
01:03Gerbard de Bruneveur, meilleur clarinettiste du monde.
01:06Alors assieds-toi, ferme ta gueule et ouvre tes oreilles.
01:09Non, enfin, puisque je vous dis que ce que je veux, moi, c'est dormir,
01:12c'est tout simplement dormir, je suis fatigué.
01:15Je suis un petit commerçant fatigué.
01:17Qu'est-ce que t'as ?
01:19Ça va pas ?
01:21J'ai pas faim.
01:24Mais moi non plus, j'ai pas faim.
01:26Envoie-là une excuse.
01:29Attention, Albert.
01:32Si tu commences à t'écouter, t'es bon pour retourner chez Geneviève
01:36et vecter son cachou.
01:38C'est barbouillé.
01:40Eh ben, débarbouille-toi, la tubor que c'est fait pour ça.
01:43Y a rien de tel pour se remettre la bouche à neuf.
01:46Et ça, je vous le dis à chaque fois, c'est votre consommation d'alcool.
01:48Vous picolez toujours autant ?
01:50J'ai gardé une belle cadence.
01:52C'est-à-dire ?
01:53Après, le matin, au réveil, je bois ma bouteille de blanc.
01:59Vers dix heures, histoire de marquer le coup,
02:02d'être solidaire de tous ces mecs qui travaillent sur les chantiers,
02:06qui vont faire la pause.
02:09J'en bois une deuxième.
02:12J'en bois une troisième à l'apéro de midi, toujours du blanc.
02:16A déjeuner, s'il y a de la viande, je peux passer au rouge.
02:18Sinon, je reste au blanc. Ou les deux.
02:20Bon, après, faut une sieste.
02:22On en est déjà à quatre bouteilles.
02:24D'où l'utilité de la sieste.

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