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Mercredi 15 janvier 2025, la commission des affaires européennes du Sénat organisait une table ronde sur le thème de l’Union européenne face à la nouvelle présidence de Donald Trump. Des intervenants spécialistes de la question ainsi que des ambassadeurs en France des Etats membres de l’Union européenne ont abordé les enjeux de ce mandat pour l’UE, et les différentes postures diplomatiques s’offrant à elle. Les intervenants ont rappelé les difficultés actuelles auxquelles font face les pays européens, qu’elles soient géopolitiques (guerre en Ukraine), diplomatiques (menace d’abandon des Etats-Unis), ou politiques (vulnérabilités internes et montée de l’extrême droite). Ils ont insisté sur la nécessité pour les pays de l’UE de faire front uni face à la diplomatie imprévisible et agressive de Donald Trump. Année de Production :

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00:00:00Bonjour à tous, très heureux de vous retrouver sur Public Sénat pour un nouveau numéro
00:00:13de 100% Sénat, l'émission qui vous fait vivre les travaux de la Haute Assemblée.
00:00:17Et on va parler aujourd'hui de Donald Trump, puisque le président élu en novembre est
00:00:22investi aujourd'hui pour un second mandat.
00:00:25Pour en parler, les sénateurs ont organisé la semaine dernière une table ronde sur les
00:00:28défis de l'Union Européenne face à la présidence Trump, avec de nombreuses inquiétudes,
00:00:33notamment sur la hausse des droits de douane et la guerre en Ukraine.
00:00:36Je vous laisse écouter cette table ronde.
00:00:37Monsieur l'ambassadeur polonais, étant déjà installé, nous pouvons commencer, puisque
00:00:43vous êtes en charge de la présidence.
00:00:45Merci.
00:00:46Et je vous donnerai d'ailleurs, si vous le souhaitez, la parole en premier, en tout cas
00:00:53après le propos des intervenants, monsieur l'ambassadeur.
00:00:56Bien.
00:00:57Mesdames et messieurs les ambassadeurs, mesdames et messieurs les ministres plénipotentiaires,
00:01:03mesdames et messieurs les présidents, monsieur le directeur général, madame la directrice,
00:01:08mes chers collègues, mesdames et messieurs.
00:01:10Au nom de la Commission des affaires européennes du Sénat, je suis très heureux de vous accueillir
00:01:14au Palais du Luxembourg.
00:01:15Merci d'avoir accepté notre invitation à venir échanger aujourd'hui sur les enjeux
00:01:20du résultat de la dernière élection présidentielle américaine pour l'Union Européenne et pour
00:01:25la relation transatlantique.
00:01:26C'est maintenant ici au Sénat un rendez-vous presque habituel, puisque c'est la troisième
00:01:30fois que nous avons ce rendez-vous avec tous les ambassadeurs de l'Union Européenne à
00:01:35l'occasion des voeux.
00:01:36Dans cinq jours, Donald Trump sera une nouvelle fois investi comme président des États-Unis.
00:01:41Aucun chef d'État ou de gouvernement étranger n'est traditionnellement convié à la cérémonie
00:01:46d'investiture des présidents américains.
00:01:47Mais Donald Trump en a décidé autrement en invitant notamment deux chefs d'État membres
00:01:53de l'Union Européenne, la présidente du Conseil des ministres italiens, Giorgia Meloni,
00:01:57et le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, mais pas les présidents des institutions
00:02:02de l'Union Européenne.
00:02:03Ce premier geste du nouveau président Trump en dit long sur le défi que sa nouvelle présidence
00:02:09représente pour l'Union Européenne.
00:02:11C'est en effet une mise à l'épreuve de l'unité européenne qui s'annonce, mettant
00:02:16donc en jeu la survie même de l'Union.
00:02:19Pourtant, les objectifs du nouveau président des États-Unis en ce qui concerne la relation
00:02:23transatlantique, dont nous savons qu'elle n'est que l'arrière-plan de la compétition
00:02:27sino-américaine, plus stratégique à ses yeux, ses objectifs transatlantiques ne semblent
00:02:33finalement pas si éloignés de ceux de son prédécesseur.
00:02:36De fait, deux de ses priorités paraissent bénéficier d'un soutien bipartisan aux États-Unis.
00:02:42Premièrement, réduire le déficit commercial américain à tout prix.
00:02:46N'oublions pas que c'est à l'administration Biden qu'il faut imputer l'Inflation Reduction
00:02:53Deuxièmement, amener les alliés européens à assumer une plus grande part du fardeau
00:02:58de la défense otanienne.
00:02:59La vraie différence avec l'ère Biden se trouverait-elle plutôt dans le changement
00:03:04de méthode ? Autant l'administration Biden discutait avec Bruxelles plus qu'avec les
00:03:09États membres, notamment du fait du flottement à Berlin et Paris, autant la nouvelle présidence
00:03:14Trump entend jouer sur les divisions internes de l'UE pour obtenir des concessions.
00:03:19Car Donald Trump, fidèle à son mode de fonctionnement transactionnel, n'a pas attendu d'être investi
00:03:25président pour établir déjà un rapport de force en vue d'atteindre ses objectifs.
00:03:30Il déclare vouloir mettre fin à la guerre en Ukraine sans délai ni consultation européenne.
00:03:36Il menace le monde entier d'une guerre commerciale implacable.
00:03:40Il demande aux membres de l'OTAN d'investir 5% de leur PIB dans la défense.
00:03:45Il envisage l'annexion du Groenland, territoire d'outre-mer, associé à l'UE, mettant le doigt
00:03:51sur le non-dit de la difficile articulation entre la clause d'assistance mutuelle inscrite
00:03:56à l'article 42.7 du traité de l'UE et l'Alliance atlantique.
00:04:01Il sème ainsi la confusion du côté de l'UE tout en ne flattant que certains leaders,
00:04:06y compris via ses puissants bras droits du numérique Elon Musk et Mark Zuckerberg, qui
00:04:12détiennent les réseaux sociaux les plus influents.
00:04:14Il ne craint donc pas de mettre à mal le multilatéralisme et les institutions démocratiques
00:04:19et de faire indirectement le jeu de Vladimir Poutine, avec lequel il partage d'ailleurs plusieurs amis.
00:04:25En retour, l'UE n'a pas d'autre choix que d'établir aussi un rapport de force,
00:04:31même si cela relève du paradoxe entre alliés présumés solidaires.
00:04:35Entrer dans un tel rapport de force, cela implique pour l'Union de décider d'être forte
00:04:40au service de ses valeurs et principes, et donc de s'entendre sur une stratégie partagée,
00:04:45malgré les divergences de vues entre ses membres, que ce soit sur l'attitude à tenir envers la Chine,
00:04:51sur la cohérence de notre politique commerciale ou sur la part à réserver à l'équipement européen
00:04:57dans leurs acquisitions de défense.
00:04:59Cela implique surtout pour l'Union d'avoir une force collective à opposer,
00:05:04ce qui passe par le sursaut économique auquel appellent les rapports Draghi et l'État,
00:05:09pour renforcer notre marché intérieur, qui est riche de 450 millions de consommateurs,
00:05:15mais doit aussi être approfondi et s'appuyer sur une union de l'épargne et de l'investissement
00:05:20pour devenir un terreau réellement propice à la réindustrialisation et à l'innovation.
00:05:26L'Union européenne est-elle déterminée et capable d'entrer dans ce scénario
00:05:30en vue de conclure un deal avec les États-Unis qui soit valable et global,
00:05:35couvrant défense, commerce, énergie, climat ou encore services financiers,
00:05:40pour être plus fort ensemble selon les mots récents et concordants
00:05:44du secrétaire d'État américain Antony Blinken et des présidents de la Commission et de Conseil européen ?
00:05:50Ou l'Union se résignera-t-elle à se soumettre aux États-Unis,
00:05:54quitte à se déliter au gré des faveurs bilatérales que certains États membres
00:05:59arracheront à Trump en fonction d'affinités politiques ?
00:06:03Mais les États-Unis seraient-ils vraiment gagnants à long terme dans un tel scénario ?
00:06:07Nous avons invité quatre experts à nous faire part de leur analyse du sujet
00:06:11et je les remercie encore pour leur présence.
00:06:14Rosa Balfour, directrice de Carnegie Europe,
00:06:18Nicole Iesotto, vice-présidente de l'Institut Jacques Delors,
00:06:22Alexandra de Hoop-Scheffer, présidente de German Marshall Fund
00:06:27et Jérémy Gallon, directeur général Europe du cabinet McLarty Associates.
00:06:34Monsieur Gallon, ayant été jeune diplomate en Amérique sous la présidence Trump,
00:06:40vous êtes de ceux qui estimaient que l'Union européenne n'a d'autre choix que d'établir ce rapport de force.
00:06:46Dans cet obstacle, vous insistez sur la crédibilité qu'elle doit acquérir,
00:06:50notamment en s'appuyant sur d'autres États, partageant à la fois ses valeurs et son ambition d'autonomie stratégique.
00:06:57Je vais vous donner la parole en rappelant quelque peu les règles de notre réunion.
00:07:02Je demande aux intervenants qui vont se succéder, je leur redonnerai la parole, d'avoir dix minutes de propos.
00:07:08Ensuite, je donnerai la parole aux ambassadeurs qui le souhaiteront.
00:07:12Pour un exercice auquel je les avais déjà contraints précédemment,
00:07:16en tout cas ceux qui n'y avaient pas participé le savent,
00:07:19c'est d'avoir une question ou peut-être un propos en deux minutes.
00:07:24Je sais que pour les ambassadeurs, c'est difficile de s'exprimer deux minutes,
00:07:28mais ce sera beaucoup plus vivant pour notre réunion.
00:07:33Et ensuite, je donnerai la parole à nos collègues qui le souhaiteront
00:07:37pour des interventions ou des questions à poser à nos intervenants.
00:07:42Donc, M. Gallon, c'est à vous.
00:07:44Monsieur le Président, mesdames et messieurs les sénateurs, mesdames et messieurs les ambassadeurs,
00:07:47je vous remercie de m'avoir invité à m'exprimer devant la Commission des affaires européennes du Sénat
00:07:52sur les conséquences pour l'Union européenne et la relation transatlantique de l'élection de M. Donald Trump.
00:07:57Mes propos liminaires, j'aimerais les débuter par analyser cinq tendances structurelles,
00:08:03indépendantes de la personnalité de Donald Trump, mais qui vont structurer sa présidence.
00:08:07La première, reflétée de l'évolution démographique des États-Unis,
00:08:10a très haut fait qu'une grande partie des élites politiques, économiques, intellectuelles américaines
00:08:15n'aura plus demain le lien intime et personnel
00:08:19que les précédents dirigeants américains avaient avec notre continent.
00:08:22Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, trois des grands maîtres de la diplomatie américaine,
00:08:25Henry Kissinger, Zbigniew Brzezinski et Madeleine Albright,
00:08:28étaient des immigrés européens de première génération.
00:08:31Aujourd'hui, quand vous allez à Washington, dans les couloirs du Congrès, du Département d'État,
00:08:34du Conseil à la Sécurité Nationale, mais aussi au Conseil d'administration des grandes entreprises américaines,
00:08:39vous avez une autre Amérique, avec des gens qui n'ont pas nécessairement ce lien intime et personnel avec l'Europe,
00:08:44qui représente une évolution d'une Amérique plus tournée vers le monde hispanique, le monde asiatique.
00:08:49Cela ne veut pas dire que ces dirigeants se désintéressent de l'Europe,
00:08:52mais cela veut dire que l'Europe n'est plus au cœur de leur matrice intellectuelle et diplomatique.
00:08:57C'est une des premières tendances structurelles.
00:09:00Deuxièmement, l'Amérique est depuis la fin du mandat de George W. Bush,
00:09:04c'est-à-dire les années 2005, 2006, 2007, dans une phase de repli sur elle-même.
00:09:09La tendance extrême de cela, c'est la politique isolationniste, défendue par Angie Devance,
00:09:13mais plus généralement, je rappelle que Barack Obama en 2008 a été élu sur une promesse de se recentrer sur l'Amérique.
00:09:19Là encore, cela va influencer considérablement la politique américaine.
00:09:24C'est lié en politique étrangère à la fatigue à l'égard notamment des guerres en Irak et en Afghanistan,
00:09:29mais c'est aussi lié à un rejet d'une grande partie de l'opinion publique américaine à l'égard d'élites vues comme internationalistes,
00:09:35rupture qui s'est effectuée notamment sous la présidence de George W. Bush,
00:09:39à la fois dans la réponse américaine au poste 11 septembre, mais aussi à la suite de la crise financière de 2008.
00:09:45Troisième tendance structurelle qui va aussi structurer la présidence de Donald Trump, le pivot vers l'Indo-Pacifique.
00:09:52Il a été théorisé par Barack Obama en 2012, il a été poursuivi par ses successeurs de manière plus structurée par Joe Biden,
00:09:59il va se poursuivre et à cet égard, je crois que s'il y a un consensus entre démocrates et républicains aujourd'hui,
00:10:05c'est que c'est la Chine qui représente un défi existentiel pour l'Amérique et non pas la Russie de Vladimir Poutine.
00:10:12Là encore, sujet possible de divergence avec les Européens.
00:10:16Quatrièmement, si le budget de défense américain nous semble colossal, à peu près 900 milliards de dollars dépensés par an,
00:10:23si on remet dans une perspective de long terme, en 1953 au sortir de la guerre de Corée,
00:10:27les Américains dépensaient 11,3% de leur PIB en dépenses de défense. En 2024, ce sera 2,7%.
00:10:35La conséquence qui a été tirée par un certain nombre d'experts à Washington, mais aussi par un rapport du Congrès récent,
00:10:41c'est qu'il devient de plus en plus difficile pour les Américains de mener deux guerres de haute intensité simultanément.
00:10:46Et entre Taïwan et l'Ukraine, reflet de mon commentaire précédent sur le pivot vers l'Indo-Pacifique,
00:10:52c'est évidemment Taïwan qui aura la priorité.
00:10:54Cinquièmement, l'émergence d'un nouveau consensus de Washington.
00:10:57Si je définis le consensus de Washington comme cette politique de libéralisation du commerce,
00:11:02d'accords de libre-échange et d'investissement qui ont été conclus par les Américains depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale
00:11:08et qui a contribué considérablement à leur prospérité,
00:11:11le fait est que ce consensus de Washington est coupable aujourd'hui, aussi bien pour les Républicains que pour les Démocrates, de deux fautes.
00:11:17La première, c'est de ne pas avoir su protéger des communautés entières ravagées par les excès de la mondialisation.
00:11:22Le deuxième est de ne pas avoir su se prémunir, et c'est lié, des violations du règle du commerce international par la Chine,
00:11:29notamment après l'entrée de la Chine dans l'OMC en 2001.
00:11:32Dès lors, un nouveau consensus de Washington a émergé qui, là aussi, fait consensus entre Républicains et Démocrates
00:11:37et va guider la politique économique du Président Trump.
00:11:40Elle est basée sur les politiques tarifaires, les politiques industrielles,
00:11:43les contrôles sur les investissements entrant et sortant, les contrôles aux exportations.
00:11:48Il y a encore eu la mesure annoncée hier sur les contrôles aux exportations de semi-conducteurs pour les applications dans l'intelligence artificielle.
00:11:55Ce nouveau consensus de Washington a été théorisé, non pas par un secrétaire au Trésor ou un secrétaire au Commerce,
00:12:00mais par le conseiller à la Sécurité nationale, Jake Sullivan, dans un discours à la Brookings le 27 avril 2023.
00:12:06Il sera absolument essentiel parce qu'il va structurer la politique américaine.
00:12:11Dans ce contexte, la présidence Trump va être marquée dès ses débuts par des tentatives de déstabilisation permanente des Européens
00:12:18et un primat accordé aux relations bilatérales par rapport à une relation directement avec Bruxelles,
00:12:23comme ce fut le cas sous l'administration Biden.
00:12:25Je souhaite aussi dès à présent souligner que la présidence Trump, telle qu'elle va s'annoncer,
00:12:30n'aura rien à voir avec le premier mandat de Trump.
00:12:33En 2016, le président était en partie contrôlé par un parti républicain et un establishment républicain,
00:12:41ce qu'on appelait les adultes dans la pièce.
00:12:44Ces impulsions les plus étonnantes, les plus dangereuses pour les Européens ont été freinées.
00:12:50Ce qu'on a observé au cours des quatre dernières années, c'est une personnalisation du parti républicain.
00:12:54Aujourd'hui, c'est un système marqué par l'ultra-loyauté, le népotisme et les phénomènes de cours qui se mettent en œuvre.
00:13:00Pour les Européens, cela va s'inscrire notamment par des tensions commerciales très fortes.
00:13:05Et il faut bien voir qu'au cours des dernières années,
00:13:08la plupart des sujets de dispute qui avaient émergé durant la première administration Trump,
00:13:13sur les surcapacités de production en matière d'acier et d'aluminium,
00:13:15le conflit Airbus-Boeing ou la taxation des géants du numérique,
00:13:19tous ces sujets n'ont pas été réglés, ils ont été simplement mis en pause.
00:13:23Ils peuvent donc être réactivés sous une seconde administration Trump.
00:13:26Deuxièmement, le Conseil du commerce et des technologies qui avait été institué en 2021
00:13:30pour accroître la coopération transatlantique sur tous ces sujets, notamment réglementaires et commerciaux,
00:13:35va probablement mourir de sa belle mort.
00:13:37Et par ailleurs, au cours des quatre dernières années,
00:13:39un certain nombre de mesures ont été adoptées par l'Union européenne,
00:13:41notamment dans le cadre du pacte vert, règlements sur la déforestation,
00:13:45mécanismes d'ajustement carbone aux frontières,
00:13:47qui vont susciter probablement l'ire d'une future administration Trump.
00:13:51En conclusion, je m'interrogerai très rapidement sur les contours possibles d'une réponse européenne.
00:13:55Alors que Donald Trump s'apprête à être investi 47e président des Etats-Unis,
00:13:58notre diplomatie doit éviter deux écueils.
00:14:01Le premier serait de nous enfermer dans une approche purement morale de la relation transatlantique.
00:14:06Comme l'écrivait Henry Kissinger, un pays qui entend faire de la perfection morale
00:14:09la pierre de touche de sa diplomatie n'atteindra ni la perfection ni la sécurité.
00:14:13À l'inverse, le second écueil serait de nous prosterner
00:14:17face aux politiques erratiques et agressives d'une future administration Trump
00:14:20et d'aller en foulant au pied nos principes qu'émandaient à Washington
00:14:23une trêve commerciale ou de l'aide militaire.
00:14:25Ces deux approches ne nous vaudraient que le mépris
00:14:28à la fois de l'administration américaine mais aussi de nos alliés.
00:14:31Il y a donc trois piliers qui doivent être développés par les Européens.
00:14:34Le premier pilier consistera à utiliser tous les outils à notre disposition
00:14:37pour influencer les futures politiques de l'administration Trump.
00:14:40Plutôt que de rejeter à priori toute politique marquée du saut trumpien,
00:14:44la question sera de distinguer celles qui ciblent directement nos intérêts
00:14:48contre lesquelles il faudra être prêt à faire preuve de rétorsion,
00:14:51notamment sur le plan tarifaire,
00:14:52des mesures avec lesquelles nous pouvons avoir une convergence de vues.
00:14:57Deuxièmement, notre diplomatie sera efficace, M. le Président,
00:15:00et c'est là le second pilier du rapport de force,
00:15:02que si elle est mise en cohérence avec notre politique
00:15:04à l'égard de nos partenaires européens et des puissances tierces.
00:15:07Sur le plan sécuritaire, cela veut dire, par exemple,
00:15:09travailler très étroitement avec nos alliés britanniques.
00:15:12Cela veut dire renforcer dans l'Indo-Pacifique
00:15:14nos relations avec le Japon, la Corée du Sud, l'Inde, l'Indonésie
00:15:17et d'autres puissances.
00:15:19Cela veut dire également, à l'égard de nos partenaires européens,
00:15:22non pas essayer de jouer sur un anti-américanisme primaire,
00:15:26mais de manière pragmatique, essayer de montrer,
00:15:28notamment à nos partenaires d'Europe de l'Est et centrale,
00:15:31que c'est une Europe plus souveraine, plus autonome,
00:15:34qui, à terme, garantira leur sécurité.
00:15:36Enfin, et c'est là le troisième pilier,
00:15:38n'oublions jamais que politique étrangère et politique intérieure
00:15:41sont intimement liées.
00:15:42Ce n'est que si nous mettons fin au décrochage économique de l'Europe
00:15:45par rapport aux Etats-Unis,
00:15:46que nous redeviendrons un acteur crédible à Washington.
00:15:49Ce n'est que si nous retrouvons des marges de manœuvre budgétaires
00:15:52et recréons les conditions pour que l'Europe s'affirme
00:15:54en tant que puissance industrielle et innovatrice
00:15:56que nous serons en mesure de peser sur les orientations
00:15:59prises par la future administration américaine.
00:16:01C'est un combat de long terme
00:16:02qui appellera des réformes structurelles majeures
00:16:04et des arbitrages difficiles de la part de la France et de l'Europe.
00:16:08Vous l'avez dit, le rapport L'État et le rapport Draghi
00:16:10esquissent certaines solutions,
00:16:12mais il n'y a pas d'alternative si nous voulons être en mesure
00:16:15de défendre nos intérêts face à une future administration Trump.
00:16:19Merci, timing tenu, bravo.
00:16:22Madame de Hoop-Schaeffer, dès l'élection du président Trump,
00:16:25vous y avez vu l'opportunité pour l'Union européenne
00:16:28de repenser enfin ses responsabilités stratégiques,
00:16:31notamment son rôle dans la compétition
00:16:33entre les Etats-Unis et la Chine,
00:16:35à condition qu'elle s'accorde sur ses priorités.
00:16:37Deux mois plus tard, l'Europe a-t-elle avancé en ce sens selon vous ?
00:16:42Merci beaucoup.
00:16:43Je suis ravie de pouvoir échanger avec vous aujourd'hui
00:16:46et puis avec mes collègues ici autour de la table.
00:16:52Je commencerai, en fait, je dirai dans la continuité
00:16:55de ce que vient de présenter Jérémy Gallon.
00:17:01Il y a trois tendances structurelles pérennes dans la politique américaine
00:17:07et ça a des effets de réverbération directement
00:17:10sur les intérêts stratégiques européens.
00:17:13L'un, c'est « America first », l'Amérique d'abord.
00:17:16Ce n'est pas Trump qui l'a créée, ça a toujours été le cas.
00:17:19Et d'ailleurs, tout dirigeant politique aujourd'hui
00:17:23défend les intérêts d'abord de son propre pays.
00:17:25Donc, ce n'est pas étonnant.
00:17:28Ce qui est plus compliqué, c'est la manière
00:17:30dont cet agenda-là a été mis en œuvre.
00:17:33Et effectivement, vous l'avez mentionné en introduction,
00:17:36la manière dont Biden, en fait, a accéléré cet agenda
00:17:41dans la lignée de Trump est tout à fait notable.
00:17:44Et ça va continuer, c'est l'agenda industriel,
00:17:47mais ça aura des impacts sur nos propres industries européennes.
00:17:53Le deuxième, c'est « China first », effectivement.
00:17:56Et là, il y a le risque, en fait, d'une Europe qui se retrouve prise en étau
00:18:00entre les États-Unis et la Chine.
00:18:03Et donc, face à ces deux priorités,
00:18:05comment éviter que l'Europe devienne « Europe last »,
00:18:09l'Europe en dernier, en gros.
00:18:12Et c'est vraiment ça, je pense, qui doit driver notre réflexion
00:18:17sur trois sujets qui, pour moi, sont les trois sujets
00:18:20sur lesquels l'Europe doit, effectivement,
00:18:22travailler ses capacités,
00:18:26sa souveraineté et ses intérêts stratégiques.
00:18:30C'est la transition énergétique, c'est la transition digitale.
00:18:34Et j'ajouterais la transition géopolitique,
00:18:37c'est-à-dire comment devenir une puissance
00:18:41qui soit capable de faire face aux défis géopolitiques
00:18:45et de défendre la sécurité de son propre continent.
00:18:52Le problème, en fait, c'est que ce n'est pas Trump qui est imprévisible.
00:18:59Alors, lui, il joue beaucoup là-dessus,
00:19:01mais c'est le système politique américain
00:19:03qui est devenu imprévisible de plus en plus.
00:19:07Pourquoi ? À cause de l'hyperpolarisation.
00:19:10On a un cycle politique, comme vous le savez, qui est ultra court,
00:19:13c'est-à-dire qu'en deux ans, maintenant,
00:19:15il y aura à nouveau des élections demi-mandat,
00:19:19et dans quatre ans, à nouveau des élections présidentielles.
00:19:22Et ce temps court, et tous les quatre ans, la possibilité,
00:19:26on l'a vu, la transition entre Obama et Trump,
00:19:30d'avoir un président américain qui peut, effectivement,
00:19:32remettre en question l'héritage, les décisions,
00:19:35la vision stratégique de son prédécesseur,
00:19:38c'est très problématique,
00:19:40c'est très troublant dans une relation alliée.
00:19:43Et je le rappelle souvent, qu'est-ce qu'un allié ?
00:19:46Je ne parle pas d'un ami, qu'est-ce qu'un allié ?
00:19:48Un allié, c'est quelqu'un de prévisible.
00:19:53C'est quelqu'un en qui on fait confiance.
00:19:57C'est incarné, finalement, dans l'article 5 de l'OTAN.
00:20:01C'est-à-dire que quand on est nous-mêmes face à un problème,
00:20:04on sait qu'on peut compter sur son allié.
00:20:07Et effectivement, ce qui distingue Trump
00:20:09par rapport à tous les autres présidents américains,
00:20:12c'est qu'il remet en question, il met un doute,
00:20:14il met un doute sur la fiabilité de cette idée d'allié
00:20:19et d'alliance entre l'Europe et les États-Unis.
00:20:24Et donc, ça aussi, ça doit nous secouer.
00:20:27Je trouve que l'Europe a beaucoup de mal à se réveiller.
00:20:31Si ce n'est pas la guerre en Ukraine qui nous aura réellement réveillés,
00:20:35peut-être qu'un deuxième homme de la Trump le fera.
00:20:39Donc, il y a ça qui, moi, me paraît très important,
00:20:42si on veut réfléchir à quelle est notre stratégie d'approche
00:20:47et d'engagement avec l'administration Trump.
00:20:51La deuxième chose, et ça, on le voit même dans les débats européens
00:20:55de plus en plus, il n'y a plus de distinction
00:21:00entre la politique intérieure et la politique étrangère,
00:21:02mais il y a aussi plus de distinction entre la sécurité économique
00:21:06et la sécurité nationale, ou les questions de défense
00:21:10et de sécurité tout court.
00:21:13Et là, on est face à l'administration Trump qui joue sur cette interdépendance.
00:21:19Il va utiliser, et il l'a déjà fait avant même son investiture,
00:21:23la coercition économique ou la menace de recourir à la coercition économique,
00:21:28aux taxes douanières, etc., pour obtenir des concessions
00:21:32dans d'autres sphères.
00:21:34L'immigration, on le voit dans le bras de fer
00:21:36avec les pays d'Amérique latine, avec le Canada.
00:21:41Sur les questions de défense, c'est-à-dire que l'OTAN
00:21:45est le parfait forum dans lequel Trump et son administration
00:21:49et ses conseillers vont encore une fois faire pression
00:21:52sur les alliés européens pour qu'ils dépensent toujours plus,
00:21:56mais pour acheter américains, et que si on n'atteint pas,
00:22:00alors maintenant il parle de 5% de dépenses par rapport au PIB,
00:22:06eh bien il utilisera des outils de menace économique,
00:22:10les taxes douanières, etc.
00:22:12On connaît ce qu'il est en train de préparer et déjà de déballer.
00:22:18Donc nous, en fait, pour l'Europe, le vrai sujet,
00:22:23le point de départ pour répondre à votre question
00:22:27sur que doit faire l'Europe, etc.,
00:22:30c'est de réfléchir d'abord en européen,
00:22:34c'est-à-dire pendant un certain temps,
00:22:37d'essayer de faire abstraction de qui est assis dans le bureau ovale.
00:22:41C'est un exercice extrêmement sain, extrêmement utile
00:22:44et je dirais vital.
00:22:46C'est-à-dire qu'est-ce que les Européens veulent pour l'Europe ?
00:22:51A quoi l'Europe devrait-elle ressembler
00:22:54dans les 10, 20 années à venir ?
00:22:57Sur quel sujet, dans quel domaine,
00:22:59est-il absolument critique aujourd'hui d'investir massivement
00:23:04pour ne pas être effectivement complètement déclassé et effacé
00:23:07dans une compétition US-Chine qui va s'accentuer,
00:23:11mais aussi dans un monde où le système d'alliance est en train d'évoluer.
00:23:16Quand vous voyez tous ces pays qu'on met grossièrement
00:23:19dans ce paquet du Sud global,
00:23:22là aussi, vous avez de nouveau du challenge pour l'Europe.
00:23:29Parce que le monde bouge.
00:23:30On n'est pas qu'en train de parler de la relation transatlantique
00:23:33ou de l'alliance atlantique.
00:23:35La relation transatlantique va de plus en plus devenir une alliance
00:23:38parmi d'autres et parmi d'autres alliances
00:23:40qui auront un impact de plus en plus
00:23:44sur la mise sur l'agenda de sujets critiques.
00:23:49Le changement climatique, l'innovation technologique, etc.
00:23:53Donc il faut qu'on change un peu de spectre.
00:23:57Commençons par réfléchir d'abord sur nos dépendances.
00:24:02Parce que nos dépendances, ce sont nos vulnérabilités.
00:24:06Et qu'est-ce que l'on voit dans la stratégie de Trump,
00:24:09dans toutes les déclarations qui précèdent à quelques jours son investiture ?
00:24:13C'est qu'il met le doigt, il appuie sur ses dépendances.
00:24:18Il y a trois dépendances qui nous lient de manière critique aux Etats-Unis.
00:24:24L'une, c'est la dépendance à leur industrie de défense.
00:24:28Et encore plus, bien sûr, depuis le début de la guerre en Ukraine.
00:24:33Les Etats-Unis n'ont jamais autant vendu d'armes aux Européens.
00:24:38Et en ce sens-là, les Américains ont aussi une forme de dépendance
00:24:42vis-à-vis du marché européen.
00:24:44Donc nous aussi, on peut jouer la dépendance des Etats-Unis
00:24:48par rapport au marché européen et pas que dans le domaine de la défense.
00:24:51Ça, c'est en un.
00:24:53Notre dépendance vis-à-vis des géants de la tech américain.
00:24:58Aujourd'hui, de retrouver à la tête des Etats-Unis
00:25:01le tandem Trump-Musk doit nous interroger, n'est-ce pas ?
00:25:08Alors combien de temps ce tandem va durer ?
00:25:11Parce que le turnover était très rapide sous le premier mandat de Trump.
00:25:17Pour moi, ça, c'est le vrai game changer, c'est le vrai changement,
00:25:22c'est la vraie différence par rapport à Trump 1.
00:25:25C'est qu'il a derrière lui tous les géants de la tech américain.
00:25:30C'est énorme en termes d'influence politique, stratégique, technologique.
00:25:37C'est aussi un gros sujet pour le système de valeurs
00:25:42que les Etats-Unis défendent aujourd'hui.
00:25:45Le fait que Mélanie et Orban sont invités à l'investiture,
00:25:49là aussi, ça doit nous montrer à quel point la relation transatlantique
00:25:55dans les quatre années à venir pourrait être redéfinie
00:25:58autour d'un socle de valeurs très différent de celui qui a constitué
00:26:03et fondé la relation transatlantique depuis ces dernières décennies.
00:26:09Et enfin, la dernière dépendance qui s'est accrue depuis la guerre en Ukraine,
00:26:15de l'Europe vis-à-vis des Etats-Unis, c'est l'énergie.
00:26:19On n'a jamais autant acheté de LNG américain, de gaz liquéfié américain,
00:26:25à un moment où on essaie justement de s'autonomiser des énergies russes.
00:26:30Donc quand vous prenez ces trois dépendances européennes vis-à-vis des Etats-Unis,
00:26:35ça constitue aussi ce dont je viens de parler, les trois transitions,
00:26:40les trois sujets que les Européens doivent réussir dans les années à venir.
00:26:46Digital, énergie et défense.
00:26:50Trois priorités qui sont d'ailleurs complètement interconnectées.
00:26:54Ce ne sont pas des priorités isolées, elles sont interconnectées.
00:26:57Quand on investit dans la défense, on investit dans l'innovation technologique.
00:27:02Quand on investit dans la transition verte, on investit également dans l'innovation technologique, etc.
00:27:08Et donc ça, pour moi, c'est la priorité.
00:27:11Et c'est les sujets sur lesquels, en fait, à mes yeux, il est tout à fait possible,
00:27:17avec une administration top, Trump,
00:27:19d'essayer de définir un agenda positif de coopération avec Washington.
00:27:26Il ne faut pas qu'on se laisse totalement écraser et on a les outils.
00:27:32Je terminerai par dire aussi qu'à la veille de l'investiture de Trump,
00:27:43ce qu'il faut comprendre, c'est que la pression,
00:27:46cette forme de coercition, de harcèlement qu'il exerce,
00:27:51qui est une stratégie purement tactique de marchandage et de prénégociation,
00:27:56elle est avant tout ciblée envers les alliés des États-Unis.
00:28:01Vous l'avez bien noté. Pourquoi ?
00:28:04Parce qu'il est beaucoup plus facile de faire trembler et de faire plier un allié à un ami plutôt qu'un rival.
00:28:11Justement à cause des dépendances dont je viens de parler.
00:28:15Ce qu'on constate aussi, c'est que cette stratégie de négociation forcée et abrupte,
00:28:20elle est en train de marcher.
00:28:22Elle délivre.
00:28:23Et Trump, avant tout, il veut montrer à son peuple américain, à son électorat,
00:28:28qu'il produit des résultats.
00:28:30Je vais vous donner quelques exemples concrets.
00:28:32Sur le Groenland, dont on a beaucoup entendu parler ces derniers jours,
00:28:37le Premier ministre du Groenland a déclaré
00:28:40« Écoutez, oui, j'ouvre mes ressources minières aux États-Unis.
00:28:44Il va falloir qu'on travaille avec l'administration Trump. »
00:28:48Le Canada qui annonce qu'il va investir 1,3 milliard de dollars canadiens
00:28:54pour assurer et renforcer la sécurité de la frontière avec les États-Unis.
00:28:59Le Danemark qui dit « Oui, Trump a raison de pointer du doigt l'influence grandissante de la Chine et de la Russie dans l'Arctique.
00:29:07Il va falloir qu'on renforce notre dialogue stratégique avec Washington sur l'Arctique. »
00:29:12Et les prochaines cibles, ce sera bien sûr la réglementation européenne des géants du numérique américain.
00:29:21Alors ça, c'est sûr, avec un musc, c'est évident.
00:29:24Ça va être le premier sujet de tension avec l'Europe.
00:29:28Et je dirais, et je conclurai là-dessus,
00:29:32un exercice intéressant à faire par les Européens,
00:29:36qu'ils soient parlementaires, chefs de gouvernement, chefs d'entreprises et autres,
00:29:41c'est de regarder ce que font d'autres puissances
00:29:44pour faire face à la stratégie de négociation et du deal, parfois abrupte et brutale de Trump.
00:29:52Regardons ce qu'a fait Shinzo Abe, Premier ministre japonais à l'époque.
00:29:58Il avait réussi à établir une relation, pas évidente, mais qui a fonctionné.
00:30:03Regardez ce que fait le Brésil,
00:30:05notamment sur les questions de la tech et de la réglementation, de la lutte contre la désinformation.
00:30:13Le Brésil a suspendu pendant 40 jours l'accès à X, donc au réseau social de Moscou, l'année dernière,
00:30:20en disant « Non, on attend en retour un changement parce que ça ne nous convient pas. »
00:30:25Et il a obtenu ce qu'il voulait.
00:30:27Donc je pense qu'il faut qu'on rentre effectivement dans un rapport de force qui est finalement très sain,
00:30:36de dire à l'administration Trump « Très bien, on a compris le message,
00:30:42mais ce n'est pas une manière de se parler d'abord entre alliés et partenaires.
00:30:46On peut avoir une discussion, une conversation et trouver un agenda commun,
00:30:51mais faisons-le dans un cadre de dialogue qui soit sain et constructif.
00:30:59Et ça, ça dépendra, et je termine là-dessus, beaucoup moins de Washington que de l'Europe.
00:31:05La prise d'initiative, la proposition de solutions et de sujets sur lesquels on pourra construire un agenda positif avec Washington
00:31:16devra venir de Bruxelles et des capitales européennes.
00:31:20Et moi, mon vœu, c'est qu'on essaye de sur-dépasser nos divisions intra-européennes
00:31:30et nos divisions de perception et de degrés de relation et de proximité,
00:31:35que ce soit avec Musk, Trump ou autres,
00:31:37pour justement essayer d'avoir une voie plus cohérente au niveau de l'Union européenne,
00:31:43parce que c'est par là, en fait, que notre réponse à Trump sera beaucoup, beaucoup plus impactante.
00:31:51Merci.
00:31:52Merci beaucoup.
00:31:53J'ajoute juste, par rapport aux trois dépendances que vous avez évoquées,
00:31:57une qu'on développe souvent ici au Sénat au travers des rapports, c'est la dépendance à l'accès à l'espace.
00:32:04Donc elle est intermédiaire, je pense, globalement, aux espaces contestés, voilà.
00:32:09Et je pense que, voilà, donc on est intermédiaire entre la défense et la tech,
00:32:13mais je pense que la dépendance de l'accès à l'espace, on a encore, nous, les Européens, un enjeu fort à défendre,
00:32:20et je pense que c'est le moment où j'aimais le défendre.
00:32:22Madame Gniézotto, dans l'un de vos ouvrages en 2022, vous appeliez déjà l'Europe à changer ou périr.
00:32:29Votre dernier livre, « Choisir l'avenir », tente de rompre avec la fatalité du pire
00:32:34et envisage plusieurs scénarios pour l'Europe dont vous dénoncez l'atlantisme atavique.
00:32:40Peut-on échapper à la résurgence d'un atavisme ? Nous vous écoutons.
00:32:46Merci, M. le Président, mesdames et messieurs les sénatrices et les sénateurs,
00:32:52mesdames et messieurs les ambassadrices et ambassadeurs.
00:32:56Moi, je vais adopter, dans les 10 minutes qui me sont imparties, un point de vue très différent.
00:33:03Et je vais commencer très brutalement en disant qu'à mes yeux,
00:33:09ce qui se joue aujourd'hui aux États-Unis, dans le discours de Trump, qui a valeur de politique,
00:33:16ce qui se joue, c'est un révisionnisme global.
00:33:19On connaissait le révisionnisme européen de la part de Vladimir Poutine,
00:33:25qui refuse l'ordre européen mis en place après la chute de l'Union soviétique en 1991.
00:33:31On connaît le révisionnisme asiatique de Xi Jinping,
00:33:34qui refuse la présence américaine en Asie et veut revoir l'ordre asiatique.
00:33:38On ne connaissait pas, mais on va découvrir, le révisionnisme global du couple,
00:33:43et là, je suis complètement d'accord avec Alexandra, du couple Trump-Elon Musk.
00:33:50Je crois que ce qu'ils essayent de faire, même s'ils ne se sont pas des philosophes au départ,
00:33:57mais ce qu'ils ont intuitivement l'intention de faire, parce qu'ils pensent qu'ils peuvent y gagner de la puissance,
00:34:03c'est de remettre en cause les trois piliers de l'ordre international que l'on a créé depuis 1945,
00:34:09c'est-à-dire le libéralisme économique et ses contrôles, la démocratie politique et ses contre-pouvoirs,
00:34:16et la liberté d'expression avec, effectivement, ses limites constitutionnelles.
00:34:26Et je crois que l'ensemble de leur discours, depuis quelques semaines,
00:34:33mais même depuis la campagne électorale de Donald Trump, c'est d'arriver à une révolution idéologique, que je crois majeure.
00:34:43Je ne suis pas du tout sur la ligne de ceux qui pensent que c'est uniquement de la rhétorique commerciale,
00:34:50que s'agit de faire des deals pour obtenir l'accès aux ressources minières du Greenland,
00:34:54ou un passage gratuit pour les flottes américaines dans le Panama.
00:34:58Je crois que ça va bien au-delà qu'une tactique de négociation,
00:35:01qu'il y a en germe, dans le discours américain, une révolution idéologique majeure,
00:35:08dont l'objectif, c'est de supprimer le droit.
00:35:11Alors, Donald Trump s'en prend au droit international, quand il parle d'annexer,
00:35:17ou de prendre militairement le Greenland, ou d'annexer le Canada ou le Panama.
00:35:23Elon Musk s'en prend au droit des affaires ou au droit privé.
00:35:26Et d'ailleurs, il a mandat du président américain de déréguler au maximum l'économie américaine,
00:35:32la banque américaine, de façon à libérer au maximum l'initiative industrielle, technologique, etc.
00:35:42et de libérer au maximum la liberté d'information.
00:35:46Et donc, je crois que c'est le droit en tant que tel qui est le fondement, en revanche, de l'Union européenne,
00:35:52qui est mis en cause, aussi bien sûr dans le droit international que dans le droit économique et commercial,
00:35:58qui est mis en cause par ce nouveau tandem Donald Trump et Elon Musk.
00:36:03Et donc, pour les européens, je crois qu'il s'agit beaucoup plus que de répondre à une administration américaine
00:36:15qui sera difficile, qui sera grossière, qui sera raquetteuse, comme le promettait d'être le premier Trump.
00:36:25Je crois qu'il faut envisager ce deuxième mandat Trump comme quelque chose de nouveau,
00:36:29si l'on ne veut pas se faire complètement avoir dans une idéologie qu'on n'aurait pas préparée.
00:36:36Et quelle est la stratégie de Trump ?
00:36:38Je termine sur ce premier point avant de passer à l'Europe.
00:36:40Je crois que la stratégie de Donald Trump, elle est double.
00:36:43Elle est premièrement, effectivement, de s'en prendre d'abord amicalement à ses alliés.
00:36:49C'est une stratégie de prédation des atouts alliés qu'on ne peut pas refuser aux chefs de l'Alliance.
00:36:55Et donc, c'est une stratégie de pression amicale, de raquette amicale sur les alliés
00:37:00pour obtenir ce dont ils pensent que la puissance américaine a besoin,
00:37:03c'est-à-dire des terres, des mines, des voies maritimes, de façon à augmenter cette puissance américaine.
00:37:10Et dans un deuxième temps, je pense qu'effectivement, la stratégie de Donald Trump,
00:37:13ce sera d'affronter la puissance chinoise qui est effectivement la seule chose qui est capable
00:37:19de contrôler la puissance des États-Unis.
00:37:23Donc, si on part du principe qu'il s'agit de bien autre chose qu'une tactique de négociation,
00:37:31qu'une diplomatie transactionnelle comme Trump nous y avait habitué lors de son premier mandat,
00:37:37si l'on part du principe qu'il y a en germe la troisième révolution du XXe-XXIe siècle,
00:37:43on a eu la révolution communiste, on a eu la révolution fasciste,
00:37:47on a réintégré la révolution libérale à la fin de la Seconde Guerre mondiale,
00:37:51et on va avoir maintenant une révolution révisionniste
00:37:55dont nous n'avons pas le vocabulaire en sciences politiques pour la définir.
00:37:59Mais si on part de ce principe, alors il faut regarder les atouts, les faiblesses de l'Union européenne
00:38:05de façon un peu différente.
00:38:07Je crois que l'Europe, malheureusement, vit un moment extrêmement difficile.
00:38:11Le monde entier évolue contre l'Europe,
00:38:15c'est-à-dire toutes les tendances que l'on peut voir dans l'évolution du système international
00:38:19et même dans la mondialisation économique sont antinomiques à ce qu'est profondément l'Union européenne,
00:38:25c'est-à-dire une entité fondée sur le droit, sur le respect des règles, sur la production de règles,
00:38:30sur la solidarité intérieure, sur la défense collective des intérêts,
00:38:35tout l'évolution du monde, le nationalisme, le populisme, tout va à l'encontre de l'Union européenne.
00:38:41Et face aux États-Unis, les Européens sont paralysés, je crois aujourd'hui, sidérés,
00:38:47parce qu'ils sont en même temps victimes d'un nombre incalculable de vulnérabilités.
00:38:52C'est la première fois dans l'histoire de l'Europe, premièrement,
00:38:55qu'elle a à la fois une menace à l'Est, militaire, une menace d'agression,
00:38:59et une menace à l'Ouest, stratégique, une menace d'abandon.
00:39:03Moi, je ne crois pas une seconde que Trump va abandonner l'OTAN,
00:39:05mais c'est perçu comme ça, c'est une énorme vulnérabilité.
00:39:09Deuxième vulnérabilité, la vulnérabilité intérieure.
00:39:12C'est la première fois qu'il y a autant de mouvements populistes et de gouvernements d'extrême droite en Europe.
00:39:18Alors, ce sont des mini-Trump qui, jusqu'à maintenant, faisaient un peu attention,
00:39:21mais maintenant, ils n'arrivent peut-être pas aux pieds, à la cheville de Donald Trump,
00:39:26mais ils vont se trouver magnifiés à bonne école avec celui-ci,
00:39:30et c'est notre système démocratique qui est, je crois, en danger.
00:39:34Notre troisième vulnérabilité, c'est que nous sommes prisonniers de l'histoire.
00:39:38Les Européens restent attachés à l'histoire, l'Amérique est le sauveur par deux fois de l'Europe,
00:39:44et donc, ils n'arrivent pas à penser une seconde que ce paradigme-là est mort.
00:39:49Ils n'arrivent pas à penser une seconde que les États-Unis pourraient être un problème,
00:39:54voire un ennemi pour les intérêts européens.
00:39:57Et donc, dans cette mesure-là, comment réagir ?
00:40:00Eh bien, ce que l'on voit actuellement se dessiner en Europe, c'est trois stratégies.
00:40:06Il y a une première stratégie qui est une stratégie de soumission, d'apaisement,
00:40:11qui est exactement celle de Mme. Van der Leyen, de Mme. Christine Lagarde ou de Mme. Kaya Callas.
00:40:18C'est de dire, on va vous acheter plus, plus de gaz de schiste, plus d'armement.
00:40:22Mme. Christine Lagarde est sortie complètement de son mandat
00:40:25en disant qu'il fallait acheter plus d'armes américaines,
00:40:28et Mme. Kaya Callas répète que l'Amérique est notre meilleure alliée.
00:40:31Donc, on a aujourd'hui, de la part des institutions, une stratégie qui est vraiment une stratégie d'apaisement,
00:40:36parce qu'encore une fois, on ne veut pas voir la gravité de ce qui se passe dans le discours américain.
00:40:41On peut avoir une deuxième stratégie, qui n'est pas qu'antinomique avec la première d'ailleurs,
00:40:46qui est une stratégie de négociation séparée avec Washington,
00:40:50de relations privilégiées de façon à s'assurer le maximum de garanties et de contre-garanties
00:40:56si jamais l'alliance allait exploser, et vous les avez cités, l'Italie, la Hongrie,
00:41:04sont dans cette optique de redoubler les alliances traditionnelles par des alliances bilatérales.
00:41:10Et puis, troisièmement, on peut avoir une stratégie de résistance, de résistance raisonnée,
00:41:16comme mes camarades l'ont appelée de leur vœu,
00:41:20et dont ils ont expliqué ce qui devrait être le contenu, et je suis complètement d'accord.
00:41:25Mais pour avoir cette stratégie de résistance raisonnée, encore faut-il un accord politique entre les États.
00:41:31Pour l'instant, on a eu une déclaration franco-allemande rappelant l'importance de la souveraineté des États,
00:41:37mais c'est à peu près tout. Moi, je compte énormément sur la présidence polonaise.
00:41:42Je me souviens que Donald Tusk, quand il était président du Conseil en 2016,
00:41:46pour le premier mandat de Donald Trump, avait été quand même l'homme qui a dit
00:41:51« avec un ami comme ça, on n'a pas besoin d'ennemis ».
00:41:53Autrement dit, Tusk connaît aussi bien l'Union européenne que Donald Trump,
00:41:58et je compte énormément sur ce sommet informel géopolitique qu'il a convoqué avec Antonio Costa
00:42:04en invitant les Britanniques pour qu'enfin l'Europe réfléchisse, réfléchisse à ce qui se passe.
00:42:10Je termine en un point sur l'avenir de la relation transatlantique.
00:42:13Si vous m'avez suivi, vous pouvez en conclure qu'à mes yeux, la relation transatlantique va être
00:42:18premièrement conflictuelle, et très conflictuelle,
00:42:21non seulement entre Européens et Américains, mais entre Européens eux-mêmes.
00:42:25Le seul exemple à mes yeux qui fait référence à cela, c'est 2003,
00:42:29avec l'intervention américaine en Irak,
00:42:32où nous étions divisés en transatlantiques et en intra-européens.
00:42:36Deuxièmement, cette relation transatlantique, à mon avis, va être fragile,
00:42:42et perçue comme fragile par les autres, et notamment par la Russie.
00:42:45Le simple fait que Trump ait été élu président des Etats-Unis a affaibli l'OTAN.
00:42:50La simple victoire de Donald Trump a été perçue par les Russes
00:42:55comme un signe de faiblesse supplémentaire dans l'alliance.
00:43:01Déjà, personne ne croit une seconde que l'alliance des Etats-Unis en Europe est automatique,
00:43:07mais avec l'élection de Trump, on est persuadés maintenant que cette alliance est incertaine.
00:43:13Et je termine dernier mot, cette alliance, cette relation transatlantique,
00:43:17il faut la penser peut-être comme en phase terminale.
00:43:23Il ne faut pas hésiter à penser le pire.
00:43:27Je n'ai pas le temps de rentrer dans le détail,
00:43:29mais les Américains nous menacent souvent de ne plus nous aider,
00:43:33de ne plus nous défendre si nous ne faisons pas ça, ça, ça.
00:43:36On peut tout à fait répartir que si l'Amérique devient le leader
00:43:41d'une internationale populiste fasciste,
00:43:44ce sont les Européens qui pourraient quitter l'alliance.
00:43:49Merci beaucoup.
00:43:50Madame Balfour, vous êtes plus pessimiste que Mme Niazotto
00:43:54et vous craignez qu'il soit trop tard pour l'Europe,
00:43:57d'autant que la guerre en Ukraine l'a rendue plus dépendante des Etats-Unis
00:44:00et qu'elle ne vous semble pas préparée à l'arrivée de Donald Trump.
00:44:04L'Europe a-t-elle vraiment manqué le coche ?
00:44:07Je rappelle aux ambassadeurs que s'ils sont aussi à l'aise avec l'anglais,
00:44:11il y a des traducteurs.
00:44:14Merci beaucoup, mais prenez garde, je vais essayer de parler en français.
00:44:20D'accord. Alors, merci pour l'invitation.
00:44:25J'ai bien organisé mes remarques dans trois chapitres.
00:44:31Premièrement, les conséquences de la présidence de Donald Trump sur l'Europe.
00:44:36Deuxièmement, le débat en Europe sur la réponse aux défis posés par Trump.
00:44:44Et enfin, les raisons pour lesquelles l'Europe est vraiment
00:44:49dans une position de grande vulnérabilité.
00:44:52Mais d'abord, je vais vous donner deux mots brefs sur le contexte général,
00:44:58parce que je suis d'accord avec Nicole que le 20 janvier,
00:45:01les Etats-Unis réjoindront un groupe de pays qui, à travers leur action,
00:45:09mise en question l'ordre mondial bâti après 1945.
00:45:15Donc c'est vraiment une grande puissance révisionniste dans le monde.
00:45:21Ce n'est pas du tout évident que le pays aillé des Etats-Unis,
00:45:28en Europe, dans le monde, et aussi les institutions internationales,
00:45:34sont capables, ensemble, de maintenir et protéger l'ordre mondial.
00:45:43Et enfin, en Europe, il y a des évaluations très différentes
00:45:49de sa puissance et de sa influence mondiale.
00:45:54Et par conséquence, il n'y a pas une idée commune sur la réponse
00:45:58au défi que Trump pose à l'Europe.
00:46:05En ce qui concerne les possibles conséquences de Trump,
00:46:09j'ai organisé des remarques en quatre domaines principaux.
00:46:16La sécurité du continent européen,
00:46:20on a, comme c'est très évident, l'agression russe contre l'Ukraine,
00:46:26et même si Trump et Poutine annoncent ces feux,
00:46:32ça pourrait ne pas être dans les traits de l'Ukraine et de l'Europe.
00:46:37Cela pourrait ne pas répondre aux attaques plus larges de la Russie contre l'Europe,
00:46:42comme l'ingérence électorale, les attaques contre les infrastructures critiques.
00:46:51Et ce n'est pas du tout certain qu'un cesse-feu va dissuader la Russie
00:46:59d'attaquer l'Ukraine ou l'Europe à l'avenir.
00:47:03Et aussi, il y a des risques plus généraux sur le futur de l'OTAN,
00:47:08comme Alexandre a remarqué, la protection nucléaire de l'Europe
00:47:12et la capacité de défense collective de l'Europe.
00:47:16Donc la sécurité de toute l'Europe n'est pas isolée à la question de l'Ukraine.
00:47:23C'est beaucoup plus large.
00:47:25Deuxièmement, l'économie européenne.
00:47:30Trump a menacé plusieurs fois d'introduire des droits de douane.
00:47:37Il doit être clair que cela va avoir une conséquence directement
00:47:44sur le produit national brut de l'Europe.
00:47:48On ne sait pas combien, parce qu'on ne sait pas quels seront exactement,
00:47:5310%, 20%, mais cela va avoir un impact.
00:47:57Et aussi, pas seulement sur la croissance économique européenne,
00:48:02mais aussi sur les règles européennes pour gouverner la révolution technologique.
00:48:10Par exemple, la Commission européenne a décidé de faire un pause,
00:48:15une revue des investigations dans Big Tech et dans son pouvoir.
00:48:20Cette semaine est passée.
00:48:21Il n'a pas encore devenu président.
00:48:23C'est déjà passé.
00:48:24Donc les conséquences sur l'économie sont sur l'économie et la croissance,
00:48:30et la possibilité de croissance,
00:48:31mais aussi sur comment on a organisé notre économie.
00:48:37Troisième domaine, c'est le choix que l'Europe peut prendre,
00:48:43la liberté d'autonomie d'en prendre et d'avoir un choix
00:48:48dans la rivalité entre les États-Unis et la Chine.
00:48:53Les États-Unis, par exemple, peuvent demander à l'Europe
00:48:57de s'aligner complètement avec Washington dans sa rivalité avec la Chine.
00:49:02Et ça, peut-être, ne va pas être vraiment dans l'intérêt européen,
00:49:07mais peut-être qu'il n'y a pas un choix.
00:49:12Et enfin, c'est la problématique du méthode du Trump.
00:49:16On a déjà parlé de ça.
00:49:18Il est transactionnaliste.
00:49:21Il se pose comme un acteur imprévisible
00:49:26pour obtenir le maximum.
00:49:28C'est MAGA.
00:49:29Ça, c'est son agenda.
00:49:31Il n'hésite pas à mettre en liaison des domaines séparés.
00:49:34Alexandra avait déjà fait des exemples avec l'immigration,
00:49:39la Groenlandie, etc.
00:49:41Mais ce qui est important à souligner,
00:49:43c'est que pour l'Europe, c'est très difficile de gérer ça.
00:49:46Parce que sur le commerce, c'est la Commission européenne
00:49:50qui a le mandat de négocier.
00:49:53Mais sur la sécurité, c'est les pays membres.
00:49:56Donc, c'est vraiment très difficile d'organiser une réponse coordonnée.
00:50:03Alors, pendant les derniers quatre ans,
00:50:07les Européens ont travaillé pour faire une chose
00:50:14qu'en anglais, on dit pour « Trump-proof the transatlantic relationship ».
00:50:19Donc, protéger la relation transatlantique
00:50:22et lier les Alliés plus fortement
00:50:26en préparation pour la possibilité d'un retour de Donald Trump.
00:50:29Maintenant, ça est passé.
00:50:32Et ce n'est pas du tout clair que la relation transatlantique,
00:50:36c'est « Trump-proofed ».
00:50:40L'invasion de l'Ukraine a renforcé cette stratégie
00:50:44parce que les Européens, comme Alexandra l'a dit,
00:50:46ont commencé à augmenter l'acquisition de défense,
00:50:51d'acheter des équipements militaires des États-Unis
00:50:57et aussi l'énergie.
00:51:00Mais en même temps, les Européens se sont un peu paralysés.
00:51:04Et moi, je pense que le débat,
00:51:06il y a plus ou moins deux côtés du débat.
00:51:11D'un côté, il y a ceux qui disent
00:51:14qu'il faut renforcer la liaison entre les États-Unis et l'Europe
00:51:19en accommodant et en anticipant les demandes de Trump.
00:51:25Alors, ça, c'est par exemple la proposition
00:51:28qui a faite la présidente de la Commission européenne
00:51:31et beaucoup d'autres, d'acheter plus d'énergie des États-Unis.
00:51:36C'est aussi ce qu'a dit Christine Lagarde.
00:51:39En anglais, on dit la « checkbook strategy »,
00:51:42la stratégie du carnet du chèque.
00:51:45Donc, offrir, d'acheter ici, là, en Amérique,
00:51:49et comme ça résister à un impact trop difficile pour l'Europe.
00:51:59Mais comme ça, on renforce aussi la liaison avec les États-Unis.
00:52:05Il y a, d'un autre côté, ceux qui disent
00:52:08qu'il faut renforcer la capacité de l'Europe d'agir en autonomie.
00:52:18Et donc, ça signifie renforcer le pilier européen de l'OTAN,
00:52:24investir dans la défense.
00:52:28Ça signifie voir la politique américaine comme un abandonnement de l'Europe
00:52:34et comme une opportunité pour sa croissance
00:52:38dans les domaines de la sécurité, des relations internationales,
00:52:44et aussi pour régler sa économie.
00:52:47Mais il y a des problèmes.
00:52:49Je pense que les deux positions ne sont pas incompatibles,
00:52:52mais on n'a pas encore trouvé politiquement une moyenne
00:52:57qui met ensemble les deux positions, les deux positions.
00:53:04Et ça, c'est parce qu'il y a beaucoup de raisons.
00:53:09Premièrement, je pense que les leaders de l'Union européenne
00:53:15n'entretiennent pas vraiment de vraies discussions entre eux
00:53:21sur les défis stratégiques de la présidence de Trump.
00:53:28Ils vont faire pour la première fois une retraite les premiers jours de février
00:53:33pour parler de la défense et de Trump.
00:53:36Mais normalement, quand ils se voient au Conseil européen,
00:53:40ils sont vraiment focalisés sur trouver un langage commun pour les conclusions publiques.
00:53:47Ici, c'est informel.
00:53:48Donc, c'est pour la première fois qu'ils vont vraiment discuter.
00:53:52C'est une bonne étape.
00:53:55Mais il faut aussi dire que les dirigeants et les pays de l'Union européenne
00:53:59ne sont divisés qu'en l'évaluation de la nature du problème.
00:54:05Il faut aussi dire que certains États sont dirigés par des partisans de Trump.
00:54:12Donc, on a nommé Melanie et Orban.
00:54:20Il y a aussi un nombre croissant des États qui sont favorables à la Russie de Poutine.
00:54:28Donc, pourquoi ?
00:54:30Il faut vraiment s'interroger sur pourquoi il y a ces divisions en Europe.
00:54:36C'est vraiment une époque dont l'Europe se trouve très vulnérable
00:54:42parce qu'il y a des problèmes de sécurité, on en a déjà parlé.
00:54:45Il y a des problèmes dans l'économie.
00:54:48L'Europe est vraiment derrière.
00:54:55À l'arrière, en face de la compétition entre les États-Unis et la Chine
00:55:02sur tout ce qui regarde la productivité, la compétitivité et l'innovation technologique.
00:55:10Il y a des rapports d'Enrico Letta, de Mario Draghi qui étaient publiés pendant l'année.
00:55:17Mais il y a un consensus entre les experts qu'il faut prendre ces propositions sérieusement.
00:55:25Mais il n'y a pas du tout un consensus politique.
00:55:29Et enfin, on a un problème de démocratie et de gouvernabilité en Europe.
00:55:35Et ici, je vois deux tendances.
00:55:40Il y a des gouvernements démocratiques mais faibles, souvent des gouvernements de minorité.
00:55:47Et après, il y a un nombre croissant de gouvernements qui sont gérés par l'extrême droite.
00:55:55Et ils ne sont pas alignés sur l'idée de trouver des solutions européennes, des solutions partagées.
00:56:04Donc pour moi, à mon avis, les choix sont difficiles mais sont clairs.
00:56:09Mais on a besoin de trouver un espace commun et une stratégie commune pour affronter ces périodes si vulnérables pour l'Europe.
00:56:22Merci.
00:56:23Merci Madame Balfour. Et votre français était quasi parfait.
00:56:28On a le plaisir d'accueillir M. Perrin, Cédric Perrin qui est président de la commission des affaires étrangères
00:56:33et qui, je crois, nous dira un petit mot tout à l'heure lors du cocktail.
00:56:38Alors selon la règle que j'ai fixée de façon unilatérale,
00:56:42je vais vous passer la parole aux ambassadeurs en commençant peut-être par M. l'ambassadeur de Pologne
00:56:48qui n'a pas demandé la parole d'ailleurs mais à qui je vais la donner parce que bon,
00:56:52il va assumer avec tous ses collègues une présidence pendant six mois.
00:56:58M. le Président, Madame la Sénatrice, M. le Sénateur,
00:57:03d'abord, merci beaucoup pour cette invitation.
00:57:07Mon discours aujourd'hui n'était pas du tout prévu, mais je traite ça comme un laissé
00:57:13juste avant l'examen devant votre commission, la commission des affaires étrangères, la semaine prochaine.
00:57:21Donc d'abord, permettez-moi de vous présenter le vœu au nom de notre présidence,
00:57:26le vœu de Meijer des très bonnes années 2025 et j'espère que je peux exprimer ce vœu au nom de tous,
00:57:36toutes et tous les ambassadeurs autour de cette table.
00:57:40Le sujet aujourd'hui, l'Union européenne face à la nouvelle présidence de Président Trump,
00:57:48c'est quelque chose d'absolument important et c'est le sujet qui nous préoccupe tous.
00:57:59Permettez-moi de rappeler peut-être quelques propos qui étaient exprimés par notre ministre des affaires étrangères, Arado Safikovski,
00:58:10qui est venu la semaine dernière à Paris et qui est devenu le keynote speaker,
00:58:17qui est invité spécial pour la conférence des ambassadrices et des ambassadeurs de France.
00:58:24Donc le 6 janvier, le ministre des affaires étrangères, monsieur Arado Safikovski,
00:58:30qui a participé à cette conférence tellement importante des ambassadeurs et des ambassadrices de la République française à Paris,
00:58:40a présenté à cette occasion les plans pour les six prochains mois, soulignant les défis auxquels l'Union européenne est confrontée.
00:58:50Permettez-moi de dire vraiment en quelques mots ce qu'il a dit en tout ce qui concerne nos relations avec les Etats-Unis.
00:58:57Lors de son discours, monsieur Sikorski a souligné l'importance prioritaire d'une coopération étroite avec les Etats-Unis.
00:59:07Je cite, nous augmenterons la responsabilité stratégique de l'Europe et ses capacités de défense,
00:59:17non pas en opposition aux Etats-Unis, mais en harmonie stratégique avec Washington.
00:59:25Cela nécessitera de la compréhension et de compromis de deux côtés de l'Atlantique.
00:59:35À part ça, je pense que c'est important de rappeler que la Pologne a également assuré un soutien supplémentaire à l'Ukraine dans la place de l'Union européenne.
00:59:48Monsieur Sikorski a également souligné les efforts visant à accélérer l'arrégissement de l'Union européenne vers l'Est et le Sud-Est.
01:00:00Il a aussi indiqué la nécessité pour l'Union européenne d'assumer une plus grande responsabilité pour sa propre sécurité et d'augmenter ses dépenses.
01:00:15Le ministre Sikorski a constaté que malheureusement, la Russie de Poutine reste l'une des menaces sécuritaires les plus graves pour l'Europe,
01:00:27mais aussi pour l'ordre mondial. Il a indiqué que l'objectif de Poutine demeure la destruction irréversible de l'architecture de sécurité européenne.
01:00:40Il a ajouté, il a précisé que l'Europe est beaucoup plus forte que ne le croit le dirigeant russe et que la Russie est bien plus faible que ne le pensent les nombreux européens.
01:00:58Les ministres ont estimé que l'Ukraine mérite la paix, mais que cette paix doit être conclue dans des conditions équitables et non par une capitulation.
01:01:11Nous ne devons pas, je cite, nous ne devons pas imposer de limites temporelles strictes à notre soutien. Cela encouragerait la Russie à poursuivre les combats.
01:01:25Au lieu de cela, nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour améliorer la position de Kiev lors des négociations futures.
01:01:36Je trouvais ça important de vous citer. Cela ne concerne pas directement le sujet de notre débat, mais que vous puissiez comprendre mieux notre position.
01:01:47Je vous remercie encore, Monsieur le Président, pour votre aimable invitation.
01:01:51Et j'ajoute que si vous avez de ses nouvelles ou si vous échangez avec lui, vous pourrez transmettre mon bonjour amical à Bogdan Klisch, qui est maintenant ambassadeur aux États-Unis, je pense, d'ailleurs.
01:02:02Absolument.
01:02:06Des ambassadeurs qui souhaitent s'exprimer avec ce défi que je leur ai donné de s'exprimer deux minutes ?
01:02:14Oui, Monsieur l'ambassadeur de Chypre.
01:02:16Merci. Merci, Monsieur le Président, et merci à nos invités.
01:02:25Je vais commencer par la dernière chose que notre collègue polonais l'a dit, les compromis.
01:02:32Je pense que pour tous les gens qui ont travaillé avec l'Union européenne, les compromis sont la clé de notre succès.
01:02:40Il n'y a aucune décision qui est prise au niveau de Bruxelles qui est sans compromis.
01:02:45C'est-à-dire qu'au Conseil européen, tous les 27 sont autour d'une table.
01:02:50Ils arrivent très souvent, après des discussions très difficiles, d'avoir des compromis.
01:02:56Donc pour la relation avec les Américains, je pense maintenant qu'il faut faire des compromis des deux côtés.
01:03:01Il faut prendre aussi en compte qu'on a beaucoup d'éléviés à notre disposition, d'éléviés au niveau politique, économique, énergétique.
01:03:08Je vous donne un exemple, on ne peut pas avoir la paix en Proche-Orient sans l'Europe,
01:03:13parce que c'est l'Europe qui va faire les reconstructions et les processus de démocratisation.
01:03:18Alors pourquoi je dis ça ? Parce que j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre analyse.
01:03:23Je suis d'accord avec les défis qu'il y a devant nous à cause de ce changement et le caractère imprévu de Monsieur Trump.
01:03:31Mais en même temps, il faut prendre en compte qu'il y a une analyse qui s'est faite à Bruxelles depuis longtemps
01:03:36et en préparation pour cette transition, en préparation qui prend en compte l'élévier que j'ai mentionné avant.
01:03:42Donc ma question c'est la suivante, avant de procéder avec des positions ou d'une redéfinition radicale,
01:03:50vous ne pensez pas qu'il faut donner un petit peu d'espace pour voir comment ça va se développer ?
01:03:56S'il y a l'espace pour les compromis mutuels et comment on peut redéfinir cette relation en prenant aussi en compte
01:04:03que peut-être c'est le moment pour l'Union européenne de grandir aussi un petit peu,
01:04:07assumer plus les responsabilités et travailler un petit peu plus pour l'autonomie stratégique.
01:04:12C'est un projet que la France a commencé.
01:04:14Les présidences, les trios des présidences sous l'Apollon qui finissent avec nous, ça va avancer très rapidement. Merci.
01:04:24Merci Monsieur l'Ambassadeur. Alors bien sûr, je m'adresse aussi aux représentants des ambassades.
01:04:29S'ils veulent prendre la parole, pas de problème.
01:04:34Bon, je suppose que oui. Monsieur l'Ambassadeur de Little.
01:04:38Merci beaucoup Monsieur le Président. C'était très intéressant, toutes les quatre interventions.
01:04:44Juste pour dire que, bon, en Lituanie, on pense que quand même on peut avoir la cohérence entre ces deux approches.
01:04:57D'une part, renforcer la relation avec les Etats-Unis et d'autre part, bien sûr, renforcer la capacité de l'Europe d'agir et de développer son propre défense européenne,
01:05:10notamment aussi avec l'aide du commissaire lituanien Andrew Scobeloo, chargé de la défense de l'espace.
01:05:16On pense que quand même c'est compatible.
01:05:20Il faut trouver, chercher les moyens communs, transformer ces trois dépendances que vous avez bien évoquées sur la défense, l'énergie et le digital,
01:05:31transformer aux avantages de notre possible partenariat avec les Etats-Unis dans le domaine de la défense, dans le domaine énergétique, dans le domaine digital
01:05:43et là, le sommet de l'intelligence artificielle à Paris, je pense, sera une opportunité extraordinaire et très importante
01:05:52pour justement diminuer notre dépendance commune vis-à-vis la Russie et la Chine sous les technologies, sous la chaîne d'approvisionnement et sur les matériels critiques.
01:06:07Donc, on reste réaliste en Lituanie, mais quand même, on bien voudrait rester aussi optimiste,
01:06:16que ce n'est vraiment pas le début de la fin de notre rapport transatlantique très important. Merci.
01:06:25Merci. D'autres demandes de prise de parole ? Oui.
01:06:32Oui, merci. Oui, je crois avoir écouté tout le monde. On peut faire certaines constatations.
01:06:43Donc, tout d'abord, avec l'élection de M. Trump, les Etats-Unis vont devenir un partenaire plus imprévisible,
01:06:53mais les Etats-Unis sont et resteront un partenaire important, tant en tant qu'alliés au sein de l'OTAN et tant d'un point de vue économique.
01:07:07Donc, l'UE doit donc continuer à attacher une grande importance à notre relation transatlantique
01:07:16et pour nous, ces relations doivent aussi rester une priorité de l'Union européenne.
01:07:25Mais ces relations doivent continuer aussi de reposer sur le respect mutuel à travers un dialogue respectué sur tous les sujets.
01:07:39Alors, la question, évidemment, et je crois qu'elle a été évoquée plusieurs fois, pour que l'Union européenne puisse avoir un tel dialogue basé sur le respect mutuel,
01:07:49il y a cependant certaines conditions. La première condition, c'est que l'Union européenne reste unie
01:07:55et, à notre avis, le grand défi de l'Union européenne sera définitivement de garder son unité vis-à-vis des Etats-Unis, mais aussi du reste du monde.
01:08:07Je ne parle pas seulement des Etats-Unis.
01:08:10Pour ça, je crois que l'Union européenne doit avoir une attitude plus proactive, plus stratégique,
01:08:20avec comme objectif majeur de rendre l'Union européenne moins dépendante,
01:08:27tant dans le domaine de la défense que dans le domaine économique.
01:08:33Notamment, on doit devenir moins dépendant, je dirais, de la tech américaine.
01:08:40Nous devons donc renforcer, comme mon collègue Schipriot l'a dit, notre autonomie stratégique dans tous les domaines sensibles.
01:08:52Donc, pour que nous restions un partenaire crédible et respecté des Etats-Unis, l'Union européenne doit devenir économiquement plus compétitive
01:09:02surtout dans les secteurs que je viens d'évoquer, la technologie, l'énergie, évidemment.
01:09:09Nous devons donc aussi à nouveau retrouver une certaine force industrielle.
01:09:15Nous devons nous baser, je crois que ça a été évoqué, sur un marché intérieur renforcé, comme le demandent les rapports Latah et Traghi.
01:09:28En matière commerciale, bon, il y a le risque que les Etats-Unis imposent des tarifs, il est réel.
01:09:36Nous devons, je crois quand même, d'abord discuter avec les Etats-Unis. Il faut avoir des discussions.
01:09:44Après, si ces discussions n'aboutissent pas, bon, alors il faut prendre des mesures défensives.
01:09:51Il faut avoir l'unité d'en prendre, mais prendre des mesures défensives ne doit pas aboutir à abandonner notre attachement au libre-échange.
01:10:02Pour le Luxembourg, c'est très important parce que nous devons garder le libre-échange, mais sans renoncer à des mesures défensives s'il en faut.
01:10:14Nous devons également, dans ce sens, je crois, renforcer nos relations avec d'autres partenaires qui nous sont proches.
01:10:26Donc, l'Europe doit essayer de jouer un rôle plus actif dans le monde entier sans jamais, je crois, pouvoir et vouloir couper nos relations avec les Etats-Unis.
01:10:42Voilà. Ça, c'est un peu notre position.
01:10:44Merci, M. l'Ambassadeur.
01:10:46D'autres prises de parole ? Oui.
01:10:49Merci beaucoup, M. le Président. Mais en fait, sur la même ligne que M. l'Ambassadeur du Luxembourg,
01:10:57en fait, disons que l'expérience de la première présidence de Trump et aussi de la présidence de Biden, en fait,
01:11:03a été que les problèmes les plus grands avec les Etats-Unis ont été sous les plans commercial et économique.
01:11:11Parce qu'à la fin, quand il s'agit des défenses, on a trouvé des accords, une manière de coopérer.
01:11:17Et donc, on peut bien imaginer, même à la lumière des déclarations de M. Trump de dernière semaine,
01:11:25que ce sera aussi le cas pour sa nouvelle présidence.
01:11:29Donc, ce que je me demande, parce que l'Italie aussi, pour des raisons évidentes, est attachée au principe du libre commerce,
01:11:37on a parlé, j'ai entendu plusieurs fois pendant les interventions de nos interlocuteurs que je remercie,
01:11:45la référence au coût que des tarifs imposés par les Etats-Unis auraient pour l'Europe.
01:11:53Mais les tarifs imposés par les Etats-Unis auraient tout d'abord un coût pour les Etats-Unis, même majeur que pour l'Europe.
01:11:59Et donc, c'est intéressant de savoir s'il y a une réflexion sur comment essayer de réagir d'une manière intelligente à ça,
01:12:08en considérant qu'en premier lieu, le coût pour les Etats-Unis, c'est le fait qu'ils pourront peut-être pas trop faire de ce côté-là. Merci.
01:12:21Merci.
01:12:24D'autres interventions ?
01:12:29Je n'en vois pas spécifiquement. J'ai peut-être passé la parole au sénateur qui le souhaite.
01:12:35Il y a Didier Marie qui m'a demandé la parole, vice-président de la Commission. Et puis peut-être qu'on aura une réponse en quelques minutes de votre part.
01:12:46Merci, président. Moi, je voudrais à mon tour remercier nos 4 intervenants, mais aussi l'ensemble des ambassadrices et ambassadeurs présents ou représentés.
01:12:58On est face à un sujet effectivement très particulier. Je crois que les responsables européens et nous-mêmes, les parlementaires,
01:13:10avions intégré depuis la crise du Covid, puis ensuite l'agression de la Russie à l'égard de l'Ukraine, que l'Europe était en faiblesse
01:13:26et que nous avions de nombreuses vulnérabilités, celles que vous avez mentionnées en matière de dépendance économique à l'égard de la Chine,
01:13:36notamment au moment du Covid, en matière énergétique après l'invasion russe en Ukraine, technologique et, bien évidemment, militaire.
01:13:50Un certain nombre de réponses ont été apportées par l'Union européenne au fur et à mesure de ces crises, mais de façon un peu déstructurée dans l'urgence.
01:14:01Je pense en particulier au plan de relance qui a été engagé, à l'emprunt commun qui a permis effectivement de mobiliser des moyens nécessaires pour répondre aux difficultés que nous rencontrions.
01:14:14Mais je crois aussi que la rapidité et la violence avec laquelle M. Trump, qui n'est pas encore président, mais qui est élu, a surpris et peut-être déstabilisé les responsables européens.
01:14:34Car si nous avions bien compris que les États-Unis étaient notre allié, mais un allié de plus en plus exigeant et qui nous posait un certain nombre de difficultés, notamment dans le domaine commercial,
01:14:50nous étions toujours persuadés qu'il resterait notre allié.
01:14:54Or, on voit des déclarations extrêmement surprenantes pour nous, Européens, qui attestent d'un changement de paradigme du côté américain.
01:15:06Et donc, on voit poindre de nouvelles difficultés, de nouvelles inquiétudes, à la fois avec M. Musk qui vient soutenir des mouvements qui interfèrent dans les processus électoraux de certains pays.
01:15:22Je pense en particulier à l'Allemagne, avec un risque d'une négociation entre les États-Unis et la Russie au sujet de l'Ukraine, de laquelle on pourrait n'être que spectateurs.
01:15:35Ou encore avec les questions qui ont été soulevées en matière de droits de douane.
01:15:44Moi, je pense que par rapport à tout ça, il faut effectivement être inquiet, mais en même temps, on a un certain nombre d'atouts à faire valoir, et ceux-ci doivent être mobilisés.
01:15:58À mon sens, la première chose que nous devons faire en tant qu'Européens, c'est de faire respecter le droit international.
01:16:05Ça a été dit tout à l'heure, les réponses aux propos de M. Trump sur le Greenland ont été assez peu relevées.
01:16:16Le président français, le chancelier allemand se sont exprimés, mais il n'y a pas eu d'expression forte de l'Union européenne sur le sujet.
01:16:26Ça me paraît être le premier point. Le deuxième point, c'est que nous avons des lois européennes et que ces lois européennes doivent être respectées.
01:16:33Et je pense en particulier au DSA et aux moyens qu'il donne d'obliger les opérateurs des GAFA à respecter les normes que nous nous sommes données.
01:16:48Il est totalement inadmissible de laisser M. Musk continuer de faire ce qu'il fait, alors que nous avons des outils pour l'en empêcher.
01:16:57Une première enquête avait été diligentée par le commissaire breton. Il faut absolument que ces choses-là se mettent en place très vite et que les conséquences en soient tirées.
01:17:08Ensuite, c'est ce que nous plaidons depuis des années. Il faut développer les réponses européennes.
01:17:16By European Act, production européenne, plateforme numérique européenne, tout ça doit être porté, même si ça nécessite bien évidemment du temps.
01:17:26Et puis, je crois, point essentiel, renforcer la législation européenne contre les atteintes à la démocratie.
01:17:32Parce que, comme vous l'avez dit, c'est ce qui nous différencie, c'est ce qui fait notre spécificité et c'est ce qui fait aussi notre force.
01:17:41En tout état de cause, je pense que la réponse est éminemment politique.
01:17:47Et nous, en tant que parlementaires, on ne peut faire que ce que l'on peut faire à notre niveau.
01:17:54Mais je crois qu'on se doit de mobiliser aussi nos responsables nationaux pour qu'ils prennent totalement conscience des difficultés qui se présentent à nous
01:18:08et apportent des réponses politiques communes à l'échelle de l'Union européenne.
01:18:13En tout cas, moi, c'est ce à quoi j'aspire et j'espère qu'effectivement, dans les semaines qui viennent,
01:18:18parce qu'il ne s'agit pas d'attendre longtemps, mais dans les semaines qui viennent, des signaux extrêmement puissants soient envoyés à l'administration Trump
01:18:28sur la base de ce que vous avez dit. Il ne s'agit pas de se coucher par terre et de prendre des coups.
01:18:36Il s'agira dans un dialogue exigeant de montrer que nous avons des valeurs, des intérêts, que nous les défendrons fortement.
01:18:45Merci. Martha Tsidrak, je vous interpelle sur le temps, les collègues.
01:18:51Merci, Président. Mesdames et messieurs les ambassadeurs, mesdames et messieurs les intervenants, merci beaucoup pour vos différentes interventions.
01:19:00En tout cas, moi, je vais essayer de synthétiser tous les éléments très riches que vous avez partagés avec nous ce soir.
01:19:08Je retiens bien évidemment les vulnérabilités sur lesquelles chacun dans vos domaines vous les avez développées.
01:19:14L'un d'entre vous, je crois que c'était Madame Balfour, a évoqué quand même une vulnérabilité qui, de mon point de vue, est très importante.
01:19:22C'est celle qui correspond à ce que vous avez défini comme des réponses non coordonnées.
01:19:27Et ces réponses non coordonnées, en réalité, sont directement liées à nos institutions, c'est-à-dire le fonctionnement même de l'Union européenne tel que nous l'avons imaginé à une époque.
01:19:37Et peut-être faut-il s'interroger aujourd'hui. C'est une question que j'ai vis-à-vis de vous quatre.
01:19:42Faut-il imaginer, parce que c'est des débats qui reviennent dans les parlements nationaux, peut-être de manière urgente, importante, accentuée,
01:19:52se réinterroger sur ce que véritablement sont nos institutions aujourd'hui.
01:19:57Qui a mandat pour parler politique, puisque nous abordons des sujets éminemment politiques.
01:20:03Par rapport, cela a été évoqué, des intérêts communs que nous avons à défendre.
01:20:08Je prends pour exemple aussi cette illustration autour du Groenland.
01:20:13En fait, l'Union européenne l'oublie, et moi je suis d'ailleurs assez étonnée que ça ne revienne pas plus souvent dans les débats.
01:20:19Nous avons en réalité, avec les territoires ultramarins français et danois, le plus grand espace maritime.
01:20:25On n'en fait absolument pas valoir, ne serait-ce que vis-à-vis des Etats-Unis, qui ont aussi un espace maritime énorme.
01:20:32La mer, c'est de la ressource, la mer c'est de la géopolitique, c'est de la stratégie, c'est de l'espace.
01:20:37Il n'y a pas que la terre sur cette planète. On a évoqué l'espace, mais je pense que l'espace maritime n'a peut-être pas été suffisamment investi dans nos réflexions d'Européens.
01:20:46Et d'ailleurs, le sujet du Groenland aujourd'hui se pose de manière, enfin avec acuité, parce que nous avons cette route de l'Arctique qui a été ouverte.
01:20:54Mais pourquoi a-t-elle été ouverte ? Et là, Trump a des positions très claires, c'est le dérèglement climatique.
01:21:01Il y a quelques années encore, on ne s'interrogeait pas sur cette route depuis l'Asie vers l'Europe et vers les Etats-Unis, qui raccourcit énormément les trajets.
01:21:12Quid de tout cela ? Pourquoi ces interrogations-là ne sont peut-être pas, en tout cas c'est le sentiment que j'ai moi en tant que parlementaire française,
01:21:21ne sont pas véritablement prises à bras-le-corps pour ce qu'elles ont véritablement de stratégie ?
01:21:26Et vous avez aussi, je crois que c'est vous Madame de Hoop, vous disiez, nous avons des outils aussi de négociation, nous avons des outils peut-être même de pression.
01:21:35Pourquoi on ne s'en sert pas ? Voilà, je vous remercie.
01:21:40Merci, merci Martha. Oui, je parlais tout à l'heure des espaces contestés, donc espaces, maritimes, espaces aériens et numériques.
01:21:47Donc on est vraiment sur toutes ces dépendances. Allez, Catherine.
01:21:52Je voulais intervenir, mesdames et messieurs les ambassadeurs, mesdames et messieurs les intervenants, sur ce qui a été cité à plusieurs reprises,
01:22:00à savoir certaines autonomies, ou plutôt certaines dépendances, pardonnez-moi, qui peuvent être potentiellement dangereuses pour nos modèles politiques, démocratiques, civilisationnels,
01:22:10à savoir celle par laquelle tout finalement passe et sur laquelle tout repose, qui est la dépendance digitale, puisque vous l'avez très bien souligné.
01:22:19La question énergétique, relever les défis climatiques de l'environnement, ça passe aussi par la transition digitale.
01:22:27Tout est interdépendant aujourd'hui. Donc je pense qu'il y a une vraie question qui va consister dans les semaines et mois à venir,
01:22:37à réfléchir comment, tout en prenant en compte nos forces et nos faiblesses, nous allons laisser passer 30 ans où nous sommes restés plutôt utilisateurs,
01:22:47spectateurs de cet écosystème qui était en train de se construire, avec un Internet qui devient le terrain d'affrontement mondial,
01:22:54qui est pour la domination du monde par l'économie et la connaissance, et plutôt d'en être acteurs, nous avons plutôt contribué à développer un marché numérique des usages,
01:23:04et non pas de l'industrie, très clairement. Maintenant, nous avons beaucoup d'atouts par ailleurs.
01:23:10Donc je pense qu'il ne faut pas baisser les bras et se dire comment, avec ces atouts, on peut aussi, dans une discussion avec ces entreprises extra-européennes,
01:23:21tenter d'avancer sur les nouvelles révolutions à venir, mettre un accent plus fort sur notre politique industrielle, revoir peut-être le plan boussole numérique à l'horizon 2030.
01:23:33Je crois qu'il y a une révision prévue en 2026. Nous avions noté ici, dans le cœur de nos rapports, qu'une approche plus stratégique, moins en silos, moins pays par pays,
01:23:45méritait d'être mise en œuvre pour peut-être mettre l'accent sur tel ou tel aspect. Je ne vais pas revenir dans le détail.
01:23:55Mais au-delà de ça, il y a cette question de la régulation que mon collègue Didier Mariet a évoquée, l'application du DMA, du DSA, du Cloud Act.
01:24:03En ce moment, nous travaillons ici au Sénat, au sein d'une commission spéciale à la transposition de la directive NIS2.
01:24:08Vous êtes aussi dans vos pays, peut-être, dans ces travaux à venir. Et donc, on est extrêmement préoccupés par les questions de cybersécurité, et tout est bien surlié.
01:24:19Alors, on se dit pourquoi, à quoi bon trail à tout ça si on ne fait pas appliquer, en tout cas en Europe, cette exigence et cette régulation qu'on a réussi,
01:24:28enfin, après tant d'années, à mettre en œuvre et qui sont un peu des étalons d'or mondiaux.
01:24:34Francis Hogan, qui est venu témoigner ici, même dans cette salle il y a quelques années, nous disait à quel point le RGPD avait pu être un étalon d'or mondial, tout de même.
01:24:42Donc, on reste quand même quelques points de référence aussi pour certains pays dans le monde.
01:24:46Moi, ce qui me préoccupe surtout dans l'application du DSA et ce qui se passe avec les provocations d'Elon Musk,
01:24:55quand je vois le résultat de certaines élections, en Roumanie les élections qui doivent être annulées,
01:25:01ce qui se prépare en Allemagne, il n'est pas écarté que le Brexit ait été dû à des ingérences étrangères, très clairement.
01:25:08Nos homologues de la Chambre des communes avec laquelle nous travaillions à l'époque avaient de forts soupçons à travers aussi la faiblesse des plateformes,
01:25:16de plus à faire qu'en bruta ethica.
01:25:18Bref, ce qui est en jeu, c'est quand même la manipulation de nos modèles politiques, nos démocraties,
01:25:23quel que soit le résultat des élections dans chacun de nos États membres.
01:25:27Donc, ne pas prendre conscience, ne pas appliquer ces réglementations, c'est aussi affaiblir nos propres systèmes politiques
01:25:38et notre souveraineté politique de chacun de nos États membres dans le résultat des élections.
01:25:46Moi, je trouve que c'est un point extrêmement grave.
01:25:49Le deuxième point qui est assez sérieux, c'est cette capacité que nous avons aussi à faire vivre nos médias.
01:25:55Nous avons eu cette initiative du Freedom Media Act, sur laquelle nous avons aussi travaillé.
01:26:01Mais, il y a encore quelques jours, Reporter sur Frontière dénonçait le fait que Twitter n'avait toujours rien fait pour corriger une usurpation d'identité de Reporter sur Frontière
01:26:13avec des propos qui étaient faux, dans un problème d'identification.
01:26:19C'est extrêmement grave, parce que si notre presse, nos médias, qui combattent régulièrement aussi les fausses nouvelles, la manipulation de l'information,
01:26:27sont affaiblis dans des systèmes où, qui plus est, ces géants du numérique refusent d'appliquer la juste rétribution de la valeur ajoutée qu'ils captent
01:26:36en mettant sur leur plateforme les contenus, avec l'application des droits d'auteur et droits voisins,
01:26:44on affaiblit considérablement nos démocraties. Autant fermer les médias.
01:26:50Donc, c'est vraiment nos démocraties qui sont en jeu plus fondamentalement, à travers aussi toute l'application de cette réglementation.
01:26:58Donc, je voulais avoir un petit peu votre ressenti. Est-ce que vous avez conscience de cela, dans vos pays respectifs,
01:27:03et comment on peut y travailler ensemble, tout en restant dans une position, pourquoi pas, ouverte,
01:27:07aussi pour continuer à construire, de toute façon, ces révolutions qu'on est amenés à mener ensemble ?
01:27:12Voilà pour cette table ronde au Sénat sur les défis de l'Union européenne face à la présidence Trump.
01:27:17De nombreuses inquiétudes pour l'Union européenne avec l'arrivée du milliardaire américain à la Maison-Blanche.
01:27:22Il souhaite augmenter les droits de douane et accélérer la fin de la guerre en Ukraine.
01:27:27C'est la fin de cette émission. Merci de l'avoir suivie.
01:27:29Continuez à suivre l'actualité politique et parlementaire sur notre site internet publicsenat.fr.
01:27:34Je vous souhaite une très bonne journée sur Public Sénat.
01:27:42Sous-titrage Société Radio-Canada

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