Z&T, c'est le duo puissant que forment Zouz et T.A. Un duo qui propose des textes de slam et de rap forts et engagés et qui puise son inspiration dans la colère et les injustices sociétales. Après avoir performé sur plusieurs scènes de la capitale, les deux bruxelloises seront sur celle du Théâtre National (Wallonie-Bruxelles) du 15 au 18 janvier. Une nouvelle et belle étape qu'elles évoquent, entre autres, avec Sarah Saadi-Garcia.
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00:00Nous, on est le duo ZNT, LCZOOZ et LCTA.
00:04Cher harceleur, merci.
00:06Merci à vous d'incarner notre muse.
00:08On puise en vous et en votre frustration,
00:10qui à force d'elle-même s'use.
00:11On crache du beat sur vos ombres, comme se le fait l'action.
00:13Ouais, grâce à vous, nos flots fusent.
00:15Le premier texte qu'on a écrit ensemble,
00:17ça s'appelle « Cher harceleur, merci ».
00:20Il est né pendant le confinement.
00:21C'est ça.
00:22En fait, moi, je faisais face à une situation d'un harceleur
00:25qui sévitait sur les réseaux sociaux.
00:27Pendant le confinement, il a ressévi.
00:29Du coup, elle est arrivée en bas de chez moi, en scoot.
00:31Et elle a dit soit on fait un clip, soit on fait un meurtre.
00:34Du coup, on a fait un clip.
00:35Du coup, ça a bien marché.
00:37On s'est fait inviter par plein de collectifs pour faire ce slam et tout.
00:39Notamment le collectif Oui Marche.
00:41Oui Marche, on l'a fait pour la première fois, en tout cas, en sauvage.
00:45En sauvage, c'était trop bien.
00:46Toi qui peut-être te sentiras concernée
00:48à court d'arguments, tuégué des morceaux d'injures consternées.
00:51Mais tu sais, même avec la meilleure volonté,
00:53personne comprend contre qui t'essayes de te liguer.
00:55Peut-être tant que tu captes que t'es solo dans cette guerre
00:57contre un capital féminin qui ne te calcule pas, gamin.
00:59Nos textes solos étaient déjà assez engagés sur certaines thématiques.
01:03Et puis très vite, tout de suite, en fait, on a continué à écrire à deux.
01:08Et c'était à chaque fois des textes qui souvent relataient
01:13soit certaines situations de violence ou alors des injustices sociétales
01:15dont on était témoin ou qu'on avait vécu.
01:17Et ça a très vite pris ce chemin-là.
01:19Je pense que la colère est hyper importante dans notre travail.
01:22Slash humour.
01:23Oui.
01:24Parce que c'est ça, on aime bien jouer avec ça.
01:25Déjà, vu qu'on vient du slam,
01:26il faut savoir qu'une des règles du slam,
01:28c'est de parler de soi et de partir de soi.
01:30Donc, de toute façon, c'était d'emblée des textes authentiques.
01:33Souvent, tous les premiers textes qu'on a écrits,
01:37ça part d'une situation qu'on a vécue en commun ou l'une et l'autre.
01:39Hop, on écrit dessus, ça en fait un texte.
01:42Donc, c'est à chaque fois parti, effectivement,
01:44souvent de zones de colère ou de constats de certaines injustices.
01:47Et de là sont nés des textes.
01:49Donc déjà, je pense que ça a sa place comme mélange créateur,
01:52en tout cas dans notre cadre à nous.
01:53C'est clair. Il faut la transformer, la colère.
01:55Même dans le rap, je trouve que cuiser dans la colère, c'est trop bien.
01:58C'est hyper efficace.
02:13Moi, dans le milieu du slam,
02:14je trouve qu'on découvre plein de formats d'écriture,
02:17de chemins d'écriture qui sont hyper intéressants.
02:19Déjà, pour enrichir nos propres vécus,
02:21mais aussi dans le travail de l'écriture, de la langue.
02:23Il y a plein de formes d'écriture, de manières de raconter qu'on découvre.
02:27Tu vois, par exemple, quand tu vas dans une école de théâtre,
02:30on t'apprend à effacer ton accent.
02:32On t'apprend à bien articuler et tout.
02:33Et en fait, quand tu vas à une scène slam,
02:35tu apprends aussi à mettre en valeur toutes tes singularités ou tes particularités.
02:40C'est très beau dans le slam.
02:41J'aime bien ce genre de format court.
02:43Tu rentres dans un univers comme ça, de manière très profonde,
02:46en très peu de temps.
02:47Moi, j'adore ça.
02:48Il y a de plus en plus de mixité dans la scène slam
02:50qu'on ne voit pas encore, malheureusement, énormément ailleurs.
02:53Dans le rap.
02:55Notamment dans le rap.
03:11On est nous-mêmes.
03:14Après, c'est clair qu'on a travaillé avec notre dramaturge
03:17pour pousser le curseur de nous-mêmes
03:20et pour travailler à partir d'improvisation.
03:22Ça, c'est clair.
03:23Tu crois que ça met combien de temps pour aller à Vignon ?
03:27J'ai regardé sur Google Maps.
03:29C'est genre 7 jours à pied.
03:32Mais on est nous-mêmes.
03:33Il n'y a pas de rôle, il n'y a pas de personnage.
03:35Et tout ce qu'on dit est vrai.
03:36C'est ça.
03:37Il y a un travail, elle pense que je mens sur des aventures de mon scooter.
03:42Or, je ne mens pas.
03:43Tout ce que je dis sur mon scooter dans le spectacle, je le dis.
03:45À le soir, tout est vrai.
03:46Mon scooter ne mens pas.
03:47Mon scooter est une star.
03:48Toujours est-il qu'effectivement,
03:51plutôt le travail pour le spectacle a été cadré d'une certaine manière.
03:54On a touché à d'autres formes de travail d'expérimentation sur le plateau.
03:57Mais notamment aussi en s'entourant d'une équipe pour son et lumière.
04:01Parce que rarement dans le slam, tu fais une crème lumière et son pour ton slam.
04:04Là, il y a eu tout un travail scénique.
04:07C'est une démarche théâtrale.
04:08Mais pas de personnage.
04:09Genre, l'année passée, le directeur du National vient nous trouver et nous dit...
04:13Vas-y, je suis chaud, je vous programme.
04:16Notre bébé, notre grand projet.
04:18On va le présenter au Théâtre National.
04:20C'est clair qu'on est hyper contentes.
04:23C'est trop bien.
04:25Et effectivement, on a envie que ce soit la voie
04:29pour que d'autres spectacles de slam et de rap puissent aller après sur ces scènes-là.
04:33C'est clair.
04:34On avait peur au début.
04:35Au début, on s'était posé la question.
04:37Tiens, rencontrer dans les institutions, qu'est-ce que ça implique ?
04:40Qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça raconte ?
04:42Et en même temps, très vite, on a tellement...
04:44On est sûrs de qui on est maintenant.
04:45On sait ce qu'on fait.
04:46Je pense qu'on était tellement clairs au début, nous, sur ce qu'on ne voulait pas,
04:50qu'on est assez rapidement arrivés à quelque chose qui nous convenait.
04:53En assimilant un peu cette hybridité des codes qui fonctionne plutôt bien.
04:58Et en acceptant aussi...
04:59Par exemple, on a une partie dans le spectacle, je vous laisserai découvrir,
05:02qui a tout un rapport avec le son et la lumière
05:06qui permet de rentrer plus dans une bulle vraiment textuelle
05:09qui s'appelle Sur le boulevard,
05:10qui est aussi le nom d'un ouvrage qui va sortir, d'ailleurs, le 15,
05:13qui est dit de la poésie, Sur le boulevard.
05:14Ça s'appelle aussi Sur le boulevard,
05:15qui est là plus...
05:17Un moment non pas théâtral, mais en tout cas plus un moment vraiment spectacle
05:20où le spectateur peut s'immiscer réellement,
05:23donc autant avec le son et la lumière que ce qui est dit,
05:25dans plein d'images de la ville, de Bruxelles, de situations.
05:28Et en fait, on s'est rendu compte, justement, en créant Bitume,
05:31que le liant du spectacle...
05:32Évidemment, il y a plein de thématiques qui sont liées au spectacle,
05:34mais il y a la ville aussi.
05:35Il y a la ville qui est très présente parce que...
05:38Alors, c'est beau et c'est triste à la fois.
05:39C'est le microcosme de l'exacerbation de plein de thématiques, plein de situations.
05:49On est co-créatrices, du coup, du collectif Anticyclone.
05:51Ouais, qui est un collectif où on n'est que des personnes finta.
05:55Tu veux expliquer finta ?
05:56Finta, c'est l'acronyme de Femmes intersexes non binaires trans à genre.
06:00Du coup, on est un collectif de personnes finta
06:02où on crée des événements inclusifs, safe et féministes
06:06pour visibiliser les personnes finta,
06:08pour faire en sorte qu'on collabore plus ensemble
06:10dans le milieu du hip-hop, du rap, du slam.
06:13C'est ça, parce qu'on a constaté deux choses.
06:15Déjà, dans le rap, beaucoup dans les open mics,
06:18il n'y a quand même pas eu une giga grande place pour les personnes finta.
06:22Les propos tenus sur scène aussi n'encouragent pas toujours les personnes finta à prendre le mic.
06:25Pareil, slam de base, hyper masculin.
06:27Et puis, il y a Lisette Lombé, Joy Slam qui sont arrivées dans le game.
06:31Et là, elles ont créé des ateliers en non-mixité aussi.
06:34Et du coup, elles ont créé une communauté notamment avec le collectif Elle Slam.
06:38Et un des mantras, c'est « ta lumière ne me fait pas ombrage »,
06:42« seul, ça n'a pas de sens ».
06:44Il n'y a que des mantras comme ça, de sororité et d'elfité qui sont magnifiques.
06:48Et du coup, nous, on a envie de reproduire ça dans le rap aussi.
06:51Programmatrice, mon avis pour Progra.
06:53Zouz, t'en penses quoi de lui ?
06:55J'espère que t'as fait des progrès.
06:56Pardonnez, c'était pas au programme.
06:59Ils voient tous les meufs en diablesse.
07:01Faites-les avec la sorcière.
07:03Au lieu d'avouer leur faiblesse, je vais faire buzzer mes ex.
07:07Nos carrières artistiques ont grandi en même temps que notre chemin militant.
07:13C'est-à-dire que pendant le confinement, ces années-là,
07:16on a été beaucoup dans des collectifs militants.
07:19Et du coup, c'est là qu'on a rencontré toutes sortes de gens
07:23qui nous ont appris tellement de choses.
07:25Le rapport artistique et le rapport au militantisme
07:28est complètement l'essence de bitume, tant dans le fond que dans la forme.
07:33Surtout dans le slam et dans le rap.
07:34Du moment que tu portes tes propres mots,
07:37c'est politique, malgré toi.
07:39Quoi que tu parles, c'est politique.
07:42Tu choisis ce que t'en fais dans le fond et dans la forme,
07:45mais nous, c'est ce qu'on se dit quand on rentre dans les institutions de théâtre.
07:49C'est aussi de nous questionner.
07:51On a la chance de pouvoir porter ces paroles-là sur le plateau.
07:54Qu'est-ce qu'on en fait ? Pourquoi on y va ? Pourquoi on n'y va plus ?
07:57Parfois, il y a aussi des scènes ou des lieux qu'on a refusés
08:00pour certaines raisons qui sont liées, je pense,
08:04à l'essence même de notre art.
08:06Parfois, si des démarches ne correspondent pas à nos visions de certaines choses
08:09ou bien entraver notre vision de plusieurs choses,
08:12on peut refuser aussi.
08:14Il y a cet aller-retour tout le temps entre l'underground et l'institutionnel qui est important.
08:35LE SOIR
08:37Repensons notre quotidien.