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Investisseur et ancien actionnaire du Racing Club de Strasbourg, Pierre-Emmanuel Weil était l'invité de l'After Foot ce mardi sur RMC pour évoquer la multipropriété dans le football. Ce modèle peut-il être vertueux ? 

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Transcription
00:00Daniel Riolo, Florent Gautreau et Jimmy Braun sont là pour parler, pour parler pognon, parler multi-propriétés
00:05avec Pierre-Emmanuel Veil qui est avec nous. Pierre-Emmanuel, bonsoir.
00:08Bonsoir Gilbert.
00:10Investisseur, ancien actionnaire du Racing Club de Strasbourg car Pierre-Emmanuel a gagné à la grande loterie de la vie.
00:14Homme d'oseille.
00:16Il est né Alsacien.
00:18On va pas rouvrir un débat
00:20sur la choucroute ?
00:22De la mer ?
00:24Je peux le tenir mais je pense que vous êtes déjà passé.
00:26On est déjà passé effectivement, Gilbert s'est ridiculisé.
00:28Bon, je précise qu'évidemment
00:30t'es un spécialiste de toutes ces questions multi-propriétés,
00:32t'es investi sur toi-même,
00:34t'as même démarré ta carrière dans le foot
00:36avec Jean-Claude Darmon
00:38il y a quelques années maintenant.
00:40La Mondart.
00:42C'était votre première boîte, je crois qu'il y avait une boîte qui s'appelait La Mondart.
00:44Ah bon ? C'est vrai.
00:46C'était juste comme ça, un petit verlan.
00:48Ça brassait bien en mettant les panneaux autour du...
00:50Ah d'accord, j'avais pas capté le verlan.
00:52Il avait juste fait ça comme pour créer une boîte, il l'avait appelée Mondart.
00:54Jamais très original
00:56dans ces moments-là.
00:58Tant que ça tourne...
01:00Il a inventé beaucoup de choses, y compris les panneaux tournants
01:02par exemple, qui n'existaient pas avant lui.
01:04C'est ce qui a fait sa fortune au départ.
01:06C'est sûr que les panneaux tournants, tu vends plus de pubs.
01:08Les panneaux tournants, maintenant LED.
01:10Maintenant les LED, c'est plus simple.
01:12Bon, il est plus dans le foot d'ailleurs.
01:16Il est toujours...
01:18Il vient souvent aux matchs du PG.
01:20Toujours grand passionné de foot et en pleine forme.
01:22On l'embrasse d'ailleurs.
01:25Non, il est toujours très concerné.
01:27Il a toujours l'oreille de certains.
01:29Ah, il souffle parfois
01:31quelques bonnes idées.
01:33Alors, on va parler de plusieurs sujets intéressants.
01:35On va parler...
01:37C'est un grand soutien de Vincent Labrune, mais je dis ça comme ça.
01:39Ou je sais pas.
01:41On avait fait une interview dans la revue de l'after,
01:43je crois qu'il en avait parlé.
01:45Il était très proche de Robert-Louis Dreyfus.
01:47Il l'a connu très jeune.
01:49On va parler des modèles vertueux
01:51de multipropriétés. S'il y en a déjà,
01:53on va voir ça avec Pierre-Emmanuel.
01:55On va revenir sur le cas de Strasbourg,
01:57parce que l'autre fois, ça avait divisé l'after.
01:59Et puis, on va parler du fameux deal CVC,
02:01parce que Pierre-Emmanuel a une lecture
02:03un peu différente qui est celle
02:05d'un spécialiste en l'occurrence.
02:07Démarrons sur les différents
02:09modèles de multipropriétés.
02:11Aujourd'hui, on a l'impression...
02:13Il n'y a pas que de la multipropriété.
02:15Saint-Etienne, tout à l'heure, on en parlait,
02:17est un modèle un peu spécial,
02:19parce que finalement, c'est le gars de Toronto,
02:21il a deux clubs.
02:23Qu'est-ce que tu définis dans multi ?
02:25À partir du moment où tu n'as pas le modèle
02:27qu'on connaissait ancien de
02:29je suis un propriétaire, j'ai mon club
02:31et j'essaye
02:33de faire marcher mon club.
02:35Après, on a eu le gars qui avait un club
02:37et qui se diversifiait avec,
02:39pourquoi pas le basket, enfin autre chose
02:41que du foot. Et puis, on a maintenant
02:43à travers
02:45souvent une zone géographique un petit peu plus large,
02:47des gens qui ont plusieurs clubs du même sport.
02:50Première question, Pierre-Emmanuel,
02:52on a l'impression qu'il y a autant de multipropriétés
02:54que de clubs, qu'il n'y a pas un modèle
02:56unique et que finalement, c'est bien
02:58compliqué de faire
03:00le ménage et de distinguer
03:02le bon grain de livret, comme on dit.
03:04Je suis absolument d'accord avec ça. Je pense qu'à la fin, on se rendra compte
03:06qu'il y avait certains modèles qui étaient assez vertueux
03:08et d'autres
03:10qui ne le sont pas, voire qui sont
03:12potentiellement contraires à une forme
03:14d'éthique ou
03:16autre. Je pense
03:18par contre qu'il y a beaucoup de procès d'intention
03:20qui sont faits sur le concept même de la multipropriété
03:22et parfois
03:24je pense que c'est un peu dur et que ça
03:26néglige certains aspects
03:28vertueux de la multipropriété.
03:30On va y revenir potentiellement
03:32dans le cas de Strasbourg tout à l'heure.
03:34Je pense qu'il est intéressant aussi de donner cette perspective,
03:36de voir ce que des
03:38fonds d'investissement qui apportent beaucoup de capitaux
03:40dans les clubs peuvent
03:42apporter, notamment
03:44en termes d'infrastructures, de professionnalisation.
03:46On a parfois
03:48souffert, et vous en plaignez souvent,
03:50d'un manque de professionnalisme sur certains
03:52sujets de clubs professionnels.
03:54La multipropriété, ça peut aussi
03:56amener de la professionnalisation.
03:58La seule critique réelle
04:00et qui tienne la route dans la multi,
04:02c'est
04:04quand
04:06on essaye au départ de faire la différence entre
04:08la multi horizontale ou verticale.
04:10Si
04:12je suis propriétaire d'un club en Angleterre
04:15et je suis propriétaire
04:17d'un club en France,
04:19que le club dont je
04:21suis propriétaire en France ne me
04:23sert que de succursale pour
04:25le club dont je suis propriétaire en Angleterre,
04:27c'est là
04:29que tombent les critiques, parce
04:31qu'on se dit que finalement
04:33le club dont il est propriétaire
04:35en France, il n'est pas fait pour performer,
04:37il n'est là que pour en gros
04:41faire grandir ses joueurs, essayer
04:43de faire un petit peu de business
04:45et la limite
04:47à cette critique, c'est
04:49uniquement, et c'est comme ça qu'essayent
04:51de se défendre Strasbourg et notamment Marc Keller,
04:53si on n'avait pas eu
04:55ce modèle-là, on serait mort.
04:57C'est ça.
04:59Moi, la multi horizontale,
05:01au fond, ne me pose pas de problème, parce que j'ai bien
05:03compris avec l'évolution
05:05économique du foot...
05:07Ce que tu appelles multi horizontale, c'est Tech Store.
05:09Exactement. Si en gros, je veux
05:11que Botafogo soit champion et je veux que Lyon soit champion,
05:13ça ne me pose pas de soucis.
05:15Parce que l'économie fait que de toute façon,
05:17tu n'as plus de droits de télé, il faut trouver
05:19des nouveaux leviers économiques.
05:21Sur ce que tu décris, Daniel, je suis d'accord,
05:23mais pour le cas de Strasbourg, je trouve qu'on n'entre
05:25absolument pas là-dedans. Par exemple,
05:27quel joueur de Strasbourg aujourd'hui,
05:29tu pourrais en dire
05:31qu'il est aujourd'hui en pépinière
05:33pour Chelsea ? André Santos.
05:35André Santos,
05:37il appartient
05:40à Chelsea au départ. Il est venu
05:42s'aguerrir à Strasbourg, c'est un cas.
05:44Mais je ne peux pas dire
05:46que... Et encore, j'aimerais le voir
05:48titulaire à Chelsea, je ne suis pas sûr non plus.
05:50Il n'y a pas que ça. Je n'ai pas
05:52envie que le club... En gros,
05:54on va faire simple, on va schématiser le petit frère.
05:56Mon but
05:58n'est pas qu'il performe réellement.
06:00On va vivoter,
06:02ça va me servir. Encore une fois, je fais passer
06:04des joueurs, éventuellement, je les vends.
06:06C'est pas ce qu'ils veulent.
06:08Et j'ajoute
06:10et puis
06:12je ne suis
06:14même pas très présent.
06:16Ce dont souffrent les gens,
06:18ceux qui sont attachés à leur club,
06:20c'est de voir qu'ils sont dirigés
06:22par du hors-sol très très loin
06:24et qu'on se dit, t'es président, mais t'es pas là,
06:26on n'a pas de lien, on n'a pas d'affect.
06:28Si ça se met complètement en place
06:30où t'as une équipe
06:32qui est là, présente
06:34et qui incarne, c'est le manque d'incarnation,
06:36c'est là que vient souvent la critique.
06:38Et quand je disais que Marc Keller,
06:40il était bien gentil, parce que de toute façon, c'est lui
06:42qui a sauvé le club et que
06:44les Strasbourgeois ne peuvent être
06:46qu'avis
06:48derrière lui et le remercier pour ça.
06:50Mais là, on a bien compris qu'aujourd'hui,
06:52de toute façon, en termes de décision,
06:54il allait avoir la chaise au bout de la table
06:56et que ceux qui allaient prendre les décisions allaient être ailleurs
06:58et que s'il servait plutôt
07:00bien le champagne en loge, c'était bien,
07:02mais qu'en gros, il avait perdu le pouvoir.
07:04Il a perdu clairement le pouvoir.
07:06Je ne suis pas d'accord avec ça.
07:08On va revenir après sur les raisons
07:10pour lesquelles on a vendu, mais
07:12allons directement sur ce sujet-là.
07:14Un club de foot,
07:16ce n'est pas seulement
07:18mettre 11 joueurs sur un terrain.
07:20Qu'est-ce qu'on voit aujourd'hui à Strasbourg ?
07:22Il y a une amélioration des infrastructures
07:24qui est extraordinaire. On a un nouveau stade,
07:26on a des nouveaux terrains d'entraînement des pros,
07:28on a une nouvelle académie.
07:30Dans quel but, ça ?
07:32Les supporters se le mangent en tartine le matin.
07:34Le stade, déjà, il ne se mange pas en tartine le matin.
07:36Ça sert à quoi ?
07:38En fait, il faut qu'il y ait un but.
07:40Pour attirer des bons joueurs,
07:42vous dites souvent qu'il faut visiter les infrastructures.
07:44Pour attirer des bons joueurs, il faut du blé.
07:46Le joueur vient s'il y a du blé.
07:48Il vient aussi s'il a le sentiment qu'il va progresser.
07:50On ne parle pas des tout meilleurs mondiaux.
07:52Donc des jeunes.
07:54Progresser, pouvoir s'entraîner dans de bonnes conditions,
07:56pouvoir s'entretenir dans de bonnes conditions, c'est hyper important.
07:58L'académie, c'est pour les jeunes
08:00et là, c'est le développement d'un centre de formation.
08:02Mais c'est vertueux aussi pour gagner la gambardée.
08:04Je ne suis pas sûr que tous les supporters soient
08:06contrairement aux autres.
08:08Le stade, le fait qu'il soit plus grand,
08:10le fait qu'il soit plus fonctionnel, qu'on ait une expérience
08:12supporter qui soit meilleure,
08:14c'est fondamental.
08:16Mais dans quel but ?
08:18Ce n'est pas seulement les revenus.
08:20Mais là, vous ne me décrivez pas le but.
08:22Le but, c'est que les Strasbourgeois déjà soient contents,
08:24qu'ils aient une équipe compétitive,
08:26qu'ils aient un stade fonctionnel dans lequel ils puissent
08:28venir plus tôt, passer des bons moments
08:30en famille, sécurisés.
08:32D'accord, mais compétitif pour faire quoi ?
08:34On va sur la compétitivité.
08:36En tant qu'ancien propriétaire de club de football,
08:38je vais vous assurer que
08:40même si on est dans une optique uniquement
08:42de valorisation des joueurs, ce que je ne pense pas être le cas,
08:44mais si on était là, le fait de jouer la Coupe d'Europe,
08:46par exemple, ça survalorise les joueurs parce que
08:48ça les expose à un niveau auquel
08:50on peut prétendre
08:52les vendre beaucoup plus cher.
08:54Un joueur qui n'a fait ses preuves qu'en championnat de France, on le vendrait.
08:56Donc si on était là,
08:58déjà on serait aligné sur le fait qu'il faudrait
09:00qu'on soit en Coupe d'Europe. Je pense qu'un supporter
09:02de Strasbourg, si on lui dit « tu seras en Coupe d'Europe
09:04régulièrement », il est content.
09:06C'est sûr, mais ce n'est pas ce qu'il dit.
09:08C'est l'ambition.
09:10C'est l'ambition affichée.
09:12En fait, il y a une carte
09:14en France qui est assez intéressante parce que
09:16si on disait aux gens ce soir
09:18où il y a de la multipropriété en France,
09:20sur les trois divisions, on sera assez surpris
09:22de voir qu'il y en a beaucoup plus que ce qu'on
09:24peut imaginer. C'est un truc finalement
09:26qui est assez peu répandu parce qu'on prend toujours l'exemple
09:28de Strasbourg. Il y a des tas de clubs
09:30qui détiennent ou sont détenus par des
09:32tas de fonds.
09:33T'as l'Orient pour qui ça ne s'est pas très bien terminé en Ligue 1.
09:35Je re-regardais. C'est le point.
09:37Même en national,
09:39il y a des clubs qui sont détenus en multipropriété.
09:41La réalité, pour
09:43faire simple quelque part,
09:45quel que soit votre avis à tous les deux
09:47finalement, est-ce qu'il y a une ambition sportive
09:49ou est-ce qu'il y a une ambition économique ?
09:51Ou est-ce qu'il y a les deux en même temps ? De la valorisation
09:53de joueurs, d'actifs et puis quand même des résultats
09:55sportifs. Je pense que ce qui va toucher
09:57le plus à un moment donné, puisqu'on parlait de ça tout à l'heure
09:59sur les gens vont au stade,
10:01je le vois partout où je peux aller, c'est
10:03le sentiment de dépossession.
10:05C'est ce que je disais tout à l'heure, la présidence lointaine,
10:07le manque d'incarnation.
10:08C'est l'incarnation des dirigeants, mais même
10:10en règle générale,
10:12tu as les dirigeants, la désincarnation,
10:14tu as ensuite le type de recru,
10:16y compris le nombre
10:18de recrues étrangères, une sorte de
10:20légion étrangère qui débarque,
10:22sans faire du régionalisme,
10:24mais le manque d'ancrage fait que
10:26je parlais d'invisibilité tout à l'heure,
10:28ça c'est lié au droit télé, et maintenant si en plus
10:30un des trucs qui marche toujours, c'est-à-dire
10:32l'ancrage régional, il est un peu battu
10:34en brèche par le fait que c'est quoi
10:36cette équipe qui ne ressent pas grand-chose, tu as des mecs qui
10:38passent au milieu de tout ça, tu as des joueurs formidables
10:40qui arrivent à s'attacher, mais la plupart
10:42passent et repassent et se font vendre.
10:44Est-ce que ce n'est pas ça finalement, avant de parler de business,
10:46la dépossession pour les supporters qui est le plus
10:48terrible ? Je comprends, mais prenons encore
10:50l'exemple de Strasbourg pour être très concret.
10:52Pourquoi un sentiment
10:54de dépossession à part un procès d'intention ?
10:56Parce qu'aujourd'hui le président c'est Marc Keller,
10:58c'est le président qu'ils ont toujours connu,
11:00l'équipe de salariés, l'équipe dirigeante
11:02100% la même,
11:04l'expérience au stade,
11:06c'est un peu des travaux, mais toutes les
11:08traditions sont là, Gilbert
11:10connaît l'ambiance du stade de la Maino, ça ouvre
11:12les portes trois heures avant,
11:14toutes les traditions locales,
11:16les tartes flambées, les concerts
11:18sont respectés, la tribune
11:20famille Europa Parc comme avant,
11:24le supporter,
11:26à part si c'est ce procès
11:28d'intention, il y trouve son compte.
11:30L'équipe est fortement
11:32améliorée, jamais on a autant investi dans l'équipe
11:34à Strasbourg.
11:36On a plus de 30 millions.
11:38On a plus que ça.
11:40De mémoire de supporter,
11:42ça fait plus de 40 ans, je n'ai jamais vu ça.
11:44Mais pourquoi les gens n'adhèrent pas tous alors ?
11:46Peut-être simplement sur l'identification.
11:48Tu as des joueurs qui sont là,
11:50là je regarde la compo du dernier match,
11:52tu as peut-être trois joueurs
11:54qui sont là, tu as Diarra
11:56qui est quelqu'un du cru, absolument,
11:58tu as Sébastien devant,
12:00mais sorti de ces deux joueurs-là,
12:02tu as Doucouré qui avait été acheté à Valenciennes il y a quelque temps,
12:04ça fait trois joueurs sur onze, tout le reste des joueurs,
12:06les huit autres sont des jeunes qui sont arrivés là
12:08et qui ont vocation à partir sous deux, trois ans.
12:10Tu sais que le gars peut partir, va rester un an.
12:12Mais est-ce qu'avant ce n'était pas le cas déjà ?
12:14Pardon, à Strasbourg, tous les joueurs,
12:16tout le respect que j'ai pour mon club,
12:18un joueur quand il est à Strasbourg,
12:20potentiellement,
12:22il peut aspirer à mieux s'il performe,
12:24qu'il soit alsacien ou pas.
12:26Non mais tu avais quand même,
12:28je ne suis pas d'idéaliser en disant
12:30que c'était mieux avant, effectivement,
12:32parce qu'il y avait quand même une base
12:34de joueurs, un gardien,
12:36une charnière centrale, un capitaine
12:38qui même si c'était quatre, cinq ans,
12:40pouvait rester et c'est de l'incarnation.
12:42Je vois là,
12:44puisque même, c'est assez marrant,
12:46même Rennes, tu vois, pour te donner
12:48un contre-exemple, entre guillemets,
12:50tu as un actionnaire qui est connu,
12:52mais ils ont fait un recrutement un peu particulier cette année.
12:54Très étranger, avec des joueurs
12:56qui ne sont pas connus des gens.
12:58Il y a en ce moment une sorte de flottement
13:00entre le supporter et le club pour ça.
13:02Est-ce que ce n'est pas simplement les résultats qui font ça ?
13:04Non, non, pas seulement.
13:06Mais si Strasbourg ou Rennes étaient dans les cinq premiers,
13:08tout le tour.
13:10C'est justement un exemple pour montrer que
13:12sortons du contexte économique et de la multi
13:14pour dire, à partir du moment où tu coupes
13:16trop brutalement,
13:18parce que même quand ça ne se passait pas bien l'an dernier,
13:20quand tu as des bourrigeaux, des terriers,
13:22les gens se rattachent un petit peu à quelque chose.
13:24Ce qui me semble,
13:26par exemple Troyes, c'est pareil.
13:28À Troyes, on a vendu un truc, mais quand les dirigeants sont venus
13:30ici expliquer un peu le projet,
13:32économiquement, ça tient la route
13:34ce qu'ils te disent, mais ça tient la route
13:36quand tu es autour d'une table de réunion.
13:38C'est-à-dire que les gars te parlent d'actifs,
13:40te parlent de développement du
13:42centre de formation, des infrastructures.
13:44Quand tu es là, tu dis, pas mal le projet.
13:46Sauf que derrière, sportivement,
13:48tout tombe, les gens se désintéressent
13:50et ne se sentent pas représentés par leurs joueurs.
13:52Et là, on a l'impression que la multipropriété,
13:54elle accélère ce processus de désincarnation.
13:56Je vais même poursuivre.
13:58En fait, le sport et le foot
14:00ont notamment cette particularité,
14:02c'est le storytelling, c'est l'histoire que tu racontes
14:04et l'attachement territorial.
14:06Si tu négliges
14:08cet aspect
14:10qui confie nos romantismes
14:12et qui peut paraître désuet ou qui peut
14:14sembler
14:16dépassé
14:18ou on peut se moquer de ça.
14:20Dans l'after, pendant des années,
14:22Gilbert racontait, et moi j'adorais cette histoire,
14:24moi j'aimais bien, et d'ailleurs, pour le coup,
14:26je la notais moi-même
14:28dans mes années où j'allais très souvent à la méno
14:30quand il était en Ligue 2, quand je commentais les matchs.
14:32C'était...
14:34Parce que Strasbourg, en plus,
14:36l'histoire veut que...
14:38ça a été un des premiers à être tombé dans des directions
14:40un peu folles, avec
14:42IMG, avec des présidents
14:44qu'on connaissait pas, qui arrivaient très bizarres,
14:46les McCormack et compagnie et tout ça. Et justement,
14:48c'était terrible ces années-là.
14:50C'est l'admirateur de Gilbert Grès aujourd'hui.
14:52C'est vrai. 83 ans.
14:54L'histoire qu'on me racontait, c'est que Strasbourg,
14:56c'est très fort, c'est des Alsaciens,
14:58et les Alsaciens sont très attachés
15:00à leur terre. C'est un club,
15:02il faut qu'il y ait des Alsaciens. Ce sont des Alsaciens
15:04qui dirigent. Il n'y a que comme ça
15:06que ça marche, parce qu'il faut que toute
15:08la communauté économique, tout l'écosystème
15:10fonctionne et tout. Et l'histoire qu'on a racontée,
15:12parce que Strasbourg, on les avait un peu
15:14oubliés avec la déchéance,
15:16et quand ils réécrivent leur
15:18histoire, où ils redémarrent de tout en bas,
15:20ils écrivent une histoire qui est
15:22fascinante,
15:24qu'on a suivie, qu'on a adorée,
15:26avec...
15:28Marc Keller qui revient, avec son frère,
15:30il remonte le club,
15:32c'est les Strasbourgeois, c'est l'Alsace
15:34qui est à la méno, c'est la méno,
15:36c'est le feu, machin.
15:38Ils arrivent même
15:40à gagner un
15:42trophée, donc c'est une histoire
15:44extraordinaire. – Avec des affluences
15:46dingues, même relationnelles. – Avec des affluences folles et tout. Et là, maintenant,
15:48au bout de ça,
15:50tu deviens le petit frérot de Chelsea,
15:52et puis ton président,
15:54il l'a vendu,
15:56il a fait un très très bon retour sur investissement,
15:58c'est bien gavé, mais ça, je ne suis pas contre
16:00l'Aussel, je ne suis pas communiste.
16:02Et le club,
16:04aujourd'hui, les gens
16:06ont peur. Et moi, cette peur, je la comprends.
16:08La peur de l'inconnu, la peur de
16:10mecs qu'on ne connaît pas, la peur de ne pas savoir
16:12vraiment qui est le président,
16:14de ne pas savoir ce qui va se passer,
16:16est-ce qu'on est là juste pour
16:18recycler les... – Voilà, la réponse de Pierre-Emmanuel,
16:20et après on sortira du casse-fraise bourgeois pour
16:22parler d'outils. – Moi, je suis avec tu viens là, parce que ça
16:24permet de remettre un peu en perspective l'aventure
16:26qu'on a vécue, que tu as très bien décrite au départ,
16:28c'était un groupe d'investisseurs alsaciens,
16:30on est reparti presque de rien,
16:32on a reconstruit un modèle qui est différent,
16:34on s'est inspiré de ce qui marchait
16:36dans certains clubs,
16:38même en Allemagne un peu, puisqu'on a une culture aussi
16:40à Strasbourg. Et quelque part,
16:42l'histoire que tu racontes, si tu mets un peu de perspective
16:44financière, c'est qu'en fait, on était
16:46un groupe très responsable, parce qu'on
16:48ne voulait jamais prendre en otage
16:50la ville de Strasbourg de notre
16:52groupe d'investisseurs et des limites qu'on avait.
16:54Nous, on a
16:56gagné de l'argent chaque année parce qu'on n'avait
16:58pas le choix, on a tout réinvesti
17:00systématiquement dans l'équipe et dans les infrastructures
17:02parce qu'on n'avait pas le choix.
17:04Et puis,
17:06quand on est arrivé dans le
17:08professionnalisme, puis en Ligue 1, on a
17:10eu coup sur coup la faillite de Mediapro,
17:12on a eu le Covid, tout ça, on devait
17:14survivre, et on s'est bien rendu compte que
17:16même tout l'argent qu'on avait
17:18mis de côté dans l'optique de faire le nouveau stade,
17:20bien aidé par les collectivités
17:22locales à Strasbourg, mais quand même ça
17:24nécessitait beaucoup de fonds de la part du
17:26propriétaire actionnaire, et les infrastructures
17:28qui étaient un peu désuètes parce qu'on
17:30n'avait pas pu,
17:32parce que déjà le club avait eu des problèmes
17:34avant et était déjà en retard du point de vue des infrastructures.
17:36Et tout ça, ça fait que dans un
17:38souci de responsabilisation, on
17:40avait aussi vu un peu que
17:42il y avait un désamour,
17:44un peu que les audiences étaient en baisse, tout ça,
17:46c'est de l'anticipation quand on est président de...
17:48Qu'est-ce qui est en baisse ?
17:50On avait bien vu que l'exposition du football français
17:52elle était moins importante quand on a vu la faillite de
17:54Médiapro, on avait bien vu que ça galérait un petit
17:56peu... Oui, mais donc c'est pour des raisons financières
17:58que Strasbourg est
18:00allé à la multis, c'est pas parce que...
18:02Et parce qu'aussi, Marc-Eliard, on avait peut-être
18:04ces années un petit peu mal...
18:06Il faut quand même rétablir, Pierre-Emmanuel,
18:08je pense que si le groupe
18:10d'investisseurs que vous étiez avait trouvé
18:12un Alsacien milliardaire
18:14prêt à reprendre, je pense que c'était pour lui !
18:16Mais dans ces cas-là, c'est ce qu'il faut dire, il ne faut pas raconter
18:18d'histoire, il ne faut pas tourner autour
18:20du pot, il ne faut pas dire que c'est génial, que Blouko,
18:22machin et tout, non ! C'est juste que
18:24il avait envie de faire autre chose dans sa vie et tout c'est
18:26tout à fond... Non, c'est que Blouko c'était
18:28l'acheteur qui était là, il n'y en avait pas 50 !
18:30Eh ben donc voilà ! Il ne faut pas
18:32nous dire que c'est forcément formidable,
18:34c'est faute de mieux parce qu'on n'a pas eu mieux,
18:36on n'a pas eu le milliardaire Alsacien, c'est comme
18:38l'OM, l'OM ils adoreraient avoir le patron d'Aribo
18:40ou de la Marseillaise,
18:42de la Pétanque, de je sais pas quoi, qu'il soit hyper
18:44identifié ! Bon, ils ont un américain,
18:46ils font avec !
18:48On peut toujours rêver, mais
18:50en attendant, ce que nous on a fait, c'était un choix
18:52très responsable parce que nous, quand on a vendu,
18:54la dernière chose qu'on voulait, parce qu'on est aussi des amoureux
18:56du club, ce qu'on ne voulait pas, c'est
18:58vendre à un cash car
19:00ou je ne sais quoi, ce qu'on voulait c'était des gens qui
19:02s'engagent à investir dans les infrastructures,
19:04dans l'équipe,
19:06qui permettent avec les collectivités
19:08locales d'aller au bout du projet du stade.
19:10Et quand même, c'est
19:12une grande responsabilité qu'on a prise parce qu'on ne voulait
19:14pas justement être vu comme des gens
19:16qui terminent mal leur histoire.
19:18Et l'histoire, elle est fantastique !
19:20Si on ne fait pas de procès d'intention, pour l'instant, à aujourd'hui,
19:22il n'y a pas de raison de considérer
19:24que ce n'est pas un bon achat.
19:26On a quand même le droit, et c'est pareil dans tous les secteurs
19:28de l'économie, on a quand même le droit
19:30parfois
19:32d'être un peu réticent
19:34vis-à-vis de cette globalisation, mondialisation.
19:36Moi, je suis sûr qu'aujourd'hui,
19:38si on avait fait un sondage
19:40il y a trois mois
19:42auprès de tous les supporters du PSG,
19:44on leur avait dit, vous savez, les gars,
19:46le Qatar, ils sont prêts à vendre.
19:48Et Antoine Arnault, au lieu d'acheter le PFC, il va acheter le PSG.
19:50Mais je crois que les supporters du PSG,
19:52à 250%, ils y allaient !
19:54Pour que ce soit un Français, supporter
19:56du PSG depuis qu'il est gamin,
19:58fleuron de l'industrie française,
20:00qui achète le PSG,
20:02que l'entreprise
20:04de glam absolu de la France
20:06prenne ce club qui, en plus,
20:08dans son ADN, d'avoir été créé
20:10déjà par un mec de la mode. Mais on aurait aimé
20:12tous adorer ça !
20:14On aurait aimé le Qatar, on l'ait raccompagné à l'aéroport !
20:16On a le droit d'être attaché
20:18à une tradition,
20:20à des investisseurs français !
20:22On a le droit, on n'a pas de mal à ça !
20:24En fait, c'est Ivan Postel qui va
20:26acheter Paris Saint-Germain.
20:28On continue le débat. On va sortir du cas de Strasbourg
20:30dans quelques secondes pour parler des modèles de multi
20:32et du cas de CVC également.
20:34Et puis Jimmy a des messages sur Direct Studio.
20:36Sortons un peu du cas du Racing,
20:38on verra.
20:40Ah oui, parce que c'est loin d'être le pire !
20:42Il faut quelques années quand même.
20:44À quel moment on doit juger, Pierre-Emmanuel,
20:46que c'est réussi ou pas, finalement,
20:48les opérations de multipropriétés ?
20:50Déjà, moi, je trouve que la partie infrastructure,
20:52t'en parlais, Florent,
20:54pour moi, c'est fondamental parce que, quoi qu'il arrive,
20:56ils partiront jamais avec le stade
20:58et jamais avec l'académie.
21:00Quand je dis ils partiront, je parle pas du cas de Strasbourg,
21:02mais de manière générale, l'investissement durable
21:04dans la cité,
21:06dans la ville, c'est quelque chose de fondamental.
21:08Et pour faire ça,
21:10il y a besoin d'apports d'argent frais
21:12que les grands chefs
21:14d'entreprises locaux étaient
21:16plus capables d'apporter. C'est devenu des montants
21:18qui sont plus...
21:20Très rarement, on parlait de
21:22la famille Arnaud...
21:24La famille Arnaud a fait des promesses
21:26sur le stade et son entraînement à Paris FC.
21:28J'adore et j'ai beaucoup d'affection
21:30pour Laurent Nicolas et pour Montpellier.
21:32Aujourd'hui, c'est un symbole. Ils sont derniers
21:34du championnat et c'est la
21:36dernière famille...
21:38Il y a les derniers du championnat.
21:40Après, ça veut pas dire que
21:42tu gères bien parce que tu as un local.
21:44C'est loin de moi
21:46l'idée de critiquer.
21:48C'est un hasard du calendrier, on est là
21:50aujourd'hui, mais c'est pour dire quoi ? C'est pour dire que
21:52ceux qui n'ont pas de ressources
21:54très sérieuses maintenant,
21:56venant de ces modèles-là, quand ils ont
21:58pris Média Pro, quand ils ont pris
22:00le Covid, quand ils prennent maintenant
22:02les droits télé qui sont à
22:04moitié moins que ce qu'ils pensaient...
22:06Au bout d'un moment, c'est des maths.
22:08Le problème de dire ça, c'est des maths...
22:10J'entends
22:12la conclusion de ton raisonnement
22:14et c'est difficile de ne pas être d'accord.
22:16Mais moi, ce qui m'énerve, c'est le avant.
22:18C'est que ces mêmes personnes
22:20n'aient pas été foutues d'avoir
22:22un président à la Ligue
22:24qui, comme tu dis,
22:26maîtrise les maths avant.
22:28C'est-à-dire de cette façon-là. Et fasse en sorte
22:30que le football français termine dans le caniveau, à tel point
22:32qu'aujourd'hui, on a quasiment
22:34tous les clubs qui sont à vendre
22:36et tous les clubs qui sont en proie.
22:38Il y a des gars qui vont arriver et qui vont dire
22:40« Le ticket d'entrée en Angleterre,
22:42c'est impossible pour nous. Le ticket
22:44d'entrée en France, il est qu'avec
22:4620 millions, 30 millions, tu peux bricoler un club
22:48comme Saint-Etienne. Allez hop, on y va, on met le billet,
22:50on prend. Puis advienne que pour A,
22:52on ne sait pas quel est le projet, on ne sait pas ce qu'ils vont faire.
22:54Multi, on va
22:56flopper maintenant. Flo avait
22:58raison, d'ailleurs, on devrait faire la liste. Mais alors,
23:00Nice, on est dedans. Lorient, on est dedans.
23:02Troyes, on est dedans. Le Red Star,
23:04on est dedans. Et partout, c'est les mêmes
23:06interrogations, c'est le même stress,
23:08c'est le « qu'est-ce qu'on devient ? ». C'est Nice,
23:10c'est des promesses. Et puis, dès que
23:12le grand frérot, il s'est acheté un club
23:14plus gros, on a vraiment eu l'impression qu'en dessous,
23:16il s'en fout un peu.
23:18Dunkerque, c'est d'accord ? Non mais Dunkerque aussi,
23:20ils sont… Non mais il y a plein de clubs.
23:22Lorient,
23:24Lorient, Lorient, c'est… Bon, de toute façon,
23:26Loïc Ferry, à part l'oseille, son portefeuille,
23:28il n'en a rien à série de Lorient. Et Lorient,
23:30il n'a jamais été lorienté ou quoi ou qu'est-ce.
23:32Il vient, il prend son jet, il vient voir le match, il repart.
23:34Il vit à Londres, sa vie, elle est à Londres,
23:36c'est un financier. Il s'encarre. Mais
23:38le club de Lorient, c'est le club larbin d'un club
23:40anglais. En tout cas,
23:42le niveau du club anglais
23:44et le niveau potentiel de Lorient
23:46étant relativement proches,
23:48je serais moins
23:50heureux d'être supporter de Lorient que d'être
23:52supporter de Strasbourg aujourd'hui. Parce qu'il y a
23:54des modèles qui sont différents. Parfois,
23:56il faut regarder techniquement comment ça se passe.
23:58Et puis parfois, ça a l'air
24:00assez évident quant au fait qu'il y a des
24:02modèles qui ont l'air mieux
24:04construits que d'autres. Quand Red Bull,
24:06quand on dit que la famille Arnaud s'associe à Red Bull,
24:08tout le monde trouve ça formidable.
24:10En attendant, Red Bull…
24:12C'est une prise de participation,
24:14ce n'est pas tout à fait la même chose. Je suis d'accord.
24:16Mais maintenant, on dit Red Bull,
24:18c'est une idée fantastique.
24:20C'est de la multipropagité.
24:22Ce qui est
24:24souligné de positif dans cette
24:26alliance, c'est aussi de s'allier
24:28à quelqu'un qui est déjà expert
24:30dans le milieu du foot sur Red Bull.
24:32C'est que les Arnaud font preuve un peu
24:34d'humilité.
24:36On va prendre un conseiller à 15%.
24:38Je ne suis pas sûr que ce soit une fantastique idée.
24:40Ce n'est peut-être pas une fantastique idée, mais en tout cas,
24:42on voit qu'en termes
24:44de conseils stratégiques
24:46et de conseils techniques, même,
24:48ils auront un réservoir, un exemple
24:50ou un réservoir dans lequel puiser.
24:52Moi, j'ai une autre question, à l'inverse.
24:54Là, on parle de clubs qui ont une existence,
24:56quand on parle de Strasbourg,
24:58de Lorient, qui sont en Ligue 1.
25:00Est-ce que ça peut être un espoir, en revanche,
25:02pour des clubs, suivez mon regard,
25:04qui ont des grosses difficultés
25:06et qui, justement,
25:08ne valent plus grand-chose et donc sont susceptibles
25:10d'être valorisés
25:12et d'être vendus plus cher ?
25:14Je pense à Tours, en fait.
25:16Mais Bordeaux, ça vaut aussi,
25:18parce que National 2, Tours, c'est Régional 1,
25:20mais il y a des tas de clubs comme ça
25:22qui cherchent, quelque part,
25:24plus ou moins, à être achetés
25:26ou à être investisseurs.
25:28Là, dans ce cas-là,
25:30est-ce que ça peut être un espoir
25:32et est-ce que c'est une possibilité ?
25:34Parce que localement, pour faire simple, puisque je connais un peu
25:36les dossiers en question, localement,
25:38les chefs d'entreprise, au bout d'un moment,
25:40ça a été une idée...
25:42Et lui, il mettrait 10 balles.
25:44Non, mais c'est une idée, en gros, qui ne marche pas vraiment.
25:46Réponse de Pierre-Emmanuel.
25:48Quand on investit, il faut un retour sur investissement.
25:50Aujourd'hui, à Tours...
25:52Retour sur investissement, il ne faut pas l'utiliser
25:54comme un gros mot, ça peut être
25:56court terme, moyen terme, très long terme.
25:58Généralement, quand on investit dans des infrastructures,
26:00d'insister un peu là-dessus, une infrastructure,
26:02c'est long terme. C'est comme quand on investit dans un hôtel,
26:04on n'a pas un retour sur investissement en 5 minutes.
26:06Quand on investit dans un stade,
26:08c'est long terme. Moi, je crois
26:10que ces clubs qui sont un peu à bout de souffle,
26:12souvent, ils ont besoin d'apport
26:14de vrai capital, parce que pour reconstruire,
26:16c'est presque une image,
26:18mais reconstruire un club, reconstruire des infrastructures,
26:20il faut bien
26:22les investir, parce qu'on peut faire des erreurs,
26:24mais il y a besoin d'un nouveau souffle.
26:26Or, ces modèles-là, aujourd'hui,
26:28sont les modèles qui permettent
26:30d'obtenir ces résultats-là. Et la raison
26:32pour laquelle ils le font, c'est parce qu'en agglomérant
26:34plusieurs structures, non seulement
26:36ils acquièrent une expérience, il y a aussi des
26:38économies d'échelle, parce qu'ils peuvent
26:40avoir une équipe de scouts qui regarde
26:42des joueurs partout dans le monde et qui
26:44les place dans l'endroit où le niveau
26:46est correspondant.
26:48Ils ont des expériences, ils travaillent
26:50l'expérientiel du stade,
26:52ils travaillent des techniques de marketing,
26:54et tout ça, ça peut être mis en commun.
26:56Et peut-être qu'à l'échelle d'un club
26:58aujourd'hui, ça commence à être difficile
27:00de supporter ces investissements et les
27:02amplitudes que ça représente, parce que le food business
27:04qu'on dénonçait,
27:06et on peut rappeler l'époque de
27:08Jean-Claude Varmont, mais chaque année
27:10on a l'impression que ça prend un zéro.
27:12Aujourd'hui, les amplitudes
27:14quand on est propriétaire d'un
27:16club de Ligue 1 sur une mauvaise année,
27:18on peut perdre plusieurs dizaines
27:20de millions d'euros, et en Angleterre, c'est plusieurs
27:22centaines de millions d'euros. — Un mot sur les fonds
27:24Vautour, Pierre-Emmanuel, parce qu'on parlait du fonds
27:26Elliott à l'époque, à Lille notamment,
27:28c'est aussi le cas à Toulouse,
27:30et on disait à l'époque « Ouais, ces gars-là,
27:32ils veulent de la rentabilité tout de suite,
27:34si c'est pas rentable, ça va foirer ». Bon, on voit
27:36finalement que ces fonds-là, ils ont pas fait n'importe quoi ?
27:38Est-ce que c'était une idée reçue à l'époque
27:40quand ils sont arrivés ?
27:42Est-ce que ces fonds Vautour
27:44peuvent faire des choses vertueuses dans le foot ou pas ?
27:46— Alors, ces fonds Vautour, c'est des fonds prêteurs
27:48au départ. Donc eux, ils étaient pas là pour être
27:50propriétaires. Ils sont devenus propriétaires
27:52de fait, parce que quand le
27:54propriétaire est défait... — Parce que le gars qu'ils ont foutu en-dessous,
27:56il a mis le club à la rue. — Mais c'est pas eux qui l'ont mis au-dessus,
27:58c'est le gars qui allait les chercher
28:00au départ. Le gars qui allait
28:02les chercher au départ, il a été défaillant,
28:04et eux, pour défendre leur investissement,
28:06ils ont pas eu d'autre choix que
28:08de prendre les manettes du club,
28:10avec une optique affichée
28:12d'en sortir, parce qu'ils étaient pas là pour être propriétaires
28:14de club. — Donc de remettre d'un plomb pour pouvoir se casser.
28:16— Voilà. Mais
28:18ça, c'est une dérive que
28:20je dénoncerais volontiers.
28:22Mais la responsabilité
28:24en vient à celui qui a fait appel à ce type
28:26de dette. Et
28:28quelque part... — Jean-Marc Lopez, en l'occurrence.
28:30— Pour ne pas le citer. Et
28:32quelque part, les propriétaires de club
28:34que nous étions, il en va aussi
28:36de leur responsabilité. Nous, à Strasbourg, c'est pas
28:38le choix qu'on a fait que d'aller chercher de la dette comme ça
28:40pour aller financer des choses. On a préféré
28:42avoir un actionnaire qui était solide.
28:44Et ça, par exemple, c'est un truc que je dénonce
28:46volontiers, parce que je pense que
28:48il y a beaucoup de projets qui se financent
28:50avec de la dette, avec assez peu de vision sur
28:52comment ils vont vraiment le faire pour le rembourser,
28:54ou alors en s'appuyant sur l'aléa
28:56sportif. Et ça, c'est trop risqué.
28:58Le foot, vous connaissez ça mieux que personne.
29:00C'est difficile d'avoir beaucoup de certitudes.
29:02Or, d'avoir
29:04des niveaux de dette qui tournent
29:06à ce type de taux, ça nécessite
29:08d'avoir beaucoup de certitudes qu'on va rembourser
29:10l'année suivante ou l'année d'après.
29:12Et en l'occurrence, ils ont pas trouvé
29:14cette rentabilité-là. — Dernier dossier, CBC.
29:16De ton œil de financier,
29:18est-ce que tu estimes que le foot français
29:20a fait une grosse opération ou pas ?
29:22Est-ce que CBC a fait une super opération
29:24ou s'est fait arnaquer ?
29:26Comment est-ce que tu vois l'affaire ?
29:28— Là aussi, j'essaie
29:30d'avoir un point de vue un petit peu
29:32objectif. Déjà,
29:34au-delà de...
29:36Je coupe court déjà par avance
29:38tout ce qui s'est passé en marge de ce deal
29:40et qui a été payé, comment ça s'est passé, etc.
29:42Parce que c'est pas le débat ici.
29:44Je crois que le débat ici, c'est de savoir si
29:46la vente
29:48de 13% de la société
29:50commerciale à 1,3
29:52milliards, je crois.
29:54— Même 5.
29:56— Est-ce que c'était une bonne affaire
29:58pour le foot français ?
30:00Aujourd'hui, moi, je considère que c'est une
30:02meilleure affaire pour le foot français que ça n'est
30:04pour le fonds CBC. — Ça, c'est sûr.
30:08— Déjà, ça met les choses
30:10en perspective. Ça veut dire qu'aujourd'hui,
30:12cette somme, elle a permis
30:14au club français de passer la vague
30:16du Covid et de la faillite de Mediapro.
30:18Et c'était
30:20fondamental d'avoir un apport d'argent
30:22frais à ce moment-là.
30:24Quand on se place du point de vue de CBC,
30:26je pense qu'ils avaient acheté un plan
30:28qui ne s'est pas passé. Alors, ils en sont aussi
30:30responsables. Maintenant, ils participent à la gouvernance.
30:32Et pour que eux
30:34fassent les rentabilités que leurs actionnaires
30:36attendent d'eux,
30:38ils vont devoir se retrousser les manches.
30:40Et pas qu'un peu, parce que c'est pas avec des droits
30:42télés à 500 millions qu'ils vont arriver
30:44ni à se rembourser avec
30:46les dividendes qu'ils vont percevoir,
30:48ni à valoriser leurs investissements
30:50en le revendant ou en se faisant racheter
30:52par la Ligue.
30:54D'ailleurs, on a vu que les patrons de CBC étaient très énervés après la Ligue.
30:56Est-ce qu'une opération comme ça, ça peut faire
30:58couler un fonds ?
31:00Non, ça ne peut pas faire couler un fonds,
31:02parce qu'un fonds, c'est diversifié par nature.
31:04Et dans un gros fonds,
31:06il peut y avoir des affaires qui marchent
31:08moins bien et des qui marchent mieux.
31:10Et celles qui marchent mieux doivent compenser celles qui marchent
31:12moins bien. Donc non, ça ne fera pas couler
31:14CBC. C'est une boîte qui gère
31:16plusieurs centaines de milliards dans le monde.
31:18En revanche,
31:20ça peut
31:22quand même avoir un impact
31:24assez important sur leur réputation,
31:26parce que c'est un deal public.
31:28Je pense que pour leur
31:30finance, mais aussi pour
31:32leur réputation, ils vont vouloir se battre pour faire en sorte
31:34que ce soit un investissement réussi.
31:36Et ça, potentiellement, ça aligne les intérêts
31:38avec ceux du football français. J'attends de voir
31:40ce que ça va donner. Il faut
31:42avoir une révolution un peu à la...
31:44Sans tomber dans les clichés, mais à la
31:46drive to survive pour ce qui est
31:48de la programmation télé
31:50underside ou à la première ligue
31:52pour ce qui est de l'amélioration
31:54de la qualité de l'expérience client
31:56de l'image.
31:58Après, si on me demande mon avis
32:00à moi, je considère qu'il y a
32:02un péché originel dans le football français.
32:04C'est la rupture de l'accord
32:06avec Canal
32:08qui avait été créée par...
32:10Je vais encore être en fixette.
32:12Non, mais La Brune,
32:14il avait été choisi pour...
32:16Et au lieu de la réparer,
32:18il l'a fracassé.
32:20Il l'a fracassé complètement.
32:22Ce qui est intéressant dans ce que tu dis, c'est que
32:24tu vois aussi pourquoi les présidents
32:26qui ont été très très fragilisés
32:28le soutiennent parce qu'au moment où
32:30ils étaient le couteau sous la gorge,
32:32il leur a amené cet argent frais avec CVC.
32:34Bien sûr qu'on peut après dénoncer
32:36et démonter tout le processus
32:38avec ce qu'on sait aujourd'hui.
32:40Mais tu comprends que les gars qui étaient
32:42sur la balustrade
32:44du vide, ils gardent une sorte de dette.
32:46C'est d'accord avec cette analyse.
32:48Mais on parle souvent de deal win-win.
32:50Là, c'est loose-loose parce que CVC perd.
32:52Les clubs de
32:54la Ligue perdent aussi puisque,
32:56on ne l'a pas précisé, mais ces 13%-là,
32:58s'ils tentaient qu'il y ait un cycle
33:00plus vertueux qui s'enclenche,
33:02les 13%, ils les auront à vie, CVC.
33:04Ce n'est pas sur ce deal-là de Droit TV.
33:06À vie, comme quand on est actionnaire d'une société,
33:08on est actionnaire à vie, sauf jusqu'au jour
33:10où quelqu'un vous rachète.
33:12Pour moi, ce n'est pas le problème.
33:14Ce n'est pas loose-loose parce qu'au départ,
33:16ça a sauvé sans doute certains clubs.
33:18Je ne sais pas à quoi ressemblerait le paysage
33:20footballistique français sans cet argent-là.
33:22Après, est-ce que CVC s'en sortira
33:24pas à la fin ? C'est encore assez
33:26jeune comme deal.
33:28Il y a beaucoup de travaux de fonds
33:30qui sont menés. Il y a aussi des nouveaux investisseurs
33:32dans le foot. On va voir,
33:34pour parler de Strasbourg, mais dans le nouveau
33:36stade, une nouvelle ambiance, une équipe
33:38qui sera peut-être plus compétitive.
33:40C'est ce genre de projet qui vont peut-être redynamiser
33:42la Ligue.
33:44Après, il ne faut pas oublier une chose, c'est qu'on était
33:46très dépendants des investissements du Qatar et du PSG
33:48parce que la vérité, c'est que quand
33:50tous ces deals ont été faits, on avait
33:52Messi, Neymar, Mbappé
33:54en attaque. Aujourd'hui, ils ne sont plus
33:56là, aucun des trois. Et quand bien même
33:58peut-être que l'équipe aura un meilleur colis.
34:00Je ne suis pas là pour commenter le PSG.
34:02Ça, ce n'est pas de l'investissement et même en termes économiques,
34:04ce n'est pas un raisonnement qui tient la route quand tu
34:06axes tout ton développement sur
34:08un moment précis, il y a
34:10deux ou trois joueurs dans une équipe.
34:12Ce n'est pas quelque chose de
34:14logique.
34:16C'est le même raisonnement qui, en 1997-1998,
34:18avait conduit la Ligue à viser
34:20le milliard en se disant, c'est formidable,
34:22Monaco joue le titre au PSG,
34:24alors qu'on sait bien que c'était un épiphénomène,
34:26le fait que le Monaco soit fort à ce moment-là,
34:28parce qu'ils avaient Falcao, ils avaient plein de
34:30joueurs.
34:32Et que le PSG
34:34était justement dans son été.
34:36C'était Mbappé, Neymar, tout ça.
34:38Et là, d'un coup, allez, on y va à fond !
34:40Et on mise tout là-dessus.
34:42Pourtant, ça devrait
34:44être des gens sérieux, mais bon.

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