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PersonnesTranscription
00:00Sarah Bernard, elle était déjà dans l'envie d'enlever les corsets aux femmes,
00:03de les libérer d'un carcan.
00:04Elle aimait les hommes, elle aimait les femmes,
00:06elle couchait avec les deux.
00:07Très, très libre intellectuellement, sexuellement.
00:10J'ai interprété 112 rôles.
00:12J'ai lutté comme personne.
00:15L'émoire de Sarah Bernard, la plus grande star du monde.
00:17C'est peut-être un peu prétentieux.
00:18Elle est d'une autre époque, mais elle est très moderne.
00:20En fait, elle a eu peur de rien.
00:22Elle était une enfant très mal aimée, très maltraitée.
00:25Et elle a décidé un jour d'être actrice à 14 ans.
00:28Pourtant, elle s'est fait virer de théâtre, de la comédie française.
00:31Elle a décidé d'avoir la vie qu'elle a voulu avoir.
00:34Elle n'en faisait qu'à sa tête.
00:36Elle était touche-à-tout, elle faisait de la sculpture.
00:37Elle était une artiste et elle voulait être aimée, je crois.
00:41Peut-être en défense d'ailleurs d'une enfance où elle ne l'était pas.
00:44Pour les jeunes, je trouve ça beau de voir à quel point on peut se faire tout seul.
00:48Elle n'avait même pas les réseaux sociaux, il n'y avait pas de médias à l'époque.
00:51Et elle a fait parler d'elle,
00:52une espèce de personnalité très forte, hors normes,
00:55et qu'elle ne bridait jamais.
00:58Même dans les coins les plus reculés, les gens connaîtront mon nom.
01:02La queue de panthère.
01:04Greffée au bas des reins.
01:06L'univers dans lequel elle vit, entourée d'animaux sauvages.
01:09Mais ce qui m'a le plus marquée d'elle, c'est qu'elle n'a peur de rien.
01:13Ni de se faire amputer, ni de vivre avec une panthère,
01:16ni d'aller trouver Zola pour dire qu'elle veut défendre Dreyfus.
01:19C'est ce qui m'a fait l'adorer d'ailleurs, l'admirer.
01:21C'est qu'elle allait au bout de ses convictions
01:23sans se soucier de savoir si ça plaisait, si ça ne plaisait pas.
01:26Leur mission, c'est d'être mère de famille.
01:28Eh bien non, c'est d'abord de vivre libre.
01:30Tu peux reprendre la pause s'il te plaît ?
01:32Oui, libre de leur corps et de leur cerveau.
01:34Dis donc, pour une artiste, tu es très rétrograde.
01:36Il y a leurs histoires à eux, chacun de leur côté, leur mariage.
01:40Et puis, il y a ses rendez-vous tout le temps.
01:42Et c'est presque par hasard, c'est presque en fin de vie
01:44qu'ils se rendent compte qu'en fait, leur histoire principale, c'était eux deux.
01:47C'est comme s'ils ne s'étaient jamais mis la pression
01:50de devoir à tout prix être fidèles, terminer, vivre toute leur vie entière.
01:55C'est comme un amour sans pression.
01:56C'est peut-être ça, le vrai amour ?
01:58C'est peut-être ça, oui.
01:58Elle répétait beaucoup dans son cercueil.
02:00En fait, son cercueil, c'est une histoire.
02:02C'est sa sœur qui est morte dans ce cercueil.
02:05Donc après, elle a gardé ce cercueil et parfois, elle répétait dedans.
02:08Il y a beaucoup de rôles qu'elle a joués.
02:10Elle se délectait, a joué l'agonie et les gens s'évanouissaient quand elle le jouait.
02:14Et elle ne faisait pas ça par provocation,
02:17mais peut-être qu'elle se provoquait elle-même avec ça.
02:19J'ai été lâche, faible et c'est terminé.
02:22Tu n'as pas le droit.
02:23C'est une langue un petit peu plus articulée.
02:25On fait moins des lisions.
02:26C'est sûr qu'on dira plus « je t'aime » que « je t'aime ».
02:29Mais tu te souviens aussi qu'on avait peur un peu de cette scène
02:31où je te dis « je n'ai jamais aimé que toi »
02:34et tu me dis « je n'ai jamais cessé de t'aimer ».
02:36On se disait qu'il y avait des moments en poulet un peu.
02:39C'est vrai que ce n'est pas tout à fait la même langue.
02:41Les gens sont plus articulés, avec des mots plus choisis.
02:45C'est vrai qu'il faut en même temps respecter ça
02:46et en même temps, il ne faut pas que ça empêche le naturalisme.
02:49Sinon, ça va tout théâtraliser.
02:50Donc, c'est un équilibre un peu à trouver.
02:52Mais c'est vrai que quand le texte est très assimilé
02:55et quand la pensée est très concrète,
02:57d'un coup, la parole devient très accessible.
03:00Elle dit très bien un truc, Sarah Bernard.
03:01Je trouve que c'est une très belle phrase d'acteur
03:04quand elle dit « laissez-moi, il faut que je me quitte ».
03:06Attends, laissez-moi, il faut que je me quitte.
03:08Quoi ?
03:08Elle doit entrer dans son personnage.
03:10Et après, il faut quitter le personnage.
03:12Et c'est vrai que j'ai eu un moment un peu solennel
03:14quand je l'ai quitté.
03:14Il y a des personnages comme ça que vous jouez
03:16et que vous aimez tellement jouer
03:18que le moment où vous la quittez,
03:20j'ai eu l'impression d'être délestée
03:21comme d'une fougue ou d'une énergie qu'elle a.
03:24J'avais l'impression de diminuer.
03:26Quand j'ai enlevé son costume, ses boucles d'oreilles,
03:28que j'ai remis mes vêtements à moi,
03:30je me suis dit que j'avais rétréci.