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L'affaire Paul Pogba est-elle le symbole des dérives du football actuel ? Débat ce mardi dans Rothen s'enflamme, alors que six individus sont actuellement jugés pour la tentative d’extorsion et la séquestration de Paul Pogba en 2022. 

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Transcription
00:00On ne va pas rentrer dans le détail de l'affaire, mais est-ce que tout ça, c'est le symbole des dérives du foot actuel, Jérôme ?
00:05Ou est-ce que finalement, tout ça a toujours plus ou moins existé ?
00:09Là, Jean-Louis, pour répondre, ça a toujours existé.
00:12Ça, c'est sûr. Du moins, à mon époque. Après, je ne parle pas de l'époque de Jean-Michel que je n'ai pas connue.
00:16Tony est un peu plus âgé que moi, donc on est plus ou moins dans la même période.
00:21Mais oui, il y a eu des dérives comme ça déjà avant.
00:25Là, on est à l'extrême quand même.
00:27Oui, à l'extrême, parce que ça, moi, je n'ai jamais vu.
00:30Non, mais c'est ça, Tony.
00:32C'est ça, c'est que là, on est à l'extrême.
00:34Là, on parle de millions d'euros, on parle de sommes incroyables.
00:37Là, tu me parles d'Adidas, mais même dans la voiture, filer 15 000 euros comme ça en cash.
00:46Non, mais où on va ?
00:48En fait, c'est bien sûr que c'est toutes les dérives du foot qui, aujourd'hui,
00:52vu que les sommes sont multipliées par 10 et qu'il y a, par rapport à avant, à ma période déjà,
00:59qu'on n'était pas malheureux.
01:01Mais là, il y en a encore plus.
01:03Tout le monde parle d'oseille, même le gamin de 13 ans, 14 ans, 15 ans, 16 ans.
01:07On va y revenir.
01:08Il parle de salaire, il parle de conditions de vie.
01:14La famille, derrière, c'est pour sauver tout le monde, toute la famille.
01:19Donc, automatiquement, les dérives, elles partent déjà de là, Jean-Louis.
01:23Et vu que c'est ancré, comme ça, un petit peu dans les mœurs du football depuis Belle-Lurette,
01:29eh bien oui, automatiquement, on en arrive à des cas extrêmes comme Paul Pogba.
01:34Alors, bien sûr que des fois, et heureusement pour la plupart des cas,
01:38ça ne se finit pas comme Paul avec toute sa famille et tous ses amis,
01:42soi-disant amis d'enfance, devant le tribunal.
01:46Mais des choses comme ça, en fait...
01:49Oui, cette affaire-là, on la connaît parce qu'elle est rendue publique.
01:52Mais il y en a plein d'autres que tu ne connais pas.
01:54Et la preuve, vous m'allumez, moi, personnellement, je ne parle même pas des autres,
01:59vous m'allumez sur le fait de...
02:00Non, on plaisante, c'est une boutade.
02:01Non, je m'en fous, c'est un peu vrai.
02:04Mais bien sûr que, déjà, dans la famille, à mon époque,
02:10et je te dis que je gagnais des bonnes sommes,
02:13rien à voir avec ce que gagne Paul, par exemple, il a des bonnes sommes.
02:16Mais bien sûr que tu te sens plus ou moins obligé de faire croquer la famille,
02:21de faire croquer les amis, parce que tu te dis...
02:23Ça te fait plaisir.
02:24Oui, parce que ça te fait plaisir.
02:26Mais il y en a qui en profitent.
02:27Mais tu t'en rends compte après.
02:29Entre aider sa famille et distribuer 15 000 euros dans une voiture à tes potes,
02:34en disant « allez vous amuser avec ça de temps en temps »,
02:38il y a quand même une différence.
02:40Mais sachant que les 15 000, c'est limite du pourboire.
02:43Le reste du temps, il a aussi aligné parfois des centaines de milliers d'euros
02:47pour financer des projets, ouvrir un réto, ce genre de choses.
02:50Ce n'est pas le procès du football, ce n'est pas les attitudes du football.
02:54C'est l'attitude de nouveaux riches et qui n'ont pas la valeur de l'argent
03:00par probablement un manque, et je ne veux pas être péjoratif dans ce sens,
03:07par un manque d'éducation et parce qu'ils ne voient pas plus loin
03:11que le bout de leur nez en s'imaginant que ça va durer aussi longtemps que les impôts.
03:19Donc, on flambe, on fait les flambeurs.
03:22Et je dirais qu'il y a, et dans les proches des joueurs,
03:27il y en a qui en profitent au lieu de leur donner de bonnes manières.
03:35Ils les incitent à disperser leurs pognons.
03:40Mais vous savez, ça ne m'étonne pas, ça ne m'étonne pas.
03:44Alors plutôt que, et je ne connais pas le cas de Paul Pogba.
03:47Moi, je vais vous raconter une ou deux anecdotes.
03:50Un jour, j'étais, mais oui, un jour, je m'occupais du recrutement,
03:54de m'occuper en tant que directeur du club à Saint-Étienne,
04:01pas directeur sportif, directeur du club.
04:02Donc, je n'étais pas agent du tout, du tout d'un jeune joueur qui est,
04:07qui finalement est allé à Rennes, à Marseille, en Angleterre
04:10et puis qui, je crois, a même fait un petit séjour en prison.
04:14Et j'étais dans un bar, Porte de Pantin.
04:17Et je discute avec le papa et je connaissais le gamin.
04:20Je le connaissais très bien. Je connaissais le papa.
04:23Et nous, nous étions mis d'accord sur une somme,
04:26sur une somme et un plan de carrière avec le petit,
04:32qui avait à l'époque, qui devait avoir à l'époque 14 ou 15 ans.
04:36Et quand on s'est levé,
04:39parce que je savais qu'il y avait d'autres clubs qui étaient intéressés,
04:44quand on s'est levé de table, le papa me dit,
04:47« Et pour la famille, il y a quoi ? »
04:51Je dis, « Combien ? »
04:54Il me dit, « Oui, parce qu'il y a d'autres clubs qui sont venus voir mon fils
04:58et ils nous ont promis de l'argent. »
05:00Donc, l'affaire est pourrie dès le départ.
05:04Quand vous appelez des gamins, et le pire, Jean-Louis,
05:10le pire, c'est que les parents s'en font une gloriole.
05:14Vous voyez un bon petit gamin de 12 ans qui joue en U13,
05:20vous m'entendez ? U13 régional.
05:23Vous voyez un bon petit gamin en disant,
05:25« Tiens, peut-être que pour progresser, il pourrait aller dans un...
05:31Je n'aime pas ça, mais dans un centre de formationné. »
05:35Vous êtes d'accord ? « Ah oui, mais ça, il faut en parler à notre agent. »
05:39Donc, si vous voulez, les choses sont pipées d'entrée,
05:43et que par la suite, je ne sais pas comment ça se passe dans le milieu de Paul Pogba,
05:48et qu'ensuite, tout le monde vienne manger dans la gamelle...
05:53– La difficulté, en fait, c'est comment sortir de ça ?
05:55Comment faire pour parfois dire non, couper les ponts avec certains mecs,
05:59qui disent qu'ils font un renvoi d'ascenseur,
06:02il ne faut pas oublier d'où tu viens,
06:04on a toujours été en protection à un certain moment,
06:06ils font un renvoi d'ascenseur.
06:07– Non, mais là, il n'y a même pas, excuse-moi Jean-Michel,
06:09mais je réponds à ça, c'est qu'il n'y a pas de renvoi d'ascenseur, Jean-Louis.
06:13Ce que je veux dire, c'est que j'espère que maintenant,
06:15il y aura un exemple bien précis avec Paul Pogba.
06:18Encore une fois, on est sur un cas extrême.
06:21Mais même les plus petits cas, comme le dit Jean-Michel.
06:24Tu sais, Jean-Michel, c'est très simple.
06:26Moi, j'ai connu ça, et encore une fois, je ne parle pas des autres ni rien.
06:29À ma période, quand je suis à 3,
06:31je suis joueur du Stade Mallerbe de Caen en Ligue 2,
06:35j'arrive à 3 en Ligue 1.
06:37Au bout de 6 mois, ça se passe très bien et tout,
06:40j'ai un agent qui me fait venir à Monaco,
06:43qui m'envoie un avion, qui me fait venir avec mon père à l'époque,
06:47juste pour parler et pour me dire,
06:49écoute, moi j'ai un club, je peux te mettre en Angleterre déjà,
06:51c'était Manchester City pour tout vous dire,
06:54c'était Kevin Kegan qui était l'entraîneur de Manchester City à cette période-là.
07:00Et on n'a pas dit oui ni rien, je suis à 3,
07:03moi je m'éclate et tout, on a juste écouté et j'avais un agent.
07:05Le mec sort de là, c'est un agent connu, reconnu,
07:08et il a encore fait des deals il n'y a pas si longtemps que ça.
07:11Il arrive, il me fait un chèque à moi,
07:13de 100 000 francs à l'époque, c'était en francs,
07:16et 200 000 francs pour mon père.
07:19Nous, les chèques, on les a pris, mais on ne les a jamais encaissés.
07:21Si, comme tu dis, pour dire stop à la dérive,
07:24il faut avoir les coronesses de dire non à ces sommes-là,
07:27parce que ça peut changer la vie de Pierre, Paul ou Jacques,
07:30ça peut changer la vie des familles.
07:31Le problème, c'est qu'aujourd'hui...
07:33— T'étais à quel âge à l'époque ?
07:34— J'avais 20 ans, 21 ans, tu vois.
07:37Et mon père qui est prof, qui a été prof,
07:41vous savez ce que gagne un prof de maintenance professionnel,
07:45il aurait pu encaisser le chèque.
07:46T'imagines le nombre de... — C'est tentant, quoi.
07:48— Oui, mais non, jamais.
07:50Et le problème, c'est qu'il faut savoir dire non,
07:51parce que si tu dis oui, tu rentres dans cette dérive-là.
07:54Des agents, des amis, des soi-disant amis d'enfance auxquels tu dois...
07:58À l'arrivée, tu peux dire non, mais sans oublier,
08:02comme tu l'as dit, Jean-Louis,
08:03sans oublier d'où tu venais,
08:04en aidant, parce que ça fait partie du jeu.
08:07Dire que tu gagnes des sommes qui sont par moments indécentes
08:09par rapport à des gens qui galèrent et qui ne méritent pas de galérer,
08:12mais ils n'ont pas le talent de ce que peut être un joueur de football,
08:17eh ben tu peux les aider.
08:18Mais il y a tellement...
08:21Jean-Louis, il y a tellement de possibilités d'aider.
08:25Par exemple, il y a des joueurs professionnels
08:28qui oublient très très vite de quel club ils sont sortis,
08:33qui n'ont jamais offert un jeu de maillot ni une paire de chaussettes.
08:38Comment ?
08:39Alors, il y a tout, et son contraire.
08:42Il y a tout, c'est l'affaire Pogba,
08:45et son contraire, c'est les ratagasses
08:48qui oublient d'où ils sont venus et qui n'ont pas un petit geste.
08:53Il y a un juste milieu que chacun,
08:57et que la majorité des footballeurs suivent.
09:03Tony, comment toi t'as fonctionné ?
09:04En plus, famille nombreuse, beaucoup de frères.
09:07Toi, bien placé pour parler de ça.
09:08Oui, moi, c'était mon papa qui s'occupait de moi.
09:11Donc en fait, si tu veux, dès Nancy, quand j'ai eu des propositions,
09:16alors à l'époque, ils appelaient directement les clubs.
09:18Moi, par exemple, j'ai su bien des années plus tard
09:21que le FC Nantes, le FC Nantes de la grande époque,
09:24était intéressé quand j'étais à Nancy.
09:26Celui, le FC Nantes qui avait été invaincu.
09:30Ouedek, Loco et Piedros.
09:33Et si tu veux, je l'ai su plusieurs années plus tard
09:36parce qu'ils sont revenus à la charge quand j'étais à Lens
09:38et ils m'ont dit, dis donc, tu nous as un peu snobé
09:41quand tu étais à Nancy, donc on l'a un peu en travers de la gorge.
09:45Alors que moi, je n'ai jamais su parce qu'ils avaient prévenu Nancy
09:48et pas à l'époque, on n'avait pas les portables,
09:51on n'avait pas tout ça, donc c'était plus compliqué.
09:53Et moi, pour ma part, à moi, c'est mon père qui...
09:58J'avais confiance en mon père.
09:59Je savais très bien, si tu veux, que c'était quelqu'un de droit,
10:02quelqu'un d'honnête.
10:04C'était pas quelqu'un qui allait négocier en disant nous, par exemple.
10:08Tu vois, ça, c'est le genre de truc que j'ai entendu.
10:11Il n'a jamais fallu repousser un peu des gens qui se rapprochaient de toi
10:15parce que tu avais de l'argent, ce genre de choses.
10:17Si, justement, justement, c'était mon père qui s'occupait de ça.
10:20Si tu veux, il avait un peu le mauvais rôle, si tu veux,
10:23parce que lui, des fois, j'entendais les gens qui disaient
10:25il a plus la grosse tête que son fils.
10:27Non, c'était le fusible, en fait, si tu veux,
10:30parce que moi, j'étais trop gentil.
10:31Moi, j'aurais donné à tout le monde.
10:33Quelqu'un venait me voir, j'ai un problème.
10:36Je me suis fait avoir, d'ailleurs, dans ma carrière par même des joueurs.
10:40Par exemple, avec qui je suis arrivé à Lens,
10:44des mecs qui, au début, ne gagnaient pas le même salaire que moi
10:47parce qu'ils commençaient en équipe réserve.
10:49Ils me disaient, ouais, bah tiens, j'ai besoin de sous
10:52parce qu'à un moment, on se fait opérer, tout ça.
10:55Et toi, un peu naïf à l'époque, tu les donnes les sous.
10:59Et puis, un an après, ils reviennent à la charge pour une voiture.
11:04Donc, à un moment donné, tu dis, alors là, tu es un peu moins naïf.
11:08Tu dis, mais attends, pas de problème, je te prête pour la voiture.
11:10Et par contre, tu m'en rembourses les deux quand tu me redonneras l'argent.
11:14Et là, tu n'entends plus parler d'eux.
11:15En fait, tu vois, tu as toujours des gens qui gravitent, qui essayent
11:18de faire copain-copain pour essayer de chercher.
11:23Et moi, j'aurais eu tendance à le faire.
11:25Mais toi, Tony, comment tu as géré, toi, avec tes frères, ta famille ?
11:31Parce que tu avais quand même l'impression,
11:33ce n'est pas l'impression, c'est que tu étais le soutien du clan, en fait.
11:36Si tu veux, quand tu as la chance de faire notre carrière,
11:39en plus, ça a commencé crescendo.
11:42Moi, j'avais des salaires à Nancy.
11:44Je gagnais à peu près le salaire de mon papa, qui était lui,
11:49qui était contre-maître, enfin pas contre-maître, qui était maîtreur à l'époque.
11:52Ce qui est l'équivalent d'architecte dans les métiers du bâtiment.
11:56Donc, ce qui n'était pas mal.
11:57Je faisais entre 13 et 14 000 francs à l'époque,
12:02ce qui était un salaire de cadre, on va dire.
12:04Et quand je suis passé à Lens, mon salaire, il a multiplié par 10.
12:08Donc, à un moment donné, tu te dis, je peux faire plaisir, tu vois ?
12:12Oui, bien sûr.
12:13Donc, j'ai emmené ma famille, j'ai permis à mon père d'être à la retraite à cette époque-là.
12:18Et c'est lui qui s'occupait de tout pour moi.
12:20Si tu veux, en fait, j'avais l'avantage qu'on s'est déplacé ensemble,
12:25mais c'est lui qui gérait tous les papiers.
12:26Si tu veux, moi, c'est tout juste si j'ouvrais un courrier, quoi, si tu veux.
12:30Donc, moi, j'avais ma tête qui ne pensait qu'au foot.
12:34Donc, moi, c'était vraiment, maman s'occupait des petits plats.
12:37J'avais mes petits frères qui étaient comme mes fils avec moi.
12:40Donc, si tu veux, c'était dans...
12:43C'était ça, si tu veux.

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